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22/11/2017 | FRANCE | N°16-18878

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 22 novembre 2017, 16-18878


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société d'assurances mutuelle MAIF que sur le pourvoi incident relevé par le directeur général des finances publiques ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 avril 2016), que la société d'assurances mutuelle MAIF (la MAIF) a perçu de ses nouveaux sociétaires des droits d'adhésion et a proposé, notamment, des garanties accessoires aux garanties d'assurance automobile ; qu'à la suite d'un contrôle, l'administration fiscale a considéré qu

e les droits d'adhésion devaient être soumis à la taxe sur les conventions d'a...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société d'assurances mutuelle MAIF que sur le pourvoi incident relevé par le directeur général des finances publiques ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 avril 2016), que la société d'assurances mutuelle MAIF (la MAIF) a perçu de ses nouveaux sociétaires des droits d'adhésion et a proposé, notamment, des garanties accessoires aux garanties d'assurance automobile ; qu'à la suite d'un contrôle, l'administration fiscale a considéré que les droits d'adhésion devaient être soumis à la taxe sur les conventions d'assurances (TSCA), à un taux de 15,5 %, et que les garanties accessoires, soumises à cette taxe, devaient se voir appliquer un taux, non de 9 % comme l'avait envisagé la MAIF, mais de 18 %, puis a mis en recouvrement un surplus de taxe pour les années 2004 et 2005 ; que, considérant que le mode de calcul de la TSCA retenu par l'administration fiscale et le taux applicable aux droits d'adhésion étaient erronés, la MAIF, après rejet implicite de sa réclamation, a assigné l'administratrice générale des finances publiques chargée de la direction des vérifications nationales et internationales en annulation de l'avis de mise en recouvrement (AMR) et en dégrèvement partiel des sommes réclamées ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal :

Attendu que la MAIF fait grief à l'arrêt du rejet de sa réclamation en ce qui concerne la taxation des contrats de garanties accessoires alors, selon le moyen :

1°/ que la taxe sur les conventions d'assurance est une taxe annuelle et obligatoire perçue sur le montant des sommes stipulées au profit de l'assureur et de tous accessoires dont celui-ci bénéficie directement ou indirectement du fait de l'assuré, à raison de toute convention d'assurance conclue avec un assureur français ou étranger, quels que soient le lieu et la date auxquels elle est ou a été conclue ; que l'article 991 du code général des impôts précise que « moyennant le paiement de (cette taxe), tout écrit qui constate (la) formation (du contrat d'assurance), sa modification ou sa résiliation amiable, ainsi que les expéditions, extraits ou copies qui en sont délivrés, sont (…) exonérés du droit de timbre et enregistrés gratis lorsque la formalité est requise » ; qu'il ressort de ce texte que la taxe sur les conventions d'assurance n'est pas assimilable à un droit d'enregistrement, mais revêt le caractère d'une taxe sui generis, dont la localisation dans le titre IV du code général des impôts s'explique, non par les caractères propres de cette taxe, mais par le seul fait qu'en l'instituant, le législateur a entendu dispenser corrélativement les parties au contrat d'assurance du paiement des droits d'enregistrement dans les cas où la formalité de l'enregistrement serait requise ; que, pour juger que l'administration fiscale avait à bon droit calculé les rappels de taxe sur les conventions d'assurance assignés à la MAIF en dehors des primes effectivement acquittées par les assurés, la cour d'appel a énoncé que cette taxe, régie par les dispositions des articles 991 à 1004 du code général des impôts, est incluse dans le titre IV intitulé « Enregistrement, publicité foncière, impôt de solidarité sur la fortune, timbre », présente toutes les caractéristiques des droits d'enregistrement, lesquels sont considérés comme des frais accessoires à la vente, de sorte qu'elle n'est pas un élément du prix convenu avec l'assuré, mais un droit d'acte, dont le fait générateur est l'émission de la quittance ; qu'en se méprenant ainsi sur la nature juridique et les caractères de la taxe sur les conventions d'assurance, impôt sui generis qui ne présente aucun des traits essentiels des droits d'enregistrement, la cour d'appel a violé l'article 991 du code général des impôts ;

