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22/11/2017 | FRANCE | N°16-19437

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 22 novembre 2017, 16-19437


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 27 avril 2016), que M. X... a été engagé le 15 juillet 2008 par la société Les transports Laurentin en qualité de conducteur poids lourd ; qu'en arrêt de travail d'origine professionnelle à compter du 10 décembre 2010, il a été déclaré, le 1er juillet 2013, inapte à son poste avec proposition de travaux, à titre indicatif, dans le secteur tertiaire, le milieu industriel sans port de charges et les travaux hors bras en élévation ; qu'il a été licencié le 26

juillet 2013 pour inaptitude avec impossibilité de reclassement ;

Sur le ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 27 avril 2016), que M. X... a été engagé le 15 juillet 2008 par la société Les transports Laurentin en qualité de conducteur poids lourd ; qu'en arrêt de travail d'origine professionnelle à compter du 10 décembre 2010, il a été déclaré, le 1er juillet 2013, inapte à son poste avec proposition de travaux, à titre indicatif, dans le secteur tertiaire, le milieu industriel sans port de charges et les travaux hors bras en élévation ; qu'il a été licencié le 26 juillet 2013 pour inaptitude avec impossibilité de reclassement ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal du salarié :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire que son licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse et de le débouter de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause, alors, selon le moyen :

1°/ que lorsque à la suite d'une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur, tenu d'une obligation de reclassement, doit lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités et aussi comparable que possible à l'emploi précédent, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations ou aménagement du temps de travail ; qu'en se déterminant sur la seule considération qu'il ressortait du registre du personnel que l'entreprise comptait principalement des postes de conducteur poids-lourds, à l'examen duquel l'employeur aurait rapidement pu apprécier les possibilités de reclassement, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée si l'employeur avait mis en oeuvre des mesures telles que mutations, transformations de poste de travail ou aménagement du temps de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-10 du code du travail ;

2°/ que lorsque à la suite d'une maladie professionnelle le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur, tenu d'une obligation de reclassement, doit nécessairement consulter les délégués du personnel sur les possibilités de reclassement et éventuelles propositions de reclassement, en leur fournissant au préalable toutes les informations nécessaires et utiles, ces derniers étant parties prenantes du processus de recherche de reclassement ; qu'à défaut de fournir une information nécessaire et utile, la consultation des délégués du personnel est dépourvue de validité, privant ce faisant, le licenciement pour inaptitude d'une cause réelle et sérieuse ; qu'en l'espèce, l'employeur s'est borné à affirmer que le reclassement en interne s'avérait impossible, sans fournir d'éléments aux délégués du personnel sur les postes de l'entreprise, les recrutements en cours ou toute éventuelle mesure de mutation, transformation de poste de travail ou aménagement du travail qui pourrait être envisagé ; qu'en se déterminant sur la seule considération que les délégués du personnel avaient en leur possession l'avis d'inaptitude et les recommandations du médecin du travail, sans rechercher si cette information était suffisante, ainsi qu'elle y était invitée, la cour d'appel a, une nouvelle fois, privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-10 du code du travail ;

3°/ que lorsque l'inaptitude est d'origine professionnelle, l'employeur doit recueillir l'avis des délégués du personnel avant de pouvoir formuler une proposition de reclassement au salarié déclaré inapte et que ce n'est que lorsqu'il est dans l'incapacité de lui proposer un autre emploi, qu'il doit l'informer par écrit des motifs qui s'opposent au reclassement ; qu'en estimant, qu'il était indifférent que les délégués du personnel aient pu être consultés postérieurement à l'information adressée au salarié de l'impossibilité de le reclasser, quand la consultation des délégués du personnel suppose que ces derniers puissent formuler des propositions de reclassement, la cour d'appel a violé ensemble les articles L. 1226-10 et L. 1226-12 du code du travail ;

Mais attendu, d'abord, que sous le couvert d'un grief non fondé de manque de base légale, le moyen ne tend qu'à contester l'appréciation souveraine, par la cour d'appel, des éléments de fait et de preuve dont elle a déduit que l'employeur justifiait être dans l'impossibilité de procéder au reclassement du salarié ;

