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26/04/2017 | FRANCE | N°15-29396

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 26 avril 2017, 15-29396


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 octobre 2015), que M. [P] ayant demandé paiement d'une rémunération supplémentaire au titre de diverses inventions de mission réalisées au temps où il était salarié de la société Alstom transport (la société Alstom), celle-ci a contesté en justice l'avis rendu par la Commission nationale des inventions de salariés (la CNIS), que M. [P] avait saisie le 28 mars 2012 ;

Attendu que M. [P] fait grief à l'arrêt de dire irreceva

ble, comme prescrite, son action, au titre de l'invention ayant fait l'objet du breve...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 octobre 2015), que M. [P] ayant demandé paiement d'une rémunération supplémentaire au titre de diverses inventions de mission réalisées au temps où il était salarié de la société Alstom transport (la société Alstom), celle-ci a contesté en justice l'avis rendu par la Commission nationale des inventions de salariés (la CNIS), que M. [P] avait saisie le 28 mars 2012 ;

Attendu que M. [P] fait grief à l'arrêt de dire irrecevable, comme prescrite, son action, au titre de l'invention ayant fait l'objet du brevet FR 2 788 739 alors, selon le moyen :

1°/ qu'il résulte de l'article L. 611-7 du code de la propriété intellectuelle que, en l'absence de toute stipulation dans les conventions collectives, les accords d'entreprise et le contrat de travail, relative aux conditions dans lesquelles le salarié, auteur d'une invention de mission, bénéficie d'une rémunération supplémentaire, le salarié doit bénéficier d'une telle rémunération dont il appartient à la CNIS ou aux tribunaux de fixer le montant sans que puisse lui être opposée la prescription ; qu'en déclarant irrecevable comme prescrite l'action de M. [P] en paiement de la rémunération supplémentaire qui lui était due par la société Alstom sans constater que, en l'absence de stipulations dans la convention collective ou un accord d'entreprise, cette société avait prévu dans le contrat de travail les conditions dans lesquelles M. [P] pouvait faire valoir son droit, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 611-7 du code de la propriété intellectuelle ;

2°/ que la prescription de cinq ans à laquelle est soumise l'action en paiement de la rémunération supplémentaire due à l'inventeur salarié a pour point de départ la date à laquelle celui-ci a disposé des éléments nécessaires au calcul de sa rémunération ; que M. [P] ayant saisi le 28 mars 2012 la CNIS de sa demande de rémunération supplémentaire au titre du brevet FR 2 788 739 déposé le 27 janvier 1999 et délivré le 2 mars 2001, la cour d'appel ne pouvait se fonder, pour déclarer l'action prescrite, ni sur des mémorandums des 1er septembre, 3 novembre et 14 décembre 1998, antérieurs à la date de dépôt du brevet, ni sur un "mail en date du 23 avril 2007" que M. [P] aurait adressé au directeur de la propriété intellectuelle de la société Alstom, ni enfin sur une "information sollicitée en 2009 auprès du chef de projet du marché pour les TER", tous éléments se situant en dehors de la seule période pertinente, allant de la date de dépôt du brevet jusqu'au mois de mars 2007, sans statuer par des motifs inopérants, privant ainsi sa décision de toute base légale au regard des articles 2277 ancien du code civil et L. 611-7 du code de la propriété intellectuelle ;

3°/ que la prescription de cinq ans à laquelle est soumise l'action en paiement de la rémunération supplémentaire due à l'inventeur salarié a pour point de départ la date à laquelle celui-ci a disposé des éléments nécessaires au calcul de sa rémunération ; que pour décider que M. [P] disposait de tels éléments antérieurement au mois de mars 2007, la cour d'appel a retenu qu'il avait joué un rôle dans la définition des offres portant sur les rames de train dans lesquelles était compris l'objet de l'invention brevetée, qu'il avait été rendu destinataire du compte rendu de négociations commerciales avec le Maroc et la Hongrie, que la société Alstom avait publié dans un "point d'information presse" et dans un article du magazine "La Vie du Rail", des informations sur un contrat conclu avec la SNCF en ce qui concerne le nombre de rames et le prix des commandes et qu'il avait reçu deux primes exceptionnelles au titre de ce même brevet, ce qui démontrait qu'il connaissait l'utilisation de son invention ; qu'en statuant par de tels motifs, d'où il résultait uniquement que M. [P] avait connaissance de l'exploitation de son invention et qu'il pouvait former certaines conjectures sur sa valeur, mais qui étaient impropres à caractériser qu'il disposait, dès avant le mois de mars 2007, des éléments nécessaires au calcul de sa rémunération supplémentaire, la cour d'appel, qui n'a pas constaté qu'il avait notamment connaissance de la méthode de calcul de sa rémunération supplémentaire et du chiffre d'affaires total, tous marchés confondus, retiré par la société Alstom de l'exploitation de l'invention, a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 2277 ancien du code civil et L. 611-7 du code de la propriété intellectuelle ;

