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01/02/2017 | FRANCE | N°16-81852

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 01 février 2017, 16-81852


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- La fédération internationale des droits de l'homme,- La ligue française pour la défense de l'homme et du citoyen, parties civiles

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 6e section, en date du 25 février 2016, qui, sur leur plainte avec constitution de partie civile contre personne non dénommée, des chefs d'accès et maintien frauduleux dans tout ou partie d'un système de traitement automatisé de données, collecte de données

à caractère personnel par un moyen frauduleux, déloyal ou illicite, attei...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- La fédération internationale des droits de l'homme,- La ligue française pour la défense de l'homme et du citoyen, parties civiles

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 6e section, en date du 25 février 2016, qui, sur leur plainte avec constitution de partie civile contre personne non dénommée, des chefs d'accès et maintien frauduleux dans tout ou partie d'un système de traitement automatisé de données, collecte de données à caractère personnel par un moyen frauduleux, déloyal ou illicite, atteinte volontaire à l'intimité de la vie privée d'autrui, a prononcé sur le montant des consignations ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 6 janvier 2017 où étaient présents : M. Guérin, président, M. Larmanjat, conseiller rapporteur, MM. Pers, Straehli, Castel, Soulard, Mme Dreifuss-Netter, MM. Fossier, Raybaud, Moreau, Mme Chaubon, MM. Ricard, Parlos, Mme Zerbib, conseillers de la chambre, MM. Barbier, Béghin, Mmes Guého, Pichon, conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Lagauche ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de M. le conseiller LARMANJAT, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIÉ, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAGAUCHE, l'avocat des demandeurs a eu la parole en dernier ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 18 juillet 2016, joignant les pourvois en raison de la connexité et prescrivant leur examen immédiat ;
Vu le mémoire produit commun aux demandeurs ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 85, 88, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a fixé les montants de la consignation due par la fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH) à la somme de 8 500 euros et par la ligue française pour la défense des droits de l'homme (LDH) et du citoyen à la somme de 2 500 euros ;
"aux motifs qu'il résulte de l'article 88 du code de procédure pénale que le montant de la consignation doit être fixée en fonction des ressources de la partie civile qui n'a pas obtenu l'aide juridictionnelle et que celle-ci peut être dispensée de consignation ; que la FIDH et la LDH, en réponse à la sollicitation du juge d'instruction ont adressé le 20 juin 2015 les rapports du commissaire aux comptes établis au 31 décembre 2014 ; que s'agissant de la FIDH, les documents communiqués établissent pour l'année 2014 le compte de résultat suivant : - total des produits : 7 018 888 euros - total des charges : 6 942 185 euros résultat : 76 703 euros ; que s'agissant de la LDH, les documents communiqués établissent pour l'année 2014 le compte de résultat suivant :- total des produits : 2 292 220 euros - total des charges : 2 329 870 euros résultat : - 37 653 euros ; que l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme stipule que « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle » et que « le droit d'accès à un tribunal constitue un élément inhérent au droit qu'énonce l'article 6, § 1, » ; que le montant de la consignation fixée par le juge d'instruction pour la FIDH est certes élevé mais qu'il ne porte toutefois pas atteinte au droit d'accès à un tribunal garanti par le texte susvisé et a été fixé en considération des ressources de la plaignante et des éléments de la cause ; que la somme retenue n'est pas de nature à empêcher le déclenchement de l'action publique et l'ouverture d'une information judiciaire et que l'ordonnance entreprise devra en conséquence être confirmée sur ce point ; que le montant de la consignation fixée par le juge d'instruction pour la LDH apparaît en revanche excessif au regard des ressources dont dispose cette partie tels qu'établies par les éléments comptables portés à la connaissance de la cour et rappelés ci-dessus ; qu'il est en conséquence nécessaire, après infirmation de l'ordonnance sur ce point, et afin de garantir l'effectivité du droit précédemment mentionné, de réduire à de plus justes proportions le montant de la consignation à l'égard de cette partie civile ainsi que précisé au dispositif ;

