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11/10/2017 | FRANCE | N°16-21419

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 11 octobre 2017, 16-21419


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 mai 2016), que Jean Y... est décédé le [...] , laissant pour lui succéder son épouse, Mme C... , et leurs deux enfants, Delphine et Pierre-Alain ; que ce dernier a assigné sa mère et sa soeur en partage ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal, ci-après annexé :

Attendu que ce moyen n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident :

Attendu que Mmes C... et Y... font grief à l

'arrêt de rejeter leur demande subsidiaire tendant à voir ordonner le rapport à la succession...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 mai 2016), que Jean Y... est décédé le [...] , laissant pour lui succéder son épouse, Mme C... , et leurs deux enfants, Delphine et Pierre-Alain ; que ce dernier a assigné sa mère et sa soeur en partage ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal, ci-après annexé :

Attendu que ce moyen n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident :

Attendu que Mmes C... et Y... font grief à l'arrêt de rejeter leur demande subsidiaire tendant à voir ordonner le rapport à la succession de Jean Y..., par M. Y..., de l'avantage indirect dont il a bénéficié par la mise à disposition, à titre gratuit, de l'appartement situé [...] , durant la période allant du mois d'août 2000 au mois d'avril 2011, alors, selon le moyen, que tout héritier venant à une succession doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement ; que la jouissance gratuite d'un immeuble peut constituer un avantage indirect rapportable dès lors qu'est établi, d'une part, un appauvrissement du disposant et, d'autre part, son intention de gratifier ; qu'en rejetant la demande tendant au rapport à la succession de l'avantage indirect dont a bénéficié M. Y... par la mise à disposition, à titre gratuit, de l'appartement situé au [...] arrondissement de Paris

pour la période allant du mois d'août 2000 au mois d'avril 2011, au motif inopérant et erroné qu'un commodat n'implique aucune dépossession de la part du prêteur et qu'il serait incompatible avec la qualification d'avantage indirect, la cour d'appel a violé les articles 843 et 893 du code civil ;

Mais attendu que le prêt à usage constitue un contrat de service gratuit, qui confère seulement à son bénéficiaire un droit à l'usage de la chose prêtée mais n'opère aucun transfert d'un droit patrimonial à son profit, notamment de propriété sur la chose ou ses fruits et revenus, de sorte qu'il n'en résulte aucun appauvrissement du prêteur ;

Et attendu qu'ayant retenu que la mise à disposition par Jean Y... à son fils d'un appartement depuis l'année 2000, sans contrepartie financière, relevait d'un prêt à usage, la cour d'appel en a, à bon droit, déduit qu'un tel contrat est incompatible avec la qualification d'avantage indirect rapportable ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Laisse à chacune des parties la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze octobre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour M. Y....

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a dit que monsieur Pierre-Alain Y... doit à madame Z... C... veuve Y... une indemnité d'occupation pour l'appartement du [...] , et dit que le montant de l'indemnité d'occupation sera fixé dans le cadre des opérations de comptes, liquidation et partage devant le notaire, à l'issue du dépôt du rapport.

AUX MOTIFS QUE « sur le paiement d'une indemnité d'occupation, Mme Z... C... veuve Y... et Mme Delphine Y... réclament une indemnité d'occupation entre le mois de niai 2011 et juillet 2014; que M, Pierre-Alain Y... entend préciser que cette indemnité d'occupation n'est pas due à sa mère, usufruitière mais à l'indivision, tant que la succession n'a pas été liquidée en application de l'article 815-10 alinéa 2 du coda civil ; que cependant, en application de l'article 582 du code civil, l'usufruitier a le droit de jouir de toute espèce de fruits que peut produire l'objet dont il a l'usufruit ; que l'indemnité due par l'occupant sans titre est due à l'usufruitier et donc à Mme Z... C... veuve Y... «icone qualité, û compter du 1' mai 2011 jusqu'au 31 juillet 2014; qu'aucune des parties n'a demandé une infirmation du jugement en sa disposition qui a ordonné une expertise notamment sur la valeur locative de l'appartement sis [...] l9ème ; qu'il convient de dire que le montant de l'indemnité d'occupation due à Mme Z... C... veuve Y... sera fixé dans le cadre des opérations de comptes, liquidation et partage devant le notaire, à l'issue du dépôt du rapport de l'expert » ;