4°/ que la prescription de cinq ans à laquelle est soumise l'action en paiement de la rémunération supplémentaire due à l'inventeur salarié a pour point de départ la date à laquelle celui-ci a disposé des éléments nécessaires au calcul de sa rémunération ; que pour décider que M. [P] disposait de tels éléments antérieurement au mois de mars 2007, la cour d'appel a retenu qu'il avait perçu le 14 juin 2000 une prime exceptionnelle pour le brevet 9900885 "Rame ferroviaire modulaire et convoi ferroviaire formé de telles rames" de 3 300 francs et le 16 avril 2003 une seconde prime de 1 507,50 euros au même titre et pour le même brevet, ce qui démontrait en tant que de besoin qu'il connaissait l'utilité de son invention ; qu'en statuant par de tels motifs fondés sur l'application de l'instruction technique n° 8 de la société Gecalsthom du 28 mai 1991 qui est un document unilatéral interne de l'employeur prévoyant le versement de ces deux primes, la cour d'appel, qui n'a pas constaté que ces instructions, qui ne pouvaient valoir accord d'entreprise, étaient opposables à M. [P] faute de lui avoir été communiquées, a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 2277 ancien du code civil et L. 611-7 du code de la propriété intellectuelle ;

5°/ qu'il appartient à l'employeur de prévoir dans le contrat individuel de travail les conditions dans lesquelles le salarié auteur de l'invention bénéficie d'une invention supplémentaire, et en tout cas, de lui faire connaître les éléments propres à lui permettre de calculer le montant de cette rémunération, faute de quoi la prescription ne peut trouver application ; que la cour d'appel, qui a énoncé que, hormis une confirmation d'une information sollicitée en 2009 auprès du chef de projet d'un marché, M. [P] n'avait jamais sollicité d'informations complémentaires sur l'exploitation du brevet concerné, a violé les articles 2277 ancien du code civil et L. 611-7 du code de la propriété intellectuelle ;

6°/ que la prescription ne court pas contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement quelconque résultant soit de la loi soit de la convention ou de la force majeure ; que la cour d'appel a déclaré irrecevable l'action de M. [P] en retenant que celui-ci "n'a jamais sollicité d'informations complémentaires sur l'exploitation du brevet concerné" ; que M. [P] n'ayant quitté la société Alstom qu'en 2010 pour prendre sa retraite et cette société ne respectant toujours pas à cette date les dispositions de l'article L. 611-7 du code de la propriété intellectuelle, la cour d'appel, qui n'a pas pris en compte le lien de subordination inhérent au contrat de travail empêchant dans les circonstances de l'espèce M. [P] de solliciter des éléments sur l'exploitation du brevet ou d'engager une action avant son départ de la société en raison du risque important de représailles à son encontre, M. [P] étant nécessairement conduit à faire valoir, dans le cadre de cette action, que la société Alstom ne respectait pas les dispositions d'ordre public de l'article L. 611-7 du code de la propriété intellectuelle, a privé sa décision de toute base légale au regard de ce texte et de l'article 2277 ancien du code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que le moyen tiré du point de départ du délai de la prescription, qui n'a pas été invoqué devant les juges du fond, est nouveau et mélangé de fait ;

Attendu, en deuxième lieu, que les deuxième et cinquième branches du moyen s'attaquent à des motifs surabondants ;

Attendu, en troisième lieu, que le grief ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine des juges du fond quant à la suffisance des éléments dont M. [P] avait connaissance avant le mois de mars 2007 ;

Attendu, en quatrième lieu, que le moyen ne saurait faire grief à la cour d'appel, qui s'est bornée à constater les paiements dont elle fait état, de faire une application normative d'un document auquel elle ne s'est pas référée ;

Et attendu, enfin, que le grief pris d'une suspension de la prescription, est nouveau, et mélangé de fait, en ce qu'il implique l'examen des éléments propres à justifier d'une crainte de représailles en cas de réclamation du salarié au temps de son emploi ;

D'où il suit qu'irrecevable en ses première et sixième branches, et inopérant en ses deuxième et cinquième branches, le moyen n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [P] aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six avril deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Bertrand, avocat aux Conseils, pour M. [P].

