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26/01/2017 | FRANCE | N°15-24711

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 janvier 2017, 15-24711


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 2 juillet 2015), que M. X... a été engagé le 1er janvier 2012 par contrat à durée déterminée par la société Cofidis compétition (la société) en qualité de cycliste professionnel ; que mis en cause dans une affaire en lien avec un éventuel trafic de produits dopants, le salarié a été interpellé à Bourg-en-Bresse le 10 juillet 2012 dans le cadre du Tour de France puis mis en examen pour " détention par un sportif de procédé ou produit interdit sans ju

stification médicale dans le cadre d'une manifestation sportive " et placé sou...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 2 juillet 2015), que M. X... a été engagé le 1er janvier 2012 par contrat à durée déterminée par la société Cofidis compétition (la société) en qualité de cycliste professionnel ; que mis en cause dans une affaire en lien avec un éventuel trafic de produits dopants, le salarié a été interpellé à Bourg-en-Bresse le 10 juillet 2012 dans le cadre du Tour de France puis mis en examen pour " détention par un sportif de procédé ou produit interdit sans justification médicale dans le cadre d'une manifestation sportive " et placé sous contrôle judiciaire le 12 juillet 2012 ; que convoqué par lettre du 19 juillet 2012 à un entretien préalable prévu le 2 août 2012 accompagnée d'une mise à pied conservatoire, le salarié a été placé en arrêt maladie le 2 août 2012 ; qu'à la suite d'un entretien préalable du 13 août 2012, l'employeur lui a notifié le 10 septembre 2012 la rupture anticipée de son contrat de travail pour faute grave ;

Sur le premier moyen :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'écarter des débats deux arrêts rendus par la chambre de l'instruction, alors, selon le moyen :
1°/ que la partie civile non tenue au secret de l'instruction est autorisée pour l'exercice des droits de sa défense à produire dans une instance civile les décisions rendues par la chambre de l'instruction dans le cadre d'une procédure pénale en cours qui lui ont été régulièrement notifiées ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que la société Cofidis compétition n'était pas tenue au secret de l'instruction et que les arrêts rendus les 27 mars et 2 mai 2013 par la chambre d'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence dans le cadre de l'instruction pénale visant M. X... lui avaient été régulièrement notifiées à raison de sa constitution de partie civile ; qu'en jugeant néanmoins que la société n'était pas en droit de produire ces décisions dans le cadre de sa défense devant la juridiction prud'homale aux motifs que ces décisions avaient été rendues en chambre du conseil et que la procédure pénale n'était pas achevée, la cour d'appel a violé les articles 11, 114 et 199 du code de procédure pénale ;
2°/ que la preuve est libre en matière prud'homale ; qu'en retenant que les décisions de la chambre de l'instruction n'émanant pas de juges du fond, n'ayant pas l'autorité de la chose jugée de sorte que leur contenu n'étant pas de nature à s'imposer au juge prud'homal quant à la matérialité de faits invoqués par l'employeur dans le cadre du licenciement, la société Cofidis compétition ne pouvait en justifier la production " pour l'exercice des droits de sa défense " dans le cadre de l'instance prud'homale, lorsque ces décisions constituaient un élément de preuve libre dont elle était en droit de se prévaloir devant le juge prud'homal pour établir la réalité des faits invoqués au soutien de la rupture du contrat de travail, la cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil ;
3°/ que les termes du litige sont fixés par les prétentions respectives des parties ; que la société Cofidis compétition sollicitait avant dire droit à titre principal qu'il soit constaté la recevabilité de la production des arrêts rendus par la chambre de l'instruction les 27 mars et 2 mai 2013, et à titre subsidiaire qu'il soit sursis à statuer sur le fond dans l'attente de l'ordonnance de règlement devant mettre fin à l'instruction visant M. X... ; qu'en retenant que la production de ces arrêts ne visait pas à obtenir un sursis à statuer en vertu de l'article 4 du code de procédure pénale, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant exactement retenu que la société ne pouvait pas produire dans une instance civile des arrêts de la chambre de l'instruction rendus dans le cadre d'une information judiciaire en cours quand bien même elle n'était pas tenue au secret de l'instruction et que les arrêts litigieux lui avaient été régulièrement notifiés, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la condamner à payer au salarié des sommes à titre de rappel de salaire pour mise à pied conservatoire injustifiée, de congés payés et de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, alors, selon le moyen :
