LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel, que Mme [M], victime d'une agression, a confié la défense de ses intérêts à Mme [N], avocat ; qu'une convention, prévoyant un honoraire de diligences et un honoraire de résultat, a été signée le 8 février 2010 pour la procédure devant le tribunal correctionnel ; qu'à la suite d'un différend sur le montant des honoraires, Mme [M] a saisi le bâtonnier de l'ordre des avocats ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
Attendu que pour fixer à une certaine somme le montant des honoraires de résultat dus par Mme [M], l'ordonnance énonce que la convention du 8 février 2010 concernait la procédure pendante devant le tribunal correctionnel de Saint-Nazaire, qu'un honoraire fixe de 5 000 euros hors taxes était prévu et un honoraire de résultat, venant en complément, était fixé à hauteur de 8 % hors taxes si les sommes obtenues variaient entre 0 et 100 000 euros, 7 % si les sommes obtenues variaient entre 100 000 euros et 300 000 euros et qu'il était précisé que l'intérêt du litige était fixé comme suit : intégralité des sommes réglées à titre définitif ; qu'elle relève encore que par jugement du 24 novembre 2011, le tribunal correctionnel de Saint-Nazaire a condamné l'agresseur de Mme [M] à lui payer en deniers ou quittance la somme de 144 028,24 euros et à payer diverses sommes aux tiers-payeurs et à l'assureur ; qu'elle retient enfin que Mme [N] ne peut soutenir que l'honoraire de résultat doit se calculer en prenant en compte ces dernières sommes et que le tribunal correctionnel a fixé l'intégralité des sommes réglées à titre définitif revenant à Mme [M] à la somme de 144 028,24 euros, dans le litige l'opposant à son agresseur et qu'en application de la convention d'honoraires, l'honoraire de résultat sera fixé à 7 % hors taxes de celle-ci ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si Mme [M] avait effectivement perçu la somme de 144 028,24 euros, alors qu'il avait relevé que la convention prévoyait que l'honoraire de résultat était fixé sur les sommes réglées à titre définitif, le premier président n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 25 février 2014, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ladite ordonnance et, pour être fait droit, les renvoie devant le premier président de la cour d'appel d'Angers ;
Condamne la société [N] aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à Mme [M] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept avril deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Haas, avocat aux Conseils, pour Mme [P], épouse [M]
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'ordonnance attaquée D'AVOIR rejeté les contestations de Mme [M] sur les honoraires de diligences ;
AUX MOTIFS QUE Me [N] a défendu Mme [M] dans plusieurs procédures ; qu'elle a facturé tous les honoraires de diligences, pour un montant total de 14 070 euros HT ; que l'avocate ne demande rien de ce chef car elle a été intégralement payée de ses honoraires ; que Mme [M] ne conteste pas ce fait mais conteste aujourd'hui le coût des diligences facturées ; qu'il n'est pas besoin de rechercher si cette contestation est couverte par la prescription dans la mesure où il est démontré que Mme [M] avait accepté le montant des honoraires, les avaient intégralement réglés, après service rendu, de sorte qu'ils ne peuvent être maintenant réduits à sa demande (2ème Civ., 5 juin 2003, n° 01-15.411) ;
ALORS, 1°), QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en relevant d'office le moyen tiré de ce que les honoraires de diligences avaient été réglés « après service rendu » sans avoir invité les parties à présenter leurs observations sur ce point, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 16 du code de procédure civile ;
ALORS, 2°), QU'en l'absence de convention d'honoraires ou de paiement après service rendu, le simple règlement des sommes réclamées par l'avocat ne fait pas obstacle à la fixation des honoraires exigibles et, le cas échéant, à la restitution des sommes excédant le montant ainsi déterminé ; qu'en considérant que les honoraires de diligences avaient été réglés « après service rendu », sans avoir constaté que les règlements intervenus se rapportaient à des diligences accomplies antérieurement par l'avocate, ce que d'ailleurs celle-ci ne soutenait pas, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1134 du code civil et 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'ordonnance attaquée D'AVOIR fixé à 12 058,04 euros TTC la somme due par Mme [M] au titre de l'honoraire de résultat ;
AUX MOTIFS QUE la convention du 8 février 2010 concernait « la procédure pendante devant le tribunal correctionnel de Saint-Nazaire » ; qu'un honoraire fixe de 5 000 euros HT était prévu et un honoraire de résultat, venant en complément, était fixé à hauteur de 8 % HT si les sommes obtenues variaient entre 0 et 100 000 euros, 7 % si les sommes variaient entre 100 000 et 300 000 euros, etc. ; qu'il était précisé : « l'intérêt du litige est fixé comme suit : intégralité des sommes réglées à titre définitif » ; que le jugement du 24 novembre 2011 du tribunal correctionnel de Saint-Nazaire a condamné l'agresseur de Mme [M] à lui payer en deniers ou quittance la somme de 144 028,24 euros ; qu'il a décerné acte à la caisse primaire d'assurance maladie de Loire-Atlantique de son intervention et a condamné l'agresseur à lui payer la somme de 13 344,73 euros ; qu'il a décerné acte à l'organisme Carpimko de son intervention et a condamné l'auteur à lui payer une somme de 325 428,27 euros ; qu'enfin, il a décerné acte à la compagnie Allianz de son intervention et a condamné l'auteur à lui payer une somme de 229 988,07 euros ; que Me [N] soutient que l'honoraire de résultat doit se calculer en prenant en compte les sommes versées par l'organisme Carpimko et l'assureur Allianz ; que, toutefois, la généralité des termes employés dans la convention d'honoraires ne permet pas de retenir cette interprétation ; que, comme le fait remarquer à juste titre Mme [M], l'organisme Carpimko et l'assureur Allianz, d'une part, devaient verser leurs prestations à la victime indépendamment de toute instance judiciaire, d'autre part, ont obtenu la condamnation de l'auteur au remboursement de leurs débours, litige qui ne concernait pas la victime ; que si Me [N] est intervenue auprès de ces tiers-payeurs, la convention d'honoraires limitait ses honoraires à la seule procédure juridictionnelle ; que le tribunal a fixé « l'intégralité des sommes réglées à titre définitif » revenant à Mme [M] à la somme de 144 028,24 euros dans le litige l'opposant à son agresseur ; qu'en application de la convention d'honoraires, l'honoraire de résultat de Mme [N] sera fixé à 7 % HT de la somme de 144 028,24 euros = 10 081,97 euros HT soit 12 058,04 euros TTC ;
ALORS QUE la convention conclue entre les parties le 8 février 2010 dans le cadre de la procédure alors pendante devant le tribunal correctionnel de Saint-Nazaire, stipulait un honoraire de résultat assis sur « l'intégralité des sommes réglées à titre définitif » ; que, dès lors, en s'abstenant de rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si la condamnation prononcée à hauteur de 144 028,24 au profit de Mme [M] par le jugement du tribunal correctionnel de Saint-Nazaire avait été exécutée, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1134 du code civil.