La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/11/2017 | FRANCE | N°16-19616

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 15 novembre 2017, 16-19616


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société civile immobilière Les Cèdres (la SCI), dont Roland X...était le gérant, a été mise en liquidation judiciaire le 5 juillet 2004, M. Y...étant désigné liquidateur ; que dans le cadre de la réalisation des actifs, une société a fait une offre d'acquisition de l'immeuble composant l'actif de la société pour un prix de 1 350 000 euros, valable jusqu'au 30 mai 2005 ; qu'une ordonnance a autorisé la cession, l'acte définitif devant intervenir avant le 31 ju

illet 2005, à peine de caducité de l'ordonnance ; que la cession n'ayant p...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société civile immobilière Les Cèdres (la SCI), dont Roland X...était le gérant, a été mise en liquidation judiciaire le 5 juillet 2004, M. Y...étant désigné liquidateur ; que dans le cadre de la réalisation des actifs, une société a fait une offre d'acquisition de l'immeuble composant l'actif de la société pour un prix de 1 350 000 euros, valable jusqu'au 30 mai 2005 ; qu'une ordonnance a autorisé la cession, l'acte définitif devant intervenir avant le 31 juillet 2005, à peine de caducité de l'ordonnance ; que la cession n'ayant pu être réalisée dans ce délai, Roland X..., désigné mandataire ad hoc de la SCI, a assigné M. Y...en responsabilité, invoquant tant le préjudice de la société que son préjudice personnel ; que Roland X...étant décédé en cours d'instance, Mme Madeleine X..., désignée à son tour mandataire ad hoc de la SCI, ainsi que les héritiers, sont intervenus à l'instance ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le second moyen :

Vu l'article 561 du code de procédure civile ;

Attendu que l'appel défère à la cour d'appel la connaissance de tous les chefs du jugement critiqués par l'appelant ;

Attendu que pour dire n'y avoir lieu à statuer sur la réparation du préjudice personnel de Roland X..., l'arrêt constate, d'un côté, que les héritiers de ce dernier, intervenants volontaires, indiquent ne pas avoir exercé leurs droits sur la succession et s'en rapporter à la cour en précisant qu'il est de l'intérêt de la succession de confirmer le jugement déféré, et retient, de l'autre, que Mme X...n'agit qu'en sa qualité de mandataire ad hoc de la SCI et ne reprend pas l'action personnelle de son mari, n'ayant pas encore pris position sur l'acceptation de la succession ;

Qu'en statuant ainsi tout en constatant que M. Y..., qui avait intérêt à ce que le chef du dispositif du jugement le condamnant à réparer le préjudice personnel de Roland X...n'acquiert pas la force de chose jugée que pourraient lui opposer ensuite les héritiers de celui-ci, une fois l'option successorale exercée et en l'absence de désistement de leur part, n'avait limité la critique du jugement ni dans l'acte d'appel, ni dans ses conclusions, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit n'y avoir lieu à statuer sur la réparation du préjudice personnel subi par M. X..., l'arrêt rendu le 14 avril 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze novembre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Fontainebleau le 5 novembre 2014 en ce qu'il avait condamné Maître François Y...à payer à M. X..., maintenant Mme Madeleine X..., ès qualités de mandataire ad hoc de la société Les Cèdres, la somme de 348. 994, 96 euros, et d'AVOIR dit que cette somme serait directement versée entre les mains de Maître Z..., ès qualités de mandataire liquidateur de la société Les Cèdres ;