2°/ que la taxe sur les conventions d'assurance est perçue sur le montant des sommes stipulées au profit de l'assureur et de tous accessoires dont celui-ci bénéficie directement ou indirectement du fait de l'assuré ; qu'en l'absence d'accord des parties au contrat d'assurance quant à la charge définitive de cette taxe, il convient de la faire supporter à l'assureur, qui en est le seul redevable légal en vertu de l'article 385 de l'annexe III au code général des impôts ; qu'il suit de là que lorsque l'assureur a par erreur liquidé la taxe sur les conventions d'assurance à un taux inférieur à celui qui était applicable, les rappels qui lui sont assignés, qui ne pourront être répercutés sur l'assuré, doivent être calculés « en dedans » de la prime effectivement acquittée par celui-ci, c'est-à-dire sur une assiette constituée du prix stipulé, diminué du montant de ladite taxe au taux applicable ; que, pour décider au contraire que l'administration fiscale avait à bon droit calculé les rappels de taxe assignés à la MAIF en dehors des primes effectivement acquittées par les assurés, la cour d'appel a énoncé que cette taxe n'est pas un élément du prix convenu avec l'assuré, mais un accessoire de celui-ci, de sorte que l'existence d'un accord entre l'assureur et l'assuré sur la garantie offerte et sur le montant de la prime totale émise dans la quittance n'est pas exclusive de ce que l'assureur puisse répercuter le montant qu'il a payé au titre de la taxe sur l'assuré, puis a ajouté que la circonstance que l'assureur puisse difficilement récupérer le montant des redressements sur ses assurés est inopposable à l'administration et ne saurait justifier un calcul « en dedans » inapproprié au regard de la dernière phrase de l'article 991 du code général des impôts, la méthode de calcul suivie par l'administration n'ayant nullement pour effet de faire porter la taxe sur une somme virtuelle que l'assureur n'a pas perçue, dès lors qu'aucune disposition ne lui interdit de la répercuter sur l'assuré qui en est l'assujetti ; qu'en se déterminant par de tels motifs, cependant qu'eu égard à son objet et à ses modalités, la taxe sur les conventions d'assurance doit être regardée comme une imposition qui grève le prix convenu de la garantie d'assurance, ce dont il découle que les rappels de taxe assignés à la MAIF n'étaient pas susceptibles d'être répercutés sur ses assurés faute de stipulation expresse le prévoyant et devaient dès lors être calculés sur une assiette constituée des primes taxes comprises stipulées, diminuées du montant de ladite taxe au taux applicable, la cour d'appel a violé les textes susvisés, ensemble l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant rappelé qu'aux termes de l'article 991 du code général des impôts, la TSCA est perçue sur le montant des sommes stipulées au profit de l'assureur et sur celui de tous accessoires dont il bénéficie directement ou indirectement du fait de l'assuré, l'arrêt retient que cette taxe n'est pas un élément de la prime et doit se calculer sur l'ensemble de celle-ci ; qu'ayant constaté que la méthode de calcul suggérée par la MAIF, consistant à asseoir la taxe sur une somme égale au prix effectivement payé par l'assuré, diminuée du montant de taxe rappelée, conduisait à retenir une assiette reconstituée inférieure au montant de la prime hors taxe initialement convenue entre les parties, et ainsi fait ressortir que cette méthode conduisait à exclure de l'assiette de la taxe une partie des sommes stipulées au profit de l'assureur, la cour d'appel, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la seconde branche, a pu retenir qu'il n'y avait pas lieu de l'appliquer ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le moyen unique du pourvoi incident, qui est recevable :