"1°) alors qu'en application de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, il doit exister un rapport raisonnable de proportionnalité entre le but visé par la mesure et les moyens employés ; que la consignation qui a pour objet de garantir le paiement d'une éventuelle amende civile ne peut justifier la fixation d'une somme disproportionnée au regard des ressources de la partie civile ; que la restriction du droit d'accès au juge ne peut porter atteinte à sa substance même et que tel est le cas lorsque le montant d'une consignation, exigée pour saisir le juge est excessive ; que les parties civiles invoquaient être des associations à but non lucratif régies par la loi du 1er juillet 1901 ; qu'en prononçant, néanmoins, des montants de consignations à hauteur de 8 500 et 2 500 euros, la chambre de l'instruction qui n'a pas répondu à cet argument des parties civiles, a méconnu les dispositions susvisées et le principe de proportionnalité ;
"2°) alors qu'en application de l'article 85 du code de procédure pénale, seules les personnes morales à but lucratif doivent justifier de leurs ressources en joignant leur bilan et compte de résultat ; que les parties civiles sont des associations à but non lucratif régies par la loi du 1er juillet 1901 ; qu'en se fondant cependant sur leur compte de résultat, la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale ;
"3°) alors que selon l'article 88 du code de procédure pénale, le montant de la consignation est fixé en considération des « ressources de la partie civile » ; qu'en retenant, pour déterminer le montant des consignations les « éléments de la cause », la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;
"4°) alors que la contradiction de motifs équivaut à son absence ; que la chambre de l'instruction a fixé le montant de la consignation due par la LDH à 2.500 euros tandis qu'elle a également constaté que cette partie civile ne bénéficiait d'aucune ressource ; que la chambre de l'instruction n'a pas davantage justifié sa décision" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que la Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH) et la Ligue française pour la défense de l'homme et du citoyen (LDH), associations à but non lucratif, ont porté plainte et se sont constituées parties civiles des chefs précités ; que le juge d'instruction a fixé le montant de la consignation due à 8 500 euros pour la première et à 4 500 euros pour la seconde ; qu'elles ont relevé appel de cette décision ;
Attendu que, pour confirmer la consignation devant être versée par la FIDH et ramener à 2 500 euros le montant de celle due par la LDH, l'arrêt retient, avant de prendre en compte les éléments de la cause et au vu des pièces produites, que les ressources des parties civiles se sont élevées, pour la première, à plus de sept millions d'euros et, pour la seconde, à plus de deux millions d'euros, et que la situation comptable déficitaire de celle-ci justifie, afin de garantir l'effectivité du droit d'accès à un tribunal, de réduire le montant de la consignation imposé à la LDH à de plus justes proportions ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, exemptes d'insuffisance comme de contradiction, dont il résulte que les parties civiles disposaient de ressources leur permettant de s'acquitter des consignations mises à leur charge, en l'absence d'autres éléments communiqués par elles, la chambre de l'instruction a justifié sa décision sans méconnaître la disposition conventionnelle invoquée ;
Qu'en effet, d'une part, l'obligation faite à la partie civile de verser, sauf admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle ou décision de dispense, une consignation fixée en fonction de ses ressources s'applique à toute personne, physique ou morale, d'autre part, si les personnes morales à but non lucratif ne sont pas soumises à l'obligation, à peine d'irrecevabilité de la plainte, de joindre à celle-ci leur bilan et compte de résultat, les juges peuvent fonder leur décision sur toutes pièces, au besoin en demandant leur production par la partie civile, pour vérifier les ressources de celle-ci, enfin, la finalité de la consignation, telle qu'énoncée par l'article 88-1 du code de procédure pénale, à savoir l'éventualité du prononcé d'une amende civile, justifie qu'ils prennent en compte également le contenu de la plainte et tous autres éléments versés au dossier ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le premier février deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 16-81852
Date de la décision : 01/02/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

ACTION CIVILE - Partie civile - Constitution - Constitution à l'instruction - Consignation - Montant - Personne morale - Personne morale à but non lucratif - Détermination - Modalités - Pouvoirs du juge

INSTRUCTION - Partie civile - Plainte avec constitution - Consignation - Montant - Personne morale - Personne morale à but non lucratif - Détermination - Modalités - Pouvoirs du juge

L'obligation faite à la partie civile de verser, sauf admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle ou décision de dispense, une consignation fixée en fonction de ses ressources s'applique à toute personne, physique ou morale. Si les personnes morales à but non lucratif ne sont pas soumises à l'obligation de joindre à leur plainte leur bilan et compte de résultat, pour vérifier leurs ressources et fonder leur décision les juges peuvent les inviter à produire toutes pièces, notamment ces pièces comptables. La finalité de la consignation, énoncée à l'article 88-1 du code de procédure pénale, à savoir l'éventualité du prononcé d'une amende civile, justifie que les juges prennent en compte également le contenu de la plainte et tous autres éléments versés au dossier


Références :

article 88 et 88-1 du code de procédure pénale

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 25 février 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 01 fév. 2017, pourvoi n°16-81852, Bull. crim.
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle

Composition du Tribunal
Président : M. Guérin
Avocat général : M. Lagauche
Rapporteur ?: M. Larmanjat
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.81852
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