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01/03/2017 | FRANCE | N°15-12785

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 01 mars 2017, 15-12785


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon les arrêts attaqués (Paris, 30 octobre 2014 rectifié le 15 janvier 2015), que les sociétés Ciben et Manuport Road transport France, devenue la société Euroports Road Transport France (la société Euroports), ont confié pendant plusieurs années à la société Sotraloma l'acheminement de marchandises ; que se prévalant d'une dégradation économique et de la concurrence déloyale de la société Sotraloma, les sociétés Ciben et Euroports ont rompu, par une lettre reçue le 2 mars 2010, leur

s relations commerciales avec cette société à compter du 10 mars suivant ; qu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon les arrêts attaqués (Paris, 30 octobre 2014 rectifié le 15 janvier 2015), que les sociétés Ciben et Manuport Road transport France, devenue la société Euroports Road Transport France (la société Euroports), ont confié pendant plusieurs années à la société Sotraloma l'acheminement de marchandises ; que se prévalant d'une dégradation économique et de la concurrence déloyale de la société Sotraloma, les sociétés Ciben et Euroports ont rompu, par une lettre reçue le 2 mars 2010, leurs relations commerciales avec cette société à compter du 10 mars suivant ; que la société Sotraloma a assigné les sociétés Euroports et Ciben en réparation du préjudice résultant de la rupture brutale de relations commerciales établies et en paiement de factures ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que les sociétés Euroports et Ciben font grief à l'arrêt de les condamner, après rectification, à payer respectivement la somme de 696 237,60 euros et celle de 224 968 euros à la société Sotraloma alors, selon le moyen :

1°/ que, s'agissant de l'objet social de la société Sotraloma, les juges du fond devaient se demander si les statuts du 24 juin 2011, postérieurs à la période litigieuse (1999-2010), étaient pertinents et rechercher corrélativement s'il ne convenait pas d'apprécier l'objet de la société Sotraloma au vu des éléments invoqués et produits par les sociétés Euroports et Ciben, et faisant apparaître que la société Sotraloma se livrait à une activité de transport routier de fret interurbain ; qu'en s'abstenant de procéder à cette recherche, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 132-8 du code de commerce ;

2°/ que les juges du fond doivent procéder à la qualification des conventions en s'attachant aux droits et obligations respectifs des parties, sans pouvoir se fonder sur les dénominations ou qualifications retenues par les parties, a fortiori lorsqu'il s'agit, comme en l'espèce, de faire tomber une présomption ; qu'en s'attachant essentiellement, au cas d'espèce, aux faits que des témoins ou des documents usaient du terme de location, ce constat était indifférent, les juges du fond ont violé les articles 12 et 1134 du code civil, ensemble l'article L. 132-8 du code de commerce ;

3°/ que l'acheminement se faisant, par principe, dans le cadre d'un contrat de transport, le contrat de location de véhicules étant l'exception et le contrat de transport devant être présumé, il était exclu que les juges du fond puissent retenir que la présomption était renversée au motif que la société Sotraloma ne disposait pas de la maîtrise de l'ensemble des opérations de transport ; qu'en effet, dans le cadre d'un contrat de sous-traitance, la société Sotraloma recevait nécessairement des directives de la part des sociétés Euroports et Ciben ; qu'à cet égard, l'arrêt attaqué est dépourvu de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 132-8 du code de commerce ;

