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04/05/2017 | FRANCE | N°16-15154

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 04 mai 2017, 16-15154


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article R. 351-37 du code de la sécurité sociale ;

Attendu, selon ce texte, que la date d'entrée en jouissance d'une pension de retraite ne peut être antérieure au dépôt de la demande formulée pour en obtenir la liquidation ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (la CNAVTS) a attribué, à effet du 1er avril 2008, à Mme X..., née le 4 octobre 1951, une

pension de retraite au titre du régime des carrières longues ; que la caisse de mutualité...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article R. 351-37 du code de la sécurité sociale ;

Attendu, selon ce texte, que la date d'entrée en jouissance d'une pension de retraite ne peut être antérieure au dépôt de la demande formulée pour en obtenir la liquidation ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (la CNAVTS) a attribué, à effet du 1er avril 2008, à Mme X..., née le 4 octobre 1951, une pension de retraite au titre du régime des carrières longues ; que la caisse de mutualité sociale agricole ayant annulé, le 16 septembre 2011, le rachat de cotisations opéré par Mme X... aux fins de complément de sa carrière, la CNAVTS a tiré les conséquences de cette décision en annulant la pension de retraite et en réclamant à l'intéressée un indu d'un certain montant, avant de lui attribuer, à effet du 1er mai 2012, une pension de retraite ; que contestant l'annulation de la pension initialement attribuée, Mme X... a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ; que la CNAVTS a formé une demande reconventionnelle aux fins de paiement de l'indu ;

