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01/03/2017 | FRANCE | N°15-24834

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 01 mars 2017, 15-24834


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société [Q] du désistement partiel de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre les arrêts du 30 octobre 2013, 14 avril 2010 et 8 septembre 2010 de la cour d'appel de Paris ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 janvier 2015), que la société des Pétroles Shell (la société Shell) a donné en location-gérance à la société [Q] une station-service, de 1989 à 2006 ; que le dernier contrat était conclu le 7 mars 2005 pour une durée limitée et prÃ

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société [Q] du désistement partiel de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre les arrêts du 30 octobre 2013, 14 avril 2010 et 8 septembre 2010 de la cour d'appel de Paris ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 janvier 2015), que la société des Pétroles Shell (la société Shell) a donné en location-gérance à la société [Q] une station-service, de 1989 à 2006 ; que le dernier contrat était conclu le 7 mars 2005 pour une durée limitée et prévoyait la vente de carburants sous le régime du mandat et l'exercice des autres activités sous le régime de la location-gérance ; que la société [Q] a dénoncé ce contrat avant son terme ; qu'invoquant des conditions d'exploitation ne lui permettant pas de dégager des résultats positifs et l'absence de renonciation valable à l'application de l'article 2000 du code civil, la société [Q] a assigné la société Shell en paiement de diverses sommes au titre des pertes du mandat, de la prime de fin de contrat et en réparation de son préjudice ;

Attendu que la société [Q] fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes de remboursement des pertes d'exploitation antérieures à mars 2005 alors, selon le moyen, que le juge ne peut rejeter la demande en paiement d'une créance dont il a constaté l'existence dans son principe au motif qu'aucun élément ne lui permettrait de l'évaluer ; qu'en déboutant la société [Q] de sa demande en paiement des pertes d'exploitation qu'elle avait subies de 1994 à 2005 au motif que les chiffres qu'elle avançait ne pouvaient être retenus, bien qu'elle ait admis l'existence en son principe de la créance de la société [Q] sur la société pétrolière, qui avait conservé la maîtrise économique de l'activité de vente de carburant et devait donc supporter les pertes d'exploitation essuyées par l'exploitant de 1994 à 2005 dès lors qu'aucune faute de gestion de la part de ce dernier n'était démontrée et qu'il lui ait appartenu de la chiffrer, la cour d'appel a violé l'article 4 du code civil ;

Mais attendu qu'après avoir énoncé que la société pétrolière, qui avait conservé la maîtrise économique de l'activité de vente de carburants par la fixation des prix et les modalités de vente des carburants, devait en principe supporter les pertes d'exploitation essuyées par l'exploitant qui ne parviendrait pas à un résultat bénéficiaire, du fait notamment de l'insuffisance de commissions destinées à rémunérer son travail et ce, en dehors de toute faute de gestion de sa part dont la preuve n'était pas rapportée, l'arrêt retient que les chiffres avancés dans les courriers produits par la société [Q] étaient très éloignés des chiffres des pertes qu' elle demandait à la société Shell de supporter et que les tableaux des pertes d'exploitation dues à l'activité sous mandat pour la période allant de 1996 à 2005, que la société [Q] produisait, n'étaient pas avalisés par un expert comptable, de sorte qu'ils ne constituent pas la preuve suffisante des pertes invoquées au titre de l'activité sous mandat pendant la période considérée ; qu'il ajoute qu'une expertise judiciaire longue et coûteuse, dont la société [Q] demande à ne pas faire l'avance des frais, ne peut être ordonnée pour suppléer la carence d'une partie dans l'administration de la preuve qui lui incombe et qui n'est pas faite concernant le montant des pertes qu'elle invoque ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations souveraines de la valeur et de la portée des éléments de preuve soumis au débat contradictoire, faisant ressortir que la société [Q] ne justifiait pas de l'existence de la créance dont elle demandait le paiement, la cour d'appel a pu statuer comme elle a fait ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société [Q] aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la société des Pétroles Shell la somme de 3 000 euros et rejette sa demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du premier mars deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour la société [Q].

