LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 décembre 2015), que, par acte du 18 mars 2008, la société civile immobilière Sivese la pêcherie (la SCI) a vendu à M. [B] un immeuble composé de dix appartements destinés à la location ; que, soutenant que l'immeuble était affecté de vices cachés, M. [B] a, après expertise, assigné la SCI en indemnisation ;
Sur le second moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le premier moyen :
Vu les articles 1641 et 1643 du code civil ;
Attendu que, pour rejeter la demande de M. [B] en réparation des désordres affectant les installations électriques, l'arrêt retient qu'il n'est pas prouvé que la SCI exerce à titre professionnel l'activité de vendeur de biens immobiliers, la clause de non-garantie des vices cachés est valable ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si la SCI connaissait au moment de la vente les défauts affectant l'installation électrique, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision de ce chef ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de M. [B] au titre des travaux de réfection des installations électriques , l'arrêt rendu le 9 décembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Sivese la pêcherie aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Sivese la pêcherie et la condamne à payer à M. [B] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept avril deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Haas, avocat aux Conseils, pour M. [B].
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué infirmatif D'AVOIR débouté M. [B] de l'ensemble de ses demandes, notamment celle tendant à voir condamner la SCI Sivese la Pêcherie à lui verser la somme de 45 527,51 euros au titre des travaux de réfection de l'installation électrique ;
AUX MOTIFS QUE l'acte de vente signé le 18 mars 2008 entre la SCI Sivese et M. [B] comporte une clause d'exclusion de garantie des vices cachés dont la SCI Sivese de la Pêcherie se prévaut pour sa part au soutien de son appel principal ; qu'il est ainsi stipulé en page 11 de l'acte que « l'acquéreur, sauf à tenir compte de ce qui peut être indiqué par ailleurs : prendra le bien vendu dans l'état où il se trouvera le jour de l'entrée en jouissance sans aucune garantie de la part du vendeur pour raison : soit de l'état des constructions, de leurs vices même cachés, sous réserve des dispositions législatives ou règlementaires contraires analysées le cas échéant ci-après » ; que cette clause est valable en vertu de l'article 1643 du code civil, sauf si M. [B] rapporte la preuve soit que la SCI Sivese la Pêcherie connaissait l'existence des vices cachés au moment de la vente, soit que la SCI Sivese la Pêcherie est un vendeur professionnel ; qu'il incombe en effet à M. [B] qui se prévaut de la nullité de la clause de rapporter cette preuve ; que sur ce dernier point, si la SCI Sivese la Pêcherie dit avoir été constituée à l'occasion de l'acquisition de l'immeuble litigieux, M. [B] ne justifie pas du contraire et n'apporte aucun élément de preuve de nature à démontrer que la SCI Sivese la Pêcherie aurait précédemment vendu un autre immeuble que celui-ci ou qu'elle serait se serait lancée dans l'activité habituelle d'achat et vente d'immeuble ; qu'au contraire, même si la qualité de l'acquéreur n'est pas un critère de la validité de la clause, la SCI Sivese la Pêcherie verse aux débats neuf matrices cadastrales de nature à montrer que M. [B] est propriétaire de plusieurs biens immobiliers à Villeneuve le Roi ; que la SCI Sivese produit en outre une attestation de M. [J] [K], régulière en la forme du 25 mars 2013 dont il ressort notamment qu'au début de l'année 1999, M. [B] a confié la gestion de son patrimoine immobilier à l'agence dans laquelle [J] [K] travaillait, que lorsque celui-ci a quitté cette agence pour fonder sa propre structure d'administrateur de biens, M. [B] l'a suivi ; que M. [B] a alors confié la gestion de son patrimoine à la SARL SECG dont M. [J] [K] était l'associé ; que M. [J] [K] ajoute que jusqu'à son départ en retraite en 2007, M. [B] n'a pas cessé d'acheter et de vendre des biens immobiliers en menant seul toutes les négociations tant avec les vendeurs qu'avec les acquéreurs ; que cette attestation régulière en la forme, précise et circonstanciée est de nature à démontrer que M. [B] en ce qui le concerne connaît bien le domaine de l'immobilier pour y avoir exercé une pratique récurrente de la négociation et des acquisitions et ventes de biens immobiliers, permettant de retenir une qualification à caractère professionnel ; qu'en tout cas, en l'absence de toute preuve que la SCI Sivese la Pêcherie exerce à titre professionnel l'activité de vendeur de biens immobiliers, la clause stipulée dans l'acte de vente doit être déclarée valable de sorte que M. [B] sera débouté de sa demande en réparation des désordres affectant les installations électriques ;
