LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 9 juin 2015), que la société Licera Reims (la société Licera), représentée par son gérant, M. X..., a conclu avec la société Casa pizza France (la société Casa pizza) un contrat de franchise auquel Mme X... est intervenue en qualité de dirigeante ; qu'après sa mise en sauvegarde, la société Licera, son mandataire judiciaire et M. X... ont assigné la société Casa pizza en annulation et, subsidiairement, en résiliation du contrat de franchise, ainsi qu'en restitution des sommes versées au titre dudit contrat et en indemnisation de leurs préjudices ; que Mme X... est intervenue en première instance en qualité de dirigeante de la société Casa pizza ; que pendant l'instance d'appel du jugement ayant, notamment, prononcé la résiliation du contrat aux torts partagés du franchiseur et du franchisé, la société Casa pizza a elle-même fait l'objet d'une procédure de sauvegarde, le 7 avril 2014, Mme Y... et la société FHB étant respectivement désignées mandataire et administrateur judiciaires ;
Attendu que la société Licera et M. et Mme X... font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes tendant à la fixation des créances non déclarées au passif de la procédure de sauvegarde de la société Casa pizza, à l'exception des créances de restitution, découlant de la demande d'annulation du contrat de franchise alors, selon le moyen, qu'aucune forme particulière n'est imposée aux créanciers à la déclaration de créance née antérieurement au jugement d'ouverture laquelle doit être signée par le créancier ou son mandataire et adressée dans un délai de deux mois à compter de la publication au BODACC du jugement d'ouverture au mandataire judiciaire ; qu'ayant relevé que le jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde de la société Casa pizza avait fait l'objet d'une publication au BODACC le 14 avril 2014, que les créanciers avaient assigné en reprise d'instance le mandataire judiciaire à la procédure de sauvegarde par actes des 7 et 12 mai 2014 et que l'assignation comportait dénonciation de leurs conclusions aux termes desquelles ils sollicitaient la fixation de leurs créances envers de la société Casa pizza, la cour d'appel qui a considéré, pour rejeter leurs demandes, qu'un tel acte valait « surtout » reprise d'instance à l'égard des organes de la procédure collective et n'exprimait pas de façon « suffisamment univoque » la volonté des demandeurs de déclarer leurs créances entre les mains du mandataire judiciaire, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations violant ainsi les articles L. 622-24 et L. 622-26 du code de commerce ;
Mais attendu que l'assignation en reprise d'une instance en cours délivrée en application de l'article L. 622-22 du code de commerce, serait-elle accompagnée de conclusions tendant à la fixation par la juridiction saisie de cette instance de la créance du demandeur, ne vaut pas déclaration de créance entre les mains du mandataire judiciaire, celle-ci devant résulter d'un acte distinct dont, conformément à l'article R. 622-20 du même code, une copie doit être produite ; que le moyen, qui procède d'un postulat erroné, n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Licera Reims et M. et Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la société Casa pizza France, Mme Y... et la société FHB, respectivement en qualité de mandataire et d'administrateur judiciaires de ladite société, la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre mai deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils, pour la société Licera Reims et M. et Mme X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté les demandes tendant à la fixation, pour leurs montants, des créances non déclarées au passif de la procédure de sauvegarde de la société Casa Pizza ouverte par jugement du tribunal de commerce de Montpellier en date du 7 avril 2014, à l'exception des créances de restitution, découlant de la demande d'annulation du contrat de franchise ;
AUX MOTIFS QU' « il résulte des dispositions combinées des articles L. 622-2 1 et L. 622-22 du code de commerce que le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent et que les instances en cours sont interrompues jusqu'à ce que le créancier poursuivant ait procédé le mandataire judiciaire et, le cas échéant, l'administrateur ou le commissaire à l'exécution du plan nommé en application de l'article L. 626-25 dûment appelés, mais tendent uniquement à la constatation des créances et à la fixation de leur montant; selon les articles L. 622-24 et R. 622-24, à partir de la publication du jugement, tous les créanciers dont la créance est née antérieurement au jugement d'ouverture, à l'exception des salariés, adressent la déclaration de leurs créances au mandataire judiciaire dans le délai de deux mois à compter de la publication du jugement d'ouverture au