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la société [Q] de ses demandes en remboursement des pertes d'exploitation antérieures à mars 2005 ;

AUX MOTIFS QU'il convient de retenir que les seuls contrats antérieurs à celui de 2005 qui sont concernés par les demandes sont ceux produits aux débats afférents à la station [Localité 1] signé le 24 août 1994 à effet du 15 septembre 1994, le 24 août 1997 à effet du 15 septembre 1997 (contrat prorogé au 6 décembre 2001) et le 7 décembre 2002, celui afférent à la station de [Localité 2] ayant été signé en août 1980 par M. [Q] seul qui n'est pas dans la cause en tant que personne physique ; que la société des pétroles Shell soutien que l'indemnisation des pertes du mandat a été expressément exclue aux termes des contrats liant les parties et que l'établissement d'un compte d'exploitation spécifique au mandat constitue une dénaturation des contrats ; elle se prévaut des stipulations contractuelles aux termes desquelles « L'exploitant assurera la vente au détail des produits (carburants) en qualité de mandataire de Shell selon les articles 1984 et suivants du Code civil, à l'exception des articles 1999 et 2000 relatifs au remboursement des frais et pertes du mandataire. Il est expressément renoncé à ces deux derniers articles (…) » ; qu'elle invoque par ailleurs que les accords interprofessionnels du 12 janvier 1994 relatifs à l'activité d'une station-service de compagnie pétrolière ne prévoit aucune indemnisation de fin de gérance au titre de l'article 2000 mais des primes à la fin de chaque contrat, sous conditions et qu'en toute hypothèse, la société [Q] ne justifie pas que ses pertes ont pour origine un élément d'exploitation dont la maîtrise aurait été conservée par la société Shell (selon elle en effet les commissions versées à la société [Q] ont été librement discutées entre les parties et ne peuvent être regardées comme un élément de l'exploitation maîtrisé par le mandant) et indique que l'activité déficitaire de la société [Q] ne saurait être mise à sa charge ; qu'or la motivation qu'a retenu la Cour dans son arrêt du 14 avril 2010 suivant laquelle l'article 2000 du Code civil auxquels les parties au contrat sont sensées avoir renoncé n'est pas reproduit dans les contrats, la clause de renonciation étant retranscrite en mêmes caractères que l'ensemble des autres clauses et qu'il n'est pas établi que l'attention de la SARL [Q] ait été spécialement attirée par cette clause dont l'importance est incontestable au regard des relations contractuelles, vaut pour les contrats signées en août 1994 et 1997 ; que la Cour a justement retenu que les époux [Q] qui représentaient la société ne sont pas des professionnels du droit, que les annexes des contrats ne leur avaient pas été communiqués avant la signature à titre d'information et que la preuve n'était pas rapportée que la distinction opérée par la société Shell dans les contrats entre les primes de fin de contrat et les contributions exceptionnelles aux frais d'exploitation ait fait l'objet d'une discussion spéciale quant à sa portée ; qu'il doit être considéré que la SARL [Q] n'a donc pas renoncé valablement aux dispositions de l'article 2000 du Code civil qui prévoit que les pertes essuyées par le mandataire à l'occasion de sa gestion sont supportées par le mandant, dans les contrats susvisés des 24 août 1994 et 24 août 1997 prorogé ; que le contrat signé le 7 décembre 2001 a quant à lui été remis à la SARL [Q] pour étude en août 20001 et la clause de renonciation bien qu'elle ne reproduise par davantage que dans les contrats antérieurs l'article 2000 du Code civil comporte l'indication que la société [Q] renonce aux dispositions des articles 1999 et 2000 du Code civil « compte tenu de l'application de l'accord interprofessionnel » ; que celui cité dans le contrat date du 12 janvier 1994 et qu'il prévoit que la société Shell constate que la gestion d'une station-service suppose que l'exploitant, s'il se comporte en bon gestionnaire, dégage un résultat positif et que la