Attendu que, pour limiter l'indu au paiement duquel il condamne Mme X... à un montant inférieur à celui réclamé par la CNAVTS, l'arrêt retient que, dans son courrier du 30 mai 2012, celle-ci avait fait application de circulaires ministérielles lui permettant de faire rétroagir au 1er mai 2012, les effets de la nouvelle pension attribuée à l'assurée suite au dépôt de sa demande, reçue le 16 mai 2012 ; que dans son courrier du 9 avril 2013 repris dans ses conclusions, la CNAVTS, qui constatait que Mme X... n'avait pas été mise en mesure de déposer plus tôt cette nouvelle demande en raison de la tardiveté de la notification de l'annulation de la première pension, postérieure à la date à laquelle l'intéressée était en mesure de prendre sa retraite à taux plein, avait offert à celle-ci la possibilité de demander que le point de départ de sa nouvelle pension soit fixé à la date de son soixantième anniversaire en application d'instructions ministérielles ; que, contrairement à ce que soutenait la CNAVTS, Mme X... avait bien formulé une demande en ce sens ; que, liée par les termes de ses courriers des 30 mai 2012 et 9 avril 2013, repris par ses conclusions d'instance, la CNAVTS devait reconnaître à Mme X... le bénéfice de sa pension rétroactivement et qu'il y avait lieu de limiter l'indu aux arrérages versés entre le 1er avril 2008 et le 31 octobre 2012 ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que la demande d'attribution de pension formulée par Mme X... avait été reçue le 16 mai 2012 par la CNAVTS, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne Mme X... à payer à la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés la somme de 43 951, 16 euros et rejette la demande formée par celle-ci sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 8 février 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet en conséquence, sur ces seuls points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre mai deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la Caisse nationale d'assurance vieillesse était en droit de réclamer le remboursement des sommes versées à Mme X... sur la période du 1er avril 2008 au 31 octobre 2011, d'AVOIR condamné Mme X... à payer à la Caisse nationale d'assurance vieillesse la somme de 43 951, 16 euros avec intérêts au taux légal à compter du 24 avril 2012 et d'AVOIR rejeté la demande de la Caisse nationale d'assurance vieillesse sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « à l'appui de son appel, Mme X... fait valoir que la décision d'annulation du 16 septembre 2011 de la MSA n'est pas définitive puisqu'elle a été contestée le 8 novembre 2011 et que cette contestation figure dans ses conclusions déposées devant le tribunal de Nanterre. Mme X... demande à la cour de constater que le rachat des 20 trimestres de cotisations était régulier et en tout cas qu'il revenait à la CNAV de vérifier que les conditions du rachat étaient remplies avant de valider sa demande de retraite anticipée, attribution qui est devenue définitive en raison du principe de l'intangibilité des retraites liquidées qui s'oppose à la remise en cause de la pension quatre ans plus tard. Par ailleurs, Mme X... considère que la CNAV est également fautive en lui adressant avec retard l'imprimé en vue de faire sa nouvelle demande de retraite le 27 avril 2012. En réplique, la CNAV soutient que Mme X... a déposé sa demande de retraite anticipée le 4 octobre 2007 qui a été acceptée parce qu'elle remplissait les conditions d'attribution du fait du rachat des trimestres auprès de la MSA, mais qu'en raison de l'annulation de ce rachat, elle s'est trouvée dans l'obligation de revoir l'attribution de la retraite personnelle. La caisse fait valoir que la décision du 16 septembre 2011 de la MSA est devenue définitive, faute pour Mme X... d'avoir contesté la décision de la commission de recours amiable du 16 décembre 2011. La caisse précise par ailleurs que par l'effet de l'annulation des droits notifiée le 13 avril 2012, l'assurée a dû déposer une nouvelle demande de retraite personnelle le 27 avril 2012, avec attribution de ses nouveaux droits dès le 1er mai 2012. En premier lieu, il convient de rappeler que la MSA et la CNAV sont deux caisses autonomes et que la décision d'annulation du 16 septembre 2011 prise par la MSA s'impose à la CNAV. Par suite, Mme X... ne peut imputer à la CNAV aucune faute découlant des décisions de rachat des trimestres prises par la MSA, ni en 2007 au moment de l'examen de la demande de retraite anticipée, ni en 2012 lors du nouvel examen de ses droits consécutifs à l'annulation du rachat. Il sera également relevé que la décision du 16 septembre 2011 de la MSA est devenue définitive dès lors que cette décision a été confirmée par la commission de recours amiable le 16 décembre 2011, l'assurée n'ayant pas contesté cette décision par un recours contentieux devant le tribunal des affaires de sécurité sociale. Enfin, le principe d'intangibilité des retraites ne vaut que si les informations communiquées à la caisse sont exactes, ce principe étant posé par l'article R. 351-10 du code de la sécurité sociale afin de ne pas tenir compte des éventuels versements postérieurs à la liquidation de la pension, ce qui ne correspond pas au cas d'espèce, la pension ayant été annulée par l'effet de la décision d'annulation du rachat des cotisations prise par la MSA. Il s'ensuit que la décision de la CNAV d'annuler la retraite personnelle de Mme X... était légitime, celle-ci ayant perçu depuis le 1er avril 2008 une pension au titre de la retraite anticipée alors qu'elle ne remplissait pas les conditions légales. En revanche, si la caisse est bien fondée à réclamer le remboursement d'un indu, il convient de considérer que la somme réclamée par la CNAV doit être limitée à la période s'écoulant du 1er avril 2008 au 31 octobre 2011, dès lors que la caisse avait reconnu à Mme X... la possibilité de faire valoir ses droits au 1er novembre 2011, premier jour du mois suivant le jour auquel elle a eu 60 ans. En effet, la caisse est tenue de respecter les informations qu'elle communique lors de la notification de ses décisions. Dans sa lettre du 13 avril 2012, objet de la contestation, la caisse, procédant à l'annulation de la retraite anticipée, a invité Mme X..., par un courrier séparé daté du même jour, à déposer une nouvelle demande de pension. Cette demande a été remplie dès le 27 avril 2012, le formulaire portant le cachet de réception du service du 16 mai 2012, et acceptée le 30 mai 2012 pour une retraite à taux plein à compter du 1er mai 2012. La caisse invoque dans le cadre de l'instance les dispositions de l'article R. 351-37 du code de la sécurité sociale, pour expliquer que l'entrée en jouissance de la pension se fait nécessairement au premier jour du mois suivant le dépôt de la demande. Toutefois, il convient de constater que la caisse a fait application le 30 mai 2012 de sa faculté de faire rétroagir les effets de la pension, autorisée par les circulaires ministérielles citées dans ses conclusions. Il ressort également des termes de la lettre du 9 avril 2013, adressée à l'assurée dans le cadre de la contestation de la décision d'annulation du 13 avril 2012, que la caisse reconnaissait que Mme X... n'avait pas été en mesure de déposer plus tôt sa deuxième demande d'attribution de la pension, en raison de la tardiveté de la notification de l'annulation de la pension (le 13 avril 2012) postérieure à la date à laquelle elle était en droit de prétendre à sa retraite à taux plein, le 1er mars 2012. La caisse a reconnu expressément dans ce courrier la faculté pour Mme X... d'obtenir sa pension dès avant le dépôt de l'imprimé, en raison de la spécificité des éléments du dossier, en lui demandant de préciser à quelle date elle souhaitait bénéficier d'une mesure rétroactive. Cette offre de rétroactivité du point de départ de la pension figure également dans les conclusions d'instance de la caisse qui rappelle que Mme X... pouvait, en application d'instructions ministérielles plus favorables prises en 2012, faire une demande de retraite personnelle à compter du 4 octobre 2011, jour de ses 60 ans. La caisse considère que Mme X... n'a formalisé aucune demande dans ce sens. Or, il sera relevé que l'assurée a mentionné dans sa demande de retraite personnelle déposée le 27 avril 2012 qu'elle souhaitait bénéficier de sa retraite personnelle à compter du 31 mars 2008. Mme X... a donc sollicité au moyen de l'imprimé réglementaire Cerfa, une demande d'attribution de sa pension prenant effet antérieurement à la date du dépôt du formulaire. La caisse, liée par les termes de ses courriers des 30 mai 2012 et 9 avril 2013, repris par ses conclusions d'instance, devait donc reconnaître à Mme X... le bénéfice de sa pension rétroactivement, dès lors que cette demande figure expressément dans l'imprimé déposé le 27 avril 2012. Le montant de l'indu sera donc limité aux sommes versées sur la période du 1er avril 2008 au 31 octobre 2011, qui s'élèvent à 43 951, 16 euros, comme au paiement de laquelle Mme X... sera condamnée avec intérêts légaux à compter de la mise en demeure du 24 avril 2012. Le jugement du 10 février 2014 qui s'est limité à examiner la demande de Mme X... sur les motifs de la décision de la MSA, sans statuer sur les contestations dirigées contre la décision de la CNAV du 13 avril 2012, sera donc réformé » ;