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable comme prescrite l'action en paiement de la rémunération supplémentaire de Monsieur [P] au titre de la première invention ayant fait l'objet du brevet n° FR 2 788 739 ;

AUX MOTIFS QUE les parties s'accordent à considérer que la rémunération supplémentaire réclamée par Monsieur [P] constitue une créance de nature salariale et que l'action en paiement y afférent est, conformément à l'ancien article 2277 ancien du code civil, soumise à prescription quinquennale ; que le point de départ du délai de prescription correspond au jour où le salarié disposait des éléments nécessaires au calcul de la rémunération supplémentaire qu'il réclame ; qu'en l'espèce, il résulte des éléments versés aux débats que la demande de brevet concernant cette invention a été déposée le 27 janvier 1999 et le brevet délivré le 2 mars 2001 ; qu'à partir de l'année 2000, date à laquelle l'invention a été primée, Monsieur [P] était responsable technique des offres au sein de la société Alstom mais il ressort de son entretien d'évaluation du 22 août 2000 que, parmi les objectifs techniques liés à sa fonction, figurait celui de "participer activement à la définition des outils de surveillance et de maîtrise du Carry Over Coradia outil développé pour fin 2000", dont fait partie notamment le matériel Coradia Duplex objet de l'invention en cause ; que par ailleurs, dans une note du 12 décembre 2000 Monsieur [P] a recensé les avantages du Coradia Duplex à la demande du directeur des offres ; qu'il a également rédigé le 12 mai 2005 un tableau des charges prévisionnelles des offres, lequel le mentionne en charge de fonctions techniques mais aussi de management technique des équipes, d'analyse marketing produit et d'analyse des besoins ; qu'il reconnaît avoir été destinataire du compte rendu de réunion du 7 juin 2001 relative aux négociations avec le Maroc quant au Coradia Duplex, réunion au cours de laquelle ont été abordés les points techniques et commerciaux concernant les paiements et les délais ; qu'il a également participé aux négociations avec la Hongrie, du moins été destinataire de l'offre telle que contenue dans le document du 1er septembre 2004 qui fait état de chiffres et du nombre de trains concernés par le projet ; que, d'ailleurs, dès 1998, Monsieur [P] a été informé par le service Recherches et développements des dépenses et des coûts de certaines études de développement comme en témoignent les mémorandums internes des 1er septembre, 3 novembre et 14 décembre 1998 ; que, de surcroît, les deux offres remportées en 2000 par la société Alstom pour le Coradia Duplex, qui ont donné lieu à l'exploitation de l'invention de l'intimé, sont issues d'appels d'offres publics dans lesquels le nombre de voitures commandées et le montant des commandes sont indiqués ; que le 5 juillet 2006, la société Alstom, procédant par voie d'informations presse, faisait état de la commande par la SNCF de 70 nouvelles voitures TER à deux niveaux pour un montant de 135 millions d'euros, ajoutant que la commande concernait 21 nouvelles rames à puissance répartie du modèle Coradia Duplex TM : 7 rames de 4 voitures et 14 rames de 3 voitures, que ce contrat porte le nombre de voitures commandées depuis 2000 à 487 sur les 629 prévues au terme du programme en 2009, le montant total des commandes s'élevant quant à lui à 727 millions d'euros et que notamment le site de [Localité 1], sur lequel travaillait Monsieur [P] en tant que responsable des offres Coradia Duplex, était impliqué dans l'exécution du contrat ; que ces informations étaient déjà contenues dans un article du magazine "La Vie du Rail" du 24 mars 2004 ; que par mail en date du 23 avril 2007, Monsieur [P] écrivait au directeur de la propriété intellectuelle de la société Alstom pour lui faire part de son mécontentement suite à la célébration de la 100ème rame Coradia Duplex, à laquelle il n'a pas été associé, indiquant que celui-ci a fait l'objet de plusieurs contrats (environ 2 milliards d'euros), étant relevé que par la suite, hormis une confirmation de cette information sollicitée en 2009 auprès du chef de projet du marché pour les TER, il n'a jamais sollicité d'informations complémentaires sur l'exploitation du brevet concerné, évaluant même le chiffre d'affaires réalisé par la société Alstom du fait de son invention entre 2, 5 et 3 milliards d'euros depuis 2000, et la marge brute réalisée pour les train Coradia Duplex Ter à 28 % ; qu'enfin, Monsieur [P] a perçu le 14 juin 2000 une prime exceptionnelle pour le brevet 9900885 "Rame ferroviaire modulaire et convoi ferroviaire formé de telles rames" de 3.300 F et le 16 avril 2003 une seconde prime de 1.507,50 euros au même titre et pour le même brevet, ce qui démontre en tant que de besoin qu'il connaissait l'utilité de son invention ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que Monsieur [P] avait non seulement connaissance de l'exploitation de son invention mais disposait également des éléments nécessaires au calcul de la rémunération supplémentaire qu'il réclame, et ce antérieurement au mois de mars 2007 ; qu'en conséquence, il y a lieu d'infirmer le jugement et de déclarer irrecevable comme prescrite l'action en paiement de rémunération supplémentaire de Monsieur [P] engagée devant la CNIS le 28 mars 2012, au titre de la première invention ayant fait l'objet du brevet n° FR 2 788 739 arrêt attaqué p. 5 al. 3 à 6 et p. 6 al. 1 à 6) ;

