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11/07/2017 | FRANCE | N°16-85864

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 11 juillet 2017, 16-85864


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- Mme Manuela X...,

contre l'arrêt de la cour d'assises de la DRÔME, en date du 30 mai 2016, qui, pour tentative d'assassinat et assassinat, l'a condamnée à trente ans de réclusion criminelle, ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la cour a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 21 juin 2017 où étaient présents : M. Guérin, président, M. Stephan, conseiller rapporteur, MM. Cas

tel, Raybaud, Moreau, Mme Drai, M. Guéry, conseillers de la chambre, M. Laurent, Mme Carbo...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- Mme Manuela X...,

contre l'arrêt de la cour d'assises de la DRÔME, en date du 30 mai 2016, qui, pour tentative d'assassinat et assassinat, l'a condamnée à trente ans de réclusion criminelle, ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la cour a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 21 juin 2017 où étaient présents : M. Guérin, président, M. Stephan, conseiller rapporteur, MM. Castel, Raybaud, Moreau, Mme Drai, M. Guéry, conseillers de la chambre, M. Laurent, Mme Carbonaro, M. Beghin, conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Salomon ;

Greffier de chambre : Mme Bray ;

Sur le rapport de M. le conseiller STEPHAN, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général SALOMON ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, 308, 343 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt incident attaqué a dit n'y avoir lieu à renvoi de l'affaire ;

"aux motifs qu'il a été mentionné au procès-verbal des débats, l'absence d'un dispositif d'enregistrement sonore des débats malgré les dispositions de l'article 2 de la loi du 20 juin 2014 ; que ces dispositions, codifiées à l'article 380 du code de procédure pénale, ne sont pas prévues à peine de nullité ;

"alors que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; que les motifs de l'arrêt sont impropres à justifier le rejet de la demande de renvoi afin que l'accusé bénéficie, comme elle le demandait, du droit à l'enregistrement sonore des débats de la cour d'assises" ;

Attendu que le moyen est inopérant dès lors que l'accusée n'a invoqué, à l'appui de sa demande de renvoi du procès, aucun grief pouvant résulter de l'absence d'enregistrement sonore des débats ;

D'ou il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 315, 316 et 593 du code de procédure pénale, ensemble la présomption d'innocence et le droit à un procès équitable ;

"en ce que l'arrêt incident attaqué a rejeté la demande de donné acte ;

"aux motifs qu'il n'entre pas dans les pouvoirs de la cour de donner acte des protestations relatives au rapport de la présidente, dès lors que cette formalité a été accomplie conformément à l'article 327 du code de procédure pénale ;

"1°) alors que la cour a le pouvoir et le devoir de donner acte de faits survenus ou propos tenus à l'audience qui sont susceptibles de porter atteinte aux droits de la défense ou au droit à un procès équitable ; qu'en l'espèce, la cour a été saisie de conclusions sollicitant qu'il soit donné acte à l'accusée de ses protestations quant à l'évocation, dans le rapport de la présidente, de l'arrêt de mise en accusation et de la feuille de motivation de première instance dont les termes, avaient, en violation de la présomption d'innocence, affirmé la culpabilité criminelle de l'accusée à raison de crimes dont elle n'avait jamais été déclarée légalement coupable, portant ainsi atteinte à son droit à un procès équitable ; qu'en rejetant la demande de donné acte aux motifs inopérants que cette formalité a été accomplie conformément à l'article 327 du code de procédure pénale et sans se prononcer sur la réalité des faits allégués, la cour a méconnu l'étendue de ses pouvoirs ;

"2°) alors qu'en s'abstenant dès lors de s'expliquer sur la violation dénoncée de la présomption d'innocence et du droit à un procès équitable de l'accusée, la cour a privé sa décision de base légale" ;

Attendu qu'il résulte du procès-verbal des débats que, le président ayant donné connaissance des motifs de l'arrêt rendu par la cour d'assises de première instance, les avocats de la défense ont émis une protestation en ce que certains passages de la feuille de motivation leur paraissaient porter atteinte à la présomption d'innocence ; qu'ils ont demandé à la cour de leur en donner acte ;

Attendu que par arrêt incident, la cour a rejeté cette demande par les motifs repris au moyen ;

Qu'en se déterminant ainsi, elle a justifié sa décision ;

Qu'en effet, s'il est loisible aux parties de critiquer la feuille de motivation, elles ne sauraient faire grief au président d'avoir, conformément aux prescriptions de l'article 327 du code de procédure pénale, donné connaissance de l'ensemble des motifs qui ont déterminé la décision rendue par la cour d'assises de première instance ;

Que le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 315, 316, 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que par arrêt incident du 9 octobre 2014, la cour a dit n'y avoir lieu à supplément d'information ;

"aux motifs qu'à ce stade des débats, les mesures complémentaires sollicitées ne sont pas nécessaires à la manifestation de la vérité ;