société Shell s'engage à étudier à tout moment le cas de toute station qui lui serait soumis par l'exploitant qui s'estimerait ne pas dégager un tel bénéfice ; qu'il s'en déduit que la société pétrolière qui a conservé la maîtrise économique de l'activité de vente de carburants par la fixation des prix et des modalités de vente des carburants, doit en principe supporter les pertes d'exploitation essuyées par l'exploitant qui ne parviendrait pas à un résultat bénéficiaire du fait notamment de l'insuffisance de commissions destinées à rémunérer son travail et ce, en dehors de toute faute de gestion de sa part dont la preuve n'est pas rapportée ; que la SARL [Q] faisait observer dans son courrier du 4 février 2004 adressé à la société Shell au terme duquel elle sollicitait de pouvoir ouvrir une station de lavage, qu'elle avait clôturé l'exerce 2000 « à zéro » sans pouvoir apurer l'exercice 1999 qui était de 4.936 euros ; « … qu'elle a équilibré son résultat en 2001 et 2002 grâce à la prime de fin de contrat de [Localité 3] et [Localité 4] » la prime de fin de contrat étant de 35.191,78 euros (cf. courrier du 18 décembre 2002) ; que dans un autre courrier du 22 août 2005, elle exposait que les pertes cumulées de 2001 à 2004 ont été de 23.167 euros grâce aux provisions sur chacun des exercices 2001, 2002, 2003 et 2004 de la prime de fin de gérance non versée du fait de la poursuite des relations contractuelles ; qu'elle évalue dans ses dernières écritures le montant de cette prime de fin de gérance pour la station de [Localité 1] à la somme de 69.657,11 euros arrondie à 70.000 euros pour la période allant de 1989 à avril 2006 ; qu'or les chiffres avancés dans ses courriers que la SARL [Q] verse aux débats sont très éloignés des chiffres des pertes qu'elle demande aujourd'hui à la société Shell de supporter ; qu'elle produit ainsi, en ayant appliqué selon elle la clef de répartition appliquée par l'expert [C] dans son rapport d'expertise, des tableaux des pertes d'exploitation dues à l'activité sous mandat pour la période allant de 1996 à 2005, qui ne sont pas avalisés par l'expert comptable de la société ou tout autre expert comptable, s'agissant au moins de l'adéquation entre les chiffres portés sur ces tableaux et les bilans comptables de la société ; qu'ils ne constituent en conséquence pas la preuve suffisante des pertes invoquées au titre de l'activité sous mandat de la société pendant la période considérée et une expertise judiciaire longue et coûteuse et dont la SARL [Q] demande à ne pas faire l'avance des frais, ne peut être ordonnée pour suppléer la carence d'une partie dans l'administration de la preuve qui lui incombe et qui n'est pas faite concernant le montant des pertes qu'elle réclame ; qu'il y a lieu en conséquence de débouter la SARL [Q] de ses demandes concernant les pertes d'exploitation antérieures à l'année 2005 ;

ALORS QUE le juge ne peut rejeter la demande en paiement d'une créance dont il a constaté l'existence dans son principe au motif qu'aucun élément ne lui permettrait de l'évaluer ; qu'en déboutant la société [Q] de sa demande en paiement des pertes d'exploitation qu'elle avait subies de 1994 à 2005 au motif que les chiffres qu'elle avançait ne pouvaient être retenus, bien qu'elle ait admis l'existence en son principe de la créance de la société [Q] sur la société pétrolière, qui avait conservé la maîtrise économique de l'activité de vente de carburant et devait donc supporter les pertes d'exploitation essuyées par l'exploitant de 1994 à 2005 dès lors qu'aucune faute de gestion de la part de ce dernier n'était démontrée et qu'il lui ait appartenu de la chiffre, la Cour d'appel a violé l'article 4 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 15-24834
Date de la décision : 01/03/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 21 janvier 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 01 mar. 2017, pourvoi n°15-24834


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.24834
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