Attendu que le directeur général des finances publiques fait grief à l'arrêt d'annuler partiellement l'AMR, en ce qu'il taxe les droits d'adhésion au taux de 15,5 %, et de rétablir ces droits à un taux de 9 % alors, selon le moyen, qu'il résulte des dispositions de l'article 991 du code général des impôts que la taxe sur les conventions d'assurance est perçue sur le montant des sommes stipulées au profit de l'assureur et de tous accessoires dont celui-ci bénéficie directement ou indirectement du fait de l'assuré ; que les droits d'adhésion, versés par chaque nouvel adhérent à une société mutuelle, sont affectés au fonds d'établissement de cette société ; que le versement des droits d'adhésion est en principe une condition à remplir par chaque nouvel adhérent pour pouvoir souscrire son premier contrat d'assurance ; que les droits d'adhésion constituent ainsi l'accessoire des contrats d'assurance et sont à ce titre soumis à la taxe sur les contrats d'assurance ; que les tarifs de la taxe sont par ailleurs fixés par l'article 1001 du code général des impôts ; que ces tarifs sont établis en pourcentage selon des taux variant de 7 à 30 % en fonction de la nature du risque couvert ; que si les droits d'adhésion sont soumis à la TSCA en tant qu'accessoire des contrats d'assurance, ils ne sont donc pas pour autant rattachables à un risque particulier, ni donc à un taux particulier ; qu'en l'espèce, l'administration proposait dès lors de rattacher le droit d'adhésion au premier contrat souscrit par l'adhérent ; qu'une telle méthode permettait de ventiler le droit d'adhésion entre les différentes garanties prévues par le premier contrat, au prorata du montant des primes afférentes à chacune de celles-ci ; que cette ventilation revenait à soumettre le droit d'adhésion à plusieurs tarifs, fixés par la loi, ce qui aboutissait à un taux moyen pondéré ; qu'il ne s'agissait donc pas de créer un nouveau taux qui n'avait été prévu par la loi, mais bien d'appliquer différents taux prévus par l'article 1001 du code général des impôts en fonction des garanties proposées dans le premier contrat ; que la cour d'appel a pourtant écarté cette méthode en jugeant notamment que l'administration fiscale ne saurait créer un taux qui n'est pas prévu par la loi de sorte que, « faute d'autre disposition dans le texte », le taux applicable aux droits d'adhésion est le taux de 9 % prévu pour « toutes autres assurances » par le 6° de l'article 1001 du code général des imôts ; qu'en se prononçant de la sorte alors même que le droit d'adhésion ne relève pas d'une assurance particulière, de sorte que le taux prévu au 6° de l'article 1001 du code général des impôts ne peut lui être appliqué, la cour d'appel a nécessairement violé les dispositions susvisées ;

Mais attendu qu'ayant relevé que le 6° de l'article 1001 du code général des impôts, dans sa version applicable, prévoit, pour les assurances autres que celles visées par les 1°) à 5°) bis de ce texte, un taux de TSCA de 9 %, c'est à bon droit que la cour d'appel en a déduit que, l'administration fiscale ne pouvant créer un taux non prévu par la loi, en l'absence de disposition particulière applicable aux droits d'adhésion dont la soumission à la taxe n'était pas contestée, un taux de 9 % devait leur être appliqué ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois principal et incident ;

Condamne la société MAIF aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux novembre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société MAIF

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré fondé le rejet implicite de la réclamation contentieuse de la MAIF sauf en ce qui concerne la taxation des droits d'adhésion, de n'AVOIR annulé l'avis de mise en recouvrement du 27 février 2009 que dans la seule mesure de la taxation des droits d'adhésion au taux de 15,5 % au lieu de 9 %, d'AVOIR rétabli cet avis de mise en recouvrement, s'agissant de la taxation des contrats, à la somme de totale de 836.556 €, dont 102.382 € au titre des intérêts de retard et d'AVOIR rejeté les autres demandes de la MAIF ;

AUX MOTIFS QUE « pour calculer le montant des rectifications, les services fiscaux ont appliqué le taux de 18 % au montant de la prime commerciale (prime versée par les assurés), puis déduit de la taxe ainsi obtenue, celle initialement liquidée au taux de 9 %. Ainsi pour une prime commerciale de 100, taxée par erreur à 9 %, soit une prime, taxe comprise, de 109, l'assiette est de 100. La taxe due est de 18 % de 100, soit 18. Compte tenu de la taxe payée, de 9, le rappel est donc, selon l'administration fiscale, de 9 (calcul « en dehors ») ;

La société Maif accepte le principe de la taxation des garanties et les taux qui ont été appliqués par l'administration fiscale, mais conteste les modalités de calcul du rappel. Selon elle, la somme de la prime commerciale (prime pure + chargement de gestion et de commercialisation) et du chargement fiscal ne saurait, après rappel, excéder le montant de la prime qui a été effectivement payée par l'assuré. C'est ainsi que pour les redressements de primes taxées par erreur à 9 % alors que le taux de la taxe sur les conventions d'assurance est de 18 %, elle a calculé l'assiette de l'impôt, à partir de la prime effectivement payée, en supposant que la taxe au taux de 18 % est déjà contenue dans cette prime. Pour une prime commerciale de 100, initialement taxée à 9 %, soit une prime taxe comprise de 109, l'assiette est de 109 x 100/118, soit 92,37. La taxe due est calculée sur cette assiette reconstituée, soit 18 % de 92,37 = 16,62. Compte tenu de la taxe payée, de 9, le rappel est donc, selon l'intimée, de 7,62 (calcul « en dedans »).

