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20/09/2017 | FRANCE | N°16-12939

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 20 septembre 2017, 16-12939


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 17 décembre 2015), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 4 novembre 2014, pourvoi n° 13-23.130), que par un acte du 3 décembre 2009, la caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Languedoc (la caisse) a consenti à la société Uniconfort (la société) une avance de trésorerie, garantie par le cautionnement de M. X..., donné par un acte séparé non daté, "édité" le 23 novembre 200

9 ; que la société ayant été mise en liquidation judiciaire, la caisse a assigné e...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 17 décembre 2015), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 4 novembre 2014, pourvoi n° 13-23.130), que par un acte du 3 décembre 2009, la caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Languedoc (la caisse) a consenti à la société Uniconfort (la société) une avance de trésorerie, garantie par le cautionnement de M. X..., donné par un acte séparé non daté, "édité" le 23 novembre 2009 ; que la société ayant été mise en liquidation judiciaire, la caisse a assigné en paiement la caution, qui lui a opposé la nullité de son engagement ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la caisse la somme de 483 148,78 euros, outre intérêts, et de rejeter l'ensemble de ses demandes alors, selon le moyen :

1°/ que toute modification de la formule de cautionnement imposée par la loi entraîne la nullité du cautionnement dès lors qu'elle rend sa compréhension plus difficile pour la caution ; qu'en ayant jugé du contraire quant à la mention manuscrite relative à la solidarité, la cour d'appel a violé les articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation ;
2°/ que la durée de l'engagement de la caution est un élément essentiel de telle sorte que la caution doit pouvoir déterminer avec précision la durée de son engagement pour que les dispositions de l'article L. 341-2 du code de la consommation soient respectées ; qu'en décidant que "l'absence de datation de l'acte de caution alors même qu'il a été souscrit en garantie du contrat de "plafond de trésorerie" édité le 23 novembre 2009 et accepté le 3 décembre 2009 par la société Uniconfort, n'affecte pas sa validité et ne lui confère pas un caractère indéterminé, puisque sa durée a été expressément limitée à 48 mois", la cour d'appel a violé l'article L. 341-2 du code de la consommation ;

3°/ que constitue un soutien abusif le fait pour le créancier de demander des garanties disproportionnées eu égard au montant de la dette du débiteur ; qu'en décidant que les garanties réclamées par le Crédit agricole n'étaient pas disproportionnées alors qu'elle a constaté que la dette de la société Uniconfort était de 500 000 euros remboursable sur 24 mois, que le Crédit agricole a réclamé non seulement le cautionnement de M. X... à hauteur de 600 000 euros sur 48 mois, mais aussi le nantissement du fonds de commerce de la société Uniconfort, la cour d'appel, qui n'a pas indiqué en quoi de telles garanties étaient proportionnées compte tenu des relations des parties, des usages ou encore des normes professionnelles, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 650-1 du code de commerce ;

Mais attendu, d'une part, qu'après avoir énoncé que le non-respect des dispositions relatives aux mentions manuscrites exigées par les articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 14 mars 2016, est sanctionné par la nullité de l'acte de cautionnement, à moins qu'il ne s'agisse d'imperfections qui n'affectent ni le sens ni la portée des mentions légales, l'arrêt retient que M. X... a reproduit intégralement la mention manuscrite exigée par l'article L. 341-2, en évoquant, en sus, le caractère solidaire de l'engagement de caution et en déduit exactement que l'ajout du terme "solidaire" dans la mention manuscrite prescrite par l'article L. 341-2 du code de la consommation ne modifie pas le sens et la portée de l'engagement de la caution ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant relevé que l'acte de cautionnement avait été souscrit en garantie du contrat de "plafond de trésorerie" "édité" le 23 novembre 2009 et accepté le 3 décembre 2009, donc conclu par la société à cette dernière date, et dès lors que l'article L. 341-2 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 14 mars 2016, n'impose pas la mention manuscrite de la date de la souscription du cautionnement mais seulement de sa durée, la cour d'appel, qui a fait ressortir, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, que le cautionnement avait été souscrit à la date du crédit garanti puis relevé que la durée du cautionnement de M. X... avait été fixée à 48 mois, a légalement justifié sa décision ;