Attendu ensuite, qu'ayant constaté, par motifs propres et adoptés, que l'employeur avait consulté les délégués du personnel le 9 juillet 2013 soit avant l'engagement de la procédure de licenciement, que ceux ci avaient reçu toutes les informations utiles leur permettant d'émettre un avis sur la possibilité ou non de reclasser le salarié et que l'annonce au salarié dès le 8 juillet 2013, de l'absence de postes de reclassement n'avait pas fait obstacle à la poursuite de recherches de reclassement auprès de sociétés extérieures, la cour d'appel, qui a procédé aux recherches prétendument omises, a légalement justifié sa décision ;

Sur les premier et second moyens du pourvoi incident de l'employeur :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois tant principal qu'incident ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens afférents à son pourvoi ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux novembre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit au pourvoi principal par Me Rémy-Corlay, avocat aux Conseils, pour M. X....

Monsieur Hervé X... fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que son licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse et de l'AVOIR débouté de ses demandes d'indemnité pour licenciement sans cause et en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles.

AUX MOTIFS PROPRES QUE : « Sur le licenciement : Aux termes de l'article L.1226-10 du code du travail, lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin de travail à reprendre l'emploi qu' il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités ; cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise ; dans les entreprises d'au moins 50 salariés, le médecin du travail formule, également, des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation destinée à lui proposer un poste adapté. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail. Les possibilités de reclassement doivent être recherchées au sein de l'entreprise et, le cas échéant, du groupe auquel elle appartient, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel. C'est à l'employeur de démontrer qu'il s'est acquitté de son obligation de reclassement, laquelle est de moyens, et de rapporter la preuve de l'impossibilité de reclassement qu'il allègue. M. X... soutient que l'employeur n'a pas satisfait à son obligation de reclassement dès lors qu'il a terminé ses recherches de reclassement dès le 8 juillet, soit 5 jours ouvrables après la déclaration d'inaptitude alors que les délégués du personnel ne s'étaient pas encore prononcés et que le médecin du travail n'avait pas été saisi pour réaliser une étude de poste notamment au regard des recrutements qui ont eu lieu dans la période contemporaine au licenciement. Le salarié fait valoir, en outre, que les dispositions de l'article L 1226-10 du code du travail qui prévoit dans les entreprises d'au moins 50 salariés des indications du médecin du travail sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation destinée à lui proposer un poste adapté, n'ont pas été respectées. Enfin, il souligne que l'employeur n'a pas attendu les réponses des sociétés extérieures qu'il avait sollicitées ce qui démontre le caractère fictif et donc, déloyal de ses recherches. De même, il n'a laissé qu'un délai d'un jour aux délégués du personnel pour recueillir leur avis, ce qui ne leur a pas permis de donner un avis éclairé et ce d'autant plus que l'employeur les a trompés en prétendant que toutes les recherches externes avaient été infructueuses ce qui caractérise un délit d'entrave. Mais, dès lors que l'entreprise comptait 48 postes de conducteur poids lourd sur 60 emplois, que M. X... a été déclaré inapte au poste de conducteur poids-lourd, que l'employeur justifie par la production du registre des entrées et sorties du personnel qu'aucun recrutement autre que des conducteurs poids-lourd n'a été effectué au Cours de la période contemporaine du licenciement, il ne peut être valablement reproché à l'employeur qui était en mesure, dans ces conditions, d'apprécier rapidement les possibilités de reclassement de M. X... au sein de l'entreprise, d'avoir agi avec précipitation ou d'avoir fait preuve de déloyauté dans la recherche de reclassement en indiquant au salarié, le 8 juillet 2013, qu'il n'y avait pas de possibilité de reclassement, étant observé que le licenciement est intervenu le 26 juillet 2013, soit près d'un mois après la déclaration d'inaptitude et, que s'agissant du reclassement externe, l'employeur a reçu des réponses négatives dès le 4 juillet et ce jusqu'au 12 juillet. Les délégués du personnel, saisis, le 9 juillet 2013, pour avis sur le reclassement de M. X... avaient en leur possession l'avis d'inaptitude et les recommandations du médecin du travail, et ont émis un avis écrit, le 10 juillet, rédigé en ces termes "au regard des informations délivrées et, notamment des restrictions médicales, je conclus qu'aucun reclassement n'est possible." Par des motifs adoptés, le premier juge a retenu, à juste titre, que l'annonce à M. X..., dès le 8 juillet, de l'absence de postes de reclassement ne faisait pas obstacle à la poursuite de la recherche de reclassement, notamment, en externe et ne remettait pas en cause la validité de la consultation des délégués du personnel. L'employeur démontre par ses pièces 3, 9, 10 et 11 avoir contacté plus de 40 entreprises extérieures en vue du reclassement de M. X..., avoir publié une annonce en ce sens dans le bulletin régional de la fédération nationale des transporteurs routiers de marchandise et de voyageurs et avoir reçu 26 réponses négatives avant la notification du licenciement. Le médecin du travail a indiqué dans son premier avis qu'il rencontrera l'employeur pour procéder à une étude de poste et il a précisé dans son deuxième avis qu'il s'est déplacé dans l'entreprise. Ses préconisations en termes de reclassement sur des postes du secteur tertiaire ou en milieu industriel sans port de charge ni travaux les bras en élévation, bien que ne précisant pas les formations possibles dans ces domaines, sont claires et n'identifient pas, après une visite dans l'entreprise, une possibilité d'aménagement d'un poste de travail au profit de M. X.... Aucun manquement ne peut, donc, être imputé à l'employeur en ce qui concerne le sérieux des démarches relatives à la médecine du travail. Il découle de ces constatations que l'employeur a satisfait à son obligation de reclassement et qu'il y a lieu, en conséquence, de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse et a débouté M. X... de ses demandes indemnitaires liées à la rupture abusive du contrat de travail ».