Mais attendu que le contrat de sous-traitance de transport se distingue du contrat de location de véhicule avec conducteur en ce que le transporteur sous-traitant a la libre utilisation de ses moyens sans que l'opérateur de transport ne puisse s'y opposer d'une façon quelconque, à la différence du loueur de véhicule avec conducteur qui n'assume pas la maîtrise des opérations de transport ; que l'arrêt relève d'abord que des factures mensuelles émises par la société Sotraloma portaient l'intitulé « location du mois de... » et désignaient l'objet de la prestation par la mention « location ensemble benne », et que les lettres échangées entre les parties faisaient état de la location du matériel roulant et de l'entière maîtrise des opérations de transport par les sociétés Euroports et Ciben ; que l'arrêt relève ensuite que, selon les témoignages recueillis auprès des salariés de la société Sotraloma, les véhicules étaient en location et que les chauffeurs recevaient leurs ordres directement des sociétés Euroports et Ciben ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, rendant inopérante la recherche invoquée par la première branche, la cour d'appel a pu retenir que les contrats liant les sociétés Euroports et Ciben à la société Sotraloma devaient être qualifiés de contrats de location de véhicule avec conducteur ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que les sociétés Euroports et Ciben font le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen :

1°/ qu'avant de déterminer si les sociétés MRT France et Ciben pouvaient mettre un terme à la relation, sans préavis, ou au terme d'un préavis abrégé, les juges du fond devaient rechercher, comme il leur était demandé, si, quand bien même la société Sotraloma n'aurait pas été dirigeant de la société Escoort, elle n'avait pas manqué à ses obligations en participant à des opérations de concurrence déloyale menées avec un tiers ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ce point, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 442-6-1, 5° du code de commerce ;

2°/ qu'en tout cas, les juges du fond ne pouvaient statuer comme ils l'ont fait sans s'interroger sur le point de savoir si les difficultés économiques éprouvées ne justifiaient pas que les sociétés MRT France et Ciben aient mis un terme à la relation en usant d'un délai de préavis abrégé, comme il était encore demandé ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ce point, les juges du fond ont de nouveau privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 442-6-1,5° du code de commerce ;

Mais attendu qu'ayant constaté qu'après une première notification de rupture en décembre 2009, les relations commerciales avaient été reprises jusqu'en mars 2010, date à laquelle elles avaient à nouveau été rompues, cette rupture étant assortie d'un préavis de huit jours, ce qui excluait l'existence de manquements graves de la société Sotraloma, la cour d'appel, qui n'avait pas à effectuer la recherche invoquée par la première branche, que ses constatations rendaient inopérante, ni à s'expliquer sur les circonstances invoquées par la seconde branche, qui ne relevaient pas d'un cas de force majeure, a pu retenir que la rupture brutale des relations commerciales nouées entre la société Sotraloma et les sociétés MRT et Ciben engageait la responsabilité de ces dernières ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le quatrième moyen :

Attendu que les sociétés Euroports et Ciben font le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen, que pour fixer la durée du préavis, les juges du fond doivent tenir compte, non seulement de l'ancienneté de la relation, mais également des autres circonstances ; qu'à cet égard, il est indispensable qu'ils s'expliquent sur le point de savoir de quel délai l'entreprise qui subit la rupture a besoin pour reconstituer une clientèle ou se redéployer vers une autre activité ; qu'en se bornant à évoquer, dans ses déclarations, sans évoquer nulle autre circonstance et notamment les délais dont la société Sotraloma avait éventuellement besoin, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 442-6-1, 5° du code de commerce ;

Mais attendu qu'aux conclusions de la société Sotraloma qui se prévalait d'un délai de préavis respectivement de vingt-quatre et douze mois, les sociétés Euroports et Ciben se sont bornées à opposer l'absence de perte de chiffre d'affaires subie ; qu'en cet état, il ne peut être reproché à la cour d'appel de ne pas avoir effectué une recherche qui ne lui était pas demandée ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le cinquième moyen :

Attendu que les sociétés Euroports et Ciben font encore le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen, que l'action instituée par l'article L. 442-6-1, 5° du code de commerce est de nature indemnitaire ; qu'elle ne peut dès lors déboucher à une condamnation excédant le préjudice effectivement subi ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme le demandaient les sociétés Euroports et Ciben si, à la suite de la rupture, et libérée de ses obligations à l'égard des sociétés MRT France et Ciben, la société Sotraloma n'avait pas mobilisé les moyens dont elle disposait pour réaliser des affaires avec des entreprises tierces, atteindre le chiffre d'affaires qu'elle atteignait précédemment, et si dès lors, cette circonstance ne devait pas minorer à due concurrence l'étendue de son préjudice ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ce point, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 442-6-1, 5° du code de commerce ;