Et attendu, enfin, que, lorsqu'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte, les créanciers ne peuvent être tenus pour responsables des préjudices subis du fait des concours consentis qu'en cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou de disproportion des garanties prises, et si les concours consentis sont en eux-mêmes fautifs ; qu'ayant exactement relevé que l'application des dispositions de l'article L. 650-1 du code de commerce oblige celui qui s'en prévaut à prouver, en sus de la fraude, de l'immixtion ou de la disproportion des garanties, que les concours octroyés par le créancier professionnel étaient fautifs, la cour d'appel, qui a retenu que M. X... invoquait la disproportion des garanties sans apporter la preuve d'un concours fautif, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à la caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Languedoc la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt septembre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils, pour M. X...

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné M. X... à payer au Crédit Agricole la somme de 483 148,78 euros augmentée des intérêts au taux contractuel de 1,73 % l'an, à compter du 7 janvier 2011 et de l'avoir débouté de l'ensemble de ses demandes.

AUX MOTIFS QUE « il est de principe que le non respect des dispositions relatives aux mentions manuscrites, exigées par les articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation, est sanctionné par la nullité automatique de l'acte, à moins qu'il ne s'agisse d'imperfections qui n'affectent ni le sens, ni la portée de la mention ; M. X... invoque le non-respect du formalisme légal ; dans l'acte de caution, M. X... a écrit en tête de paragraphe la mention suivante : « je reconnais être parfaitement informé de la situation tant juridique que financière du cautionné » ; A la suite de cette mention, il a reproduit intégralement la mention manuscrite exigée par l'article L. 341-2 du code de la consommation, en évoquant, en sus, le caractère solidaire de l'engagement de caution ; la mention relative à sa connaissance de la situation financière de la société Uniconfort, apposée avant la formule légale intégralement reproduite et l'évocation du caractère solidaire du cautionnement, ne modifient pas le sens et la portée de celle-ci ni n'en rendent sa compréhension plus difficile pour la caution ; c'est donc à tort que le premier juge a considéré que le formalisme de l'article L. 341-2 du code de la consommation n'avait pas été respectée ; en revanche, la mention manuscrite relative à la solidarité diffère effectivement de celle prescrite par l'article L. 341-3 du même code, en ce qu'elle est incomplète puisqu'elle ne reproduit pas la formule : « je m'engage à rembourser le créancier sans pourvoir exiger qu'il poursuive préalablement le débiteur ». Cette non-conformité n'a pas permis à la caution d'apprécier exactement les conséquences de la solidarité et de la renonciation au bénéfice de discussion. Le sens et la portée de la mention en sont affectés ; toutefois, l'irrégularité de cette mention ne prive pas le cautionnement de sa validité mais a pour effet de priver la caisse du bénéfice d'un engagement solidaire de la caution, laquelle demeure tenue comme caution simple, ce qui, en l'espèce, est sans effet, puisque la société Uniconfort a été placée en liquidation judiciaire ; l'absence de datation de l'acte de caution alors même qu'il a été souscrit en garantie du contrat de « plafond de trésorerie » édité le 23 novembre 2009 et accepté le 3 décembre 2009 par la société Uniconfort, n'affecte pas sa validité et ne lui confère pas un caractère indéterminé, puisque sa durée a été expressément limitée à 48 mois ; en conséquence, l'engagement de caution souscrit par M. X... sera tenu pour valable et le jugement sera infirmé ; en application des dispositions de l'article L. 650-1 du code de commerce, issue de la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005, applicables aux procédures collectives ouvertes après le 1er janvier 2006, lorsqu'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte, les créanciers ne peuvent être tenus pour responsables des préjudices subis du fait des concours consentis, sauf cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou de disproportion des garanties prises, que si les concours consentis sont en eux même fautifs. Pour le cas où la responsabilité d'un créancier est reconnue, les garanties prises en contrepartie de ces concours sont nulles ; l'application de ces dispositions légales oblige celui qui s'en prévaut à prouver, en sus de la fraude, l'immixtion ou la disproportion des garanties, que les concours octroyés par le créancier professionnel étaient fautifs en ce qu'ils ont été fournis à une société dont la situation était irrémédiablement compromise ou en ce qu'ils ont été constitutifs de moyens ruineux ; M. X... qui invoque la disproportion des garanties sans apporter la preuve d'un concours fautif n'est pas fondé à se prévaloir de ces dispositions légales ; en tout état de cause, il n'apparaît nullement que le nantissement du fonds de commerce de la société Uniconfort ainsi que le cautionnement souscrit par M. X..., dirigeant et associé détenant 50 % du capital social de cette société, constituaient des garanties excessives et non proportionnées au concours financiers d'un montant de 500 000 euros, consenti à titre d'avance de trésorerie, dans l'attente du remboursement de crédits de TVA ; de telles garanties s'inscrivaient dans un schéma classique au regard de ce montant, étant précisé que la société Uniconfort avait bénéficié par le passé de plusieurs concours du même type ; l'exception de nullité tirée de l'application de l'article L. 650-1 du code de commerce sera rejetée ; la banque a déclaré au passif de la procédure collective une créance de 483 148,78 euros, qui n'a donné lieu à aucune contestation ; M. X... n'apporte pas la preuve lui incombant du versement par la société Uniconfort d'une somme de 82 397,32 euros venant en déduction du solde réclamé et ses demandes faites en juin et octobre 2010 tendant à affecter au remboursement du prêt, des créances de TVA, ne pouvaient pas s'imposer à la caisse dans la mesure où celles-ci avaient déjà fait l'objet d'avances « Dailly » par la voie de l'escompte ; en conséquence, M. X... sera débouté de l'ensemble de ses prétentions et condamné à payer à la caisse la somme de 483 148,78 euros, augmentée des intérêts au taux contractuel de 1,73 % l'an, à compter de la mise en demeure du 7 janvier 2011, en application de l'article 1153 du code civil. La caisse n'est pas fondée à solliciter le paiement d'intérêts contractuels antérieurs à cette date ».