ALORS, d'une part, QU'il résulte de l'article L.611-7 du Code de la propriété intellectuelle que, en l'absence de toute stipulation dans les conventions collectives, les accords d'entreprise et le contrat de travail, relative aux conditions dans lesquelles le salarié, auteur d'une invention de mission, bénéficie d'une rémunération supplémentaire, le salarié doit bénéficier d'une telle rémunération dont il appartient à la Commission nationale des inventions de salariés ou aux tribunaux de fixer le montant sans que puisse lui être opposée la prescription ; qu'en déclarant irrecevable comme prescrite l'action de Monsieur [P] en paiement de la rémunération supplémentaire qui lui était due par la société Alstom sans constater que, en l'absence de stipulations dans la convention collective ou un accord d'entreprise, cette société avait prévu dans le contrat de travail les conditions dans lesquelles Monsieur [P] pouvait faire valoir son droit, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L.611-7 du Code de la propriété intellectuelle ;

ALORS, d'autre part et subsidiairement, QUE la prescription de cinq ans à laquelle est soumise l'action en paiement de la rémunération supplémentaire due à l'inventeur salarié a pour point de départ la date à laquelle celui-ci a disposé des éléments nécessaires au calcul de sa rémunération ; que Monsieur [P] ayant saisi le 28 mars 2012 la Commission nationale des inventions de salariés de sa demande de rémunération supplémentaire au titre du brevet FR 2 788 739 déposé le 27 janvier 1999 et délivré le 2 mars 2001, la cour d'appel ne pouvait se fonder, pour déclarer l'action prescrite, ni sur des mémorandums des 1er septembre, 3 novembre et 14 décembre 1998, antérieurs à la date de dépôt du brevet, ni sur un "mail en date du 23 avril 2007" que Monsieur [P] aurait adressé au directeur de la propriété intellectuelle de la société Alstom, ni enfin sur une "information sollicitée en 2009 auprès du chef de projet du marché pour les TER", tous éléments se situant en dehors de la seule période pertinente, allant de la date de dépôt du brevet jusqu'au mois de mars 2007, sans statuer par des motifs inopérants, privant ainsi sa décision de toute base légale au regard des articles 2277 ancien du Code civil et L.611-7 du Code de la propriété intellectuelle ;