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE : « Sur 1'obligation de reclassement : L'article L 1226-10 du Code du travail dispose que "lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation destinée à lui proposer un poste adapté. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail". L'article L 1226-11 du même code édicte que "lorsque, à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n ‘est pas reclassé dans l'entreprise ou s'il n'est pas licencié, l'employeur lui verse, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail. Ces dispositions s'appliquent également en cas d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise constatée par le médecin du travail". L'article L 1226-12 du même code énonce que "lorsque l'employeur est dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement. L ‘employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L.1226-10, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions. S'il prononce le licenciement, l'employeur respecte la procédure applicable au licenciement pour motif personnel prévue au chapitre II du titre II]". Il ressort des débats que Monsieur X... a été déclaré par le médecin du travail, le 1er juillet 2013, "inapte au poste de conducteur routier PL [poids lourd] - cariste. Inapte aux tâches de manutentions telles que tirer des palettes, bâchage, rebâchage, accrochage, décrochage. Inapte aux travaux bras en élévation au-dessus de la ceinture scapulaire, proposition de travaux à titre indicatif dans le secteur tertiaire ou en milieu industriel mais sans port de charge et travaux bras en élévation". Il n'est pas contesté que la SAS Transports Laurentin ne disposait, à la date de cet avis d'inaptitude, que de 60 salariés dont 48 de conducteurs poids-lourds. Le registre du personnel produit aux débats révèle que pendant la période litigieuse attachée à l'obligation de recherche de reclassement pesant sur l'employeur, aucun recrutement de salarié autres que des conducteurs de poids-lourds n'a été réalisé par la SAS Transports Laurentin. Eu égard au nombre limité de postes de travail hors conducteurs de poids-lourds présents dans l'entreprise et dont aucun élément aux débats n'a révélé le caractère disponible pendant cette période litigieuse de recherche de reclassement, il ne saurait être jugé que la SAS Transports Laurentin n'a pas respecté son l'obligation de recherche loyale et sérieuse des possibilités de maintien par voie de reclassement de Monsieur X... au sein de l'entreprise, en ayant fait le simple et rapide constat de la non disponibilité de poste adapté aux restrictions médicales attachées à l'inaptitude prononcée à son égard. S'agissant de la consultation des délégués du personnel, il est produit aux débats les Courriers datés du 9 juillet 2013 sur lesquels les délégués ont apposé, le 10juillet 2013, la mention "vu les restrictions médicales et les informations communiquées, j'en conclus qu'il n'y a pas de reclassement possible dans la société Laurentin" et "au regard des informations délivrées et notamment des restrictions médicales, je constate qu'aucun reclassement n'est possible au sein de l'entreprise". Il faut ajouter qu'à ces Courriers du 9 juillet 2013 était jointe la copie de l'avis d'inaptitude du 1er juillet 2013, comportant les restrictions médicales mais également les propositions du médecin du travail concernant les orientations possibles en termes de reclassement adapté à l'état de santé du salarié. Il faut également rappeler que les délégués du personnel n'avaient pas à donner d'avis sur les possibilités de reclassement de Monsieur X... au sein de sociétés extérieures. Dans ces conditions, la suffisance du simple et rapide constat de l'indisponibilité de postes de reclassement adaptés au sein de l'entreprise a conféré à cette démarche de consultation des délégués du personnel, par simple Courrier, sans réunion, sur la simple base de cet avis médical d'inaptitude