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26/04/2017 | FRANCE | N°16-11386

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 26 avril 2017, 16-11386


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 novembre 2015), que la société Carrefour hypermarchés (la société Carrefour), qui exploite un hypermarché à [Localité 1], a refusé que les salariés de la société Chadis, qui exploite un hypermarché à l'enseigne E. Leclerc dans la même zone de chalandise, effectuent au sein de son magasin des relevés de prix au moyen d'un appareil permettant la lecture optique des codes-barres des produits ; que la société Chadis a saisi le trib

unal de commerce afin de l'y contraindre ;

Attendu que la société Chadis fait g...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 novembre 2015), que la société Carrefour hypermarchés (la société Carrefour), qui exploite un hypermarché à [Localité 1], a refusé que les salariés de la société Chadis, qui exploite un hypermarché à l'enseigne E. Leclerc dans la même zone de chalandise, effectuent au sein de son magasin des relevés de prix au moyen d'un appareil permettant la lecture optique des codes-barres des produits ; que la société Chadis a saisi le tribunal de commerce afin de l'y contraindre ;

Attendu que la société Chadis fait grief à l'arrêt de dire que les relevés de prix que la société Carrefour doit lui laisser pratiquer ne pourront avoir lieu que du lundi au jeudi inclus alors, selon le moyen :

1°/ que le principe général de fixation des prix par le libre jeu de la concurrence qui commande que les concurrents puissent comparer leurs prix et en conséquence en faire pratiquer des relevés par leurs salariés dans leurs magasins respectifs ne peut être restreint a priori à certains jours de la semaine ; qu'en statuant en sens contraire en disant que la pratique des relevés de prix par les salariés de la société Chadis ne devait être exercée que pendant les journées du lundi au jeudi inclus, à l'exclusion des vendredis et des journées de fin de semaine, au seul motif que cette pratique constituait « une démarche intrusive menée un jour par semaine, qui nécessite d'être conduite de façon discrète et dans des conditions de nature à éviter que l'exploitation du magasin soit perturbée ; qu'il n'est pas contesté que les vendredi, samedi et éventuellement les dimanches, en cas d'ouverture, sont les jours de grande affluence durant lesquels les relevés sont plus visibles pour la clientèle et le plus dérangeant pour les magasins», soit en considérant a priori la nécessité d'un encadrement, par restriction de son exercice, de la pratique des relevés de prix par les salariés de la société Chadis auprès de la société Carrefour hypermarchés pour son établissement de [Localité 1], la cour d'appel a violé l'article L. 410-2 du code du commerce ;

2°/ que l'exercice d'un droit ne peut donner lieu à restriction, sauf abus ; qu'en disant que la pratique des relevés de prix par les salariés de la société Chadis ne devait être exercée que pendant les journées du lundi au jeudi inclus, à l'exclusion des vendredis et des journées de fin de semaine, au seul motif que cette pratique constituait « une démarche intrusive menée un jour par semaine, qui nécessite d'être conduite de façon discrète et dans des conditions de nature à éviter que l'exploitation du magasin soit perturbée ; qu'il n'est pas contesté que les vendredi, samedi et éventuellement les dimanches, en cas d'ouverture, sont les jours de grande affluence durant lesquels les relevés sont plus visibles pour la clientèle et le plus dérangeant pour les magasins », soit en restreignant la pratique des relevés de prix par les salariés de la société Chadis auprès de la société Carrefour hypermarchés pour son établissement de [Localité 1], sans justifier d'un abus dans l'exercice de ce droit, la cour d'appel a violé l'article L. 410-2 du code du commerce ;