ALORS, 1°), QUE, même en présence d'un acquéreur professionnel, le vendeur non professionnel ne peut se prévaloir d'une clause d'exclusion de garantie des vices cachés, s'il avait connaissance du vice au moment de la vente ; qu'en se bornant à relever, pour dire valable la clause d'exclusion de garantie stipulée dans l'acte de vente du 18 mars 2008 et débouter M. [B] de sa demande au titre des travaux de réfection de l'installation électrique, qu'il n'était pas démontré que la SCI Sivese la Pêcherie avait la qualité de vendeur professionnel, sans rechercher, comme elle y avait été invitée, si la SCI Sivese la Pêcherie connaissait ou aurait dû connaître, au moment de la vente, les défauts de conformité dont était affectée l'installation électrique, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1641 et 1643 du code civil ;
ALORS, 2°), QUE le juge ne peut fonder sa décision sur une pièce non visée dans les conclusions des parties et dont il ne ressort ni des mentions de l'arrêt ni des bordereaux de communication des pièces qu'elle ait été soumise au débat contradictoire ; qu'en se fondant, pour dire que M. [B] devait recevoir la qualité de professionnel de l'immobilier, sur l'attestation de M. [K], cependant qu'il ne résulte pas des bordereaux de communication des pièces des parties, notamment de celui de la SCI Sivese la Pêcherie, qui n'avait pas davantage fait état de cet élément de preuve dans ses conclusions, que cette attestation ait été régulièrement produite aux débats et soumise au débat contradictoire, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
ALORS, 3°), QUE la clause d'exclusion de garantie des vices cachés doit être écartée lorsque le vendeur connaissait le vice au moment de la vente et que si l'acquéreur, fut-il un professionnel, ne disposait pas de compétences techniques lui permettant de se convaincre de l'existence du vice ; qu'en ne recherchant pas, après avoir retenu que M. [B] pouvait être considéré comme un professionnel de l'immobilier, si les défauts de conformité affectant l'installation électrique étaient décelables et, le cas échéant, si M. [B] disposait des compétences techniques nécessaires pour apprécier la conformité de l'installation électrique, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1641 et 1643 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué infirmatif D'AVOIR débouté M. [B] de l'ensemble de ses demandes, notamment celle tendant à voir condamner la SCI Sivese la Pêcherie à lui verser les sommes de 20 192,70 euros et 27 419,45 euros au titre des travaux de réfection des couvertures ;
AUX MOTIFS QUE l'acte de vente signé le 18 mars 2008 entre la SCI Sivese et M. [B] comporte une clause d'exclusion de garantie des vices cachés dont la SCI se prévaut pour sa part au soutien de son appel principal ; qu'il est ainsi stipulé en page 11 de l'acte que « l'acquéreur, sauf à tenir compte de ce qui peut être indiqué par ailleurs : prendra le bien vendu dans l'état où il se trouvera le jour de l'entrée en jouissance sans aucune garantie de la part du vendeur pour raison : soit de l'état des constructions, de leurs vices même cachés, sous réserve des dispositions législatives ou règlementaires contraires analysées le cas échéant ci-après » ; que cette clause est valable en vertu de l'article 1643 du code civil, sauf si M. [B] rapporte la preuve soit que la SCI l'existence des vices cachés au moment de la vente, soit que la SCI est un vendeur professionnel ; qu'il incombe en effet à M. [B] qui se prévaut de la nullité de la clause de rapporter cette preuve ; que sur ce dernier point, si la SCI dit avoir été constituée à l'occasion de l'acquisition de l'immeuble litigieux, M. [B] ne justifie pas du contraire et n'apporte aucun élément de preuve de nature à démontrer que la SCI aurait précédemment vendu un autre immeuble que celui-ci ou qu'elle serait se serait lancée dans l'activité habituelle d'achat et vente d'immeuble ; qu'au contraire, même si la qualité de l'acquéreur n'est pas un critère de la validité de la clause, la SCI verse aux débats 9 matrices cadastrales de nature à montrer que M. [B] est propriétaire de plusieurs biens immobiliers à Villeneuve le Roi ; que la SCI produit en outre une attestation de M. [J] [K], régulière en la forme du 25 mars 2013 dont il ressort notamment qu'au début de l'année 1999, M. [B] a confié la gestion de son patrimoine immobilier à l'agence dans laquelle M. [K] travaillait, que lorsque celui-ci a quitté cette agence pour fonder sa propre structure d'administrateur de biens, M. [B] l'a suivi ; que M. [B] a alors confié la gestion de son patrimoine à la SARL SECG dont M. [K] était l'associé ; que M. [J] [K] ajoute que jusqu'à son départ en retraite en 2007, M. [B] n'a pas cessé d'acheter et de vendre des biens immobiliers en menant seul toutes les négociations tant avec les vendeurs qu'avec les acquéreurs ; que cette attestation régulière en la forme, précise et circonstanciée est de nature à démontrer que M. [B] en ce qui le concerne connaît bien le domaine de l'immobilier pour y avoir exercé une pratique récurrente de la négociation et des acquisitions et ventes de biens immobiliers, permettant de retenir une qualification à caractère professionnel ; qu'en tous cas, en l'absence de toute preuve que la SCI exerce à titre professionnel l'activité de vendeur de biens immobiliers, la clause stipulée dans l'acte de vente doit être déclarée valable de sorte que M. [B] sera débouté de sa demande en réparation des désordres affectant les installations électriques ; que cette clause n'est cependant