circonstancié, l'avis ayant été donné par retour de Courrier, le caractère de sérieux et de loyauté exigé par la loi. Il ressort des débats que la SAS Transports Laurentin a rédigé, puis adressé au salarié avant le 10juillet 2013 une première fois ou concomitamment une seconde fois, le premier Courrier n'ayant pas été adressé à la bonne adresse, le Courrier daté du 8 juillet 2013 (pièce cabinet Salles n° 7) par lequel l'employeur a exprimé que "suite au deuxième avis médical du médecin du travail nous avons fait des recherches en interne et en externe pour procéder a votre reclassement. En interne nous n'avons pas de poste actuel, ni à notre connaissance à venir, qui présente les critères de la médecine du travail. […] nous devons faire le constat d'échec à votre reclassement". La circonstance que ce Courrier a été rédigé et adressé avant d'être reçu par le salarié seulement le jour où l'avis des délégués du personnel a été donné n'est pas de nature à invalider la procédure de reclassement dès lors qu'aucune proposition de poste n'était faite en l'espèce, que la loi n'exige pas que l'avis des délégués vienne conclure le processus destiné à permettre le reclassement du salarié déclaré inapte, que l'exigence de sérieux et de loyauté imposée au processus de reclassement doit s'apprécier au regard de l'ensemble des démarches entreprises sur la période considérée, qu'en l'espèce cette annonce anticipée par l'employeur de l'échec du reclassement en interne ne saurait être considérée comme une marque de déloyauté dans l'exécution de l'obligation de reclassement, la procédure de licenciement n'ayant été mise en oeuvre qu'à partir du 12 juillet 2013 - date de la lettre de convocation à l'entretien préalable, et finalisée le 27 juillet 2013 - date de la notification du licenciement. S'agissant de la tentative de reclassement externe, en dehors d'un champ de groupe de sociétés étranger à la présente affaire, il convient de constater que les pièces produites aux débats (pièces cabinet Ten France n° 10) révèlent que la SAS Transports Laurentin avait reçu 10 réponses à la date du 8 juillet 2013, 11 à la date du 12 juillet 2013. A ce stade, il convient de juger qu'il ne saurait lui être reproché de ne pas avoir attendu l'ensemble de réponses que les sociétés sollicitées n'ont par ailleurs pas l'obligation de transmettre, tandis que la suspension du règlement du salaire du salarié déclaré inapte est limitée à un mois. L'employeur a en outre fait paraître une annonce concernant la recherche de reclassement au profit de Monsieur X... dans le bulletin régional de la Fédération nationale des transporteurs routiers (pièce Ten France n° 11). La circonstance que le Courrier litigieux du 8 juillet 2013 déjà évoqué, dans lequel l'employeur fait le constat de l'échec du reclassement en externe de Monsieur X... a été rédigé et adressé au salarié en donnant l'impression que l'ensemble des contacts extérieurs avaient abouti, négativement, alors que seulement une partie des sociétés sollicitées avaient répondu, n'est pas de nature à invalider la procédure de reclassement. Ainsi, comme cela été rappelé plus haut, l'exigence de sérieux et de loyauté imposée au processus de reclassement doit s'apprécier au regard de l'ensemble des démarches entreprises sur la période considérée, tandis qu'en l'espèce cette annonce anticipée par l'employeur de l'échec du reclassement en externe ne saurait être considérée comme une marque de déloyauté dans l'exécution de l'obligation de reclassement, la procédure de licenciement n'ayant été mise en oeuvre qu'à partir du 12 juillet 2013 - date de la lettre de convocation à l'entretien préalable, et finalisée le 27 juillet 2013 - date de la notification du licenciement. Dans ces conditions, les tentatives de reclassement en externe seront jugées loyales et sérieuses.
La demande tendant à voir juger le licenciement de Monsieur X... dépourvu de cause réelle et sérieuse sera rejetée ».