Aux termes de l'article 991 du code général des impôts : « Toute convention d'assurance conclue avec une société ou compagnie d'assurances ou avec tout autre assureur français ou étranger est soumise, quels que soient le lieu et la date auxquels elle est ou a été conclue, à une taxe annuelle et obligatoire moyennant le paiement de laquelle tout écrit qui constate sa formation, sa modification ou sa résiliation amiable, ainsi que les expéditions, extraits ou copies qui en sont délivrés, sont, quel que soit le lieu où ils sont ou ont été rédigés, enregistrés gratis lorsque la formalité est requise. La taxe est perçue sur le montant des sommes stipulées au profit de l'assureur et de tous accessoires dont celui-ci bénéficie directement ou indirectement du fait de l'assuré ».

Selon l'article 1708 du même code « Dans tous les cas, les assureurs, leur représentant responsable, leurs agents, directeurs d'établissements ou de succursales, ou leurs représentants, les courtiers et intermédiaires et les assurés sont tenus solidairement pour le paiement de la taxe spéciale sur les conventions d'assurances et ses pénalités. Cette taxe est perçue dans des conditions qui sont fixées par décret ».

La société Maif soutient que comme cela a été fait par les juridictions administratives pour la TVA, il convient d'examiner le statut de la TSCA au regard des principes de droit civil selon l'analyse suivante : - les obligations financières du client vis-à-vis du fournisseur se résument à payer le prix convenu (art. 1582, 1583 et 1591 du code civil) et à supporter les frais accessoires à la vente (art. 1593 du code civil) ; - or, la TVA ne pouvant être considérée comme un élément accessoire (en droit civil, la notion de frais accessoires à la vente s'interprète strictement, comme visant uniquement les frais intrinsèques à la mutation, ceux dont le non-paiement priverait l'acquéreur de la possibilité d'entrer juridiquement en possession du bien acquis) elle constitue un élément du prix ; - en conséquence, lorsque le vendeur estime que l'opération est exonérée de TVA, le prix dont il convient avec l'acquéreur est un prix ferme et définitif, que la facture mentionne ou non que l'opération est exonérée ou hors champ, sauf stipulation expresse prévoyant le versement d'un complément de prix par l'acquéreur au cas où l'opération se révélerait passible de TVA. La solution inverse, préconisée par l'administration, conduirait à calculer la TVA due par le vendeur sur un prix fictif, supérieur au prix effectivement convenu.

Cependant, outre que la conclusion d'un contrat d'assurance n'est pas assimilable à une vente, l'analyse sus-mentionnée ne saurait être transposée en matière de taxe sur les contrats d'assurances qui présente des différences fondamentales avec la TVA.

En effet, cette taxe, régie par les dispositions des articles 991 à 1004 du CGI, est incluse dans le titre IV intitulé « Enregistrement, publicité foncière, impôt de solidarité sur la fortune, timbre », et elle présente toutes les caractéristiques des droits d'enregistrement, lesquels sont considérés comme des frais accessoires à la vente. Les termes de l'article 991 du code général des impôts qui énoncent que moyennant le paiement de la taxe «tout écrit qui constate sa formation, sa modification ou sa résiliation amiable, ainsi que les expéditions, extraits ou copies qui en sont délivrés, sont, quel que soit le lieu où ils sont ou ont été rédigés, enregistrés gratis lorsque la formalité est requise » montrent que celle-ci a été conçue comme se substituant au droit d'enregistrement de tels actes, ce que confirme l'article 21 de la loi du 31 janvier 1944 qui l'a instituée et qui prévoit que le recouvrement de la taxe, ainsi que des pénalités, est assuré par l'administration de l'enregistrement et que les instances sont introduites et jugées comme en matière d'enregistrement.