Mais attendu qu'ayant justement énoncé que le préjudice résultant d'une insuffisance de préavis devait être évalué en considération de la durée du préavis jugé nécessaire et qu'il n'y avait pas lieu de tenir compte des résultats d'exploitation de la victime de la rupture au cours de la période considérée, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les sociétés Euroports Road Transports France et Ciben aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la société Sotraloma la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du premier mars deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour les sociétés Euroports Road Transport France et Ciben.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a débouté la SAS EUROPORTS ROAD TRANSPORT France et la SASU CIBEN de leur demande rejet de pièces, confirmé le jugement en tant qu'il avait retenu le principe d'une condamnation, puis condamné la société EUROPORTS ROAD TRANSPORT France à payer à la société SOTRALOMA, après rectification, la somme de 696.237,60 euros et la société CIBEN SASU à payer à la société SOTRALOMA, après rectification, la somme de 224.968 euros ;

AUX MOTIFS TOUT D'ABORD QUE « la demande d'EUROPORTS ROAD TRANSPORTS France te de CIBEN tendant au rejet des attestations établies par Messieurs [S], [Z], [D] et [R] (pièces n° 10, 11, 42, 42bis, 43, 43bis) est sans objet, SOTRALOMA ne produisant pas ces attestations devant la Cour » ;

ET AUX MOTIFS ENCORE QUE « si aucune photocopie de pièce officielle d'identité n'est jointe à l'attestation de Monsieur [A] (pièce n° 4 communiquée par SOTRALOMA), la valeur probante de cette attestation ne peut être mise en cause dès lors que l'absence de pièce d'identité n'est pas prescrite à peine de nullité et qu'EUROPORTS ROAD TRANSPORT France et CIBEN ne conteste ni l'identité, ni les fonctions exercées par Monsieur [A] ; qu'EUROPORTS ROAD TRANSPORT France et CIBEN seront déboutées de leur demande d'irrecevabilité des attestations en cause » ;

ALORS QUE, PREMIEREMENT, la pièce 10 annexée aux conclusions de la société SOTRALOMA correspondait à un « courrier SERTI à SOTRALOMA du 13 août 2008 » ; que les juges du fond ne pouvaient donc considérer que cette pièce correspondait à une attestation émanant de Messieurs [S], [Z], [D] et [R] ; qu'en statuant comme ils l'ont fait, les juges du fond ont dénaturé le bordereau de communication de pièces ;

ALORS QUE, DEUXIEMEMENT, la pièce 11 correspondait à un « courrier SOTRALOMA à SERTI du 22 octobre 2008 » ; que de la même façon, les juges du fond ne pouvaient retenir que cette pièce correspondait à une attestation émanant de Messieurs [S], [Z], [D] et [R] ; que l'arrêt a également commis de ce chef une dénaturation ;

ALORS QUE, TROISIEMEMENT, la pièce 43 correspondait à une « attestation [K] [W] » ; que dès lors, les juges du fond ne pouvaient considérer que l'attestation en cause émanait de Messieurs [S], [Z], [D] et [R] ; que de ce chef également, la dénaturation est patente ;

ALORS QUE, QUATRIEMEMENT, et en toute hypothèse, à supposer par impossible que les dénaturations précédemment dénoncées ne puissent être retenues, l'arrêt doit être regardé comme reposant sur des motifs intelligibles, dès lors que les pièces 10 et 11 ne correspondent pas à des attestations et que la pièce 43 ne correspond pas à une attestation émanant de Messieurs [S], [Z], [D] et [R] ; qu'à cet égard, l'arrêt attaqué doit être censuré pour violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;