ALORS QUE 1°) lorsque à la suite d'une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur, tenu d'une obligation de reclassement, doit lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités et aussi comparable que possible à l'emploi précédent, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations ou aménagement du temps de travail ; qu'en se déterminant sur la seule considération qu'il ressortait du registre du personnel que l'entreprise comptait principalement des postes de conducteur poids-lourds, à l'examen duquel l'employeur aurait rapidement pu apprécier les possibilités de reclassement, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée (conclusions p.8 et 9) si l'employeur avait mis en oeuvre des mesures telles que mutations, transformations de poste de travail ou aménagement du temps de travail, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1226-10 du Code du travail ;

ALORS QUE 2°) lorsque à la suite d'une maladie professionnelle le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur, tenu d'une obligation de reclassement, doit nécessairement consulter les délégués du personnel sur les possibilités de reclassement et éventuelles propositions de reclassement, en leur fournissant au préalable toutes les informations nécessaires et utiles, ces derniers étant parties prenantes du processus de recherche de reclassement ; qu'à défaut de fournir une information nécessaire et utile, la consultation des délégués du personnel est dépourvue de validité, privant ce faisant, le licenciement pour inaptitude d'une cause réelle et sérieuse ; qu'en l'espèce, l'employeur s'est borné à affirmer que le reclassement en interne s'avérait impossible, sans fournir d'éléments aux délégués du personnel sur les postes de l'entreprise, les recrutements en cours ou toute éventuelle mesure de mutation, transformation de poste de travail ou aménagement du travail qui pourrait être envisagé ; qu'en se déterminant sur la seule considération que les délégués du personnel avaient en leur possession l'avis d'inaptitude et les recommandations du médecin du travail, sans rechercher si cette information était suffisante, ainsi qu'elle y était invitée (conclusions p. 14 et 15), la Cour d'appel a, une nouvelle fois, privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1226-10 du code du travail ;

ALORS QUE 3°) lorsque l'inaptitude est d'origine professionnelle, l'employeur doit recueillir l'avis des délégués du personnel avant de pouvoir formuler une proposition de reclassement au salarié déclaré inapte et que ce n'est que lorsqu'il est dans l'incapacité de lui proposer un autre emploi, qu'il doit l'informer par écrit des motifs qui s'opposent au reclassement ; qu'en estimant, qu'il était indifférent que les délégués du personnel aient pu être consultés postérieurement à l'information adressée au salarié de l'impossibilité de le reclasser, quand la consultation des délégués du personnel supposent que ces derniers puissent formuler des propositions de reclassement, la Cour d'appel a violé ensemble les articles L.1226-10 et L.1226-12 du code du travail.
Moyens produits au pourvoi incident par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Transports Laurentin.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société TRANSPORTS LAURENTIN à payer à Monsieur X... les sommes de 1.047,22 € à titre de complément d'indemnité spéciale de licenciement et 840,79 € à titre de complément d'indemnité équivalente à l'indemnité de préavis, outre les frais irrépétibles et les dépens ;

AUX MOTIFS QUE « sur les demandes de rappel d'indemnités au titre de la revalorisation du salaire de référence : aux termes de l'article L.1226-16 du code du travail, les indemnités prévues aux articles L.1226-14 et L.1226-15 sont calculées sur la base du salaire moyen qui aurait été perçu par l'intéressé au cours des trois derniers mois s'il avait continué à travailler au poste qu'il occupait avant la suspension du contrat de travail provoquée par l'accident du travail ou la maladie professionnelle ; pour le calcul de ces indemnités, la notion de salaire est définie par le taux personnel, les primes, les avantages de toute nature, les indemnités et les gratifications qui composent le revenu ; que M. X... sollicite la revalorisation de son salaire de référence sur la base des trois derniers salaires versés avant son arrêt de travail dont le montant doit être augmenté en fonction du taux horaire minimum de la convention collective applicable en 2013, soit 9,72 euros, ce qui porte le montant du salaire de référence à la somme de 3.032,93 euros ; que l'employeur objecte que si M. X... travaillait en moyenne 248 heures par mois avant son arrêt de travail, le temps de travail de tous les salariés de l'entreprise est passé à 215 heures à compter du 31 décembre 2010, de sorte d'une part, que l'intéressé n'aurait pas continué à travailler à hauteur de 248 heures s'il avait été déclaré apte lors de la visite de reprise le 1" juillet 2013 et d'autre part, que le salaire de référence doit être fixé sur la base d'un temps de travail de 215 heures, ce qui porte son montant à la somme de 2.366 euros ; mais que, par des motifs adoptés, le premier juge a fait une exacte appréciation du montant du salaire de référence en le fixant à la somme de 3.032,93 euros au regard de la durée du travail effectuée par M. X... avant la suspension du travail conformément aux dispositions de l'article 1226-16, étant précisé que la durée du travail des autres salariés en 2013 n'est pas opposable à M. X... dont la situation doit être, à ce titre, appréciée sur la période située entre septembre et novembre 2010 ; que le premier juge a déduit, à bon droit, de la revalorisation du salaire de référence que M. X... pouvait prétendre à un complément du montant de l'indemnité spéciale de licenciement et de l'indemnité compensatrice de préavis dont il a fait une juste évaluation ; que de ces chefs, le jugement sera confirmé » ;