ALORS, de troisième part et toujours subsidiairement, QUE la prescription de cinq ans à laquelle est soumise l'action en paiement de la rémunération supplémentaire due à l'inventeur salarié a pour point de départ la date à laquelle celui-ci a disposé des éléments nécessaires au calcul de sa rémunération ; que pour décider que Monsieur [P] disposait de tels éléments antérieurement au mois de mars 2007, la cour d'appel a retenu qu'il avait joué un rôle dans la définition des offres portant sur les rames de train dans lesquelles était compris l'objet de l'invention brevetée, qu'il avait été rendu destinataire du compte rendu de négociations commerciales avec le Maroc et la Hongrie, que la société Alstom avait publié dans un "point d'information presse" et dans un article du magazine "La Vie du Rail", des informations sur un contrat conclu avec la SNCF en ce qui concerne le nombre de rames et le prix des commandes et qu'il avait reçu deux primes exceptionnelles au titre de ce même brevet, ce qui démontrait qu'il connaissait l'utilisation de son invention ; qu'en statuant par de tels motifs, d'où il résultait uniquement que Monsieur [P] avait connaissance de l'exploitation de son invention et qu'il pouvait former certaines conjectures sur sa valeur, mais qui étaient impropres à caractériser qu'il disposait, dès avant le mois de mars 2007, des éléments nécessaires au calcul de sa rémunération supplémentaire, la cour d'appel, qui n'a pas constaté qu'il avait notamment connaissance de la méthode de calcul de sa rémunération supplémentaire et du chiffre d'affaires total, tous marchés confondus, retiré par la société Alstom de l'exploitation de l'invention, a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 2277 ancien du Code civil et L.611-7 du Code de la propriété intellectuelle ;

ALORS, de quatrième part et toujours subsidiairement, QUE la prescription de cinq ans à laquelle est soumise l'action en paiement de la rémunération supplémentaire due à l'inventeur salarié a pour point de départ la date à laquelle celui-ci a disposé des éléments nécessaires au calcul de sa rémunération ; que pour décider que Monsieur [P] disposait de tels éléments antérieurement au mois de mars 2007, la cour d'appel a retenu qu'il avait perçu le 14 juin 2000 une prime exceptionnelle pour le brevet 9900885 « Rame ferroviaire modulaire et convoi ferroviaire formé de telles rames » de 3 300 francs et le 16 avril 2003 une seconde prime de 1 507,50 euros au même titre et pour le même brevet, ce qui démontrait en tant que de besoin qu'il connaissait l'utilité de son invention ; qu'en statuant par de tels motifs fondés sur l'application de l'instruction technique n° 8 de la société Gecalsthom du 28 mai 1991 qui est un document unilatéral interne de l'employeur prévoyant le versement de ces deux primes, la cour d'appel, qui n'a pas constaté que ces instructions, qui ne pouvaient valoir accord d'entreprise, étaient opposables à Monsieur [P] faute de lui avoir été communiquées, a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 2277 ancien du Code civil et L. 611-7 du Code de la propriété intellectuelle ;

ALORS, de cinquième part et toujours subsidiairement, QU'il appartient à l'employeur de prévoir dans le contrat individuel de travail les conditions dans lesquelles le salarié auteur de l'invention bénéficie d'une invention supplémentaire, et en tout cas, de lui faire connaitre les éléments propres à lui permettre de calculer le montant de cette rémunération, faute de quoi la prescription ne peut trouver application ; que la cour d'appel, qui a énoncé que, hormis une confirmation d'une information sollicitée en 2009 auprès du chef de projet d'un marché, Monsieur [P] n'avait jamais sollicité d'informations complémentaires sur l'exploitation du brevet concerné, a violé les articles 2277 ancien du Code civil et L.611-7 du Code de la propriété intellectuelle ;

ALORS, plus subsidiairement encore et enfin, QUE la prescription ne court pas contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement quelconque résultant soit de la loi soit de la convention ou de la force majeure ; que la cour d'appel a déclaré irrecevable l'action de Monsieur [P] en retenant que celui-ci « n'a jamais sollicité d'informations complémentaires sur l'exploitation du brevet concerné » ; que Monsieur [P] n'ayant quitté la société Alstom qu'en 2010 pour prendre sa retraite et cette société ne respectant toujours pas à cette date les dispositions de l'article L. 611-7 du Code de la Propriété Intellectuelle, la cour d'appel, qui n'a pas pris en compte le lien de subordination inhérent au contrat de travail empêchant dans les circonstances de l'espèce Monsieur [P] de solliciter des éléments sur l'exploitation du brevet ou d'engager une action avant son départ de la société en raison du risque important de représailles à son encontre, Monsieur [P] étant nécessairement conduit à faire valoir, dans le cadre de cette action, que la société Alstom ne respectait pas les dispositions d'ordre public de l'article L.611-7 du Code de la propriété intellectuelle, a privé sa décision de toute base légale au regard de ce texte et de l'article 2277 ancien du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 15-29396
Date de la décision : 26/04/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 30 octobre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 26 avr. 2017, pourvoi n°15-29396


Composition du Tribunal
Président : Mme Riffault-Silk (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Bertrand, SCP Hémery et Thomas-Raquin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.29396
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