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20/09/2017 | FRANCE | N°15-27488

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 20 septembre 2017, 15-27488


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Orange que sur le pourvoi incident relevé par la société Chaska productions ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 19 octobre 2000, la société France Télécom, devenue Orange (la société Orange), a embauché Mme Roa X...(Mme X...) en qualité de cadre supérieur « responsable artistique » ; qu'à compter de septembre 2001, la société Orange a commandé diverses prestations artistiques à la société Chaska productions (la sociétÃ

© Chaska) ; qu'estimant que les liens et intérêts patrimoniaux existant entre Mme X...et...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Orange que sur le pourvoi incident relevé par la société Chaska productions ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 19 octobre 2000, la société France Télécom, devenue Orange (la société Orange), a embauché Mme Roa X...(Mme X...) en qualité de cadre supérieur « responsable artistique » ; qu'à compter de septembre 2001, la société Orange a commandé diverses prestations artistiques à la société Chaska productions (la société Chaska) ; qu'estimant que les liens et intérêts patrimoniaux existant entre Mme X...et la société Chaska lui avaient été dissimulés et qu'à la faveur de cette dissimulation Mme X...l'avait incitée à contracter avec la société Chaska sans recourir à une procédure d'appel d'offres, la société Orange a déposé une plainte pénale, avec constitution de partie civile, et a licencié Mme X...pour faute grave en novembre 2003 ; que par lettre du 29 décembre 2003, la société Orange a mis un terme à la relation commerciale nouée avec la société Chaska, sans préavis ; qu'après avoir vainement mis en demeure la société Orange de lui régler les sommes qu'elle estimait lui être dues au titre des prestations effectuées, la société Chaska l'a assignée en paiement des sommes dues et en réparation du préjudice résultant de la rupture brutale de leur relation commerciale ; que la société Orange a reconventionnellement demandé la nullité des contrats conclus avec la société Chaska ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu que pour rejeter la demande d'annulation des contrats fondée sur le dol, l'arrêt constate que Mme X..., qui a été recrutée le 19 octobre 2000 en qualité de responsable artistique, est demeurée gérante de la société Chaska après son embauche par la société Orange, pendant plusieurs mois, cumulant ainsi ses fonctions de salariée de la société Orange et de gérante de la société Chaska du 19 octobre 2000 au 2 juillet 2001 ; qu'il retient que les contrats litigieux ont été conclus entre septembre 2001 et septembre 2003, cependant que Mme X...détenait, au sein de la société Chaska, une participation minoritaire de 10 % du capital ; qu'il relève que la société Orange pouvait aisément en avoir connaissance par la consultation de l'extrait K bis de la société Chaska, de sorte que cet élément ne peut caractériser une réticence dolosive de la part de cette société ; qu'il ajoute que les seuls témoignages des gérantes de droit successives de la société Chaska, qui indiquent n'avoir été que des « gérantes de paille », sont insuffisants à établir que Mme X...en était alors l'animatrice, de sorte que la dissimulation de ce qu'elle en assurait la gestion de fait n'est pas démontrée ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la société Orange se prévalait dans ses conclusions d'autres éléments de preuve, en produisant, notamment, des constatations, des déclarations et des expertises, intervenues au cours des instances pénale, civile et prud'homale ayant opposé la société Orange à Mme X...et faisant état de cette gérance de fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Sur le second moyen du même pourvoi :
Vu l'article 624 du code de procédure civile ;
Attendu que la cassation prononcée sur le premier moyen du pourvoi principal entraîne la cassation, par voie de conséquence, du chef de dispositif critiqué par le moyen ;
Et sur les premier et second moyens du pourvoi incident :
Vu l'article 624 du code de procédure civile ;