1°) ALORS QUE la règle selon laquelle l'entrée en jouissance d'une pension de vieillesse ne peut être fixée à une date antérieure à celle du dépôt de la demande est impérative et ne peut être écartée quelle que soit la cause du retard apporté à la présentation de la demande ; que seule l'allocation de dommages et intérêts peut éventuellement réparer le préjudice subi par l'assuré du fait de l'attitude fautive de l'organisme en charge de la liquidation ; qu'en décidant en l'espèce de faire produire effet à la pension de vieillesse dès le 1er novembre 2011 tandis que la demande de liquidation avait été déposée le 27 avril 2012 par cela seul que la notification de l'annulation de la première pension, survenue seulement le 13 avril 2012, avait empêché Mme X... de déposer plus tôt cette nouvelle demande et que la CNAV aurait reconnu cet état de fait et aurait proposé elle-même une rétroactivité, la cour d'appel a violé les articles R. 351-34 et R. 351-37 du code de la sécurité sociale ;

2°) ALORS QUE l'indu objectif doit être intégralement répété ; que la faute éventuellement commise par le solvens ne peut directement, par la voie de la déchéance, remettre en cause ce droit à répétition ; qu'elle peut seulement dans le cadre d'une demande reconventionnelle, donner lieu à l'attribution de dommages et intérêts entrant en compensation avec le montant ainsi répété ; qu'en décidant de déchoir directement la CNAV, à hauteur de 6 322, 26 euros et pour la période du 1er novembre 2011 au 31 mars 2012, de son droit à répétition par cela seul qu'elle aurait tardé à annuler le paiement indu, le 13 avril 2012 seulement, empêchant ainsi Mme X... de déposer plus tôt une nouvelle demande de pension, la cour d'appel a violé l'article 1376 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 16-15154
Date de la décision : 04/05/2017
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 08 février 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 04 mai. 2017, pourvoi n°16-15154


Composition du Tribunal
Président : M. Prétot (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.15154
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