AUX MOTIFS QUE M. X...a exercé son action à deux titres, d'une part ès qualités de mandataire ad hoc de la société Les Cèdres selon jugement du tribunal de grande instance de Fontainebleau du 12 mars 2013 et d'autre part en son nom propre ; que Maître Y...fait tout d'abord valoir que M. X...ne peut agir en qualité de subrogé dans les droits des créanciers de la procédure collective notamment s'agissant des créances antérieures à l'ouverture de la procédure ; que la cour constate d'une part que Mme X...ne prétend pas être subrogée dans les droits des créanciers et d'autre part que si une créance est retenue envers Maître Y...du fait de la faute commise lors de la vente litigieuse, elle sera postérieure à l'ouverture de la procédure collective ; que la cour rappelle que la liquidateur est personnellement tenu des fautes ou des négligences qu'il commet dans l'exercice de ses fonctions sur le fondement de l'article 1382 du code civil ; qu'il appartient à celui qui recherche sa responsabilité de rapporter la preuve d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre la faute et le préjudice ; que, sur la faute, Mme X..., ès qualités, fait valoir que la société DWA a offert de reprendre les actifs de la société Les Cèdres par acte du 5 avril 2005, cette offre étant valable jusqu'au 30 juin 2005. Maître Y...a attendu le 15 mai 2005, soit un mois et dix jours, pour saisir M. A..., juge commissaire et à défaut M. B..., juge commissaire suppléant, d'une requête afin d'autoriser la vente ; que M. X..., quant à lui, avait émis un avis favorable à cette cession ; que la requête a été fixée pour examen devant M. B...le 30 mai 2005 ; que l'ordonnance autorisant la cession a été rendue par M. B...ce même jour prévoyant la cession au plus tard le 31 juillet 2005 ; que M. X..., estimant que M. B...n'avait pas été désigné en qualité de juge commissaire à la liquidation judiciaire de la société Les Cèdres a formé opposition à cette ordonnance le 18 juillet 2005 ; que Mme X...reproche à Maître Y...d'avoir commis une faute en saisissant un juge commissaire incompétent d'abord et ensuite en ne réagissant pas avant le 17 août 2005 date à laquelle il a formé une nouvelle requête ; que Maître Y...fait valoir que le nom de M. B...comme juge commissaire suppléant résulte d'une simple erreur et que sa requête visait à titre principal le juge-commissaire effectivement désigné dans la procédure concernant la société Les Cèdres et c'est seulement en raison de l'opposition formée le 18 juillet 2005 par M. X...contre l'ordonnance du juge commissaire du 30 mai 2005, que celle-ci n'est pas devenue définitive et n'a pas acquis l'autorité de la chose jugée ; que l'acte de cession ne pouvait être signé que lorsque l'ordonnance autorisant cette cession n'était susceptible d'aucun recours ; que la restitution de la somme de 135. 000 euros résulte de la caducité de l'ordonnance du 30 mai 2005 et du retrait de l'offre par la société DWA qui ne pouvait pas faire l'objet d'une action en responsabilité ; qu'il ressort des pièces versées aux débats que Maître Y...a effectivement attendu un mois et dix jours pour déposer sa requête alors que le délai de validité de l'offre était déjà relativement court ; qu'il est également constant qu'il a commis une erreur en indiquant sur sa requête le nom de M. B..., lequel n'avait pas été désigné comme suppléant dans la procédure collective de la société Les Cèdres ; que certes il avait été désigné dans le cadre des sociétés Patton dont la société Les Cèdres était la holding et certes une procédure en confusion de patrimoine était en cours mais ces faits, s'ils peuvent expliquer la faute, ne la font cependant pas disparaître ; que la cour note enfin que Maître Y...a attendu le mois d'août pour introduire une nouvelle requête soit bien après l'expiration des délais prévus dans l'ordonnance pour signer la cession, soit le 31 juillet 2005 et dans l'offre de la société DWA, soit le 30 juin 2005 ; que de même que les premiers juges la cour considère que l'opposition formée par M. X...le 18 juillet 2005 qui visait à faire annuler l'ordonnance du 30 mai 2005 pour avoir été rendue par un juge commissaire non désigné dans la procédure n'a eu aucun rôle causal dans le fait que la cession n'est pas intervenue avant le 30 juin 2005, date fixée par la société DWA dans son offre ; qu'enfin, aucune faute ne peut être retenue à l'encontre de Maître Y...pour avoir restitué à la société DWA les fonds déposés en garantie par celle ci alors qu'une ordonnance avait été rendue en ce sens quand bien même elle n'était pas encore exécutoire ; que, sur le préjudice, Mme X...fait valoir que le préjudice subi s'élève à la différence entre le prix de 1. 350. 000 euros prévu dans l'offre d'achat de la société DWA qui n'a pu se réaliser en raison des fautes de Maître Y...et le prix de vente réelle de l'immeuble de 1. 001. 005, 04 euros, soit une différence de 348. 994, 96 euros ; que Maître Y...soutient que le seul préjudice consisterait en une perte de chance, dont la preuve n'est pas rapportée, d'obtenir condamnation, puis paiement, par la société DWA de la totalité de la somme proposée, aucun préjudice n'est donc prouvé ; que concernant le préjudice moral, celui-ci n'est pas justifié par les héritiers et suite aux paiements spontanés des créanciers hypothécaires inscrits sur la maison d'habitation de M. X..., celle-ci n'a pas été vendue par Maître Z...pour payer les créanciers de la société ; que la cour relève que le préjudice subi n'est pas celui d'une perte de chance puisque la société DWA s'était irrévocablement engagée à acquérir le bien pour le prix stipulé à la condition que cette cession intervienne avant le 30 juin 2005 ; que le préjudice est donc bien constitué par la différence entre le prix proposé par la société DWA et le prix auquel le bien a finalement été vendu ; que la cour relève que Mme X...n'agit qu'en sa qualité de mandataire ad hoc de la société Les Cèdres et ne reprend pas l'action personnelle de son mari M. Roland X...n'ayant pas encore pris position sur l'acceptation de la succession ; que, sur le lien de causalité, Mme X...considère que c'est l'absence de diligences de Maître Y...entre le 30 mai et le 31 juillet 2005, sa nouvelle requête devant le juge commissaire et la restitution précipitée de la somme de 135. 000 euros à la société DWA qui ont fait obstacle à la cession de l'immeuble et qui ont causé le préjudice subi par la liquidation ; que Maître Y...soutient que le préjudice, dont il conteste l'existence, résulterait de l'erreur du juge-commissaire qui a statué alors qu'il n'était pas régulièrement désigné, du délai nécessaire pour que le greffe notifie l'ordonnance en vue de la rendre définitive, du libre retrait de l'offre par la société DWA et il résulte surtout de l'opposition formée par M. X...contre cette ordonnance sans motif de fond ; que la cour a déjà considéré que l'opposition de M. X...n'avait pas eu de conséquences sur l'absence de cession à DWA ; que, de même s'il est exact que le juge commissaire a également commis une erreur en rendant une ordonnance là où il n'avait aucune compétence, il n'en demeure pas moins que cette erreur était directement causée par la requête de Maître Y...qui a saisi expressément M. A... en qualité de juge commissaire et/ ou M. B...en qualité de juge commissaire suppléant ; qu'or cette erreur aurait pu être réparée si Maître Y...avait réagi plus vite, avant la caducité de l'ordonnance et avant la caducité de l'offre d'achat ;