Attendu que la cassation prononcée sur le premier moyen du pourvoi principal entraîne la cassation, par voie de conséquence, du chef de dispositif critiqué par ces moyens ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 septembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ; Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt septembre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Orange.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR rejeté la demande de la société ORANGE tendant à l'annulation des contrats conclus avec la société CHASKA PRODUCTIONS, et D'AVOIR en conséquence condamné la SA ORANGE à payer à la SARL CHASKA PRODUCTIONS la somme de 97. 846 euros, avec intérêts au taux appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente, majoré de 10 %, et ce à compter du 31 juillet 2002 pour la somme de 1. 000, 00 euros TTC, du 17 mai 2003 pour la somme de 13. 126, 00 euros TTC, et du 1er septembre 2003 pour la somme de 83. 720, 00 euros TTC, ordonné la capitalisation des intérêts en application de l'article 1154 du code civil, et condamné la SA ORANGE à payer à la SARL CHASKA PRODUCTIONS la somme de 8. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à prendre en charge les dépens ;
AUX MOTIFS QUE « Sur la nullité des contrats : qu'Orange soutient que son consentement aux contrats a été vicié par le silence coupable de Madame X...sur ses liens et intérêts patrimoniaux avec la société Chaska, devenue prestataire exclusif d'Orange dans le domaine artistique et conclut à la nullité de l'intégralité des 14 contrats conclus entre Orange et Chaska durant leur relation d'affaires (…) Sur le dol : qu'aux termes de l'article 1116 du code civil : " le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles qu'il est évident que sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé " ; que le dol peut être constitué par le silence d'une partie dissimulant à son cocontractant un fait qui, s'il avait été connu de lui, l'aurait empêché de contracter ; qu'il est constant que Madame X...a été recrutée, le 19 octobre 2000, par Orange en qualité de responsable artistique de son Studio Créatif ; qu'elle est demeurée gérante de Chaska après son embauche pendant plusieurs mois et a donc cumulé ses fonctions de salariée d'Orange et de gérante de Chaska du 19 octobre 2000 au 2 juillet 2001 ; que les contrats litigieux ont été conclus entre septembre 2001 et septembre 2003 alors que Madame Roa X... détenait, au sein de Chaska, une participation minoritaire de 10 % du capital ; qu'Orange invoque les dissimulations de Madame X...concernant sa position de gérante de fait de la société Chaska ; que les seuls témoignages de Mesdames Y..., gérante de droit de Chaska du 2 juillet 2001 au 18 mars 2003, et Maloiseau, gérante de droit du 18 mars à décembre 2003, qui indiquent n'avoir été que des « gérantes de paille », sont insuffisants établir que Madame X...était, sous les mandats de ces dernières, l'animatrice de Chaska, point que conteste l'intéressée ; que la dissimulation de ce que [Madame Roa-X...] assurait la gestion de fait de Chaska et n'est donc nullement démontrée ; que le seul point non discuté, à savoir la participation de Madame X...au capital de Chaska à hauteur de 10 %, dont Orange pouvait aisément avoir connaissance par la consultation de l'extrait K bis de Chaska, ne peut caractériser une réticence dolosive de Chaska ; Sur l'erreur : que l'article 1110 du code civil prévoit que « l'erreur n'est une cause de nullité de la convention que lorsqu'elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l'objet. Elle n'est point une cause de nullité, lorsqu'elle ne tombe que sur la personne avec laquelle on a intention de contracter, à moins que la considération de cette personne ne soit la cause principale de la convention » ; que Orange prétend avoir été victime d'une erreur sur la personne de la société Chaska dans la mesure où cette dernière constituait un simulacre de société, dépourvue de moyen propre, de compétence ou de qualification pour exécuter elle-même les prestations demandées ; que toutefois la considération de la personne de Chaska n'est pas la cause principale de la convention, aucune clause d'intuitu personae n'étant stipulée dans les contrats rédigés par Orange ; qu'aux