3°/ qu'il appartient à celui qui entend limiter l'exercice d'un droit de justifier du manquement au droit en cause, du préjudice effectivement subi par l'exercice de ce droit et d'un lien de causalité entre le manquement et le préjudice ; qu'en l'espèce, la pratique des relevés de prix par des salariés de la société Chadis a été limitée aux seules journées des lundis aux jeudis inclus au seul motif que cette pratique constituait « une démarche intrusive menée un jour par semaine, qui nécessite d'être conduite de façon discrète et dans des conditions de nature à éviter que l'exploitation du magasin soit perturbée ; qu'il n'est pas contesté que les vendredi, samedi et éventuellement les dimanches, en cas d'ouverture, sont les jours de grande affluence durant lesquels les relevés sont plus visibles pour la clientèle et le plus dérangeant pour les magasins », soit sans qu'il soit justifié d'un manquement au droit en cause tenant à la pratique de relevés de prix et du préjudice effectivement subi par la société Carrefour hypermarchés pour son établissement de [Localité 1] en raison de relevés de prix par la société Chadis les vendredis et les journées de fins de semaines ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé ensemble les articles 1382 et 1383 du code civil ;

Mais attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation de la proportionnalité des contraintes inhérentes aux relevés de prix par rapport à l'objectif qu'ils poursuivent, et sans méconnaître les exigences de l'article L. 410-2 du code de commerce, qu'après avoir relevé, d'une part, que les vendredi, samedi et éventuellement dimanche, en cas d'ouverture, sont des jours de grande affluence durant lesquels les relevés sont plus visibles pour la clientèle et plus perturbants pour les magasins, d'autre part, que la nécessité de réaliser des relevés de prix durant ces journées n'était pas établie, la cour d'appel a estimé nécessaire d'en encadrer l'exercice en l'autorisant du lundi au jeudi inclus, à l'exclusion du vendredi et du week-end ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Chadis aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Carrefour hypermarchés la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six avril deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Rémy-Corlay, avocat aux Conseils, pour la société Chadis

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que les relevés de prix que la Société Carrefour Hypermarchés doit laisser pratiquer à la Société Chadis dans son établissement de [Localité 1] ne pourront avoir lieu que du lundi au jeudi inclus, à l'exclusion du vendredi et du week-end ;

AUX MOTIFS QUE : « (…)que la fixation des prix par le libre jeu de la concurrence, prévue par l'article L.410-2 du code de commerce, commande que les concurrents puissent comparer leurs prix et, en conséquence, en faire pratiquer des relevés par leurs salariés dans leurs magasins respectifs ; que la société CARREFOUR HYPERMARCHÉ ne conteste plus que la société CHADIS ait la possibilité de faire pratiquer un relevé de prix par ses salariés, dans son magasin de [Localité 1] ; que la pratique des relevés de prix dans les magasins concurrents a pour finalité de garantir le libre jeu de la concurrence, ce qui implique que cette pratique doit présenter un caractère de réciprocité ; que, s'il n'apparaît pas nécessaire d'imposer que les relevés de prix soit effectués exclusivement par des sociétés panélistes, notamment parce que tout usage déloyal de ces relevés peut être sanctionné sur le fondement des dispositions relatives à la publicité comparative, cependant rien ne s'oppose à ce que cette pratique soit encadrée afin d'empêcher que sa mise en oeuvre soit préjudiciable à la société au sein de laquelle elle s'exerce ; que la pratique des relevés de prix par des salariés d'une société concurrente, même si elle est effectuée dans un espace ouvert au public, est une démarche intrusive menée un jour par semaine, qui nécessite d'être conduite de façon discrète et dans des conditions de nature à éviter que l'exploitation du magasin soit perturbée ; qu'il n'est pas contesté que les vendredi, samedi et éventuellement les dimanches, en cas d'ouverture, sont les jours de grande affluence durant lesquels les relevés sont plus visibles pour la clientèle et le plus dérangeant pour les magasins ; que face à cet inconvénient certain, il n'est pas invoqué qu'il soit nécessaire de réaliser des relevés de prix durant ces journées ; que la société CARREFOUR HYPERMARCHÉ est bien fondée à solliciter que les relevés de prix ne soient pas effectués durant les vendredis et les fins de semaines (…) »