ALORS QUE, CINQUIEMEMENT, et plus subsidiairement, faute de s'être mieux expliqués sur l'identification des pièces qu'ils entendaient écarter, eu égard aux anomalies découlant de ce que les pièces 10 et 11 n'étaient pas des attestations et que la pièce 43 ne correspondait pas à une attestation de Messieurs [S], [Z], [D] et [R], les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article du Code de procédure civile fixant les limites du litige ;

ET ALORS QUE, SIXIEMEMENT, on objecterait vainement que les juges du fond ont estimé que les pièces sur lesquelles ils statuaient n'avaient pas été versées aux débats, une telle appréciation supposant, pour être pertinente, que les juges du fond n'aient commis aucune erreur, ni aucune insuffisance quant aux pièces sur lesquelles ils statuaient ; qu'à cet égard également, l'arrêt doit être regardé comme dépourvu de base légale au regard de l'article 4 du Code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a débouté la SAS EUROPORTS ROAD TRANSPORT France et la SASU CIBEN de leur demande rejet de pièces, confirmé le jugement en tant qu'il avait retenu le principe d'une condamnation, puis condamné la société EUROPORTS ROAD TRANSPORT France à payer à la société SOTRALOMA, après rectification, la somme de 696.237,60 euros et la société CIBEN SASU à payer à la société SOTRALOMA, après rectification, la somme de 224.968 euros ;