termes des conventions conclues, Orange n'a pas exigé que son cocontractant dispose d'une équipe pluridisciplinaire ; qu'il n'est par ailleurs pas discuté que les deux salariées de Chaska intervenues pour l'exécution des contrats, Mesdames Z...et Quemener, dont il est indifférent qu'elles aient eu le titre d'« assistantes », étaient connues des responsables d'Orange et, diplômée la première de l'Ecole des beaux-arts de Bordeaux, la seconde de l'Ecole des beaux-arts de Cergy-Pontoise, disposaient de toute la compétence technique requise ; que le recours de Chaska à un sous-traitant ne saurait constituer la preuve de l'incompétence de Chaska en vue de la réalisation des prestations commandées, prestations dont Orange n'a d'ailleurs, à aucun moment, contesté la qualité ; Qu'en conséquence, la Cour infirmera le jugement entrepris et déboutera Orange de sa demande de nullité des contrats » ;
ET AUX MOTIFS QUE « Sur la demande de paiement présentée par Chaska : que Chaska réclame le paiement de sommes dues au titre des quatre contrats suivants : contrat n° 42439640 en date du 27 janvier 2003 : contrat portant sur la réalisation des tests utilisateurs sur la maquette du produit « Smart Web » ; somme restant due : 13. 126, 00 euros TTC ;- contrat n° 021 B 855 ; somme restant due : 1. 000, 00 euros TTC ;- contrat n° 2B06498 basé sur un devis du 15 mars 2002 : contrat portant sur la location de matériel informatique et de rétroprojecteur sur mobilier interactif à partir des caractéristiques techniques fournies par Orange ; somme restant due : 36. 328, 50 euros TTC ;- contrat n° 42439642 du 26 janvier 2003 : somme restant due 83. 720, 00 euros TTC ; que la somme réclamée au titre du contrat n° 021 B 855 (1. 000, 00 euros TTC) n'est pas contestée ; Que, sur le contrat n° 42439640 en date du 27 janvier 2003 portant sur le produit « Smart Web », il est constant que la prestation commandée a été réalisée, le rapport d'étude ayant été remis à France Telecom le 9 septembre 2003 ; qu'Orange se borne à faire état d'une critique non articulée, aux termes de laquelle « le mémoire technique livré par le sous-traitant de la société CHASKA PRODUCTIONS ne correspondait pas à ce qui était indiqué à l'annexe technique du contrat signé par les parties notamment en terme d'expertise pour déterminer l'évolution conceptuelle, graphique et fonctionnelle du produit », grief général et étayé d'aucun élément précis, insusceptible de déterminer en quoi Chaska aurait manqué à sa mission ; que, si, par ailleurs, l'établissement de ce rapport d'étude a été sous-traité à l'association) O (- ce que Chaska ne conteste pas-en violation de l'article 16. 2 du contrat, ce seul élément n'est pas de nature à justifier un refus de paiement de la prestation réalisée, untel refus étant hors de proportion avec le manquement relevé par Orange ; que la somme de 13. 126, 00 euros TTC est, dans ces conditions, due ; Que, sur le contrat n° 42439642 du 26 janvier 2003, Orange a identifié ce contrat, pour un montant de 70. 000, 00 euros HT, dans la liste des contrats en cours qu'elle a établie lors du licenciement de Madame X...(pièce n° 65 communiquée par Chaska) ; qu'elle ne saurait donc soutenir qu'aucune commande en ce sens n'a été passée par Orange ; que la somme réclamée de 83. 720, 00 euros TTC est en conséquence due ; (…) qu'en conséquence, la Cour réformera la décision déférée et condamnera Orange à payer à Chaska la somme de 97. 846, 00 euros, avec intérêts majorés, prévus l'article L. 441-6 1 du code de commerce, au taux appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente, majoré de 10 %, et ce à compter du 31 juillet 2002 pour la somme de 1. 000, 00 euros TTC, du 17 mai 2003 pour la somme de 13. 126, 00 euros TTC et du 1 er septembre 2003 pour la somme de 83. 720, 00 euros TTC ; qu'il sera fait droit à la demande de capitalisation des intérêts en application de l'article 1154 du code civil ; (…) que l'équité commande de condamner Orange à payer à Chaska la somme de 8. 000, 00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile » ;

