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05/10/2017 | FRANCE | N°16-23864

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 05 octobre 2017, 16-23864


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 31 juillet 2002, des dommages ont été causés aux installations de la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) du fait d'un éboulement d'une parcelle dépendant du domaine privé de la commune de Breil-sur-Roya (la commune) les surplombant ; que la SNCF a procédé aux travaux de remise en état et de sécurisation ; que, par jugement du 3 novembre 2009, le tribunal administratif de Nice s'est déclaré incompétent pour connaître du litige opposant l

a SNCF à la commune ; que la SNCF, devenue SNCF mobilités, et l'établissem...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 31 juillet 2002, des dommages ont été causés aux installations de la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) du fait d'un éboulement d'une parcelle dépendant du domaine privé de la commune de Breil-sur-Roya (la commune) les surplombant ; que la SNCF a procédé aux travaux de remise en état et de sécurisation ; que, par jugement du 3 novembre 2009, le tribunal administratif de Nice s'est déclaré incompétent pour connaître du litige opposant la SNCF à la commune ; que la SNCF, devenue SNCF mobilités, et l'établissement Réseau ferré de France (RFF), devenu SNCF réseau, ont assigné la commune et son assureur, la société Smacl assurances, en indemnisation de leurs préjudices ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen unique pris en sa première branche annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Vu les articles 455 du code de procédure civile et 1384, alinéa 1, devenu 1242, alinéa 1, du code civil ;

Attendu que, pour condamner la commune et son assureur à verser à la SNCF la somme de 399 270,05 euros en réparation de son préjudice, l'arrêt énonce que la commune ne démontre pas que la garde de la falaise a été transférée à RFF ou à la SNCF et que ces dernières avaient l'usage, le contrôle et la direction de la falaise litigieuse ;

Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions qui faisaient valoir le caractère inaccessible de la falaise et que seul RFF avait l'obligation d'intervenir pour sécuriser les voies, de sorte que la commune étant privée de ses pouvoirs d'usage, de contrôle et de direction sur celle-ci, n'avait pu en conserver la garde, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences des textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la troisième branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 juin 2016, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne les établissements SNCF mobilités et SNCF réseau aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la commune de Breil-sur-Roya et à la société Smacl assurances la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq octobre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour la société Smacl assurances et la commune de Breil-sur-Roya

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR condamné la commune de Breil sur Roya, in solidum avec la société SMACL Assurances, à verser à la SNCF la somme de 399 270,05 euros en réparation de son préjudice ;

AUX MOTIFS QUE les premiers juges ont considéré que la SNCF n'établissait pas que les éboulements proviendraient d'une parcelle comprise dans le domaine privé de la commune ; que la SNCF a fait intervenir un géomètre afin de vérifier la provenance des blocs rocheux objets du litige ; que les plans établis par le géomètre-expert démontrent que les zones de départ de l'éboulement se situent sur la parcelle 170, propriété de la commune de Breil sur Roya ; qu'au regard des pièces versées aux débats et sans qu'il soit nécessaire de recourir à expertise que la SNCF et la société RFF démontrent bien l'origine du sinistre, laquelle se situe sur le domaine privé de la commune de Breil sur Roya ; que pour s'exonérer de sa responsabilité, la commune soutient que c'est à la société RFF de prendre des mesures afin de sécuriser sa voie ; que, cependant, en sa qualité de gardienne de la falaise, la commune est tenue sur la base d'une présomption de responsabilité, dont elle ne peut se défaire qu'en démontrant la force majeure ou la faute de la victime ; que la présomption de responsabilité établie par l'article 1384, alinéa 1er, à l'encontre de celui qui a sous sa garde la chose inanimée qui a causé un dommage à autrui ne peut en effet être détruite que par la preuve d'un cas fortuit ou de force majeure ou d'une cause étrangère qui ne lui soit pas imputable ; qu'il ne suffit pas de prouver qu'il n'a commis aucune faute ou que la cause du fait dommageable est demeurée inconnue, seule l'imprévisibilité et l'irrésistibilité sont une cause d'exonération de la responsabilité de plein droit qui pèse sur le gardien ; que le seul fait que la commune n'ait pas les moyens financiers de faire cesser les dangers et d'entretenir ses terrains n'est ainsi pas de nature à l'exonérer de sa responsabilité qui ne peut être écartée qu'en cas de force majeure, ce qui n'est pas le cas ; qu'il est par ailleurs constant que la victime d'un dommage causé par une chose peut invoquer la responsabilité résultant de l'article 1384, alinéa 1er, à l'encontre du gardien de la chose instrument du dommage, sans que puisse lui être opposé son acceptation des risques, le comportement de la victime n'étant ni imprévisible ni irrésistible, il ne peut être constitutif d'un cas de force majeure exonératoire pour le gardien ; que si la mission de la société RFF inclut la sécurisation de son réseau en vue de la circulation ferroviaire et des personnes, il ne lui appartient pas de supprimer le risque provenant d'une propriété riveraine de son domaine ; que la commune de Breil sur Roya ne démontre pas que la garde de la falaise a été transférée à la société RFF ou à la SNCF et que ces dernières avaient l'usage, le contrôle et la direction de la falaise litigieuse ; qu'elle ne démontre pas que l'éboulement de la falaise était inévitable puisque des mesures de sécurité ont été depuis réalisées et que ces mesures si elles avaient été prises par la commune auraient empêché la chute de blocs qui a provoqué le dommage ; que la commune de Breil sur Roya sera déclarée responsable du sinistre litigieux sur le fondement de l'article 1384 du code civil ;

ALORS, 1°) QUE le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en se fondant exclusivement sur le rapport du géomètre-expert mandaté par la SNCF, non établi contradictoirement, pour dire que l'origine de l'éboulement ayant provoqué le dommage se situait sur une parcelle appartenant au domaine privé de la commune de Breil sur Roya, qui en avait expressément contesté les conclusions, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

ALORS, 2°), QUE la garde est caractérisée par l'usage, le contrôle et la direction de la chose ; qu'il y a transfert de garde lorsqu'un tiers a reçu toute possibilité de prévenir luimême le dommage que la chose peut causer ; qu'en se bornant à affirmer que la commune ne démontrait pas que la garde de la falaise avait été transférée à la société RFF ou la SNCF, sans répondre au moyen tiré de ce que le caractère inaccessible de la falaise la privait de ses pouvoirs d'usage, de contrôle et de direction, qui seuls pouvaient caractériser la garde, tandis que la société RFF qui, avec la SNCF, profitait exclusivement du passage de la voie ferrée en contrebas de la falaise, avait, quant à elle, l'obligation d'intervenir afin de prévenir les risques d'éboulement et était seule maître du choix et de l'étendue de la protection à assurer, de sorte qu'elle avait acquis les pouvoirs d'usage, de contrôle et de direction sur la falaise, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS, 3°) et en tout état de cause, QUE la garde est caractérisée par l'usage, le contrôle et la direction de la chose ; qu'en se bornant à affirmer que la commune, en sa qualité de propriétaire, avait la garde de la falaise, sans rechercher, comme elle y avait été invitée, si faute de pouvoir accéder à la falaise et d'y procéder à une quelconque intervention, la commune ne pouvait avoir ni l'usage, ni le contrôle ni la direction de la falaise, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1384, alinéa 1er, devenu l'article 1242, alinéa 1er du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 16-23864
Date de la décision : 05/10/2017
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 30 juin 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 05 oct. 2017, pourvoi n°16-23864


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Odent et Poulet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.23864
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