LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 21 c) de la Convention franco-marocaine du 5 octobre 1957, ensemble ses articles 16 c) et 19 ;
Attendu que, selon ces textes, le juge vérifie si la décision dont l'exequatur est demandé est, d'après la loi du pays où elle a été rendue, passée en force de chose jugée et susceptible d'exécution et il appartient à celui qui en demande l'exécution, de produire un certificat des greffiers compétents constatant qu'il n'existe contre la décision ni opposition ni appel ni pourvoi en cassation ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... et Mme Y..., tous deux de nationalité marocaine, se sont mariés en France le 26 août 2006 ; que, par acte d'huissier de justice du 27 octobre 2010, Mme Y... a assigné son mari aux fins d'annulation du mariage pour cause de bigamie ;
Attendu que, pour rejeter la demande Mme Y..., l'arrêt retient qu'il résulte d'une attestation du 12 septembre 2013 établie par le consulat général du Maroc à Bordeaux, que le divorce de M. X... et de sa précédente épouse, qui a été prononcé par jugement du tribunal de première instance de Meknès du 27 juillet 2006, est devenu "définitif et irrévocable" le 26 août 2006 ;
Qu'en statuant ainsi, alors que M. X... n'avait pas produit le certificat des greffiers compétents, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 octobre 2014, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre janvier deux mille dix sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour Mme Y...
L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a rejeté la demande formée par Madame Y... à l'encontre de X... visant à la nullité du mariage du 26 août 2006 du fait de la persistance du mariage précédent du mari avec Madame Z... ;
AUX MOTIFS QUE « sur invitation de la Cour, M X... verse au débat une attestation en date du 13 septembre 2013 établie par le consulat général du Royaume du Maroc de Bordeaux rédigée en ces termes : "Vu la déclaration judiciaire n° 2266/CA12 établie par le Tribunal de Première Instance le 28 novembre 2012, Vu le jugement de divorce prononcé par le tribunal de Première Instance de MEKNES en date du 27 juillet 2006, Vu l'article 28 du code de la famille, Le consul Général du Royaume du Maroc à Bordeaux, atteste que : * M. MOHAMED X... né le 10/11/1981 et * Mme NADIA Z... née le 06/09/1983 ont définitivement divorcé et d'une manière irrévocable le 27 juillet 2006" ; que Mme Y... produit pour sa part une attestation, établie par le greffier de la chambre de la famille du tribunal de première instance de MEKNES en date du 25 février 2014, qui ne saurait être recevable, à défaut d'une part, d'avoir la nature d'un certificat de coutume établi par une autorité marocaine en France mais surtout qui ne porte aucune date quant à la date effective du divorce, de sorte qu'il convient d'infirmer le jugement déféré, M. X... ayant rapporté la preuve qu'il n'était plus uni par les liens du mariage, lors de son union avec Mme Y... le 26 août 2006 » ;
ALORS QUE, premièrement, en application de l'article 21 de la Convention franco-marocaine du 5 octobre 1957, la partie qui se prévaut d'une décision judiciaire émanant de l'Etat étranger, doit produire un certificat du greffier compétent constatant que la décision qu'il invoque ne fait l'objet, ni d'une opposition, ni d'un appel, ni d'un pourvoi en cassation ; qu'en faisant état au cas d'espèce d'une attestation émanant du consul général du Royaume du Maroc à Bordeaux, et non du greffier de la juridiction en cause, les juges du fond ont violé l'article 21 de la convention franco-marocaine du 5 octobre 1957 ;
ALORS QUE, deuxièmement, et en tout cas, en faisant produire effet à une décision émanant d'une juridiction marocaine, sans se préoccuper de savoir s'il était attesté que cette décision ne faisait ni d'une opposition, ni d'un appel, ni d'un pourvoi en cassation, les juges du fond ont de nouveau l'article 21 de la convention franco-marocaine du 5 octobre 1957 ;
ET ALORS QUE, troisièmement, et subsidiairement, faute pour les juges du fond de s'être souciés de savoir s'ils disposaient d'une attestation, émanant du greffier compétent, se prononçant sur l'existence d'une opposition, d'un appel ou d'un pourvoi en cassation, les juges du fond ont à tout le moins privé leur décision de base légale au regard de l'article 21 de la convention franco-marocaine du 5 octobre 1957.