AUX MOTIFS TOUT D'ABORD QUE « c'est sous le régime, non de la sous-traitance de transport, comme le soutiennent les appelantes, mais de la location de véhicules avec chauffeur que SOTRALOMA est intervenue aux opérations de transport en cause, ainsi que cela ressort : - de l'objet social de la société SOTRALOMA, qui, aux termes de l'article 2 de ses statuts en date du 24 juin 201 1, a pour objet "/a location de véhicules industriels, utilitaires, de tourisme et de tous matériels de toute nature" ; - des factures mensuelles émises par SOTRALOMA entre les 31 août 1999 et 31 mars 2010 (pièces n° 51 bis communiquées par SOTRALOMA) qui portent l'intitulé "location du mois de .,,.", désignent l'objet de la prestation par la mention "location ensemble benne" et fixent la facturation sur la base du seul kilométrage parcouru, sans la moindre précision de l'utilisation du véhicule, et non en référence au tonnage ou à la nature de la marchandise ; - du témoignage de Monsieur [C] [A], ancien salarié de CIBEN, en date du 5 novembre 2013 (pièce n° 4 communiquée par SOTRALOMA), qui indique que "les véhicules de SOTRALOMA étaient en location exclusive'" ; - de ce même témoignage, aux termes duquel CIBEN gérait "plusieurs chauffeurs de SOTRALOMA en exploitation directe", des témoignages des anciens chauffeurs de SOTRALOMA (Messieurs [O] [Q], [K] [W], [P] [E], [Y] [L], [V] [G], [F] [T], [I] [J] et [B] [X]), indiquant qu'ils prenaient leurs ordres directement chez SERTI ou CIBEN, et des courriers échangés entre les parties qui font état de ce que "les véhicules sont en location à votre disposition exclusive" (télécopie de SOTRALOMA à CIBEN/SERTI du 22 avril 2009), "le matériel est dédié exclusivement aux. transports que nous maîtrisons" (lettre CIBEN à SOTRALOMA du 21 décembre 2005), et "le locataire conserve la maîtrise de l'opération de transports détermine la nature et le poids des marchandises transportées et fixe les itinéraires empruntés" (lettre SOTRALOMA à SERTI du 12 juin 2008), éléments dont il se déduit que SOTRALOMA ne disposait pas de la maîtrise de l'ensemble des opérations de transport et n'intervenait donc pas en qualité de transporteur ; que les deux documents produits par EUROPORTS ROAD TRANPORT FRANCE et CIBEN (pièce n° 17), présentés somme des lettres de voiture dont la mauvaise qualité de la copie ne permet pas de déterminer s'il s'agit de lettres de voiture, concernent seulement deux transports et ne présentent pas un caractère probant suffisant ; que c'est en conséquence à raison que les premiers juges ont retenu qu'était en l'espèce applicable, non le contrat-type de transport public routier de marchandises, mais l'article L 442-6-1, 5° du code de commerce » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « selon la jurisprudence de la Cour de Cassation (Corn, 4 octobre 2011, n° 10-20240) en matière de sous-traitance de transports routiers de marchandises, le contrat type exclut l'application de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de Commerce. Cette solution n'est pas celle de cours d'appel, qui appliquent les deux dispositions cumulativement ; qu'il importe donc de connaître la nature du contrat fiant les parties. Pour la demanderesse, il s'agit d'un contrat de location de véhicules industriels avec chauffeur, le contrat type, pour cette activité, est approuvé par le décret du 17 avril 2002. Ce contrat type ne comporte pas de délai de préavis obligatoire en cas de rupture ; que pour les sociétés défenderesses, le contrat entre les parties est un contrat de sous-traitance transport, même si aucun écrit n'a été signé entre elles, il n'y a pas de contrat, mais les pièces versées au dossier permettent de cerner les services rendus par la SA SOTRALOMA, en sachant que lui incombe la charge de la preuve. Notamment la SA SOTRALOMA remet dans ses pièces les factures de location pour les exercices 2007 à 2010 et ceci pour chacune des sociétés défenderesses. Celles-ci ne contestent pas le libellé desdites factures ; qu'en ce qui concerne la STE MRT les factures produites permettent de relever que fa société SOTRALOMA loue des ensembles routiers, avec chauffeur et avec la facturation au kilomètre parcouru. Le chiffre d'affaires selon les factures produites s'élève à 445.076 € en 2007, 1.013.778 € en 2008, 726,819 € en 2009, soit un chiffre d'affaires moyen sur ces trois années de 728.557 € ; qu'en ce qui concerne la SASU CIBEN les factures produites justifient qu'à partir de 1999, la SA SOTRALOMA est en relation d'affaire avec de la location d'ensembles routiers avec chauffeur et avec la facturation au kilomètre parcouru (par exempte la facture de novembre 2008). Le chiffre d'affaires résultant, de la sommation des factures produites, s'élève à 729.078 € en 2007, 603.030 € en 2008, et 520.901 € en 2009, soit un chiffre moyen sur ces trois années de 617.670 € ; que ces chiffres sont conformes à ceux cités page 14 des conclusions des sociétés défenderesses, ce qui tend à démontrer que la SA SOTRALOMA n'a pas facturé d'autres prestations aux sociétés défenderesses ; que les sociétés défenderesses produisent deux lettres de voiture, en partie illisibles, avec le cachet de la SA SOTRALOMA pour Justifier l'activité de transport de cette dernière, ce que le Tribunal juge non probant eu égard à la masse clés opérations entre les parties, de même elle produit un état de pré facturation transporteur, dont on ne sait quel est l'émetteur, ce qui prive ce document de toute valeur probante ; que le Tribunal relève que la lettre du 22 octobre 2008 adressée aux sociétés CIBEN-SERTI, et contresignée par le directeur Mr [S], directeur de ces sociétés à cette date, concerne un point particulier d'application du contrat de location de véhicules routiers ; que de tout ce que dessus le Tribunal dit que le contrat entre les parties est un contrat de location de véhicules routiers et non un contrat de transport, et que de ce fait l'article L. 442-6,1,50 du Code de Commerce s'applique, et non les clauses du contrat type de sous-traitant transport » ;

