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12/07/2017 | FRANCE | N°15-18580

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 12 juillet 2017, 15-18580


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 26 mars 2015), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière, économique, 11 octobre 2011, n° 10-25.862), et les productions, que la société Banque populaire du Nord (la banque) a consenti à la société Opaline deux prêts professionnels dont la gérante de cette dernière, Mme X... (la caution), s'est rendue caution solidaire ; qu'à la suite de la liquidation judiciaire de cette société, la banque a assigné la ca

ution en exécution de ses engagements ; que celle-ci s'y est opposée en invoqu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 26 mars 2015), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière, économique, 11 octobre 2011, n° 10-25.862), et les productions, que la société Banque populaire du Nord (la banque) a consenti à la société Opaline deux prêts professionnels dont la gérante de cette dernière, Mme X... (la caution), s'est rendue caution solidaire ; qu'à la suite de la liquidation judiciaire de cette société, la banque a assigné la caution en exécution de ses engagements ; que celle-ci s'y est opposée en invoquant la nullité et la résiliation des cautionnements, la décharge de ses engagements en application des articles 2314 du code civil et L. 341-4 du code de la consommation, la déchéance du droit de la banque aux intérêts conventionnels et a demandé le paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive ; qu'un arrêt du 1er juillet 2010 l'a condamnée à payer à la banque la somme de 22 119,59 euros, outre intérêts à compter du 11 août 2004 au taux contractuel de 4,25 % sur 20 521,46 euros et au taux légal sur 1 598,13 euros, et celle de 95 083,92 euros, outre intérêts à compter du 11 août 2004 au taux contractuel de 4,75 % sur 88 373,50 euros et au taux légal sur 6 710,42 euros, et a rejeté ses demandes ; que cet arrêt a été cassé, mais seulement en ce qu'il condamnait la caution à payer à la banque les intérêts au taux contractuel à compter du 11 août 2004 ; que devant la cour de renvoi, la banque a demandé la confirmation de l'arrêt du 1er juillet 2010, tandis que la caution a réitéré sa demande tendant à la déchéance de la banque de son droit aux intérêts contractuels et formé une demande reconventionnelle de dommages-intérêts d'un montant équivalent à celui réclamé par la banque, soit la somme de 117 000 euros, pour manquement de la banque à son devoir de mise en garde ;

Attendu que la caution fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable sa demande reconventionnelle en responsabilité de la banque pour manquement à son devoir de mise en garde alors, selon le moyen :

1°/ que les demandes reconventionnelles sont recevables en appel lorsqu'elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant ; que, devant la cour de renvoi, la caution a expressément déclaré soumettre à la cour une demande reconventionnelle, recevable en appel ainsi que prévu à l'article 567 du code de procédure civile ; qu'en déclarant la demande reconventionnelle présentée par la caution irrecevable en énonçant, sans même vérifier si elle se rattachait à la prétention originaire par un lien suffisant, que devant la cour, en application des articles 564 et suivants du code de procédure civile, est recevable une demande reconventionnelle en responsabilité tendant à obtenir compensation entre les dommages-intérêts réclamés et les sommes demandées dans le cadre de l'action principale et que, dans le cadre d'une cassation partielle comme en l'espèce, une telle demande ne peut viser qu'à obtenir compensation avec le montant de la condamnation qui serait issue de la décision de la cour relative à la disposition cassée et que, dès lors qu'il est fait droit à la demande de la caution quant au défaut d'information annuelle et que les demandes de la banque sur ce point sont rejetées après cassation, il ne peut y avoir lieu à compensation, la cour d'appel a violé l'article 567 du code de procédure civile, ensemble les articles 4 et 954 du même code ;

2°/ qu'il résulte des articles 633 et 638 du code de procédure civile que devant la juridiction de renvoi, l'affaire est à nouveau jugée en fait et en droit, à l'exclusion des chefs non atteints par la cassation, et que la recevabilité des prétentions nouvelles est soumise aux règles applicables devant la juridiction dont la décision a été cassée ; que l'article 567 du code de procédure civile, expressément invoqué par la caution dispose que les demandes reconventionnelles sont recevables en appel ; qu'en déclarant irrecevable la demande reconventionnelle en responsabilité de la banque présentée par la caution à la cour après renvoi de cassation au motif que, dans le cadre d'une cassation partielle comme en l'espèce, cette demande reconventionnelle nouvelle ne pouvait tendre qu'à obtenir compensation avec le montant de la condamnation qui serait issue de la décision de la cour relative à la disposition cassée, la cour d'appel a ajouté à la loi une condition qu'elle ne comporte pas ; que, ce faisant, elle a violé les articles 633, 638, 564 et 567 du code de procédure civile ;

