LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 1116 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a souscrit un contrat de location de matériel de vidéo-surveillance avec la société Locam ; qu'assignée en paiement par cette société, elle a reconventionnellement demandé la nullité du contrat pour dol ;
Attendu que pour déclarer cette demande irrecevable, l'arrêt énonce que le dol n'est une cause de nullité de la convention que s'il émane de la partie envers laquelle l'obligation est contractée et retient que tel n'est pas le cas des manoeuvres dolosives alléguées, imputées au représentant de la société ASC agissant sous l'enseigne commerciale Altea, qui n'a pas été appelé dans la cause ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la société ASC dont le représentant avait été le seul interlocuteur de Mme X... et lui avait fait signer le contrat de location au nom de la société Locam, n'avait pas agi comme mandataire de celle-ci, ce dont il résulterait que les manoeuvres imputées à son représentant étaient, à les supposer établies, opposables à la société Locam, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 janvier 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;
Condamne la société Locam-Location automobiles matériels aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize décembre deux mille seize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit Mme X... irrecevable en son exception de nullité pour dol et, en conséquence, d'AVOIR condamné Mme X... à payer à la société Locam la somme de 12. 966 euros outre intérêts au taux légal à compter du 24 mai 2011 et 1 euro au titre de la clause pénale ;
AUX MOTIFS QUE l'appelante explique avoir été victime des agissements de Mme Y...
Z... et invoque le dol ; mais qu'aux termes de l'article 1116 du code civil, le dol n'est une cause de nullité de la convention que s'il émane de la partie envers laquelle l'obligation est contractée ; qu'en l'espèce, à supposer que la preuve de manoeuvres dolosives soit rapportée, celles-ci seraient imputables à Mme Y...
Z..., en réalité Z...
Y..., commerciale d'une sarl ASC agissant pour le compte de l'enseigne Altéa, ; que ni cette personne physique, ni cette ou ces société (s) n'ont été attraites à la cause ; que, par ailleurs, aucune manoeuvre dolosive de la société Locam elle-même n'est démontrée, celle-ci s'étant contentée d'acquérir le matériel sur visa du procès-verbal de livraison et de conformité dument signé par l'appelante, afin de les lui donner à bail moyennant paiement du loyer convenu ; qu'en appel Mme X... ne sollicite même pas un sursis à statuer dans l'attente de l'issue de l'instruction pénale en cours, alors que celle-ci aurai pu déterminer si la société Locam avait ou non une responsabilité quelconque dans les agissements de Diana Y..., responsabilité qui en l'état n'est pas établie ; que dès lors, l'exception de nullité est irrecevable faute pour l'appelante d'avoir attrait à l'instance l'auteur ou les auteurs des manoeuvres dolosives alléguées ;
1) ALORS QUE le représentant de la venderesse ayant été chargé par l'établissement de crédit de proposer ses financements aux clients potentiels, puis de les recommander à son approbation, n'est pas, pour la conclusion des contrats, un tiers de sorte que les manoeuvres dolosives de ce représentant, viciant le consentement des clients, sont opposables à l'établissement ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, si Mme Y...
Z..., représentante de la société ASC agissant pour le compte de la société Altéa, qui reconnaissait avoir fait signer à Mme X... des documents en blanc dissimulés dans une liasse de documents en même temps que le contrat de fourniture du matériel de vidéo surveillance litigieux, et qui avait été la seule interlocutrice de Mme X..., n'avait pas, en faisant signer le contrat de location au profit de la société Locam, agi comme mandataire de cette dernière, ce dont il résultait que le dol n'émanait pas d'un tiers au contrat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1109, 1116 et 1998 du code civil ;
2) ALORS QUE le défaut de réponse à conclusion est un défaut de motif ; que devant la cour d'appel, Mme X... faisait valoir que la seule interlocutrice qu'elle avait eue était Mme Y...
Z..., représentante de la société ASC qui lui avait fait signer le contrat de fourniture du matériel de vidéo surveillance pour le compte de la société Altéa, fournisseur, et qui avait reconnu au cours de l'enquête diligentée avoir fait signer un contrat de fourniture du matériel pour un montant de 32, 29 euros TTC par mois et des documents en blanc, notamment deux feuillets dont un laissant vierge la tarification et la désignation du matériel et le second identique au précédent mais comportant en outre une autorisation de prélèvement ; que Mme X... ajoutait qu'elle n'avait jamais signé aucun contrat de location pour le matériel de vidéo surveillance auprès de la société Locam et qu'elle n'aurait jamais signé un contrat de location pour des échéances mensuelles de 209, 10 euros par mois sur cinq ans alors qu'elle était âgée de 63 ans et qu'elle devait prendre sa retraite d'épicière dans les deux ans ; que la signature figurant sur le contrat de location Locam avait été obtenue par escroquerie (concl. p. 5) ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen décisif, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3) ALORS QUE les juges du fond sont tenus de procéder à l'analyse des documents régulièrement soumis à leur examen ; qu'au soutien de ses prétentions, Mme X... avait versé aux débats les deux procès-verbaux d'audition de Mme Y...