ALORS QUE, PREMIEREMENT, s'agissant de l'objet social de la société SOTRALOMA, les juges du fond devaient se demander si les statuts du 24 juin 2011, postérieurs à la période litigieuse (1999-2010), étaient pertinents et rechercher corrélativement s'il ne convenait pas d'apprécier l'objet de la société SOTRALOMA au vu des éléments invoqués et produits par les sociétés EUROPORTS ROAD TRANSPORT FRANCE et CIBEN, et faisant apparaître que la société SOTRALOMA se livrait à une activité de transport routier de fret interurbain (conclusions n° 2, p. 6) ; qu'en s'abstenant de procéder à cette recherche, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil et L. 132-8 du Code de commerce ;

ALORS QUE, DEUXIEMEMENT, les juges du fond doivent procéder à la qualification des conventions en s'attachant aux droits et obligations respectifs des parties, sans pouvoir se fonder sur les dénominations ou qualifications retenues par les parties, a fortiori lorsqu'il s'agit, comme en l'espèce, de faire tomber une présomption ; qu'en s'attachant essentiellement, au cas d'espèce, aux faits que des témoins ou des documents usaient du terme de location, ce constat était indifférent, les juges du fond ont violé les articles 12 et 1134 du Code civil, ensemble l'article L. 132-8 du Code de commerce ;

ET ALORS QUE, TROISIEMEMENT, l'acheminement se faisant, par principe, dans le cadre d'un contrat de transport, le contrat de location de véhicules étant l'exception et le contrat de transport devant être présumé, il était exclu que les juges du fond puissent retenir que la présomption était renversée au motif que la société SOTRALOMA ne disposait pas de la maîtrise de l'ensemble des opérations de transport ; qu'en effet, dans le cadre d'un contrat de sous-traitance, la société SOTRALOMA recevait nécessairement des directives de la part des sociétés MRT et CIBEN ; qu'à cet égard, l'arrêt attaqué est dépourvu de base légale au regard des articles 1134 du Code civil et L. 132-8 du Code de commerce.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a débouté la SAS EUROPORTS ROAD TRANSPORT France et la SASU CIBEN de leur demande rejet de pièces, confirmé le jugement en tant qu'il avait retenu le principe d'une condamnation, puis condamné la société EUROPORTS ROAD TRANSPORT France à payer à la société SOTRALOMA, après rectification, la somme de 696.237,60 euros et la société CIBEN SASU à payer à la société SOTRALOMA, après rectification, la somme de 224.968 euros ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « les parties ne contestent pas l'ancienneté de la relation d'affaires, 25 ans pour la relation établie entre les sociétés SOTRALOMA et SERTI, aux droits de laquelle vient MRT, depuis juillet 1999 pour la relation de SOTRALOMA avec CIBEN ; qu'il n'est pas davantage discuté que la rupture des relations commerciales est imputable aux sociétés SERTI et CIBEN qui : - par lettre en date du 10 décembre 2009, ont informé SOTRALOMA qu'elles mettaient un terme à leurs relations commerciales ; - par courrier reçu le 2 mars 2010, ont confirmé la rupture en en fixant la date d'effet au 10 mars 2010 ; que les parties s'opposent sur la brutalité de la rupture et sur la durée du préavis ; que EUROPORTS ROAD TRANPORT FRANCE et CIBEN soutiennent que la rupture ne présente aucune brutalité dès lors que SOTRALOMA, complice des actes de captation de clientèle commis par la société ESCOORT, ne pouvait ignorer les difficultés économiques occasionnées aux sociétés SERTI et CIBEN, ce qui rendait la rupture prévisible ; que toutefois elles ne font état d'aucune initiative de leur part, antérieurement au 10 décembre 2009, susceptible d'être interprétée comme une mise en demeure de rupture de la relation en considération des agissements déloyaux allégués » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'« il n'est pas contesté que les sociétés défenderesses ont mis fin aux relations commerciales, une première fois, par une lettré du 10 décembre 2009 pour la société MRT et sans écrit pour la SASU CIBEN. Cette lettre ne contient pas de griefs à rencontre de la SA SOTRALOMA et elle ne comporte pas la mention d'un préavis ; que c'est à la suite d'une protestation de la SA SOTRALOMA par lettre de son conseil du 22 décembre 2009 que Ses sociétés défenderesses, par lettre du 30 décembre 2009 et du 11 janvier 2010 ont repris, chacune, le contrat pour finalement y mettre fin, brutalement, par des courriers du 2 mars 2010, avec un préavis de 8 jours ; fin de contrat au 10 mars 2010 (soit trois mois à partir du 10 décembre 2009) ; que le Tribunal ne peut voir dans la lettre du 10 décembre 2009,, l'annonce d'un quelconque préavis de trois mois, encore moins sans écrit Dans ces conditions c'est au 10 mars 2010 que se situe la rupture brutale des relations commerciales établies entre les parties. Sur le point de l'antériorité des relations établies, il n'y a pas de contestation entre les parties » ;