ET AUX MOTIFS, À LES SUPPOSER TACITEMENT ADOPTÉS DES PREMIERS JUGES QUE « sur les indemnités de licenciement : l'article L.1226-14 du code du travail dispose que « la rupture du contrat de travail dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article L.1226-12 ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L.1234-5, ainsi qu'jà une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l'indemnité prévue par l'article L.1234-9. Toutefois, ces indemnités ne sont pas dues par l'employeur qui établit que le refus par le salarié du reclassement qui lui est proposé est abusif. Les dispositions du présent article ne se cumulent pas avec les avantages de même nature prévus par des dispositions conventionnelles ou contractuelles en vigueur au 7 janvier 1981 et destinés à compenser le préjudice résultant de la perte de l'emploi consécutive à l'accident du travail ou à la maladie professionnelle" ; que l'article L 1226-16 du même code énonce que "les indemnités prévues aux articles L. 1226-14 et L. 1226-15 sont calculées sur la base du salaire moyen qui aurait été perçu par l'intéressé au cours des trois derniers mois s'il avait continué à travailler au poste qu'il occupait avant la suspension du contrat de travail provoquée par l'accident du travail ou la maladie professionnelle. Pour le calcul de ces indemnités, la notion de salaire est définie par le taux personnel, les primes, les avantages de toute nature, les indemnités et les gratifications qui composent le revenu" ; que l'article L 1226-16 fixe pour la détermination des indemnités de licenciement une règle de calcul spéciale, dérogatoire et favorable au salarié, en prenant comme point de référence le salaire moyen que le salarié aurait perçu au cours des trois derniers mois s'il avait continué à travailler au poste qu'il occupait avant la suspension du contrat de travail en lien avec la maladie professionnelle ; qu'il convient donc en l'espèce de retenir comme base de calcul du salaire moyen les mois de septembre, d'octobre et de novembre 2010, le contrat de travail de Monsieur X... ayant été suspendu au cours du mois de décembre 2010 ; qu'après réévaluation du taux horaire applicable en 2013, date du licenciement, le montant du salaire moyen servant de base de calcul aux indemnités de licenciement pour inaptitude de Monsieur X... doit être retenu à hauteur de 3.032,93 euros, conformément à la demande ; que dans ces conditions, il sera fait droit aux demandes de Monsieur X... en complément d'indemnités, au regard des sommes déjà versées de ces chefs par la SAS TRANSPORTS LAURENTIN, comme suit :
- 1.047,22 euros nets à titre de complément d'indemnité spéciale de licenciement prévue par l'article L 1226-14 du Code du travail,
- 840,79 euros bruts à titre de complément d'indemnité compensatrice de préavis permise par l'article L.1226-14 du code du travail » ;