Z... en date des 3 février et 19 mai 2011 (pièces 22 et 23) qui établissaient que cette dernière lui avait fait signer un contrat de fourniture du matériel et des documents en blanc, notamment deux feuillets dont un laissant vierge la tarification et la désignation du matériel et le second identique au précédent mais comportant en outre une autorisation de prélèvement, documents précisément identiques au contrat Locam ; qu'en ne s'expliquant pas sur ces documents qui démontraient la réalité du vice du consentement dont Mme X... avait été victime, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit Mme X... irrecevable en sa demande liée à l'inexécution alléguée du contrat de fourniture et, en conséquence, d'AVOIR condamné Mme X... à payer à la société Locam la somme de 12. 966 euros outre intérêts au taux légal à compter du 24 mai 2011 et 1 euro au titre de la clause pénale ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE l'appelante prétend que la société Altéa n'a pas procédé à une installation complète du système de tété-surveillance et conclut donc à l'inexécution par cette société du contrat de fourniture et prestation ; mais que ces griefs ne sont pas dirigés contre la société Locam, financier de l'opération, mais contre la seule société Altéa, fournisseur et qu'il n'appartient pas au loueur, la SAS Locam, de vérifier l'installation ou la conformité du bien choisi par le locataire et encore moins son fonctionnement ; qu'en effet, l'article 1 des conditions générales du contrat de location stipule que e choix du matériel ainsi que celui du fournisseur appartient au locataire et que « 1. 1- Le loueur mandate le locataire pour choisir le fournisseur, le type et la marque du bien repondant à ses besoins. Toutes clauses ou conventions particulières non expressément dénoncées au loueur sont inopposables à ce dernier. Le procès-verbal de livraison, signé du locataire et du fournisseur, consacre la bonne exécution de la transaction et autorise Locam à régler la facture du fournisseur, le paiement emportant date du contrat et engagement définitif du locataire de l'exécuter. En cas de non-conformité ou de non-respect de l'une des conditions du bon de commande par le fournisseur, le locataire en qualité de mandataire du loueur l'informera immédiatement à peine d'engager sa responsabilité en sorte qu'aucun décaissement n'intervienne » ; que l'article 2 des mêmes conditions générales précise « La livraison du bien et son installation sont faites aux frais et risques du locataire sous sa responsabilité » ; qu'ainsi l'appelante ne peut, sans contredire, d'une part, les conditions générales qu'elle a pourtant expressément acceptées et, d'autre part, sa réception sans opposition ni réserve, opposer à la société Locam un dysfonctionnement ou une installation incomplète du matériel imputable à son seul fournisseur, la société Altéa ; que, de surcroit, l'article 7 des mêmes conditions générales, intitulé « Garantie-Recours », prive le locataire de tous recours contre le bailleur du chef d'une défaillance du fournisseur ; qu'il s'ensuit que les griefs relatifs au fonctionnement, à la délivrance et à la conformité du matériel choisi et commandé par l'appelante, ne sont pas opposables à la société Locam et que, faute par l'appelante d'avoir attrait la société Altéa à la procédure, ses demandes fondées sur l'inexécution du contrat de fourniture sont irrecevables ; qu'aux termes de l'article 1184 du code civil : « La condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas ou l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement. Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté, a le choux ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts. La résolution doit être demandée en justice... » ; qu'en l'espèce, l'appelante n'a ni obtenu ni agi en résolution ou en nullité du contrat la liant à son fournisseur, la société Altéa ; qu'en l'absence de mise en cause du fournisseur et prestataire de services, il n'y a donc pas lieu de s'interroger sur l'interdépendance des différents contrats et l'appréciation de l'état et du fonctionnement du matériel, dont seule la société Altéa aurait dû répondre ; que le litige se limite donc, de facto, aux seules relations de l'appelante avec la société Locam ;