3°/ que la demande reconventionnelle nouvelle de la caution était fondée sur le grave manquement de la banque à son devoir de mise en garde à l'égard d'une caution profane et non pas sur le fait que la banque lui avait fait souscrire un engagement de caution disproportionné à ses facultés financières, point qui avait été définitivement rejeté par les dispositions non cassées de l'arrêt du 1er juillet 2010 ; qu'en énonçant que la demande reconventionnelle ne pouvait avoir pour objet ou pour effet de remettre en cause la partie du dispositif de l'arrêt n'ayant pas fait l'objet d'une cassation alors que la demande visant à voir reconnaître la responsabilité de la banque pour avoir fait souscrire à la caution un engagement de caution disproportionné à ses facultés financières se heurte à l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt du 1er juillet 2010 qui a écarté l'argumentation développée par l'appelante sur ce point, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de la caution ; que, ce faisant, elle a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'après avoir énoncé qu'aux termes de l'article 633 du code de procédure civile, la recevabilité des prétentions nouvelles devant la juridiction de renvoi est soumise aux règles qui s'appliquent devant la juridiction dont la décision a été cassée, et que, devant la cour d'appel, en application des articles 564 et suivants du code de procédure civile, est recevable une demande reconventionnelle en responsabilité tendant à obtenir compensation entre les dommages-intérêts réclamés et les sommes demandées dans le cadre de l'action principale, l'arrêt retient, à bon droit, et sans ajouter de condition à la loi, qu'après une cassation partielle, qui n'a atteint que la condamnation au paiement des intérêts et a rendu irrévocable la condamnation au paiement du principal, une telle demande ne peut tendre qu'à obtenir compensation avec le montant de la condamnation à venir au titre des intérêts ; qu'ayant ainsi fait ressortir que la demande reconventionnelle ne pouvait avoir de lien qu'avec la seule demande, dont elle était saisie, de condamnation au paiement des intérêts et non avec la demande en paiement du principal, sur laquelle il avait été statué de manière irrévocable, la cour d'appel, qui a effectué la recherche invoquée par la première branche et abstraction faite des motifs critiqués par la troisième branche, qui sont surabondants, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Banque populaire du Nord la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour Mme Y...

IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET ATTAQUE d'avoir déclaré irrecevable la demande reconventionnelle en responsabilité de la BANQUE POPULAIRE DU NORD pour manquement à son devoir de mise en garde présentée pour la première fois par Madame X... après renvoi de cassation,
AUX MOTIFS QUE :
« (…) Mme Y... formule pour la première fois devant la cour, saisie après renvoi de cassation, une demande reconventionnelle en responsabilité de la banque pour manquement à son devoir de mise en garde ;
(…) Aux termes de l'article 633 du code de procédure civile, « la recevabilité des prétentions nouvelles est soumise aux règles qui s'appliquent devant la juridiction dont la décision a été cassée » ; Que, devant la cour, en application des articles 564 et suivants du code de procédure civile, est recevable une demande reconventionnelle en dommages-intérêts tendant à obtenir compensation entre les dommages-intérêts réclamés et les sommes demandées dans le cadre de l'action principale ;
(…) Toutefois que, dans le cadre d'une cassation partielle comme en l'espèce, une telle demande ne peut viser qu'à obtenir compensation avec le montant de la condamnation qui serait issue de la décision de la cour relative à la disposition cassée ; Que dès lors qu'il est fait droit à l'argumentation de Mme Y... quant au défaut d'information annuelle et que les demandes de la banque sont sur ce point rejetées après cassation, il ne peut y avoir lieu à compensation ;
Qu'une telle demande reconventionnelle ne peut au surplus avoir pour objet ou pour effet de remettre en cause la partie du dispositif de l'arrêt de la cour d'appel qui n'a pas fait l'objet d'une cassation ; Qu'en l'espèce, la demande visant à voir reconnaître la responsabilité de la banque pour avoir fait souscrire par Mme Y... un engagement de caution disproportionné à ses facultés financières se heurte à l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt du 1er juillet 2010 qui a écarté l'argumentation développée par Mme Y... sur ce point ;
(…) Dans ces conditions, que la demande reconventionnelle de Mme Y... est irrecevable » ;