ALORS QUE les indemnités prévues aux articles L. 1226-14 et L. 1226-15 du Code du travail sont calculées sur la base du salaire moyen qui aurait été perçu par l'intéressé au cours des trois derniers mois s'il avait continué à travailler au poste qu'il occupait avant la suspension du contrat de travail provoquée par l'accident du travail ou la maladie professionnelle ; que la société TRANSPORTS LAURENTIN avait offert de prouver, en l'espèce, que le salaire que Monsieur X... aurait perçu au cours des trois derniers mois s'il avait continué à travailler au poste qu'il occupait avant la suspension du contrat de travail était inférieur à celui qu'il avait effectivement perçu durant les trois mois précédant la suspension, du fait qu'à l'époque les salariés effectuées systématiquement des heures supplémentaires, contrairement à la période devant servir à déterminer l'assiette de calcul des indemnités dues au cours de laquelle plus aucune heure supplémentaire n'était effectuée ; qu'en refusant d'examiner si Monsieur X... aurait accompli des heures supplémentaires, au cours des trois derniers mois précédant la rupture, s'il avait continué à travailler au poste qu'il occupait avant la suspension du contrat de travail, au motif erroné que la rémunération de référence devait nécessairement être calculée d'après les salaires perçus au cours des trois mois précédant la suspension du contrat, la cour d'appel a violé l'article L. 1226-16 du Code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société TRANSPORTS LAURENTIN à payer à Monsieur X... la somme de 500 € à titre de dommages et intérêts pour non respect de l'obligation d'information sur les droits du salarié à l'intéressement, outre les frais irrépétibles et les dépens ;

AUX MOTIFS QUE Sur la demande au titre de l'intéressement et de la participation : selon l'article L 3313-1 al 1 du code du travail, l'accord d'intéressement institue un système d'information du personnel et de vérification des modalités d'exécution de l'accord ; que l'article L.3323-1 précise que l'accord de participation détermine les conditions dans lesquelles les salariés sont informés de leurs droits à participation ; que M. X... soutient, en premier lieu, qu'il n'a jamais été informé des modalités de mise en oeuvre de l'accord de participation ; que l'employeur fait valoir que l'accord d'intéressement négocié dans l'entreprise et entré en vigueur le 1er février 2009 a été dénoncé le 18 novembre 2011 et qu'en conséquence M. X... ne peut justifier d'aucun préjudice ; que toutefois, il est constant que l'employeur n'a pas, au cours de la période d'application de cet accord, en 2009 et 2010, informé M. X... de ses droits à intéressement. Ce manquement aux dispositions légales susvisées a nécessairement causé un préjudice à M. X... qui sera réparé par des dommages et intérêts à hauteur de 500 euros. Le jugement sera réformé sur ce point ; qu'en second lieu, M. X... prétend que la dénonciation de l'accord n'est pas valable dans la mesure où l'un des signataires de l'accord a apposé ses initiales mais pas sa signature sur le procès-verbal de dénonciation. Mais, le premier juge, par des motifs pertinents que la cour adopte, a déduit, à juste titre, du caractère partiel des pièces produites aux débats, que le document par lequel l'accord a été dénoncé ne pouvait être déclaré irrégulier au seul motif qu'il manquait une signature sous les initiales de l'un des signataires et a débouté M. X... de sa demande d'intéressement pour l'exercice 2012. Le jugement sera confirmé sur ce point ; que le salarié reconnaissant dans ses conclusions (p 20) qu'il a reçu, en 2015, l'information sur ces droits à participation, il n'y a pas lieu d'ordonner la remise sous astreinte du document relatif à ses droits à participation ni à condamner l'employeur à lui verser les primes éventuelles dues à ce titre, M. X... ne rapportant pas la preuve qui lui a été fournie de l'existence d'un quelconque droit à participation. Le jugement sera réformé sur ce point » ;

ALORS QUE les juges du fond doivent, pour justifier l'octroi de dommages et intérêts, caractériser l'existence d'un préjudice et en évaluer le montant ; qu'en se bornant à affirmer, pour condamner la société TRANSPORTS LAURENTIN à payer la somme de 500 € à titre de dommages et intérêts pour non respect de l'obligation d'information sur les droits du salarié à l'intéressement, que le défaut d'information au salarié sur ses droits à intéressement pour les années 2009 et 2010 avait nécessairement causé un préjudice au salarié, cependant qu'elle constatait que le salarié ne pouvait prétendre à aucun droit à intéressement la cour d'appel qui n'a pas fait ressortir en quoi le défaut d'information aurait causé un préjudice au salarié, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 ancien [devenu 1231-1] et 1382 [devenu 1240] du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-19437
Date de la décision : 22/11/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 27 avril 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 22 nov. 2017, pourvoi n°16-19437


Composition du Tribunal
Président : Mme Guyot (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Rémy-Corlay, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.19437
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