pas applicable aux désordres affectant la couverture si M. [B] démontre le dol de la venderesse à son égard en ce qui les concerne ; que M. [B] reproche à la SCI de « n'avoir jamais porté à sa connaissance l'existence de quelconques difficultés liées à des sinistres de type « dégâts des eaux dont certains locataire se seraient plaints » ; que le rapport d'expertise de M. [Q] du 17 juin 2010 met en évidence l'état de vétusté et d'insalubrité de l'ensemble du bâtiment ; que les dégâts qu'il a constaté à l'intérieur du bâtiment ont pour origine la vétusté des couvertures ; que l'expert dit expressément que la vétusté de cet ensemble immobilier « était apparente dans les parties communes, dans les escaliers et les appartements » et que « les pièces de l'appartement sur cour au 1er étage et les réparations de la couverture, objet de l'assignation, étaient visibles depuis les fenêtres, les murs et les plafonds étaient déjà endommagés avant la transaction » ; qu'en commentaire de ses photographies jointes à son rapport, l'expert a mentionné que la toiture, objet de l'assignation d'origine, est visible depuis les fenêtres de l'immeuble sur rue acquis par M. [B] et que l'état de vétusté des couvertures du bâtiment était parfaitement visible depuis les châssis et les fenêtres du bâtiment sur rue (cf. PJ 5 du rapport de M. [Q]) ; que l'expert ajoute en conclusion (p. 17) que : « la simple visite des lieux témoigne d'une vétusté générale des locaux… Toutes les toitures sont anciennes avec diverses réparations. Il est évident que d'importants travaux de réhabilitation étaient à prévoir, à ce sujet M. [B] a sollicité des aides et des subventions auprès de l'ANAH. J'estime sous toutes les réserves d'usage que le mauvais état général était de nature à susciter toute la prudence nécessaire pour l'achet du patrimoine concerné par la présente expertise » ; que compte-tenu de l'état général du bâtiment et des constatations de l'expert, les vices invoqués par M. [B] étaient manifestement apparents et ce d'autant plus que ce dernier a procédé à la visite du bien préalable à son achet accompagné d'un architecte ; que dans ces conditions, il ne justifie pas avoir été trompé par la SCI qui lui aurait dissimulé l'existence de ces désordres apparents ;
ALORS, 1°), QUE, le vice n'est apparent, au sens de l'article 1642 du code civil, que si l'acquéreur non seulement a pu se convaincre non seulement de son existence, au simple examen de la chose vendue, mais également de son ampleur et de ses conséquences ; qu'en se bornant à relever que, selon le rapport d'expertise, l'état de vétusté des toitures étaient apparent et visible, sans rechercher, comme elle y avait été invitée, si en dépit de l'apparence de vétusté des bâtiments et la toiture, M. [B] avait pu se convaincre des réels désordres que cet état avait déjà occasionnés et de l'ampleur des travaux à entreprendre pour y remédier, cependant qu'avant son achat, il n'avait pas visité les appartements touchés par les dégâts occasionnés par l'état de la toiture et que la SCI Sivese la Pêcherie qui en connaissait l'existence, les avait tus, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1641, 1642 et 1643 du code civil ;
ALORS, 2°), QUE le juge doit préciser les éléments de preuve sur lesquels il se fonde ; qu'en affirmant que M. [B] était assisté d'un architecte lors des visites préalables à la vente, sans précisait de quelle pièce elle tirait cette constatation, au demeurant contraire aux pièces produites par M. [B] dont il ressortait que, lors de ces visites, il n'était pas assisté et que ce n'est que postérieurement à la vente qu'il était entré en contact pour la première fois avec M. [R], architecte, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS, 3°), QUE le juge ne peut fonder sa décision sur une pièce non visée dans les conclusions des parties et dont il ne ressort ni des mentions de l'arrêt ni des bordereaux de communication des pièces qu'elle ait été soumise au débat contradictoire ; qu'en se fondant, pour dire que M. [B] devait recevoir la qualité de professionnel de l'immobilier, sur l'attestation de M. [K], cependant qu'il ne résulte pas des bordereaux de communication des pièces des parties, notamment de celui de la SCI Sivese la Pêcherie, qui n'avait pas davantage fait état de cet élément de preuve dans ses conclusions, que cette attestation ait été régulièrement produite aux débats et soumise au débat contradictoire, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
ALORS, 4°), QUE l'acquéreur professionnel n'est pas présumé avoir connaissance des vices dont la chose vendue est affectée et, à son égard, un vice ne peut être considéré comme apparent que si ses compétences techniques lui permettaient d'en déceler l'existence et de se convaincre de son ampleur et de ses conséquences ; qu'en ne recherchant pas si M. [B], qu'elle avait qualifié d'acquéreur professionnel, disposait de compétences techniques lui permettant, en dépit de l'état de vétusté apparent des bâtiments et la toiture, de se convaincre des désordres que cet état avait d'ores et déjà occasionnés et de l'ampleur des travaux à entreprendre pour y remédier, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1641, 1642 et 1643 du code civil.