1°/ que la cassation à intervenir du chef de dispositif ayant rejeté la production des deux arrêts rendus par la chambre de l'instruction entraînera la cassation par voie de conséquence de ce chef de dispositif en application de l'article 624 du Code de procédure civile ;
2°/ que la présomption d'innocence bénéficiant à celui qui fait l'objet d'une procédure pénale n'interdit pas d'établir par tout moyen de preuve légalement admissible devant le juge civil qui n'est pas tenu de surseoir à statuer, les faits qui lui sont reprochés lorsqu'ils constituent une faute civile ; qu'en jugeant que la société Cofidis compétition ne pouvait établir que M. X... avait tenté de se faire livrer du matériel d'injection le 10 juillet 2012, et qu'il avait déjà subi des traitements par injections non déclarés, faits qu'elle lui reprochait au soutien de la rupture de son contrat de travail, au moyen de coupures de presse, de déclarations du procureur de la République et des aveux du naturopathe de M. X..., sous peine de porter atteinte à la présomption d'innocence dont ce dernier bénéficiait dans le cadre de sa mise en examen pour détention par un sportif de substances ou de procédés interdit sans justification médicale dans le cadre d'une compétition ou manifestation sportive, la cour d'appel a violé les articles 9-1 du code civil et 4, alinéa 3, du code de procédure pénale ;
3°/ que constitue un grief suffisamment précis pour être matériellement vérifiable le fait d'avoir « subi des traitements non déclarés auprès de notre équipe et non déclarés auprès de l'UCI, alors même que les procédés dont il s'agit (injections et perfusions) sont strictement réglementés et pour votre cas injustifiés » ; qu'en jugeant le contraire au motif inopérant que ces faits n'étaient datés, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;
Mais attendu que le rejet du premier moyen rend sans portée la première branche du moyen qui invoque une cassation par voie de conséquence ;
Et attendu que sous le couvert de griefs non fondés de violation de la loi, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine des faits et des preuves par les juges du fond qui ont estimé que les faits reprochés au salarié n'étaient pas établis ;
Sur le troisième moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Cofidis compétition aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Cofidis compétition à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six janvier deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Cofidis compétition
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ses dispositions relatives au rejet de la production des deux arrêts rendus par la chambre de l'instruction
AUX MOTIFS QUE « Au visa des articles 11 et 114 du code de procédure pénale, M. Rémy X... demande, comme en 1ère instance, le rejet des deux arrêts de la chambre de l'instruction, pour l'un autorisant le salarié à participer à nouveau aux compétitions sportives et pour l'autre déclarant irrecevables les constitutions de partie civile de la SA Cofidis et la société Cofidis Compétition. Il invoque le fait que l'instance pénale n'est pas achevée, que la production de telles pièces n'a pas été expressément autorisée par le juge d'instruction ou le procureur général et que la cour, dans son arrêt de référé rejetant l'arrêt de l'exécution provisoire, a déjà dit que le conseil des prud'hommes de Marseille avait à juste titre écarté ces pièces. Il estime que la révélation d'informations résultant de ces arrêts en audience publique, est nécessairement de nature à violer le secret de l'instruction. La société Cofidis Compétition indique que le secret de l'instruction ne lui est pas opposable, qu'elle a eu communication des pièces dont le rejet est demandé, de façon régulière puisque notifiées par le greffe. Elle estime que ces pièces sont nécessaires à l'exercice des droits de sa défense, dans le cadre du litige prud'homal. Il est incontesté que les arrêts litigieux ont été notifiés à la société appelante par le greffe de la chambre de l'instruction, en sa qualité de partie civile. Le fait que la société