ALORS, premièrement, QU'il résulte de l'article 1888 du code civil que lorsqu'aucun terme n'a été convenu pour le prêt d'une chose d'un usage permanent, sans qu'aucun terme naturel soit prévisible, le prêteur est en droit d'y mettre fin à tout moment, à condition qu'il respecte un délai de préavis raisonnable ; que monsieur Pierre-Alain Y... soulignait que c'était à juste titre, en application de ce texte et de l'article 1879 du code civil, que les premiers juges avaient débouté madame Z... C... veuve Y... de sa demande de paiement d'une indemnité pour l'occupation de l'immeuble (conclusions, p. 14 et p. 15) ; qu'en disant que l'exposant devait verser une indemnité d'occupation sans répondre à ce moyen, après avoir simplement constaté que par lettre du 22 mars 2011 madame Z... C... veuve Y... avait décidé de mettre fin au commodat et qu'en sa qualité d'usufruitière l'indemnité d'occupation lui revenait, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS, deuxièmement, QUE madame Z... C... veuve Y... se prévalait de l'article 815-9 du code civil pour prétendre être bénéficiaire d'une indemnité d'occupation (conclusions, p. 5), cependant que monsieur Pierre-Alain Y... invoquait l'article 815-10 du code civil pour lui objecter que l'indemnité d'occupation revenait à l'indivision (conclusions, p. 10) ; qu'en relevant d'office le fondement de l'article 582 du code civil pour retenir que l'indemnité d'occupation revenait à madame Z... C... veuve Y..., sans inviter les parties à s'en expliquer, la cour d'appel a viol le principe de la contradiction et l'article 16 du code de procédure civile. Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour Mmes C... et Y....

Il est fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté la demande subsidiaire tendant à ordonner le rapport à la succession de Jean Y..., par M. Pierre-Alain Y..., de l'avantage indirect dont il a bénéficié par la mise à disposition, à titre gratuit, de l'appartement situé au [...] arrondissement de Paris, durant la période allant du mois d'août 2000 au mois d'avril 2011,

AUX MOTIFS QU'

« un commodat n'implique aucune dépossession de la part du prêteur, de sorte qu'il est incompatible avec la qualification d'avantage indirect ; que les demandes formées par les appelantes à ce titre seront écartées »,

ALORS QUE tout héritier venant à une succession doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement ; que la jouissance gratuite d'un immeuble peut constituer un avantage indirect rapportable dès lors qu'est établi, d'une part, un appauvrissement du disposant et, d'autre part, son intention de gratifier ; qu'en rejetant la demande tendant au rapport à la succession de l'avantage indirect dont a bénéficié M. Pierre-Alain Y... par la mise à disposition, à titre gratuit, de l'appartement situé au [...] arrondissement de Paris pour la période allant du mois d'août 2000 au mois d'avril 2011, au motif inopérant et erroné qu'un commodat n'implique aucune dépossession de la part du prêteur et qu'il serait incompatible avec la qualification d'avantage indirect, la cour d'appel a violé les articles 843 et 893 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 16-21419
Date de la décision : 11/10/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

PRET - Prêt à usage - Caractère gratuit - Droit à l'usage de la chose prêtée - Incompatibilité - Avantage indirect rapportable

SUCCESSION - Rapport - Choses sujettes à rapport - Avantage indirect - Portée

Le prêt à usage constitue un contrat de service gratuit, qui confère seulement à son bénéficiaire un droit à l'usage de la chose prêtée mais n'opère aucun transfert d'un droit patrimonial à son profit, notamment de propriété sur la chose ou ses fruits et revenus, de sorte qu'il n'en résulte aucun appauvrissement du prêteur; qu'il s'ensuit qu'un tel contrat est incompatible avec la qualification d'avantage indirect rapportable


Références :

articles 843 et 893 du code civil

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 18 mai 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 11 oct. 2017, pourvoi n°16-21419, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Batut
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger, SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.21419
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