1°) ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'au soutien de sa demande d'annulation pour dol des contrats conclus avec la société CHASKA PRODUCTIONS, dont elle soutenait que la gérante de fait était Madame Roa-X..., embauchée par ORANGE en qualité de responsable artistique en octobre 2000, l'exposante se prévalait, non seulement des déclarations de Mesdames Y...et A..., gérantes de droit successives de la société CHASKA PRODUCTIONS, qui avaient indiqué n'avoir jamais exercé la direction de cette société dont la gestion avait été dans les faits assurée par Madame X..., mais également du procès-verbal d'interrogatoire de Madame X..., au cours duquel cette dernière avait admis avoir signé des documents intéressant la société CHASKA PRODUCTIONS, notamment des contrats conclus avec la société ORANGE ; que l'exposante invoquait également l'expertise graphologique effectuée lors de l'instruction pénale qui avait permis de démontrer « que les signatures de Madame Y...et de Mademoiselle A...[avaient] été imitées lors de la signature de contrats de prestations de services, de chèques, des procès-verbaux d'assemblées générales, ou encore sur des procurations (pièce n° 54) » (conclusions d'appel de la société ORANGE, p. 17, 3ème § ; p. 20), l'expertise graphologique qu'elle avait confiée à Madame B..., qui était parvenue aux mêmes conclusions (ses conclusions d'appel, p. 11) ainsi que l'arrêt de la Cour d'appel de PARIS du 26 septembre 2013, devenu définitif, ayant jugé que Madame Roa-X...avait exercé la gérance de fait de la société CHASKA PRODUTIONS et avait dissimulé cette circonstance à la société ORANGE, en se fondant notamment sur les témoignages « de Mme C...et JOURDE, respectivement contrôleur de gestion et juriste chez FRANCE TELECOM, et celle de M. D..., fonctionnaire de police en détachement chez FRANCE TELECOM, qui ont rencontré Mme Z...et Mme Y..., lesquelles leur ont confirmé que Mme Roa X...assurait la gérance de fait de la société », et le « courriel envoyé par Mme Y...au cabinet-comptable de CHASKA (« Par rapport à vos questions, je les transmets à Mme Roa X...car je connais pas la nature des faits ni j'ai pas les factures. Elle est la seule personne à pouvoir vous répondre ») » (conclusions d'appel de la société ORANGE, p. 18-19) ; qu'en retenant, pour débouter la société ORANGE de sa demande d'annulation des contrats conclus avec la société CHASKA PRODUCTIONS, que « les seuls témoignages de Mesdames Y..., gérante de droit de CHASKA du 2 juillet 2001 au 18 mars 2003, et A..., gérante de droit du 18 mars à décembre 2003, qui indiquent n'avoir été que des « gérantes de paille », sont insuffisants établir que Madame X...était, sous les mandats de ces dernières, l'animatrice de CHASKA, point que conteste l'intéressée », quand la société ORANGE invoquait d'autres éléments de preuve à l'appui de ses prétentions, qu'il lui incombait d'examiner, la Cour d'appel a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE la société ORANGE faisait valoir (ses conclusions d'appel, p. 10-11 ; p. 18-19) qu'il résultait de l'arrêt devenu définitif rendu par la Cour d'appel de PARIS le 26 septembre 2013, à l'occasion de l'instance prud'homale ayant opposé la société ORANGE à Madame Roa-X..., que cette dernière avait dissimulé à son employeur ses fonctions de gérante de fait de la société CHASKA PRODUCTIONS ; que pour statuer de la sorte, la Cour d'appel s'était en particulier fondée, outre sur les déclarations en ce sens de Mesdames Y...et A..., sur les témoignages « de Mme C...et JOURDE, respectivement contrôleur de gestion et juriste chez FRANCE TELECOM, et celle de M. D..., fonctionnaire de police en détachement chez FRANCE TELECOM, qui ont rencontré Mme Z...et Mme Y..., lesquelles leur ont confirmé que Mme Roa X...assurait la gérance de fait de la société », sur le « courriel envoyé par Mme Y...au cabinet-comptable de CHASKA (« Par rapport à vos questions, je les transmets à Mme Roa X...car je connais pas la nature des faits ni j'ai pas les factures. Elle est la seule personne à pouvoir vous répondre ») », ainsi que sur le « rapport graphologique produit par la société FRANCE TELECOM montrant que de nombreuses signatures attribuées à Mme Y...sont en réalité de la main de Mme Roa X..., ce que du reste celle-ci a reconnu lors d'une audition par le juge d'instruction le 14 décembre 2005 » ; qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, s'il ne résultait pas des éléments retenus par l'arrêt de la Cour d'appel de PARIS du 26 septembre 2013 la preuve de ce que Madame Roa-X...avait dans les faits exercé la gérance de la société CHASKA PRODUCTIONS, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1108 et 1116 du code civil ;
