LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu selon l'arrêt attaqué (Douai, 11 février 2016), que, par acte reçu le 28 juillet 1997 par un officier de l'état civil de la commune de son domicile en France, M. [E] [V], né à [Localité 1] (Zaïre) le [Date naissance 1] 1950, a déclaré reconnaître M. [M] [V], né à [Localité 1] le [Date naissance 2] 1980, de [D] [S] ; que, le 21 décembre 1999, ce dernier s'est vu délivrer un certificat de nationalité française comme étant né le [Date naissance 2] 1980 à [Localité 2] (République démocratique du Congo), son père étant français par déclaration ; que le ministère public a engagé une action négatoire, mettant en cause la validité de l'extrait d'acte de naissance produit ;
Sur la recevabilité du pourvoi, contestée par la défense :
Attendu que le ministère public soutient que M. [M] [V] n'a pas déposé au ministère de la justice copie de son pourvoi ;
Attendu que M. [M] [V] justifie de l'accomplissement des formalités de l'article 1043 du code de procédure civile ;
D'où il suit que le pourvoi est recevable ;
Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu que M. [M] [V] fait grief à l'arrêt de constater son extranéité ;
Attendu que la cour d'appel a énoncé que l'intéressé avait produit trois extraits d'actes de naissance comportant des indications discordantes sur le centre d'état civil qui conservait cet acte et sur les références de celui-ci dans le registre d'état civil ; qu'elle a relevé que le jugement supplétif soumis à son appréciation devait être écarté dès lors qu'il n'avait pas été légalisé et qu'il avait été obtenu en fraude à la loi ; qu'elle en a souverainement déduit que l'état civil de l'intéressé, entaché d'irrégularité, ne permettait pas de l'identifier avec certitude, en sorte que la reconnaissance faite par M. [E] [V] le 28 juillet 2007 ne pouvait produire aucun effet acquisitif de nationalité ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [V] aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt avril deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat aux Conseils, pour M. [V].
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir constaté l'extranéité de Monsieur [M] [V] et ordonné la mention prévue à l'article 28 du code civil ;
Aux motifs que l'article 30 du code civil dispose que la charge de la preuve, en matière de nationalité française, incombe à celui dont la nationalité est en cause ; que toutefois, cette charge incombe à celui qui conteste la qualité de français à un individu titulaire d'un certificat de nationalité française délivré conformément aux articles 31 et suivants ; que M. [M] [V] est titulaire d'un certificat de nationalité française n° 1239/1999 qui lui a été délivré le 21 décembre 1999 par le greffier en chef du tribunal d'instance de Roubaix sur le fondement de l'article 18 du code civil aux motifs que la filiation de l'intéressé est établie à l'égard de son père, lui-même français en vertu de l'article 37-1 du code de la nationalité française par déclaration souscrite devant le tribunal d'instance de Tourcoing le 19 avril 1979 sous le numéro 16663/79 (dossier n° 8520DX79) ; qu'il incombe donc au ministère public d'établir la preuve de l'extranéité de l'intéressé ; qu'aux termes de l'article 47 du code civil, tout acte de l'état civil des français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ; que pour justifier de son état civil et de sa filiation à l'égard de M. [E] [V] l'intéressé avait notamment produits : - un extrait, daté du 5 février 1991, d'un acte de naissance n° 225 issu du registre des naissances de la commune de [Localité 1] (République du Zaïre), volume II, folio IV, selon lequel [M] [V] est né le [Date naissance 2] 1980 à [Localité 1] de [E] [V] et de [D] [S], - un acte de reconnaissance paternelle n° 0579 issu des registres d'état civil de l'année 1997 de la commune [Localité 3] (France, Nord,) aux termes duquel le 28 juillet 1997 à 13 heures 45, [E] [X] [V], né à [Localité 1] (Zaïre) le [Date naissance 1] 1950, cuisinier, domicilié à [Adresse 3], a déclaré reconnaître pour son fils [M] [V], né à [Localité 1] le [Date naissance 2] 1980 de [D] [S] ; que l'appelant verse aux débats : - un courrier du 23 mai 2006, adressé par le greffier en chef du tribunal d'instance d Lille au consulat général de France à [Localité 1] par la voie diplomatique, rédigé en ces termes : « je vous prie aux lieu et place d'une authentification d'un extrait d'acte (nous n'avons pas d'autre élément) de bien vouloir procéder auprès des autorités locales à la levée de l'acte de naissance de [V] [D], né le [Date naissance 2] 1980 à [Localité 1], zone de [Localité 2], Congo, et de m'en adresser une copie intégrale originale », - un document censé avoir été reçu en réponse à ce courrier, à savoir un exemplaire de l'extrait d'acte de naissance susvisé, daté du 5 février 1991, revêtu de la mention manuscrite « faux » accompagnée d'un cachet illisible, à l'exception des mots « Etat civil », d'une signature et de la date du 20/9/2006 ; qu'il est curieux que ce document ait été adressé au greffier en chef du tribunal d'instance de Lille en réponse