Ainsi, la TSCA n'est pas un élément du prix convenu avec l'assuré, mais un droit d'acte, dont le fait générateur est l'émission de la quittance, et non le paiement.

De plus, comme l'a précisé la Cour de cassation dans un arrêt du 11 mars 2003 (Chambre commerciale, financière et économique, n° 00-21.882, Bull. 2003, IV n°42), la TSCA ne comporte aucun des éléments caractéristiques de la taxe sur la valeur ajoutée, dès lors qu'il résulte des dispositions de l'article 991 du code général des impôts que non seulement la TSCA ne couvre pas l'ensemble des opérations économiques sur le territoire national, puisqu'elle ne s'applique pas à l'ensemble des transactions ayant pour objet des biens ou des services, mais que, de surcroît, elle n'est ni perçue à chaque stade du processus de production et de distribution, ni appliquée à la seule valeur ajoutée au service produit par l'assureur.

Dès lors, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, la TSCA ne présente pas le caractère d'un impôt indirect, perçu à titre définitif sur la consommation de prestations d'assurance, comme la TVA. En effet, Il résulte des dispositions précédentes que le fait générateur de la TSCA est la conclusion ou le renouvellement d'une police d'assurance et non l'exécution d'une prestation de service. La cour relève à ce sujet qu'au surplus la prestation de service qui incombe à l'assureur est la garantie du risque assuré et que si l'assureur peut répercuter la TSCA sur les assurés, c'est néanmoins lui-même qui en est le redevable.

Par ailleurs, la circonstance que l'assureur puisse difficilement récupérer le montant des redressements sur ses assurés est inopposable à l'administration et ne saurait justifier en soi un mode de calcul de ceux-ci « en dedans » inapproprié. L'existence d'un accord entre l'assureur et l'assuré sur la garantie offerte et sur le montant de la prime totale émise dans la quittance n'est pas exclusif de ce que l'assureur puisse répercuter le montant qu'il a payé au titre de la TSCA sur l'assuré.

Dans ces conditions, les principes dégagés par la jurisprudence administrative en matière de TVA, invoquée par la société Maif, ne sauraient être transposés en matière de TSCA ;

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la taxe sur les contrats d'assurance n'est pas un élément de la prime mais doit se calculer sur l'ensemble de celle-ci, ainsi que le précise la dernière phrase de l'article 991 du code général des impôts. Cette méthode n'a, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, nullement pour effet de faire porter la taxe sur une somme virtuelle que l'assureur n'a pas perçue, dès lors qu'aucune disposition ne lui interdit de la répercuter sur l'assuré qui en est l'assujetti.

Le jugement qui a annulé en totalité l'avis de mise en recouvrement devra en conséquence être réformé sur ce point et il n'y a pas lieu dès lors de rectifier l'erreur matérielle résultant de cette annulation de la totalité de l'avis de mise en recouvrement qui portait sur un montant total de 8.699.040 euros, alors que le montant du litige, qui n'est pas contesté par les parties, était limité à la somme de 1.312.084 euros »

1. ALORS, de première part, QUE la taxe sur les conventions d'assurance est une taxe annuelle et obligatoire perçue sur le montant des sommes stipulées au profit de l'assureur et de tous accessoires dont celui-ci bénéficie directement ou indirectement du fait de l'assuré, à raison de toute convention d'assurance conclue avec un assureur français ou étranger, quels que soient le lieu et la date auxquels elle est ou a été conclue ; que l'article 991 du code général des impôts précise que « moyennant le paiement de (cette taxe), tout écrit qui constate (la) formation (du contrat d'assurance), sa modification ou sa résiliation amiable, ainsi que les expéditions, extraits ou copies qui en sont délivrés, sont (…) exonérés du droit de timbre et enregistrés gratis lorsque la formalité est requise » ; qu'il ressort de ce texte que la taxe sur les conventions d'assurance n'est pas assimilable à un droit d'enregistrement, mais revêt le caractère d'une taxe sui generis, dont la localisation dans le titre IV du code général des impôts s'explique, non par les caractères propres de cette taxe, mais par le seul fait qu'en l'instituant, le législateur a entendu dispenser corrélativement les parties au contrat d'assurance du paiement des droits d'enregistrement dans les cas où la formalité de l'enregistrement serait requise ; que, pour juger que l'administration fiscale avait à bon droit calculé les rappels de taxe sur les conventions d'assurance assignés à la MAIF en dehors des primes effectivement acquittées par les assurés, la Cour d'appel a énoncé que cette taxe, régie par les dispositions des articles 991 à 1004 du CGI, est incluse dans le titre IV intitulé « Enregistrement, publicité foncière, impôt de solidarité sur la fortune, timbre », présente toutes les caractéristiques des droits d'enregistrement, lesquels sont considérés comme des frais accessoires à la vente, de sorte qu'elle n'est pas un élément du prix convenu avec l'assuré, mais un droit d'acte, dont le fait générateur est l'émission de la quittance ; qu'en se méprenant ainsi sur la nature juridique et les caractères de la taxe sur les conventions d'assurance, impôt sui generis qui ne présente aucun des traits essentiels des droits d'enregistrement, la Cour d'appel a violé l'article 991 du code général des impôts ;