3°) ALORS QUE la société ORANGE faisait valoir qu'une expertise graphologique qu'elle avait confiée à Madame B..., expert en écriture près la Cour d'appel de VERSAILLES, avait permis de démontrer que de nombreux contrats et bons de commande n'avaient pas été signés par Madame Y..., gérante de droit de la société, mais par Madame Roa-X...(conclusions d'appel de la société ORANGE, p. 11 ; p. 19) ; qu'elle soutenait également qu'au terme d'une autre expertise, effectuée dans le cadre de la procédure pénale diligentée sur la plainte avec constitution de partie civile de l'exposante, l'expert graphologue était également parvenu à la conclusion que de très nombreux documents dont la signature avait été attribuée à Madame Y...avaient en réalité été signés par Madame Roa-X...(p. 17) ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen et d'examiner les rapports d'expertise régulièrement versés aux débats, la Cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°) ALORS QUE à l'appui de sa demande d'annulation des contrats qu'elle avait conclus avec la société CHASKA PRODUCTIONS, la société ORANGE invoquait, non seulement une erreur sur la personne de son cocontractant, au sens de l'article 1110 du code civil (ses conclusions d'appel, p. 38), mais également l'existence de manoeuvres commises par Madame Roa-X..., qu'elle avait embauchée en qualité de responsable artistique, qui l'avait incitée à contracter, sans recours à une procédure d'appel d'offres, à la société CHASKA PRODUCTIONS, alors que celle-ci ne disposait d'aucun moyens propres (locaux, ligne téléphonique, salariés) et n'exerçait aucune activité réelle, se contentant de sous-traiter les prestations qui lui étaient confiées, au mépris de l'interdiction faite dans les contrats conclus avec la société ORANGE (ses conclusions d'appel, p. 20 à 26), et en surfacturant ses prestations (p. 24 à 26) ; qu'en retenant que la société ORANGE prétendait avoir été victime d'une erreur sur la personne de la société CHASKA PRODUCTIONS, qu'elle a écartée au motif que les contrats en cause n'avaient pas été conclus intuitu personae, et que les deux salariées intervenues pour l'exécution des contrats disposaient des compétences techniques requises, quand l'exposante fondait également sa demande sur l'existence de manoeuvres dolosives de la part de Madame Roa X..., la Cour d'appel, qui a dénaturé les conclusions de la société ORANGE, a méconnu les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
5°) ALORS QUE le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté ; qu'en l'espèce, la société ORANGE faisait valoir (ses conclusions d'appel, p. 20) que Madame Roa-X..., qu'elle avait embauchée comme responsable artistique, qui avait en cette qualité « le pouvoir de choisir et de proposer des prestataires à la direction », ainsi qu'elle l'avait reconnu lors de son interrogatoire par le juge d'instruction, lui avait présenté la société CHASKA PRODUCTIONS comme une entreprise « compétente, souple, réactive, et ayant une expertise dans l'événementiel », alors que cette dernière n'était qu'une coquille vide ne disposant d'aucun moyens propres, et n'exerçant aucune activité réelle, puisqu'elle avait systématiquement recours à la sous-traitance, en violation de l'interdiction faite dans les contrats conclus avec la société ORANGE, pour effectuer les prestations en cause ; qu'elle soulignait en outre que l'expertise réalisée dans le cadre de l'instruction pénale avait conclu que le montant des factures de la société CHASKA PRODUCTIONS était disproportionné au regard des prestations réalisées et qu'il était « trois fois supérieurs aux coûts engagés par la société CHASKA » (p. 24-25) ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, s'il ne résultait de ces éléments de fait que la société ORANGE avait été incitée par Madame Roa-X...à contracter avec la société CHASKA PRODUCTIONS, dans la croyance erronée de la qualité des prestations réalisées par cette société, mais en réalité à des conditions désavantageuses, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1108, 1110 et 1116 du code civil ;