1- ALORS QUE les demandes reconventionnelles sont recevables en appel lorsqu'elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant ; Que, devant la cour de renvoi, Madame X... a expressément déclaré soumettre à la cour une demande reconventionnelle (cf. le dispositif de ses conclusions, prod.4 p.26 et 27), recevable en appel ainsi que prévu à l'article 567 du code de procédure civile (ibidem p.20 dernier alinéa) ; Qu'en déclarant la demande reconventionnelle présentée par Madame X... irrecevable en énonçant, sans même vérifier si elle se rattachait à la prétention originaire par un lien suffisant, que devant la cour, en application des articles 564 et suivants du code de procédure civile, est recevable une demande reconventionnelle en responsabilité tendant à obtenir compensation entre les dommages-intérêts réclamés et les sommes demandées dans le cadre de l'action principale et que, dans le cadre d'une cassation partielle comme en l'espèce, une telle demande ne peut viser qu'à obtenir compensation avec le montant de la condamnation qui serait issue de la décision de la cour relative à la disposition cassée et que, dès lors qu'il est fait droit à la demande de Madame X... quant au défaut d'information annuelle et que les demandes de la banque sur ce point sont rejetées après cassation, il ne peut y avoir lieu à compensation, la cour d'appel a violé l'article 567 du code de procédure ci-vile, ensemble les articles 4 et 954 du même code ;

2- ALORS QU'il résulte des articles 633 et 638 du code de procédure civile que devant la juridiction de renvoi, l'affaire est à nouveau jugée en fait et en droit, à l'exclusion des chefs non atteints par la cassation, et que la recevabilité des prétentions nouvelles est soumise aux règles applicables devant la juridiction dont la décision a été cassée ; Que l'article 567 du code de procédure civile, expressément invoqué par Madame X... en page 20 dernier alinéa de ses conclusions (prod.4) dispose que les demandes reconventionnelles sont recevables en appel ; Qu'en déclarant irrecevable la demande reconventionnelle en responsabilité de la banque présentée par Madame X... à la cour après renvoi de cassation au motif que, dans le cadre d'une cassation partielle comme en l'espèce, cette demande reconventionnelle nouvelle ne pouvait tendre qu'à obtenir compensation avec le montant de la condamnation qui serait issue de la décision de la cour relative à la disposition cassée, la cour d'appel a ajouté à la loi une condition qu'elle ne comporte pas ; Que, ce faisant, elle a violé les articles 633, 638, 564 et 567 du code de procédure civile ;

3- ALORS QUE la demande reconventionnelle nouvelle de Madame X... était fondée sur le grave manquement de la banque à son devoir de mise en garde à l'égard d'une caution profane (cf. prod.4 p.20 et suivantes) et non pas sur le fait que la banque lui avait fait souscrire un engagement de caution disproportionné à ses facultés financières, point qui avait été définitivement rejeté par les dispositions non cassées de l'arrêt du 1er juillet 2010 ; Qu'en énonçant que la demande reconventionnelle ne pouvait avoir pour objet ou pour effet de remettre en cause la partie du dispositif de l'arrêt n'ayant pas fait l'objet d'une cassation alors que la demande visant à voir reconnaître la responsabilité de la banque pour avoir fait souscrire à Madame X... un engagement de caution disproportionné à ses facultés financières se heurte à l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt du 1er juillet 2010 qui a écarté l'argumentation développée par l'appelante sur ce point, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de Madame X... ; Que, ce faisant, elle a violé l'article 4 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 15-18580
Date de la décision : 12/07/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 26 mars 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 12 jui. 2017, pourvoi n°15-18580


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : Me Brouchot, SCP Gadiou et Chevallier

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.18580
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