"alors que Mme Manuela X..., mise en accusation du chef de tentative d'assassinat et assassinat de son époux, a sollicité un supplément d'instruction aux fins de saisie d'une lettre de nature à retenir l'hypothèse d'un suicide de ce dernier ; qu'en s'abstenant d'expliciter en quoi ce supplément d'information, dont la faisabilité technique avait été vérifiée, n'était pas nécessaire à la manifestation de la vérité, la cour, qui n'a pas mis Mme X... en mesure de comprendre pourquoi elle avait été privée d'un élément de preuve essentiel à l'exercice de ses droits, n'a pas légalement justifié sa décision" ;

Attendu que, pour rejeter la demande de supplément d'information présentée par la défense de l'accusée, ayant pour objet de procéder à l'ouverture du cercueil de la mère de la victime afin de rechercher une lettre qui pourrait s'y trouver, et, le cas échéant, de procéder à la saisie de cette correspondance, la cour retient que cette mesure d'investigation n'est pas nécessaire à la manifestation de la vérité compte-tenu de l'ensemble des éléments recueillis lors des débats, en particulier les témoignages et les avis des experts ;

Qu'en prononçant ainsi, la cour d'assises, qui a souverainement apprécié l'intérêt de cette mesure, a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 62 de la Constitution du 4 octobre 1958, 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 7, 8 et 9 de la Déclaration de 1789, 348, 349, 365-1, 591 et 593 du code de procédure pénale, violation des droits de la défense, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt incident attaqué a rejeté la demande de l'accusé tendant à poser des questions factuelles complémentaires à la cour et au jury durant les délibérations ;

"aux motifs que les dispositions des articles 348 et 349 du code de procédure pénale sont d'interprétation stricte ; que les questions posées dans les termes de la prévention, lues par la présidente avant le début des plaidoiries des avocats des parties civiles, ne peuvent être complétées par des questions factuelles que la loi pénale n'autorise pas ;

"1°) alors qu'il résulte de la décision du Conseil constitutionnel 2011-113/115 QPC du 1er avril 2011 que celui-ci a assorti l'article 349 du code de procédure pénale d'une réserve d'interprétation, aux termes de laquelle « l'accusé peut ainsi demander que la liste des questions posées soit complétée afin que la cour d'assises se prononce spécialement sur un élément de fait discuté pendant les débats » ; qu'en s'opposant par principe à cette possibilité dont l'accusé a fait expressément la demande, la cour a méconnu l'autorité attachée à la décision précitée et violé l'article 62 de la Constitution du 4 octobre 1958 ;

"2°) alors, en toute hypothèse, qu'aucun principe d'interprétation stricte ne gouverne la procédure pénale et que les textes de procédure doivent être interprétés dans le sens de l'octroi des meilleures garanties à la défense ; que rien n'exclut que pour assurer une meilleure motivation, à laquelle participent les réponses apportées aux questions, et une réponse satisfaisante aux conclusions de la défense dont la cour et le jury ne disposent pas dans leur délibéré, l'accusé puisse demander à ce que soient posées des questions de fait portant notamment sur des éléments de preuve discutés aux débats, dont il appartient au président ou à la cour d'apprécier la pertinence et l'opportunité ; qu'en niant ce droit à l'accusé, la cour a violé les textes précités outre les droits de la défense" ;

Attendu qu'après la lecture par le président des questions auxquelles la cour et le jury devraient répondre, la défense a demandé que soient également posées cinq questions purement factuelles; qu'à la suite du refus du président, les avocats ont saisi la cour d'un incident contentieux ;

Que pour rejeter cette demande, la cour prononce par les motifs repris au moyen ;

Qu'en se déterminant ainsi, elle a justifié sa décision, dès lors que ne peuvent être posées à la cour et au jury des questions étrangères aux prévisions des articles 348 et 349 du code de procédure pénale ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu qu'aucun moyen n'est produit contre l'arrêt civil, que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la cour et le jury ;

REJETTE le pourvoi ;

FIXE à 3 000 euros la somme globale que Mme X... devra payer à M. Nicolas Y..., M. Hubert Y..., Mme Liliane Z... épouse Y..., Mme Sylviane Y... épouse A... et M. Noël A... au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le onze juillet deux mille dix-sept ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 16-85864
Date de la décision : 11/07/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

COUR D'ASSISES - Questions - Questions posées à la cour et au jury - Etendue - Limites

Ne peuvent être posées à la cour et au jury des questions étrangères aux prévisions des articles 348 et 349 du code de procédure pénale


Références :

Sur le numéro 1 : article 327 du code de procédure pénale
Sur le numéro 2 : articles 348 et 349 du code de procédure pénale

Décision attaquée : Cour d'assises de la Drôme, 30 mai 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 11 jui. 2017, pourvoi n°16-85864, Bull. crim.
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle

Composition du Tribunal
Président : M. Guérin
Avocat général : M. Salomon
Rapporteur ?: M. Stephan
Avocat(s) : SCP Spinosi et Sureau, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.85864
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