La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/10/2017 | FRANCE | N°16-18548

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 octobre 2017, 16-18548


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X...a été engagée le 2 juin 2008 en qualité de cuisinière par son époux M. Y..., exploitant un restaurant en nom propre, selon un contrat à durée indéterminée ; que la salariée a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Sur le premier moyen :

Vu les articles L. 1231-1, L. 1235-1, en sa rédaction applicable au litige, et L. 1237-1 du code du travail ;

Attendu que pour dire que le contrat à durée indéterminée avait pris fin par

suite de la démission de la salariée, l'arrêt retient que celle-ci a cessé de travailler ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X...a été engagée le 2 juin 2008 en qualité de cuisinière par son époux M. Y..., exploitant un restaurant en nom propre, selon un contrat à durée indéterminée ; que la salariée a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Sur le premier moyen :

Vu les articles L. 1231-1, L. 1235-1, en sa rédaction applicable au litige, et L. 1237-1 du code du travail ;

Attendu que pour dire que le contrat à durée indéterminée avait pris fin par suite de la démission de la salariée, l'arrêt retient que celle-ci a cessé de travailler au mois de décembre 2008, que le couple s'est séparé en décembre 2008, que les pièces produites établissent que les relations de travail et de couple étaient intimement liées, que la rupture du couple s'accompagnait nécessairement de la rupture du contrat de travail et que le départ de la salariée équivaut donc à une démission ;

Qu'en se déterminant ainsi, par des motifs qui ne caractérisent pas une volonté claire et non équivoque de démissionner, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et attendu que la cassation prononcée sur le premier moyen entraîne par voie de dépendance la cassation des chefs de l'arrêt critiqués par les deuxième et troisième moyens ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 octobre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Condamne M. Y...aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Y...à payer à la SCP Piwnica et Molinié la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf octobre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour Mme X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le contrat de travail à durée indéterminée du 2 juin 2008 avait pris fin par suite de la démission de Mme Y...et que le contrat de travail à durée déterminée du 18 avril 2011 avait pris fin à son terme fixé au 18 octobre 2011, et d'avoir en conséquence débouté Mme Y...de ses demandes ;

AUX MOTIFS QUE la demande de paiement de salaires formée par Fatiha Y...se rapporte à la période allant de juin 2008 à novembre 2011 ; qu'elle doit donc établir qu'il a existé pendant cette période une relation de travail la liant à Abdelkader Y...qui est aussi son époux ; que cette période peut se décomposer en 5 parties :- du 2 juin 2009 au 19 décembre 2008 ; – du 20 décembre 2008 au 3 janvier 2010 ;- du 4 janvier 2010 au 5 novembre 2010 ;- du 6 novembre 2010 au 16 avril 2011 ;- du 17 avril 2011 au mois d'octobre 2011 ; que Fatiha Y...produit un contrat de travail à durée indéterminée daté du 2 juin 2008 et suivant lequel Abdelkader Y...l'a engagée en qualité de cuisinière à temps partiel (15 heures par semaine) ; qu'il résulte des pièces produites aux débats que Fatiha Y...a cessé de travailler au mois de décembre 2008 ; que le couple Fatiha Y...Abdelkader Y...s'était séparé en décembre 2008 ainsi que le prouvent :- la lettre que celle-ci a adressée le 16 décembre 2008 à son époux et par laquelle elle déclare que toute relation est terminée entre eux et que « l'avenir dira si Nadia (sa rivale) sera capable de le seconder dans la vie quotidienne »- la requête en divorce présentée le 20 décembre 2008 par Fatiha Y...; que ces pièces établissent que les relations de travail et de couple étaient intimement liées et que la rupture du couple s'accompagnait nécessairement de la rupture du contrat de travail ; que le départ de Fatiha Y...équivaut donc à une démission et cette démission à mis fin au contrat de travail conclu entre les parties le 2 juin 2008 ; que dès lors, Fatiha Y...ne peut prétendre au paiement de salaires que pour la période du 2 juin 2008 au 19 décembre 2008 (arrêt p. 3) ;

ALORS QUE la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail ; que lorsque le salarié, sans évoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur et lorsqu'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, le juge doit l'analyser en une prise d'acte qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'une démission ; qu'en énonçant que Mme Y...avait cessé de travailler au mois de décembre 2008 et que le couple Fatiha Y...-Abdelkader Y...s'était séparé en décembre 2008, que les relations de travail et de couple étaient intimement liées et que la rupture du couple s'accompagnait nécessairement de la rupture du contrat de travail, pour en déduire que le départ de Mme Y...équivalait à une démission ayant mis fin au contrat de travail conclu entre les parties le 2 juin 2008, la cour d'appel n'a pas caractérisé une volonté claire et non équivoque de Mme Y...de démissionner, en violation des articles L 1231-1, L 1235-1 et L 1237-1 du code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné M. Y...à payer à Mme Y...la somme de 5105, 82 € au titre de salaires restant dus, avec intérêts au taux légal à compter du jour de sa demande et d'avoir débouté Mme Y...du surplus de ses demandes ;

