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15/11/2017 | FRANCE | N°16-21066

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 15 novembre 2017, 16-21066


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Val-de-France (la Caisse) a consenti, entre 2004 et 2006, plusieurs prêts à la société Sologne développement (la société) dont l'un d'eux était garanti par le cautionnement de M. X..., gérant de la société, auquel la Caisse a également accordé un prêt, à titre personnel, le 19 mai 2006 ; que plusieurs procédures ont opposé les parties sur des assignations en paiement délivrées par la Caisse aboutissant à un arrÃ

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Val-de-France (la Caisse) a consenti, entre 2004 et 2006, plusieurs prêts à la société Sologne développement (la société) dont l'un d'eux était garanti par le cautionnement de M. X..., gérant de la société, auquel la Caisse a également accordé un prêt, à titre personnel, le 19 mai 2006 ; que plusieurs procédures ont opposé les parties sur des assignations en paiement délivrées par la Caisse aboutissant à un arrêt de la cour d'appel d'Orléans du 24 septembre 2009 prononçant plusieurs condamnations en paiement de la société et de M. X... en qualité de caution ; que le 28 février 2008, la société et M. X... avaient assigné la Caisse devant le tribunal de grande instance de Nanterre pour voir annuler plusieurs des engagements souscrits et pour obtenir la condamnation de la Caisse au paiement de dommages-intérêts ; que la société a été mise en redressement judiciaire par un jugement du 21 décembre 2012 ; que par un jugement du 4 avril 2014, le tribunal de grande instance de Nanterre a, entre autres dispositions, déclaré la société et M. X... irrecevables en leur demande d'annulation d'un prêt et du cautionnement le garantissant, rejeté toutes les demandes de la société et de M. X... et a condamné ce dernier à payer diverses sommes à la Caisse au titre du prêt qui lui avait été consenti personnellement ; que la liquidation judiciaire de la société a été prononcée le 13 juin 2014 ; que par déclaration du 23 juin 2014, la société et M. X..., pris en sa qualité de gérant de celle-ci, ont relevé appel du jugement du 4 avril 2014 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société et M. X..., pris en sa qualité de gérant de la société, font grief à l'arrêt de les déclarer irrecevables en leur appel alors, selon le moyen, que le débiteur accomplit les actes et exerce les droits et actions qui ne sont pas compris dans la mission du liquidateur ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si le jugement de liquidation n'était pas silencieux sur la poursuite de l'action engagée par la société Sologne développement contre la Caisse Val-de-France, de sorte que la société Sologne développement, représentée par son dirigeant social resté en fonction malgré la liquidation, pouvait poursuivre cette même action, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 641-9 du code de commerce ;

Mais attendu que, si le débiteur dessaisi de l'administration et de la disposition de ses biens par sa liquidation judiciaire a le droit propre de contester son passif, aucun droit propre ne fait échec à son dessaisissement pour l'exercice des actions tendant au recouvrement de ses créances ou à la mise en cause de la responsabilité d'un cocontractant ; qu'ayant relevé que le liquidateur n'était pas intervenu à l'instance avant l'expiration du délai d'appel, mais avait, au contraire, écrit pour indiquer qu'il ne soutenait pas l'appel exercé au nom de la société, et qu'aucune méconnaissance de la nature ou de la portée des règles relatives au dessaisissement n'était invoquée, l'arrêt retient exactement, s'agissant de l'exercice d'une action en responsabilité de nature purement patrimoniale exercée par la société débitrice contre sa banque afin d'obtenir le paiement de dommages-intérêts, et sans avoir à effectuer la recherche inopérante invoquée par le moyen, qu'aucun droit ou action attaché à la personne de la débitrice, ni aucun droit propre ne sont en cause ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen, qui n'étant pas incompatible avec la thèse soutenue devant les juges du fond est recevable :

Vu les articles 4, 547 et 901 du code de procédure civile ;

Attendu que pour dire que M. X... n'a pas fait appel du jugement à titre personnel, l'arrêt retient qu'il n'a fait appel qu'en qualité de gérant de la société et que la cour d'appel n'est saisie que dans les seuls termes de la déclaration d'appel pour en déduire que l'appel ne vise pas les condamnations prononcées contre M. X... sur le fondement de ses engagements personnels envers la Caisse ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'erreur manifeste commise dans la déclaration d'appel, sur la qualité de l'appelant, au regard de l'objet du litige, tel que déterminé par les dispositions du jugement entrepris ainsi que par les prétentions des parties devant les juges du fond, et notamment par les conclusions de M. X... devant la cour d'appel, n'était pas de nature à entraîner l'irrecevabilité des prétentions de l'appelant, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il constate que M. X... n'a pas interjeté appel du jugement à titre personnel et dit que le jugement produira son plein et entier effet à l'égard de M. X..., l'arrêt rendu le 31 mars 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;

