LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° F 16-87.722 F-P+B
N° 954
FAR
21 MARS 2017
CASSATION
M. GUÉRIN président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt et un mars deux mille dix-sept, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller BELLENGER, les observations de Me BOUTHORS, avocat en la Cour et les conclusions de Mme l'avocat général LE DIMNA ;
CASSATION sur le pourvoi formé par le procureur général près la cour d'appel de Versailles, contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de ladite cour, en date du 16 décembre 2016, qui, dans la procédure d'extradition suivie contre M. [E] [D] à la demande du gouvernement éthiopien, a émis un avis défavorable ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 696-3 du code de procédure pénale ;
Vu ledit article, ensemble l'article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'il se déduit du premier de ces textes qu'il appartient aux juridictions françaises de rechercher si les faits visés dans la demande d'extradition sont punis par la loi française d'une peine criminelle ou correctionnelle, indépendamment de la qualification donnée par l'Etat requérant ;
Attendu que, selon le second, tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que le 20 février 2015, les autorités judiciaires d'Ethiopie ont formé une demande d'arrestation provisoire de M. [E] [D] suite à un mandat d'arrêt décerné le 22 octobre 2014 par le tribunal de première instance d'Addis-Abeba pour des faits d'escroquerie commis entre le 9 décembre 2013 et le 29 janvier 2014 ; que la demande d'extradition en date du 18 novembre 2016 indique que M. [D], qui s'était fait remettre de l'argent par trois personnes avec la fausse promesse d'importer des camions, avait émis en leur faveur des chèques de garantie qui se sont révélés sans provision, avant de prendre la fuite à l'étranger ; que, placé sous écrou extraditionnel, M. [D] n'a pas consenti à sa remise ;
Attendu que, pour émettre un avis défavorable, l'arrêt énonce que l'émission de chèque sans garantie de fonds, c'est-à-dire de chèques sans provision, qui n'est pas incriminée par le droit français, n'est susceptible d'aucune qualification pénale et qu'il n'appartient pas à la juridiction française de se substituer aux autorités judiciaires requérantes dans la qualification choisie et visée ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait de qualifier les faits au regard de la loi française et qu'il résultait de ses propres constatations qu'ils pouvaient constituer, en droit français, le délit d'escroquerie, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, en date du 16 décembre 2016, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Bellenger, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.