ALORS QUE la vente de gré à gré d'un immeuble compris dans l'actif du débiteur en liquidation judiciaire est parfaite dès l'ordonnance qui l'autorise, de sorte que le cessionnaire ne peut plus à compter de cette ordonnance retirer son offre ; qu'en retenant, pour exclure le rôle causal du comportement de M. X..., et notamment de l'opposition qu'il avait formée contre l'ordonnance autorisant la cession à la société DWA le 18 juillet 2005, que la régularisation de la vente n'était pas intervenue dans le délai stipulé dans l'offre d'acquisition, soit avant le 30 juin 2005, bien qu'elle ait constaté que l'ordonnance autorisant la cession à cette société était intervenue le 30 mai 2005, de sorte qu'à compter de cette date la vente était parfaite et le cessionnaire ne pouvait plus retirer son offre, les actes de cession devant alors intervenir non avant le 30 juin 2005, mais avant le 31 juillet 2005, date fixée par l'ordonnance, la cour d'appel a violé l'article L. 622-16, alinéa 3, du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, applicable en la cause.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit n'y avoir lieu à statuer sur la réparation du préjudice personnel subi par M. X...;

AUX MOTIFS QUE la cour constate que Mme Madeleine X..., Mme Agnès X..., M. Elysée X...et Mme Elodie X...interviennent volontairement à l'instance en qualités d'héritiers de M. Roland X...et qu'ils n'ont pas exercé leurs droits sur sa succession : que les intervenants volontaires, héritiers de M. X..., font uniquement valoir qu'ils n'ont accepté la succession ni expressément, ni implicitement par les présentes conclusions et qu'ils s'en rapportent à la cour précisant qu'il est de l'intérêt de la succession de confirmer le jugement déféré ;

ET QUE la cour relève que Mme X...n'agit qu'en sa qualité de mandataire ad hoc de la société Les Cèdres et ne reprend pas l'action personnelle de son mari M. Roland X...n'ayant pas encore pris position sur l'acceptation de la succession ;

ALORS QU'en l'absence de limitation de l'appel à certains chefs du jugement, la dévolution s'opérant pour le tout, la cour d'appel doit statuer à nouveau sur tous les points du litige qui avait été soumis au tribunal ; qu'en jugeant qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur la réparation du préjudice personnel de M. X..., quand M. Y...avait été condamné en première instance à payer à M. X...en son nom personnel la somme de 30. 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral, et que l'appel formé par M. Y...était total, celui-ci concluant à l'infirmation du jugement en toutes ses dispositions, la cour d'appel a méconnu la portée de l'effet dévolutif de l'appel et ainsi violé l'article 561 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 16-19616
Date de la décision : 15/11/2017
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 14 avril 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 15 nov. 2017, pourvoi n°16-19616


Composition du Tribunal
Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Delvolvé et Trichet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.19616
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award