Bodacc ; enfin, l'article L. 622-26 énonce qu'à défaut de déclaration dans les délais prévus à l'article L. 622-24, les créanciers ne sont pas admis dans les répartitions et les dividendes à moins que le juge-commissaire ne les relève de leur forclusion s'ils établissent que leur défaillance n'est pas due à leur fait ou qu'elle est due à une omission du débiteur lors de l'établissement de la liste prévue au deuxième alinéa de l'article L. 622-6 ; en l'occurrence, il est constant que la procédure de sauvegarde de la société Casa Pizza a été ouverte par un jugement du tribunal de commerce de Montpellier en date du 7 avril 2014, publié au Bodacc le 18 avril 2014 ; la société Licera Reims et M. et Mme X..., qui soulignent à juste titre que la déclaration de créance n'est soumise à aucun formalisme particulier, font valoir que les assignations en reprise d'instance, qu'ils ont fait délivrer, les 7 et 12 mai2014 aux organes de la procédure collective, valent déclaration de leurs créances nées antérieurement au jugement d'ouverture, dès lors que ces assignations comportent la dénonciation de leurs conclusions devant la cour, aux termes desquelles ils sollicitent la fixation de leurs créances au passif de la société Casa Pizza ; pour autant, si l'assignation notamment délivrée à Mme Y..., mandataire judiciaire à la procédure de sauvegarde de la société Casa Pizza, porte dénonciation de la copie des conclusions et du bordereau des pièces déposées devant la cour, elle vaut surtout reprise d'instance à l'égard des organes de la procédure collective, que la société Licera Reims et M. et Mme X... étaient tenus d'appeler en cause en vertu des textes susvisés ; l'assignation, même si elle renvoie aux conclusions déposées devant la cour sollicitant la fixation des créances, n'exprime pas, de façon suffisamment univoque, la volonté des intéressés de déclarer leurs créances entre les mains du mandataire judiciaire, puisqu'elle indique, page 3, que les requérants ont intérêt à assigner les requis en reprise d'instance à telles fins notamment que leur créance soit fixée au montant des sommes qui ont fait l'objet d‘une production ; il n'est pas allégué que le juge-commissaire ait été saisi d'une demande de relevé de forclusion à laquelle il aurait été fait droit et autorisant la société Licera Reims et M. et Mme X... à déclarer leurs créances, sachant qu'indépendamment de la publication au Bodacc du jugement d'ouverture, le conseil de ces derniers a été informé personnellement, par télécopie du 14 avril 2014, de l'ouverture de la procédure de sauvegarde ; les créances éventuelles de restitution, découlant de la demande d'annulation du contrat de franchise, qui ne pourraient naître que du prononcé d'une telle sanction, postérieurement au jugement d'ouverture, ne sont pas affectées par le défaut de déclaration au mandataire judiciaire ; il s'agit, en l'occurrence, des sommes versées en exécution du contrat, dont l'annulation est sollicitée, à savoir la somme de 30 000 € HT, montant du droit d'entrée, et celle de 31 952,87 €, montant des redevances payées au 31 octobre 2009 ; les autres créances indemnitaires, qui visent à réparer, sur le fondement des règles de la responsabilité délictuelle, les préjudices consécutifs à la faute du cocontractant, mais qui ne sont pas des restitutions découlant de l'annulation du contrat, doivent être regardées comme des créances nées antérieurement au jugement d'ouverture ; ces créances, non déclarées, sont inopposables à la procédure collective et il convient dès lors de rejeter les demandes tendant à la fixation de leurs montants » (arrêt, p. 10-11) ;
ALORS QU'aucune forme particulière n'est imposée aux créanciers à la déclaration de créance née antérieurement au jugement d'ouverture laquelle doit être signée par le créancier ou son mandataire et adressée dans un délai de deux mois à compter de la publication au BODACC du jugement d'ouverture au mandataire judiciaire ; qu'ayant relevé que le jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde de la société Casa Pizza avait fait l'objet d'une publication au BODACC le 14 avril 2014, que les créanciers avaient assigné en reprise d'instance le mandataire judiciaire à la procédure de sauvegarde par actes des 7 et 12 mai 2014 et que l'assignation comportait dénonciation de leurs conclusions aux termes desquelles ils sollicitaient la fixation de leurs créances envers de la société Casa Pizza, la cour d'appel qui a considéré, pour rejeter leurs demandes, qu'un tel acte valait « surtout » reprise d'instance à l'égard des organes de la procédure collective et n'exprimait pas de façon « suffisamment univoque » la volonté des exposants de déclarer leurs créances entre les mains du mandataire judiciaire, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations violant ainsi les articles L. 622-24 et L. 622-26 du code de commerce.