ALORS, D'UNE PART, QUE toute modification de la formule de cautionnement imposée par la loi entraine la nullité du cautionnement dès lors qu'elle rend sa compréhension plus difficile pour la caution ; qu'en ayant jugé du contraire quant à la mention manuscrite relative à la solidarité, la Cour d'appel a violé les articles L 341-2 et L 341-3 du code de la consommation ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE la durée de l'engagement de la caution est un élément essentiel de telle sorte que la caution doit pouvoir déterminer avec précision la durée de son engagement pour que les dispositions de l'article L 341-2 du code de la consommation soient respectées ; qu'en décidant que « l'absence de datation de l'acte de caution alors même qu'il a été souscrit en garantie du contrat de « plafond de trésorerie » édité le 23 novembre 2009 et accepté le 3 décembre 2009 par la société Uniconfort, n'affecte pas sa validité et ne lui confère pas un caractère indéterminé, puisque sa durée a été expressément limitée à 48 mois », la Cour d'appel a violé l'article L 341-2 du code de la consommation ;

ALORS, ENFIN, QUE constitue un soutien abusif le fait pour le créancier de demander des garanties disproportionnées eu égard au montant de la dette du débiteur ; qu'en décidant que les garanties réclamées par le Crédit Agricole n'étaient pas disproportionnées alors qu'elle a constaté que la dette de la société Uniconfort était de 500 000 euros remboursable sur 24 mois, que le Crédit Agricole a réclamé non seulement le cautionnement de M. X... à hauteur de 600 000 euros sur 48 mois, mais aussi le nantissement du fonds de commerce de la société Uniconfort, la Cour d'appel, qui n'a pas indiqué en quoi de telles garanties étaient proportionnées compte tenu des relations des parties, des usages ou encore des normes professionnelles, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L 650-1 du code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 16-12939
Date de la décision : 20/09/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 17 décembre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 20 sep. 2017, pourvoi n°16-12939


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Hémery et Thomas-Raquin, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.12939
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