2. ALORS, de deuxième part, QUE la taxe sur les conventions d'assurance est perçue sur le montant des sommes stipulées au profit de l'assureur et de tous accessoires dont celui-ci bénéficie directement ou indirectement du fait de l'assuré ; qu'en l'absence d'accord des parties au contrat d'assurance quant à la charge définitive de cette taxe, il convient de la faire supporter à l'assureur, qui en est le seul redevable légal en vertu de l'article 385 de l'annexe III au code général des impôts ; qu'il suit de là que lorsque l'assureur a par erreur liquidé la taxe sur les conventions d'assurance à un taux inférieur à celui qui était applicable, les rappels qui lui sont assignés, qui ne pourront être répercutés sur l'assuré, doivent être calculés « en dedans » de la prime effectivement acquittée par celui-ci, c'est-à-dire sur une assiette constituée du prix stipulé, diminué du montant de ladite taxe au taux applicable ; que, pour décider au contraire que l'administration fiscale avait à bon droit calculé les rappels de taxe assignés à la MAIF en dehors des primes effectivement acquittées par les assurés, la Cour d'appel a énoncé que cette taxe n'est pas un élément du prix convenu avec l'assuré, mais un accessoire de celui-ci, de sorte que l'existence d'un accord entre l'assureur et l'assuré sur la garantie offerte et sur le montant de la prime totale émise dans la quittance n'est pas exclusive de ce que l'assureur puisse répercuter le montant qu'il a payé au titre de la taxe sur l'assuré, puis a ajouté que la circonstance que l'assureur puisse difficilement récupérer le montant des redressements sur ses assurés est inopposable à l'administration et ne saurait justifier un calcul « en dedans » inapproprié au regard de la dernière phrase de l'article 991 du code général des impôts, la méthode de calcul suivie par l'administration n'ayant nullement pour effet de faire porter la taxe sur une somme virtuelle que l'assureur n'a pas perçue, dès lors qu'aucune disposition ne lui interdit de la répercuter sur l'assuré qui en est l'assujetti ; qu'en se déterminant par de tels motifs, cependant qu'eu égard à son objet et à ses modalités, la taxe sur les conventions d'assurance doit être regardée comme une imposition qui grève le prix convenu de la garantie d'assurance, ce dont il découle que les rappels de taxe assignés à la MAIF n'étaient pas susceptibles d'être répercutés sur ses assurés faute de stipulation expresse le prévoyant et devaient dès lors être calculés sur une assiette constituée des primes taxes comprises stipulées, diminuées du montant de ladite taxe au taux applicable, la Cour d'appel a violé les textes susvisés, ensemble l'article 1134 du code civil.

Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour le directeur général des finances publiques, demandeur au pourvoi incident

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé en toutes ses dispositions le jugement entrepris et, statuant à nouveau, d'AVOIR déclaré fondé le rejet implicite de la réclamation du 11 décembre 2009 adressé par la société MAIF sauf en ce qui concerne la taxation des droits d'adhésion, d'AVOIR annulé l'avis de mise en recouvrement n° A457V10620174 du 27 février 2009 dans la seule mesure de la taxation des droits d'adhésion au taux de 15,5 % au lieu de 9 % et d'AVOIR rétabli cet avis sur ce point pour un montant total de 22 703 €, dont 2 837 € au titre des intérêts de retard;