Cofidis Compétition ne soit pas soumise au secret de l'instruction ne peut l'autoriser pour autant à divulguer les actes juridictionnels que sont des arrêts prononcés en chambre du conseil, auprès d'une juridiction appelée à statuer par une décision qui sera rendue publique. En effet, s'il ressort de la jurisprudence produite par la société appelante qu'une telle production n'est pas interdite après achèvement de l'instance pénale, tel n'est pas le cas en l'espèce à ce jour ; de même, la production de ces arrêts ne visent pas à obtenir un sursis à statuer en vertu de l'article 4 du code de procédure pénale. Enfin, la société Cofidis Compétition ne peut justifier la production de tels actes " pour l'exercice des droits de sa défense " dans le cadre de l'instance prud'homale puisque ces décisions pénales n'émanant pas de juges du fond n'ont pas l'autorité de la chose jugée et leur contenu n'est pas de nature à s'imposer au juge prud'homal, quant à la matérialité de faits invoqués par l'employeur dans le cadre du licenciement. En conséquence, il convient de confirmer le jugement du conseil des prud'hommes de Marseille qui a écarté à juste titre la production de telles pièces »

1/ ALORS QUE la partie civile non tenue au secret de l'instruction est autorisée pour l'exercice des droits de sa défense à produire dans une instance civile les décisions rendues par la chambre de l'instruction dans le cadre d'une procédure pénale en cours qui lui ont été régulièrement notifiées ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que la société Cofidis Compétition n'était pas tenue au secret de l'instruction et que les arrêts rendus les 27 mars et 2 mai 2013 par la chambre d'instruction de la Cour d'appel d'Aix en Provence dans le cadre de l'instruction pénale visant M. X... lui avaient été régulièrement notifiées à raison de sa constitution de partie civile ; qu'en jugeant néanmoins que la société n'était pas en droit de produire ces décisions dans le cadre de sa défense devant la juridiction prud'homale aux motifs que ces décisions avaient été rendues en chambre du conseil et que la procédure pénale n'était pas achevée, la Cour d'appel a violé les articles 11, 114 et 199 du code de procédure pénale ;
2/ ALORS QUE la preuve est libre en matière prud'homale ; qu'en retenant que les décisions de la chambre de l'instruction n'émanant pas de juges du fond, n'ayant pas l'autorité de la chose jugée de sorte que leur contenu n'étant pas de nature à s'imposer au juge prud'homal quant à la matérialité de faits invoqués par l'employeur dans le cadre du licenciement, la société Cofidis Compétition ne pouvait en justifier la production " pour l'exercice des droits de sa défense " dans le cadre de l'instance prud'homale, lorsque ces décisions constituaient un élément de preuve libre dont elle était en droit de se prévaloir devant le juge prud'homal pour établir la réalité des faits invoqués au soutien de la rupture du contrat de travail, la Cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil ;
3/ ALORS QUE les termes du litige sont fixés par les prétentions respectives des parties ; que la société Cofidis Compétition sollicitait avant dire droit à titre principal qu'il soit constaté la recevabilité de la production des arrêts rendus par la chambre de l'instruction les 27 mars et 2 mai 2013, et à titre subsidiaire qu'il soit sursis à statuer sur le fond dans l'attente de l'ordonnance de règlement devant mettre fin à l'instruction visant M. X... (dispositif des conclusions d'appel de la société Cofidis Compétition reprises oralement à l'audience, p. 41) ; qu'en retenant que la production de ces arrêts ne visait pas à obtenir un sursis à statuer en vertu de l'article 4 du code de procédure pénale, la Cour d'appel a violé l'article 4 du Code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Cofidis Compétition à verser à M. X... les sommes de 28. 333, 33 € à titre de rappel de salaire pour la mise à pied injustifiée outre 2833, 33 € pour les congés payés y afférents, et 300. 000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat à durée déterminée et d'AVOIR débouté la société Cofidis Compétition de ses demande reconventionnelles