ALORS QUE, PREMIEREMENT, avant de déterminer si les sociétés MRT France et CIBEN pouvaient mettre un terme à la relation, sans préavis, ou au terme d'un préavis abrégé, les juges du fond devaient rechercher, comme il leur était demandé (conclusions n° 2, pp. 11-13), si, quand bien même la société SOTRALOMA n'aurait pas été dirigeant de la société ESCOORT, elle n'avait pas manqué à ses obligations en participant à des opérations de concurrence déloyale menées avec un tiers ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ce point, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 442-6-1, 5ème du Code de commerce ;

ALORS QUE, DEUXIEMEMENT, et en tout cas, les juges du fond ne pouvaient statuer comme ils l'ont fait sans s'interroger sur le point de savoir si les difficultés économiques éprouvées ne justifiaient pas que les sociétés MRT France et CIBEN aient mis un terme à la relation en usant d'un délai de préavis abrégé, comme il était encore demandé (conclusions n° 2, p.,14-15) ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ce point, les juges du fond ont de nouveau privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 442-6-1,5ème du Code de commerce.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a débouté la SAS EUROPORTS ROAD TRANSPORT France et la SASU CIBEN de leur demande rejet de pièces, confirmé le jugement en tant qu'il avait retenu le principe d'une condamnation, puis condamné la société EUROPORTS ROAD TRANSPORT France à payer à la société SOTRALOMA, après rectification, la somme de 696.237,60 euros et la société CIBEN SASU à payer à la société SOTRALOMA, après rectification, la somme de 224.968 euros ;

AUX MOTIFS TOUT D'ABORD QU' « EUROPORTS ROAD TRANPORT FRANCE et CIBEN soutiennent que la rupture ne présente aucune brutalité dès lors que SOTRALOMA, complice des actes de captation de clientèle commis par la société ESCOORT, ne pouvait ignorer les difficultés économiques occasionnées aux sociétés SERTI et CIBEN, ce qui rendait la rupture prévisible ; que toutefois elles ne font état d'aucune initiative de leur part, antérieurement au 10 décembre 2009, susceptible d'être interprétée comme une mise en demeure de rupture de la relation en considération des agissements déloyaux allégués » ; que le seul préavis annoncé, celui de huit jours fixé par la lettre reçue par SOTRALOMA le 2 mars 2010, et non de trois mois comme le prétendent à tort EUROPORTS ROAD TRANPORT FRANCE et CIBEN, est hors de proportion avec l'ancienneté de la relation d'affaire entretenue avec MRT et CIBEN ; que ces dernières ont, dans ces conditions, rompu brutalement la relation commerciale ; que, sur la durée du préavis, les sociétés EUROPORTS ROAD TRANPORT FRANCE et CIBEN prétendent que doit en l'espèce s'appliquer le contrat type de transport public routier de marchandises qui fixe un préavis de trois mois en cas de rupture des relations commerciales » ;