AUX MOTIFS QUE du 20 décembre 2008 au 3 janvier 2010 Fatiha Y...n'établit pas qu'elle a travaillé au sein du restaurant bien que le couple ait repris la vie commune et que l'épouse se soit désistée de sa requête en divorce le 12 mai 2009 ; que l'attestation émanant d'Yves Z...qui déclare « avoir vu régulièrement entre 2008 et 2011 Mme Y...au travail en salle ou en cuisine dans le restaurant Coté Parc » est trop imprécise pour établir la relation de travail précisément du 20 décembre 2008 au 3 janvier 2010 ; que la demande de paiement de salaires pour cette période sera rejetée ; du 4 janvier 2010 au 5 novembre 2010, il n'est pas contesté que Fatiha Y...a travaillé au restaurant Côté Parc et Abdelkader Y...produit une attestation de la chambre des métiers de l'Isère du 7 décembre 2010 dont il résulte que Fatiha Y...avait le statut de conjoint collaborateur ; que l'absence de contrat de travail et le défaut de toutes réclamations de Fatiha Y...contemporaines à cette période font présumer que son statut déclaré de conjoint collaborateur correspondait à la réalité ; que la demande de paiement de salaires sera ici encore rejetée ; du 6 novembre 2010 au 16 avril 2011, Fatiha Y...ne produit aucune pièce établissant qu'elle a travaillé pendant ce temps au restaurant « Côté Parc » ; qu'elle ne peut donc prétendre à aucun salaire pendant cette période (arrêt p. 3 et 4) ;

1°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en affirmant, pour limiter la condamnation de M. Y...à payer à Mme Y...la somme de 5105, 82 € au titre de salaires restant dus avec intérêts au taux légal, que celle-ci n'établissait pas qu'elle avait travaillé au sein du restaurant au cours la période du 20 décembre 2008 au 3 janvier 2010, et ne produisait aucune preuve établissant qu'elle avait travaillé du 6 novembre 2010 au 16 avril 2011, sans examiner l'attestation de M. A...qui indiquait que depuis les années 1982, il déjeunait deux ou trois fois par semaine au restaurant Côté Parc et dans les années 2008, 2009, 2010 et jusqu'à la fin 2011, il avait vu chaque fois Mme Y...travailler en salle ou en cuisine et même quelques fois seule à s'occuper du restaurant, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QU'EN n'établissant pas qu'elle avait travaillé au sein du restaurant au cours de la période du 20 décembre 2008 au 3 janvier 2010, et ne produisait aucune preuve établissant qu'elle avait travaillé du 6 novembre 2010 au 16 avril 2011, sans examiner l'attestation de Mme Nouria B... qui précisait que Mme Y...était présente au restaurant jusqu'en novembre 2011 et qu'elle avait géré le restaurant de juillet à novembre 2011, lorsque M. Y...se trouvait en Algérie, la cour d'appel a derechef méconnu l'article 455 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné de M. Y...à payer à Mme Y...la somme de 5105, 82 € au titre de salaires restant dus avec intérêts au taux légal à compter du jour de sa demande et l'avoir déboutée du surplus de ses demandes ;

AUX MOTIFS QUE du 4 janvier 2010 au 5 novembre 2010, il n'est pas contesté que Fatiha Y...a travaillé au restaurant Côté Parc et Abdelkader Y...produit une attestation de la chambre des métiers de l'Isère du 7 décembre 2010 dont il résulte que Fatiha Y...avait le statut de conjoint collaborateur ; que l'absence de contrat de travail et le défaut de toutes réclamations de Fatiha Y...contemporaines à cette période font présumer que son statut déclaré de conjoint collaborateur correspondait à la réalité ; que la demande de paiement de salaires sera ici encore rejetée (arrêt p 4) ;

ALORS QU'est considéré comme conjoint collaborateur le conjoint du chef d'une entreprise commerciale, artisanale ou libérale qui exerce une activité professionnelle régulière dans l'entreprise, sans percevoir une rémunération et sans avoir la qualité d'associé au sens de l'article1832 du code civil ; qu'en présence d'un contrat de travail à durée indéterminée qui n'est pas rompu, le conjoint du chef d'une entreprise commerciale ne peut avoir le statut de conjoint collaborateur ; qu'en affirmant néanmoins, pour débouter Mme Y...de sa demande en paiement au titre des salaires du 4 janvier 2010 au 5 novembre 2010, que M. Y...produisait une attestation de la chambre des métiers de l'Isère du 7 décembre 2010 dont il résultait que Mme Y...avait le statut de conjoint collaborateur, pour en déduire que l'absence de contrat de travail et le défaut de toutes réclamations de Mme Y..., contemporaines à cette période, faisaient présumer que son statut déclaré de conjoint collaborateur correspondait à la réalité, quand le contrat de travail à durée indéterminée n'avait pas été rompu en l'absence de volonté claire et non équivoque de Mme Y...de démissionner, de sorte que celle-ci ne pouvait avoir le statut de conjoint collaborateur, la cour d'appel a violé les articles L 121-4 et R 121-1 du code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-18548
Date de la décision : 19/10/2017
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 15 octobre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 oct. 2017, pourvoi n°16-18548


Composition du Tribunal
Président : Mme Guyot (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.18548
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award