AUX MOTIFS PROPRES QUE « La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée du préavis. L'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve. La lettre du 10 septembre 2012 est motivée ainsi : « Nous vous avons convoqué pour un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement qui devait se tenir le 13 août dernier. Selon correspondance du 02 août, votre conseil nous a fait part de votre indisponibilité en invoquant la fragilité de votre état de santé. Pour vous permettre de vous exprimer, nous vous avons proposé le report de cet entretien, proposition qui n'a pas reçu votre accord. Connaissance prise de votre choix, nous vous avons formulé par écrit différentes questions qui devaient vous permettre de nous apporter des réponses sans détour sur les faits qui vous sont reprochés et l'objet de nos préoccupations. Nous prenons acte de votre réponse qui consiste, en définitive, à ne pas nous répondre motif pris d'un prétendu secret d'instruction. Nous constatons et regrettons à cet égard que si, dans un premier temps, vous avez estimé devoir nier en bloc et, sous la plume de votre conseil, rejeter la totalité des faits qui vous ont été reprochés, vous vous cantonnez désormais dans un silence « prudent », vous dispensant de toute explication. Nous vous laissons l'entière responsabilité de ce choix, étant fait observer que votre comportement est en lui-même peu propice à la poursuite des relations contractuelles que votre conseil appelait de ses voeux. Quoi qu'il en soit, vous ne nous apportez aucun élément susceptible d'infléchir nos constatations quant à la violation, par vos soins, des obligations inhérentes à votre contrat de travail et à la réglementation à laquelle vous êtes soumis. Nous vous rappelons à cet égard que votre contrat de travail vous engage, notamment, à : adopter un comportement et une hygiène de vie en rapport avec votre activité de coureur cycliste professionnel ; respecter le règlement intérieur ainsi que la charte éthique les règles de conduites applicables au sein de l'équipe COFIDIS que vous avez dûment acceptées et signées ; suivre les mesures mises en place par la Direction de l'équipe dans le cadre de la lutte contre le dopage. Vous vous êtes également obligé à assurer une stricte observance des règlements auxquels vous êtes statutairement soumis en tant que coureur cycliste professionnel, soit en particulier :- la réglementation UCI,- la liste des substances et méthodes interdites telles qu'édictées par l'Agence Mondiale Antidopage et reprise par les instances nationales. Au titre de cette réglementation, il vous est interdit d'avoir recours, sans déclarations et justifications utiles, à des injections de quelque produit que ce soit (Articles L. 232-2-2 du Code du Sport, L. 232-9 du même Code, article 13. 1. 062 et suivants de la réglementation UCI). Or, il est établi qu'à la date du 10 juillet 2012, lors de la première journée de repos du Tour de France 2012, vous avez tenté de vous faire livrer du matériel vous appartenant et pouvant servir à des injections et/ ou perfusions. Indépendamment de toute qualification pénale, la possession de ce type de matériel constitue une transgression évidente des règles UCI, ce type de manquement étant de surcroît susceptible d'emporter votre exclusion de la course, comme celle de toute l'équipe. Vos agissements traduisent une grave inconséquence professionnelle et la mise en danger délibérée de toute l'équipe à laquelle vous appartenez. Ces faits, qui sont à l'origine de votre interpellation par les services de police le 10 juillet 2012, ont abouti à d'autres révélations reprises tant par voie de presse que par une communication officielle du Procureur de la République DALLEST. Il en résulte, notamment, que vous avez subi des traitements non déclarés auprès de notre équipe et non déclarés auprès de l'UCI, alors même que les procédés dont il s'agit (injections et perfusions) sont strictement réglementés et pour votre cas injustifiés. Indépendamment des suites que la justice entendra donner à la procédure pénale en cours (et derrière laquelle vous vous retranchez), les faits qui sont d'ores et déjà établis et non contestés par vous contreviennent gravement aux engagements qui sont les vôtres et constituent des manquements aux conditions d'exécution du contrat de travail dûment régularisé entre vous et notre société. Ils contreviennent également à l'éthique sportive et à votre obligation contractuelle de loyauté. Ces révélations portent, par ailleurs, atteinte à l'image de marque de l'équipe comme à son sponsor principal, indépendamment des dysfonctionnements et de l'émoi suscité par votre mise en cause et votre interpellation au sein de l'équipe. De surcroît, et suite à vos agissements, nous avons de votre unique fait été privés d'un coureur sur le reste du Tour de France, ce qui a été de nature à impacter la performance de l'équipe dans son ensemble.