Condamne la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Val-de-France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze novembre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Occhipinti, avocat aux Conseils, pour M. X... et la société Sologne développement.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré la société Sologne Développement et M. X... pris en sa qualité de gérant de cette société irrecevables en leur appel ;

AUX MOTIFS QUE la société Sologne Développement et M. Alain X..., pris en sa qualité de gérant de cette société, ont interjeté appel du jugement entrepris le 23 juin 2014, soit dix jours après le prononcé par le Tribunal de commerce de Blois du jugement plaçant en liquidation judiciaire la société appelante. En application de l'article L 641-9 du code de commerce et de la jurisprudence en découlant, à compter du 13 juin 2014, la société Sologne Développement et son gérant étaient dessaisis de I ' administration et de la disposition de leurs biens, seul Me Hubert Y..., désigné en qualité de liquidateur par le tribunal dc commerce, ayant qualité et étant recevable à interjeter appel. L'appel formé aurait pu I 'être à titre conservatoire, sous réserve que Me Y... intervienne avant l' expiration du délai d' appel pour régulariser son recours par substitution aux premiers appelants. Cependant Me Y... ne s'est pas manifesté et par courrier du 14 octobre 2014 adressé à la cour, il précise qu'il "ne soutien(t) absolument pas l'appel au nom de la SARL Sologne Développement dont la liquidation judiciaire a été prononcée le 13 juin dernier", et donc qu'il ne constituera pas avocat. La société Sologne Développement invoque à l'appui de la recevabilité de son appel les dispositions de l'article L 641-9 II du code de commerce, aux termes duquel "les dirigeants sociaux en fonction au prononcé du jugement de liquidation judiciaire le demeurent". Il n'en reste pas moins que selon l'article L 641-9 1 du même code, le jugement prononçant la liquidation judiciaire emporte le dessaisissement du débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens, les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine étant exercés par le liquidateur Par ailleurs la jurisprudence citée par les appelants au soutien d'un droit propre d'appel n'est pas applicable à l'espèce. D'une part, la société Sologne Développement ne soutient pas que la nature ou la portée des règles relatives au dessaisissement aient été méconnues, et ne justifie d'aucun droit ou action attachée à sa personne qu'elle pourrait exercer malgré le dessaisissement dont elle a fait l'objet, tel que la jurisprudence de la cour de cassation en a reconnu la faculté au demeurant au seul débiteur personne physique (arrêt Soc février 2001 ) Les droits propres reconnus au débiteur malgré le dessaisissement découlant de la procédure collective sont tous afférents à la mise en oeuvre de la procédure collective elle-même, appel du jugement d'ouverture de la procédure collective, appel du jugement ayant reporté la date de cessation des paiements. La société Sologne Développement enfin n'a pas fait appel avant son placement en liquidation judiciaire (cas des arrêts Com. 1er octobre 2002 et 5 juillet 2005), et ne justifie pas qu'elle exercerait aujourd'hui des droits et actions non compris dans la mission du liquidateur, les actions afférentes aux prêts litigieux étant de nature purement patrimoniale ;

ALORS QUE le débiteur accomplit les actes et exerce les droits et actions qui ne sont pas compris dans la mission du liquidateur ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si le jugement de liquidation n'était pas silencieux sur la poursuite de l'action engagée par la société Sologne Développement contre la CRCAM Val de France, de sorte que la société Sologne Développement, représentée par son dirigeant social resté en fonction malgré la liquidation, pouvait poursuivre cette même action, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 641-9 du code de commerce.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que M. X... n'avait pas interjeté appel à titre personnel ;

AUX MOTIFS QUE M. X... n'a fait appel qu'en qualité de gérant de la société Sologne Développement. Il doit en être déduit qu'il n'a pas fait appel des condamnations prononcées à son encontre sur la base d'engagements personnels envers la banque. La cour est en effet saisie dans les seuls termes de la déclaration d'appel ;

ALORS QUE l'erreur manifeste dans la déclaration d'appel quant à la qualité de l'appelant, eu égard à l'objet du litige, ne peut pas limiter la portée de l'appel ; que M. X... formulait dans ses conclusions plusieurs demandes à titre personnel, qui avaient déjà été présentées en première instance, de sorte que sa désignation dans la déclaration d'appel comme agissant en qualité de gérant de la société Sologne Développement, au demeurant superflue, était une simple erreur ; qu'en en déduisant qu'il n'avait pas fait appel à titre personnel, la cour d'appel a violé les articles 4, 58 et 901 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 16-21066
Date de la décision : 15/11/2017
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 31 mars 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 15 nov. 2017, pourvoi n°16-21066


Composition du Tribunal
Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Occhipinti, SCP de Chaisemartin et Courjon

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.21066
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