ALORS QUE 1°) le principe général de fixation des prix par le libre jeu de la concurrence qui commande que les concurrents puissent comparer leurs prix et en conséquence en faire pratiquer des relevés par leurs salariés dans leurs magasins respectifs ne peut être restreint a priori à certains jours de la semaine ; qu'en statuant en sens contraire en disant que la pratique des relevés de prix par les salariés de l'exposante ne devait être exercée que pendant les journées du lundi au jeudi inclus, à l'exclusion des vendredis et des journées de fin de semaine, au seul motif que cette pratique constituait « une démarche intrusive menée un jour par semaine, qui nécessite d'être conduite de façon discrète et dans des conditions de nature à éviter que l'exploitation du magasin soit perturbée ; qu'il n'est pas contesté que les vendredi, samedi et éventuellement les dimanches, en cas d'ouverture, sont les jours de grande affluence durant lesquels les relevés sont plus visibles pour la clientèle et le plus dérangeant pour les magasins », soit en considérant a priori la nécessité d'un encadrement, par restriction de son exercice, de la pratique des relevés de prix par les salariés de la Société Chadis auprès de la Société Carrefour Hypermarchés pour son établissement de [Localité 1], la Cour d'appel a violé l'article L. 410-2 du Code du commerce ;

ALORS QUE 2°) l'exercice d'un droit ne peut donner lieu à restriction, sauf abus ; qu'en disant que la pratique des relevés de prix par les salariés de l'exposante ne devait être exercée que pendant les journées du lundi au jeudi inclus, à l'exclusion des vendredis et des journées de fin de semaine, au seul motif que cette pratique constituait « une démarche intrusive menée un jour par semaine, qui nécessite d'être conduite de façon discrète et dans des conditions de nature à éviter que l'exploitation du magasin soit perturbée ; qu'il n'est pas contesté que les vendredi, samedi et éventuellement les dimanches, en cas d'ouverture, sont les jours de grande affluence durant lesquels les relevés sont plus visibles pour la clientèle et le plus dérangeant pour les magasins », soit en restreignant la pratique des relevés de prix par les salariés de la Société Chadis auprès de la Société Carrefour Hypermarchés pour son établissement de [Localité 1], sans justifier d'un abus dans l'exercice de ce droit, la Cour d'appel a violé l'article L. 410-2 du Code du commerce ;

ALORS QUE 3°) il appartient à celui qui entend limiter l'exercice d'un droit de justifier du manquement au droit en cause, du préjudice effectivement subi par l'exercice de ce droit et d'un lien de causalité entre le manquement et le préjudice ; qu'en l'espèce, la pratique des relevés de prix par des salariés de la Société Chadis a été limitée aux seules journées des lundis aux jeudis inclus au seul motif que cette pratique constituait « une démarche intrusive menée un jour par semaine, qui nécessite d'être conduite de façon discrète et dans des conditions de nature à éviter que l'exploitation du magasin soit perturbée ; qu'il n'est pas contesté que les vendredi, samedi et éventuellement les dimanches, en cas d'ouverture, sont les jours de grande affluence durant lesquels les relevés sont plus visibles pour la clientèle et le plus dérangeant pour les magasins », soit sans qu'il soit justifié d'un manquement au droit en cause tenant à la pratique de relevés de prix et du préjudice effectivement subi par la Société Carrefour Hypermarchés pour son établissement de [Localité 1] en raison de relevés de prix par la Société Chadis les vendredis et les journées de fins de semaines ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé ensemble les articles 1382 et 1383 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 16-11386
Date de la décision : 26/04/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 18 novembre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 26 avr. 2017, pourvoi n°16-11386


Composition du Tribunal
Président : Mme Riffault-Silk (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Rémy-Corlay, SCP Odent et Poulet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.11386
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