6°) ALORS QUE les contrats n° 42439640 et n° 42439642 conclus entre la société ORANGE et la société CHASKA PRODUCTIONS comportait chacun un article 16. 2 stipulant « le présent contrat étant conclu intuitu personae, aucune sous-traitance ne pourra avoir lieu. En cas de non-respect de cette interdiction, France Télécom R et D pourra résilier le présent contrat par lettre recommandée avec accusé de réception sans que le cocontractant puisse prétendre à une indemnité d'aucune sorte et nonobstant les dommages et intérêts auxquels France Télécom R et D pourrait prétendre » ; qu'en retenant, pour rejeter la demande de nullité des contrats en cause, fondée sur la circonstance que Madame Roa-X...avait dissimulé à la société FRANCE TELECOM (ORANGE) l'absence d'activité réelle de la société CHASKA PRODUCTIONS, laquelle avait été contrainte de recourir à la sous-traitance pour faire réaliser les prestations qui lui avaient été confiées, que « la considération de la personne de Chaska n'est pas la cause principale de la convention, aucune clause d'intuitu personae n'étant stipulée dans les contrats rédigés par Orange », la Cour d'appel a dénaturé les contrats n° 42439640 et n° 42439642 conclus entre la société ORANGE et la société CHASKA PRODUCTIONS, violant ainsi l'article 1134 du code civil ;
7°) ALORS QUE dans ses écritures d'appel, en réponse à l'affirmation de Madame Roa-X...selon laquelle « la bonne exécution de [s] es prestations par la société CHASKA n'a jamais été réellement contestée par la FRANCE TELECOM tout comme la qualité de celles-ci », la société ORANGE faisait valoir que la société CHASKA PRODUCTIONS avait manqué à ses obligations contractuelles en ayant recours à la sous-traitance lors même que les contrats conclus avec la société ORANGE l'excluaient expressément, que les prestations réalisées ne consistaient en réalité qu'à des prestations d'intermédiaire et avaient à ce titre été « très largement surfacturées », et enfin, que la seule personne au sein de la société ORANGE capable d'apprécier la véritable qualité des prestations effectuées par la société CHASKA PRODUCTIONS était Madame Roa-X...qui n'était autre que la gérante de fait de cette société (ses conclusions d'appel, p. 31) ; qu'en jugeant que la société ORANGE n'avait « à aucun moment, contesté la qualité » des prestations commandées à la société CHASKA PRODUCTIONS, la Cour d'appel a dénaturé les écritures de l'exposante, en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR en conséquence condamné la SA Orange à payer à la SARL Chaska Productions la somme de 97. 846 euros, avec intérêts au taux appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente, majoré de 10 %, et ce à compter du 31 juillet 2002 pour la somme de 1. 000, 00 euros TTC, du 17 mai 2003 pour la somme de 13. 126, 00 euros TTC, et du 1er septembre 2003 pour la somme de 83. 720, 00 euros TTC, ordonné la capitalisation des intérêts en application de l'article 1154 du code civil, et condamné la SA Orange à payer à la SARL Chaska Productions la somme de 8. 000, 00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à prendre en charge les dépens ;
AUX MOTIFS QUE « Sur la demande de paiement présentée par Chaska : que Chaska réclame le paiement de sommes dues au titre des quatre contrats suivants : contrat n° 42439640 en date du 27 janvier 2003 : contrat portant sur la réalisation des tests utilisateurs sur la maquette du produit « Smart Web » ; somme restant due : 13. 126, 00 euros TTC ;- contrat n° 021 B 855 ; somme restant due : 1. 000, 00 euros TTC ;- contrat n° 2B06498 basé sur un devis du 15 mars 2002 : contrat portant sur la location de matériel informatique et de rétroprojecteur sur mobilier interactif à partir des caractéristiques techniques fournies par Orange ; somme restant due : 36. 328, 50 euros TTC ;- contrat n° 42439642 du 26 janvier 2003 : somme restant due 83. 720, 00 euros TTC ; que la somme réclamée au titre du contrat n° 021 B 855 (1. 