AUX MOTIFS QU' « ainsi que le rappelle à juste titre la société intimée, l'article 34 de la Constitution dispose que « La loi fixe les règles concernant (') l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures ». En vertu de cette disposition, l'administration fiscale ne saurait créer un taux qui n'est pas prévu par la loi, sans qu'importe l'absence de prévision de taux propre aux droits d'adhésion perçus par les compagnies d'assurances mutuelles dans l'article 1001 du code général des impôts qui détaille les taux applicables au titre de l'article 991 du même code. Par ailleurs, il convient de relever que le 6º de l'article 1001 précité énonce que pour les assurances qui ne sont pas énoncées dans le texte et qui sont désignées comme étant « les autres assurances » le taux est de 9 %, ce montant ressortant comme un taux de base. Il s'en déduit que faute d'autre disposition dans le texte, le taux applicable aux droits d'adhésion qui constituent un accessoire dont l'assureur bénéficie directement du fait de l'assuré et sont donc passibles de la TSCA, est de 9 % et non de 15,5 % comme l'a appliqué l'administration fiscale en l'espèce. L'avis de mise en recouvrement devra en conséquence être annulé en ce qu'il concerne la taxation des droits d'adhésion au taux de 15,5 % et il sera rétabli au taux de 9 %, soit pour des montants que l'administration fiscale fixe, dans ses conclusions, à 12 246 euros dont 1 921 euros d'intérêts de retard pour 2014, et à 10 457 euros, dont 916 euros d'intérêts de retard pour 2015, soit un total de 22 703 euros » ;

ALORS QU' il résulte des dispositions de l'article 991 du C.G.I. que la taxe sur les conventions d'assurance est perçue sur le montant des sommes stipulées au profit de l'assureur et de tous accessoires dont celui-ci bénéficie directement ou indirectement du fait de l'assuré ; que les droits d'adhésion, versés par chaque nouvel adhérent à une société mutuelle, sont affectés au fonds d'établissement de cette société ; que le versement des droits d'adhésion est en principe une condition à remplir par chaque nouvel adhérent pour pouvoir souscrire son premier contrat d'assurance ; que les droits d'adhésion constituent ainsi l'accessoire des contrats d'assurance et sont à ce titre soumis à la T.S.C.A. ; que les tarifs de la taxe sont par ailleurs fixés par l'article 1001 du C.G.I. ; que ces tarifs sont établis en pourcentage selon des taux variant de 7 à 30 % en fonction de la nature du risque couvert ; que si les droits d'adhésion sont soumis à la T.S.C.A. en tant qu'accessoire des contrats d'assurance, ils ne sont donc pas pour autant rattachables à un risque particulier, ni donc à un taux particulier ; qu'en l'espèce, l'administration proposait dès lors de rattacher le droit d'adhésion au premier contrat souscrit par l'adhérent ; qu'une telle méthode permettait de ventiler le droit d'adhésion entre les différentes garanties prévues par le premier contrat, au prorata du montant des primes afférentes à chacune de celles-ci ; que cette ventilation revenait à soumettre le droit d'adhésion à plusieurs tarifs, fixés par la loi, ce qui aboutissait à un taux moyen pondéré ; qu'il ne s'agissait donc pas de créer un nouveau taux qui n'avait été prévu par la loi, mais bien d'appliquer différents taux prévus par l'article 1001 du C.G.I. en fonction des garanties proposées dans le premier contrat ; que la cour d'appel a pourtant écarté cette méthode en jugeant notamment que l'administration fiscale ne saurait créer un taux qui n'est pas prévu par la loi de sorte que, « faute d'autre disposition dans le texte », le taux applicable aux droits d'adhésion est le taux de 9 % prévu pour « toutes autres assurances » par le 6° de l'article 1001 du C.G.I. ; qu'en se prononçant de la sorte alors même que le droit d'adhésion ne relève pas d'une assurance particulière, de sorte que le taux prévu au 6° de l'article 1001 du C.G.I. ne peut lui être appliqué, la cour d'appel de Paris a nécessairement violé les dispositions susvisées.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 16-18878
Date de la décision : 22/11/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 12 avril 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 22 nov. 2017, pourvoi n°16-18878


Composition du Tribunal
Président : Mme Riffault-Silk (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
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