Enfin, la légèreté de votre comportement vous amène à être sous le coup d'une interdiction de courir en compétition, ce qui en soi vous prive également de la possibilité d'exécuter votre contrat de travail. Pour l'ensemble de ces raisons, nous vous signifions, par la présente, votre licenciement pour faute grave. Compte tenu de la qualification retenue, aucun préavis n'est à prester ou à être indemnisé, la période de mise à pied à titre conservatoire ne vous étant, par ailleurs, pas payée. (...) ». Le salarié considère que les manquements excipés ne sont pas établis et résultent d'une suspicion de dopage et d'une mise en examen qui ne peut caractériser une faute grave. Il estime que les propos du procureur de la république reproduits par voie de presse écrite ou à l'aide d'une vidéo, selon constat d'huissier ne sont que de simples affirmations sans valeur probante. Il précise qu'en juillet 2012, il n'a pas été interpellé en possession de produits illicites ou injectables, que l'accompagnement d'un naturopathe dans sa préparation physique n'avait pas à être déclaré à son employeur et qu'il n'existe pas de preuves tangibles qu'il se soit injecté des produits même non dopants. Il en veut pour preuve l'absence de poursuite de nature disciplinaire de la part de l'UCI laquelle lui a délivré une licence pour l'année 2013. Il fait valoir que le contrôle judiciaire l'empêchait de participer à des compétitions mais non à des entraînements et que la société Cofidis Compétition, conformément à son communiqué de presse, pouvait mettre la procédure disciplinaire en suspens jusqu'à décision définitive du juge pénal. La société Cofidis Compétition fait valoir que la rupture ne repose sur aucune qualification pénale mais sur des faits précis à apprécier indépendamment de toute qualification et réponses du juge pénal mais correspondant à des interdits professionnels. Elle déclare se fonder sur les éléments factuels issus des communiqués de presse du procureur de la République démontrant que M. Rémy X... a tenté de se faire livrer par un ami sur le Tour de France, du matériel permettant de faire des injections, a subi des traitements non déclarés à l'UCI et interdits puisque n'ayant fait l'objet d'aucune prescription de la part de l'encadrement médical. Elle soutient avoir agi sans précipitation, laissant toute latitude au salarié de s'expliquer sur les faits. Il est incontesté qu'au contraire de la procédure de " licenciement " conduite en 2004 à l'encontre d'un autre coureur, la société Cofidis Compétition ne fonde pas la rupture du contrat de travail sur l'implication de M. Rémy X... dans une affaire de dopage susceptible de sanctions pénales. Cependant, la société Cofidis Compétition n'apporte aux débats que des coupures de presse et le compte rendu fait par le procureur de la république, à une date ignorée mais proche de l'interpellation de M. Rémy X.... Dès lors, l'employeur ne rapporte pas la preuve des faits de détention de matériel permettant des injections, la présomption d'innocence devant bénéficier au salarié ; de même les aveux du naturopathe, également mis en examen, comme ceux de M. Rémy X... tels qu'évoqués dans ces documents, quant à des injections déjà pratiquées par le passé sont à eux seuls insuffisants pour permettre à la société Cofidis Compétition d'asseoir les griefs d'une rupture, au demeurant aucune date précise n'étant indiquée dans la lettre de licenciement. En conséquence, l'employeur ne justifie pas que M. Rémy X... ait, par les agissements reprochés, manqué aux obligations de son contrat de travail et c'est donc à juste titre que le conseil des prud'hommes de Marseille a dit que la rupture ne reposait ni sur une faute grave ni sur une cause réelle et sérieuse. Sur les conséquences de la rupture A titre liminaire, il convient de constater que M. Rémy X... a reproduit dans ses conclusions devant la cour une demande d'indemnité de précarité, indiquée comme abandonnée dans les motifs du jugement déféré, et qui en tout état de cause, n'est pas explicitée ni justifiée s'agissant d'un contrat à durée déterminée d'usage. Elle sera donc rejetée. 1- sur la mise à pied La faute grave n'étant pas retenue, la mesure était dénuée de fondement. La société Cofidis Compétition fait valoir que M. Rémy X... était déjà sous le coup d'une interdiction de compétition par le contrôle judiciaire et dans l'incapacité de travailler en août et septembre du fait d'un arrêt maladie lui ayant procuré un revenu de substitution. Il convient de dire que le contrôle judiciaire a empêché le salarié de poursuivre le Tour de France mais n'a pas eu pour effet de suspendre son contrat de travail ; dès lors, le salarié est en droit de solliciter le rappel de salaire afférent à la mise à pied à titre conservatoire du 19 juillet au 10 septembre 2012, sans être diminué des indemnités journalières perçues, au demeurant de 1700 € sur la période. Observant que le conseil des prud'hommes de Marseille a fixé la créance à 34. 