000, 00 euros TTC) n'est pas contestée ; Que, sur le contrat n° 42439640 en date du 27 janvier 2003 portant sur le produit « Smart Web », il est constant que la prestation commandée a été réalisée, le rapport d'étude ayant été remis à France Telecom le 9 septembre 2003 ; qu'Orange se borne à faire état d'une critique non articulée, aux termes de laquelle « le mémoire technique livré par le sous-traitant de la société CHASKA PRODUCTIONS ne correspondait pas à ce qui était indiqué à l'annexe technique du contrat signé par les parties notamment en terme d'expertise pour déterminer l'évolution conceptuelle, graphique et fonctionnelle du produit », grief général et étayé d'aucun élément précis, insusceptible de déterminer en quoi Chaska aurait manqué à sa mission ; que, si, par ailleurs, l'établissement de ce rapport d'étude a été sous-traité à l'association) O (- ce que Chaska ne conteste pas-en violation de l'article 16. 2 du contrat, ce seul élément n'est pas de nature à justifier un refus de paiement de la prestation réalisée, untel refus étant hors de proportion avec le manquement relevé par Orange ; que la somme de 13. 126, 00 euros TTC est, dans ces conditions, due ; Que, sur le contrat n° 42439642 du 26 janvier 2003, Orange a identifié ce contrat, pour un montant de 70. 000, 00 euros HT, dans la liste des contrats en cours qu'elle a établie lors du licenciement de Madame X...(pièce n° 65 communiquée par Chaska) ; qu'elle ne saurait donc soutenir qu'aucune commande en ce sens n'a été passée par Orange ; que la somme réclamée de 83. 720, 00 euros TTC est en conséquence due ; (…) qu'en conséquence, la Cour réformera la décision déférée et condamnera Orange à payer à Chaska la somme de 97. 846, 00 euros, avec intérêts majorés, prévus l'article L. 441-6 1 du code de commerce, au taux appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente, majoré de 10 %, et ce à compter du 31 juillet 2002 pour la somme de 1. 000, 00 euros TTC, du 17 mai 2003 pour la somme de 13. 126, 00 euros TTC et du 1 er septembre 2003 pour la somme de 83. 720, 00 euros TTC ; qu'il sera fait droit à la demande de capitalisation des intérêts en application de l'article 1154 du code civil ; (…) que l'équité commande de condamner Orange à payer à Chaska la somme de 8. 000, 00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile » ;
ALORS QUE dans ses écritures d'appel (p. 43 à 47), la société ORANGE contestait, non seulement avoir accepté le devis émis par la société CHASKA PRODUCTIONS, mais également la réalité des prestations dont cette dernière réclamait le paiement ; qu'en se bornant à retenir, pour condamner la société ORANGE à payer à la société CHASKA PRODUCTIONS la somme de 83. 720 € au titre de ce contrat, que l'exposante avait identifié ce contrat dans la liste des contrats en cours qu'elle avait établie lors du licenciement de Madame Roa-X..., de sorte qu'elle ne pouvait soutenir qu'aucune commande n'avait été passée, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée par les conclusions d'appel de la société ORANGE, si la société CHASKA PRODUCTIONS justifiait de la réalisation des prestations facturées, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil. Moyens produits au pourvoi incident par la SCP Richard, avocat aux Conseils, pour la société Chaska productions.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt d'attaqué d'avoir débouté la Société CHASKA PRODUCTIONS de sa demande tendant à voir condamner la Société ORANGE à lui payer la somme de 12. 109, 50 euros TTC au titre de l'exécution du contrat n° 2B06498 ;
AUX MOTIFS que, sur le contrat n° 2B 06 498, il est constant que CHASKA a établi, le 15 mars 2002, un devis relatif à « l'installation de matériel informatique et de rétroprojecteur sur mobilier interactif à partir des cahiers de caractéristiques techniques fournies par FT », outre le service de dépannage compris pendant la période de l'exposition, pour un montant de 30. 000, 00 euros HT, et a adressé, le 30 mai 2002 à Orange une facture du montant du devis, soit 35. 880, 00 euros TTC ; qu'il n'est pas contesté que cette somme a été payée par Orange ; que ni le devis, ni la facture ne font référence â une location ; que CHASKA, à laquelle il incombe de démontrer la réalité de l'obligation invoquée, ne rapporte la preuve ni que la mise à disposition des matériels informatiques et rétroprojecteurs en cause ait consisté en une location, ni en conséquence que la somme réclamée est due ; que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté Chaska de cette demande de cc chef ;