AUX MOTIFS ADOPTES QUE l'existence du contrat de location n'est pas remise en cause ; que Mme X... a ratifié les documents contractuels et que le contrat de location comporte sa signature manuscrite apposée à 3 endroits, la mention « lu et approuvé » et la mention « bon pour cachet » ; que le procès-verbal de livraison et de conformité établi également à l'en-tête de la société Locam est également signé par Mme X... sur lequel elle a apposé son tampon commercial et la mention manuscrite « lu et approuvé » ; que Mme X... a aussi ratifié une autorisation de prélèvement établie clairement et de manière non équivoque à l'adresse de " Locam SAS " ; que la mise en mouvement de l'action publique n'impose par la suspension du jugement des autres actions exercées devant la juridiction commerciale, de quelque nature qu'elle soit ; que la plainte est dirigée à l'encontre d'un tiers à la présente procédure, à savoir le commercial de la société fournisseur ; que même si ce tiers est potentiellement condamnable, il n'est pas démontré que sa condamnation rendra la société Locam responsable de ses agissements personnels fautifs ; qu'en outre, les dires de la défenderesse ne sont corroborés par aucune pièce, ni élément objectif d'aucune sorte selon laquelle le commercial aurait reconnu être intervenu de manière frauduleuse ; que la société Altéa, fournisseur, n'est pas appelée à la cause et que de ce fait, les moyens soulevés sur les critiques du matériel livré ne peut être retenus ; que l'art. I des conditions générales du contrat stipule : «... le loueur mandate le locataire pour choisir le fournisseur, le type et la marque du matériel répondant à ses besoins... » et que l'art. 2 stipule : «... la livraison du matériel et son installation sont faites aux frais et risques du locataire et sous sa responsabilité... » ; que de ce fait, il n'appartient pas au loueur de vérifier l'installation du matériel choisi par le locataire et encore moins son fonctionnement ; que Mme X... a ratifié et apposé le cachet humide à son enseigne sur le procès-verbal de livraison du matériel sans aucune réserve d'aucune sorte ou du moins sans aucune mention faisant état d'un défaut de fonctionnement ou d'installation du matériel ; que l'art. 7 des conditions générales du contrat de location stipule le transfert au locataire des droits et actions de la société Locam à l'égard du fournisseur, en contrepartie de quoi, le locataire renonce à tous recours du chef d'une défaillance du fournisseur à l'encontre du bailleur ; que l'art. 11 des conditions générales de location précise : «... le locataire est rendu attentif l'indépendance juridique existant entre le contrat de location et le contrat de prestation de maintenance entretien dont les difficultés d'exécution ne sauraient justifier le non-paiement des loyers... " ; que les loyers échus et non échus sont dus à la société Locam ; que le Tribunal rejettera la demande de Mme X... de sursis à statuer dans l'attente du résultat de la procédure pénale et condamnera Mme X... à payer la somme de 12. 966 euros en principal avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 24. 05. 2011 ; que la clause pénale de 10 % des sommes dues apparaît excessive ; que le tribunal réduira la clause pénale à 1 euro et condamnera Mme X... à payer ladite somme ;
1) ALORS QUE les contrats concomitants ou successifs qui s'inscrivent dans une opération incluant une location financière sont interdépendants ; que sont réputées non écrites les clauses des contrats inconciliables avec cette interdépendance ; qu'en l'espèce, pour juger que les griefs relatifs au fonctionnement et à la délivrance et la conformité du matériel de vidéo surveillance étaient inopposables à la société Locam, loueur du matériel, la cour d'appel a relevé que l'article 2 des conditions générales excluait que le locataire puisse opposer au loueur un dysfonctionnement ou une installation incomplète du matériel et que l'article 7 privait en toute hypothèse le locataire de tout recours contre le bailleur du chef d'une défaillance d'une fournisseur ; qu'en statuant ainsi, quand ces clauses, inconciliables avec l'interdépendance des contrats de location et de prestation de services, devaient être réputées non écrites, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
2) ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions est un défaut de motif ; que dans ses conclusions d'appel, Mme X... soutenait qu'elle n'avait jamais signé aucun contrat de location pour le matériel de vidéo surveillance auprès de la société et que la signature figurant sur le contrat de location Locam avait été obtenue par escroquerie (Conclusions d'appel p. 5) ; qu'en jugeant que les griefs relatifs au fonctionnement et à la délivrance et la conformité du matériel de vidéo surveillance étaient inopposables à la société Locam, loueur du matériel, dès lors que Mme X... avait expressément accepté les conditions générales du contrat de location, sans répondre au moyen qui faisait valoir que la signature figurant sur le contrat de location Locam lui avait été extorquée, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.