642, 01 € nets outre les congés payés y afférents, sans aucun calcul justificatif de la part de M. Rémy X..., alors que la rémunération mensuelle brute du salarié était de 16. 666, 67 € selon les bulletins de salaire, il convient de fixer la somme due à 28. 333, 33 € outre 2833, 33 € pour les congés payés y afférents. 2- sur les dommages et intérêts pour rupture abusive La société Cofidis Compétition considère que la somme allouée ne correspond pas au calcul d'une réparation forfaitaire tel que prévu par l'article L. 1243-4 du code du travail. Le salarié considère que ce texte prévoit une réparation forfaitaire minimale basée sur la rémunération mensuelle brute mais qu'il convient de tenir compte du contexte brutal de la rupture alors qu'il était irréprochable et des suites de son éviction : maladie, chômage n'ayant retrouvé un contrat à durée déterminée qu'en 2014 à raison de 40. 000 € l'an. Il convient de préciser que les dommages et intérêts ont, dans ce cas précis, vocation en 1er lieu à réparer la perte de salaire et comme tels sont soumis à l'impôt notamment et assujettis à la RDS et CSG et ne peuvent se cumuler avec les allocations chômage. Cependant, il ne peut être reproché au conseil des prud'hommes de Marseille de les avoir exprimés en sommes nettes ni d'avoir statué ultra petita. Prenant en considération la somme brute de 261. 547, 24 € comme étant celle des salaires restant à courir, non contestée par la société Cofidis Compétition, et au regard des éléments exposés par les parties sur les circonstances de la rupture, il convient d'allouer à M. Rémy X... pour le préjudice subi tant matériel que moral du fait de la rupture, la somme de 300. 000 €. Sur la demande reconventionnelle Le présent arrêt, infirmatif sur certains points, constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement, et dès lors il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de l'employeur en restitution des sommes versées du fait de l'exécution provisoire. La société Cofidis Compétition sera déboutée de sa demande faite à titre de dommages et intérêts, la procédure initiée par M. Rémy X... n'étant pas abusive » ET AUX MOTIFS A LES SUPPOSER ADOPTES QUE « l'article L. 1243-1 du code du travail énonce : « Sauf accord des parties, le contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu avant l'échéance du terme qu'en cas de faute grave ou de force majeure. » En effet la faute du salarié est considérée comme grave lorsqu'elle provient d'un fait ou d'un ensemble de faits qui rendent impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. Ce ou ces faits doivent être directement imputables au salarié. La gravité de la faute est appréciée en fonction des circonstances propres à chaque fait. La faute grave peut être reconnue au regard d'un fait unique mais inacceptable. Qu'en l'espèce l'employeur dans la lettre de licenciement rappelle qu': « il est interdit d'avoir recours sans déclaration et justification utile à des injections de quelques produit que ce soit » selon les obligations contractuelles et la réglementation en vigueur » (code du sport et réglementation UCI). Que l'employeur motive sa lettre de licenciement dans la forme suivante : « il serait établi qu'à la date du 10 juillet 2012, Mr X... aurait tenté de se faire livrer du matériel lui appartenant et pouvant servir à des injections et ou perfusions. » Que l'employeur ne ramène pas la matérialité et la réalité des agissements reprochés. Que Mr X... affirme ne jamais s'être dopé. Qu'au jour du licenciement aucune culpabilité n'a été établie d'autant plus que celle-ci n'a jamais été même après le licenciement. Que Mr X... n'a jamais été mis en cause dans le cadre des contrôles effectués tout au long de sa carrière par les autorités du cyclisme chargées de veiller au respect des règlements liés au dopage. Que Mr X... abordait ce tour de France avec l'enthousiasme et la renommée d'un coureur cycliste professionnel de grande qualité, salarié de l'équipe COFIDIS. Que cette réputation avérée aurait peut être pris une dimension encore plus importante lors de ce tour de France si son employeur, la société COFIDIS, avait fait montre de soutien et de solidarité envers son salarié au lieu de le sanctionner rapidement et sans preuve en tentant de gérer le défoulement médiatique et populaire propre à ce genre d'accusations. Que selon l'article 9. 1 du Code Civil : « chacun a droit au respect de la présomption d'innocence ». Qu'il appartient à l'employeur au jour du licenciement de démontrer la réalité des faits reprochés. En conséquence la rupture anticipée du contrat de travail de Mr X... est abusive et ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse »

1/ ALORS QUE la cassation à intervenir du chef de dispositif ayant rejeté la production des deux arrêts rendus par la chambre de l'instruction entraînera la cassation par voie de conséquence de ce chef de dispositif en application de l'article 624 du Code de procédure civile ;
2/ ALORS QUE la présomption d'innocence bénéficiant à celui qui fait l'objet d'une procédure pénale n'interdit pas d'établir par tout moyen de preuve légalement admissible devant le juge civil qui n'est pas tenu de surseoir à statuer, les faits qui lui sont reprochés lorsqu'ils constituent une faute civile ; qu'en jugeant que la société Cofidis Compétition ne pouvait établir que M. X... avait tenté de se faire livrer du matériel d'injection le 10 juillet 2012, et qu'il avait déjà subi des traitements par injections non déclarés, faits qu'elle lui reprochait au soutien de la rupture de son contrat de travail, au moyen de coupures de presse, de déclarations du Procureur de la République et des aveux du naturopathe de M. X..., sous peine de porter atteinte à la présomption d'innocence dont ce dernier bénéficiait dans le cadre de sa mise en examen pour détention par un sportif de substances ou de procédés interdit sans justification médicale dans le cadre d'une compétition ou manifestation sportive, la Cour d'appel a violé les articles 9-1 du Code civil et 4 alinéa 3 du Code de procédure pénale ;
3/ ALORS QUE constitue un grief suffisamment précis pour être matériellement vérifiable le fait d'avoir « subi des traitements non déclarés auprès de notre équipe et non déclarés auprès de l'UCI, alors même que les procédés dont il s'agit (injections et perfusions) sont strictement réglementés et pour votre cas injustifiés » ; qu'en jugeant le contraire au motif inopérant que ces faits n'étaient datés, la Cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du Code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Cofidis Compétition à verser à M. X... les sommes de 28. 333, 33 € à titre de rappel de salaire pour la mise à pied injustifiée outre 2833, 33 € pour les congés payés y afférents
AUX MOTIFS QUE « La faute grave n'étant pas retenue, la mesure était dénuée de fondement. La société Cofidis Compétition fait valoir que M. Rémy X... était déjà sous le coup d'une interdiction de compétition par le contrôle judiciaire et dans l'incapacité de travailler en août et septembre du fait d'un arrêt maladie lui ayant procuré un revenu de substitution. Il convient de dire que le contrôle judiciaire a empêché le salarié de poursuivre le Tour de France mais n'a pas eu pour effet de suspendre son contrat de travail ; dès lors, le salarié est en droit de solliciter le rappel de salaire afférent à la mise à pied à titre conservatoire du 19 juillet au 10 septembre 2012, sans être diminué des indemnités journalières perçues, au demeurant de 1700 € sur la période. Observant que le conseil des prud'hommes de Marseille a fixé la créance à 34. 642, 01 € nets outre les congés payés y afférents, sans aucun calcul justificatif de la part de M. Rémy X..., alors que la rémunération mensuelle brute du salarié était de 16. 666, 67 € selon les bulletins de salaire, il convient de fixer la somme due à 28. 333, 33 € outre 2833, 33 € pour les congés payés y afférents »

ALORS QUE lorsque la mise à pied à titre conservatoire prononcée par l'employeur s'avère dépourvue de fondement, le salarié ne peut prétendre qu'au paiement du salaire qu'il aurait perçu pendant la période si cette mesure n'avait pas été prononcée ; qu'il en résulte que le salarié placé en arrêt maladie pendant la période au cours de laquelle il avait été mis à pied ne peut prétendre qu'au complément de salaire que l'employeur devait lui verser en sus des indemnités journalières perçues des organismes de sécurité sociale ; qu'il était constant que M. X... qui avait été mis à pied à titre conservatoire le 19 juillet 2012 avait été placé en arrêt maladie le 2 août 2012 ; qu'en condamnant la société Cofidis Compétition à lui régler la totalité du salaire qu'il aurait perçu s'il avait travaillé pendant la période de mise à pied, sans vérifier que le salarié pouvait prétendre au maintien de son salaire pendant son arrêt maladie ni déduire les indemnités journalières qu'il avait perçues de la sécurité sociale, la Cour d'appel a violé l'article L. 1221-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-24711
Date de la décision : 26/01/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 02 juillet 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 jan. 2017, pourvoi n°15-24711


Composition du Tribunal
Président : Mme Guyot (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.24711
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