ALORS QUE la demande d'achat de prestations du 15 octobre 2002 et le bon de commande du 22 octobre 2002, tous deux émis par la Société FRANCE TELECOM, devenue la Société ORANGE, mentionnait expressément une « location » ; qu'en affirmant néanmoins que les parties n'avaient pas conclu un contrat de location, la Cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ces deux pièces, en violation de l'article 1134 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt d'attaqué d'avoir débouté la Société CHASKA PRODUCTIONS de sa demande tendant à voir condamner la Société ORANGE à lui payer la somme de 67. 429, 40 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la rupture brutale des relations commerciales établies ;
AUX MOTIFS que l'article L 442-61, 5°, du Code de commerce dispose qu'" engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte, notamment, de la durée de la relation commerciale. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution, par l'autre partie, de ses obligations ou en cas de force majeure. " ; qu'Orange a, par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 29 décembre 2003, constaté la résiliation du contrat aux torts exclusifs de Chaska en application de l'article 16-2 du contrat (pièce n° 27 communiquée par Orange) ; qu'entre juillet 2001 et mars 2003, 14 contrats ont été conclus entre Chaska et Orange ; qu'il est indifférent que n'ait été souscrit entre les parties aucun accord-cadre, ni aucune garantie de chiffre d'affaires ; que la régularité et le nombre des commandes passées par Orange établissent l'existence, entre les parties, d'une relation stable et significative constitutive d'une relation commerciale établie au sens de l'article L 442-6 I, 5° ; que la rupture de la relation intervenue le 29 décembre 2003 était dépourvue de préavis ; qu'aucun des faits invoqués par Orange, ni la qualité de gérante de fait de Chaska de Madame X..., ni l'absence de moyens propres de Chaska, ni le recours de cette dernière à la sous-traitance, ni la pratique d'un taux de marge sans rapport avec les charges exposées, faits dont la Cour a retenu qu'ils étaient soit non caractérisés, soit hors de proportion, ne constituent des manquements contractuels propres à justifier une rupture sans préavis ; qu'un préavis de trois mois doit être regardé comme suffisant au regard de l'ancienneté de la relation commerciale de 20 mois ; qu'en cas d'insuffisance du préavis, le préjudice en résultant est évalué en considération de la marge brute correspondant à la durée du préavis jugé nécessaire ; que Chaska ne justifie ni de son chiffre d'affaires réalisé avec Orange-le montant invoqué de 408. 663, 00 euros ne pouvant être retenu dès lors qu'il est constitué pour partie par le recours à la sous-traitance à l'association) O (- ni du taux de marge brute de 66 % ; que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté Chaska de cette demande ;
ALORS QU'engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte, notamment, de la durée de la relation commerciale ; que le juge, qui constate que la responsabilité de l'une des parties est engagée, ne peut refuser d'allouer à la victime l'indemnisation de son préjudice, sous couvert d'une insuffisance d'éléments permettant de l'évaluer ; qu'en déboutant néanmoins la Société CHASKA de sa demande de dommages-intérêts, après avoir pourtant constaté que la Société ORANGE avait brutalement rompu les relations commerciales établies et avait engagé sa responsabilité à ce titre, motif pris que la Société CHASKA ne justifiait pas suffisamment de l'étendue de son préjudice, la Cour d'appel a violé l'article L 442-6, I, 5°, du Code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 15-27488
Date de la décision : 20/09/2017
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 10 septembre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 20 sep. 2017, pourvoi n°15-27488


Composition du Tribunal
Président : Mme Riffault-Silk (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Richard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.27488
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