AUX MOTIFS ENCORE QU'« il résulte de l'article L 442-6-1, 5° que la durée du préavis que doit respecter l'auteur de la rupture du contrat s'apprécie en tenant compte de la durée de la relation commerciale ; qu'eu égard en l'espèce à l'ancienneté de la relation de SOTRALOMA avec CIBEN et SERTI - 25 ans pour MRT, plus de dix ans pour CIBEN -le préavis de huit jours mis en oeuvre par CIBEN et SERTI était manifestement insuffisant ; que la cour dira que la durée suffisante du préavis est de 12 mois pour la relation de SOTRALOMA avec CIBEN, et de 24 mois pour la relation de SOTRALOMA avec MRT » ;

ALORS QUE, pour fixer la durée du préavis, les juges du fond doivent tenir compte, non seulement de l'ancienneté de la relation, mais également des autres circonstances ; qu'à cet égard, il est indispensable qu'ils s'expliquent sur le point de savoir de quel délai l'entreprise qui subit la rupture a besoin pour reconstituer une clientèle ou se redéployer vers une autre activité ; qu'en se bornant à évoquer, dans ses déclarations, sans évoquer nulle autre circonstance et notamment les délais dont la société SOTRALOMA avait éventuellement, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 442-6-1, 5ème du Code de commerce.

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a débouté la SAS EUROPORTS ROAD TRANSPORT France et la SASU CIBEN de leur demande rejet de pièces, confirmé le jugement en tant qu'il avait retenu le principe d'une condamnation, puis condamné la société EUROPORTS ROAD TRANSPORT France à payer à la société SOTRALOMA, après rectification, la somme de 696.237,60 euros et la société CIBEN SASU à payer à la société SOTRALOMA, après rectification, la somme de 224.968 euros ;

AUX MOTIFS QUE « les sociétés EUROPORTS ROAD TRANPORT FRANCE et CIBEN ne discutent pas les éléments communiqués par SOTRALOMA relatifs au chiffre d'affaires réalisé avec MRT et CIBEN, soit 870.297,00 euros par an pour MRT et 562.420,00 euros par an pour CIBEN • qu'elles n'opposent aucun élément pertinent aux attestations établies le 25 mars 2010 par Monsieur [M] [H], expert-comptable de SOTRALOMA (pièces n° 74 et 75 communiquées par SOTRALOMA) qui certifie que la marge brute bénéficiaire de production avec MRT et CIBEN s'établit à 54,70 % sur les années 2006 à 2008 ; que la cour fera en conséquence droit à la demande de SOTRALOMA de prise en compte d'un taux de marge brute de 40 % ; que SOTRALOMA est, dans ces conditions, fondée à obtenir condamnation : - de la société MRT, à hauteur de 870297,00 euros x 40 % = 870.297,00 euros ; - de la société CIBEN, à hauteur de 562.420,00 euros x 40 % x 2 = 449.936,00 euros », étant rappelé que le montant des condamnations a fait l'objet d'une rectification en vertu d'un arrêt du 15 janvier 2015 ;

ALORS QUE, l'action instituée par l'article L. 442-6-1, 5ème du Code de commerce est de nature indemnitaire ; qu'elle ne peut dès lors déboucher à une condamnation excédant le préjudice effectivement subi ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme le demandaient les sociétés EUROPORTS ROAD TRANSPORT FRANCE et CIBEN si, à la suite de la rupture, et libérée de ses obligations à l'égard des sociétés MRT France et CIBEN, la société SOTRALOMA n'avait pas mobilisé les moyens dont elle disposait pour réaliser des affaires avec des entreprises tierces, atteindre le chiffre d'affaires qu'elle atteignait précédemment, et si dès lors, cette circonstance ne devait pas minorer à due concurrence l'étendue de son préjudice ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ce point, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 442-6-1, 5ème du Code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 15-12785
Date de la décision : 01/03/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 30 octobre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 01 mar. 2017, pourvoi n°15-12785


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger, SCP de Chaisemartin et Courjon

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.12785
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