à son courrier du 23 mai 2006 alors que ce dernier demandait non pas une authentification d'un extrait d'acte de naissance, dont il ne semblait pas vouloir se dessaisir, mais une copie intégrale de l'acte de naissance, à moins qu'il ait envoyé une photocopie de l'extrait d'acte de naissance qu'il détenait et que ce soit cette copie qui lui ait été retournée revêtue de la mention « faux », en raison peut-être de l'inexistence de l'acte en question ; que le défaut de production du courrier de réponse du consulat général de France à [Localité 1] prive la Cour de toute explication à ce sujet ; que les défauts de conformité, allégués par le procureur général, de l'extrait susvisé de l'acte n° 225 au code de la famille congolais ne sont pas démontrés dès lors que rien ne permet de vérifier que le texte de chacun des articles visés par l'appelant, reproduit sur une feuille ne comportant aucune autre référence, est bien issu du bon code, le code de l'Etat dans lequel est censé avoir été dressé l'acte, c'est-à-dire la République Démocratique du Congo, autrefois Congo belge ou Congo-
[Localité 1] puis Zaïre, alors même que l'adjectif « congolais » peut désigner ce qui se rapporte à la République du Congo, ancien Congo français ou Congo-Brazzaville ; qu'en revanche, le ministère public justifie, par la production des pièces en question de ce que : - pour obtenir un certificat de nationalité française pour son fils, M. [M] [V] a produit un extrait de son propre acte de naissance issu du registre des naissances de la commune de [Localité 1], que le centre d'état-civil ayant délivré l'extrait ([Localité 4] au lieu de [Localité 2]) que les références du registre de l'acte son différentes (volume V, folio 1780997 acte 02254 au lieu de volume II, folio IV acte 225) – que pour obtenir une carte d'identité, il a produit un extrait encore différent de son acte de naissance tant en ce qui concerne le centre de l'état-civil ayant délivré l'extrait ([Localité 5] [sic] au lieu de [Localité 2]) que les références du registre et de l'acte (volume I/99, folio II, acte IV) ; que la production de trois extraits d'acte de naissance différents prive ceux-ci de caractère probant au regard de l'article 47 précité du code civil ; que par ailleurs, le ministère public fait encore valoir à juste titre que le jugement supplétif d'acte de naissance rendu le 31 mai 2007 par le tribunal de grande instance de Kinshasa Matete que l'intimé a produit devant les premiers juges, doit être considéré comme ayant été obtenu par fraude et que sa régularité au regard de l'ordre public international ne peut être retenue dès lors qu'il ressort dudit jugement que l'intéressé, dont on a vu supra qu'il avait produit en France trois extraits différents d'acte de naissance, a présenté une requête aux fins de voir ordonner à l'officier d'état-civil de lui établir un acte de naissance en exposant qu'il est né à [Localité 1] le [Date naissance 2] 1980 de [E] [V] et de [D] [S] mais que ses parents n'ont pu déclarer sa naissance dans le délai de la loi ; qu'en toute hypothèse ce jugement n'a pas fait l'objet d'une légalisation, d'abord par un notaire public ou le ministère de la justice et le ministère des affaires étrangères congolais, ensuite par l'ambassade de France, formalité nécessaire pour lui permettre de produire effet en France ; que la filiation de M. [M] [V] avec M. [E] [V], dont la nationalité française n'est pas discutée dans la présente instance, n'étant pas valablement établie, il ne peut être reconnu comme français et qu'il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris ;
Alors, d'une part, que la filiation paternelle peut être établie par une reconnaissance volontaire de paternité, valable dès lors qu'elle a été faite en conformité avec la loi personnelle de son auteur ; que la Cour d'appel qui constate qu'à l'appui de sa demande de certificat de nationalité française, Monsieur [M] [V] avait produit l'acte de reconnaissance volontaire de paternité établi par son père alors de nationalité française par déclaration devant l'officier d'état civil de la commune [Localité 3] ne pouvait estimer, ,quelles que soient les critiques susceptibles d'être formulées à l'encontre des extraits d'acte de naissance utilisés par Monsieur [M] [V] dans le cadre de diverses démarches administratives et notamment pour l'obtention de ce certificat de nationalité et à l'encontre du jugement supplétif d'acte de naissance rendu le 31 mai 2007 par le tribunal de grande instance de [Localité 1], que sa filiation avec Monsieur [E] [V] n'était pas valablement établie sans méconnaître les articles 311-17 et 316 du code civil ;
Alors, en toute hypothèse, qu'en statuant par de tels motifs inopérants, en l'absence de toute précision quant à la portée juridique que la loi congolaise attache aux mentions de ces actes de naissance, et sans rechercher si la filiation de Monsieur [M] [V] résultant de cette reconnaissance de paternité avait été régulièrement contestée par le ministère public dans les conditions prévues aux articles 332 et 333 du code civil, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions précitées ;