La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/12/2016 | FRANCE | N°15-17679

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 07 décembre 2016, 15-17679


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1221-1 et L. 1233-4 du code du travail ;
Attendu selon l'arrêt attaqué que la société Groupe SEB Moulinex a au cours de l'année 2009, entrepris une réorganisation ayant pour conséquence la fermeture du site de La Défense, que le plan de sauvegarde de l'emploi comprenait un chapitre relatif à des départs volontaires, que Mme X... engagée en 2003, occupait à La Défense le poste de directeur produit international, qu'elle a d'abord accepté la modification de

son contrat de travail et son affectation au sein de la société SEB à Selo...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1221-1 et L. 1233-4 du code du travail ;
Attendu selon l'arrêt attaqué que la société Groupe SEB Moulinex a au cours de l'année 2009, entrepris une réorganisation ayant pour conséquence la fermeture du site de La Défense, que le plan de sauvegarde de l'emploi comprenait un chapitre relatif à des départs volontaires, que Mme X... engagée en 2003, occupait à La Défense le poste de directeur produit international, qu'elle a d'abord accepté la modification de son contrat de travail et son affectation au sein de la société SEB à Selongey pour ensuite les refuser, qu'elle a été convoquée le 17 mai 2010 à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour motif économique, que le 12 juillet 2010, elle a conclu avec la société une convention de rupture d'un commun accord pour motif économique conforme aux prévisions du plan de sauvegarde de l'emploi ; qu'estimant que l'employeur n'avait pas respecté son obligation de reclassement, elle a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que pour dire irrecevable la demande de la salariée tendant à contester le respect de l'obligation de reclassement, la cour d'appel a retenu qu'il est de principe que lorsque la résiliation du contrat de travail résulte de la conclusion d'un accord de rupture amiable conforme aux prévisions d'un accord collectif ou d'un plan de sauvegarde de l'emploi soumis aux représentants du personnel, la cause de la rupture ne peut être contestée sauf fraude ou vice du consentement et que s'il est vrai que son employeur a décidé de convoquer la salariée à un entretien préalable à un éventuel licenciement, la procédure de licenciement n'a pas été poursuivie et que la rupture du contrat de travail est intervenue en exécution d'une convention signée entre les parties, et s'inscrivant dans le cadre des mesures d'accompagnement prévues au chapitre "départs volontaires" du plan de sauvegarde de l'emploi ;
Attendu, cependant, que lorsque les départs volontaires prévus dans un plan de sauvegarde de l'emploi s'adressent aux salariés dont le licenciement est envisagé en raison de la suppression d'effectifs, sans engagement de ne pas les licencier si l'objectif n'est pas atteint au moyen de ruptures amiables des contrats de travail des intéressés, l'employeur est tenu à l'égard de ces salariés, d'exécuter au préalable l'obligation de reclassement prévue dans le plan, en leur proposant des emplois disponibles et adaptés à leur situation personnelle, dans les sociétés du groupe dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent la permutation de tout ou partie du personnel ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en qu'il rejette la demande de nullité du plan de sauvegarde de l'emploi, l'arrêt rendu le 10 juillet 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne la société Groupe SEB Moulinex aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Groupe SEB Moulinex et condamne celle-ci à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept décembre deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour Mme X...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que la salariée est irrecevable à contester le non-respect par son employeur de son obligation de reclassement et, en conséquence, de L'AVOIR déboutée de sa demande de dommages-intérêts ;
AUX MOTIFS QUE Mme X... soutient que la société intimée n'a pas recherché dans leur intégralité les propositions de reclassement qu'elle aurait pu lui faire, qu'elle ne lui a pas communiqué en outre à titre individuel la liste des postes qui étaient disponibles et qu'enfin la société n'a pas respecté les dispositions conventionnelles prévues par l'article 28 de l'accord du 12 juin 1987 relativement à la consultation des commissions territoriales de l'emploi ; qu'en réponse aux observations de la société, elle soutient que contrairement aux apparences, la rupture du contrat de travail n'est pas intervenue d'un commun accord mais qu'il s'agit d'une rupture liée à un licenciement économique, quand bien même elle résulte d'un départ volontaire tel que prévu au plan de sauvegarde de l'emploi ; qu'elle en conclut qu'elle peut contester les conditions de son reclassement ; que la société intimée soutient qu'il est admis que la rupture du contrat de travail pour motif économique peut résulter d'un départ volontaire dans le cadre d'un accord collectif mis en oeuvre après consultation du comité d'entreprise et eu égard aux circonstances de l'espèce et que cette rupture est jugée, de façon constante, comme constituant en ce cas une résiliation amiable du contrat de travail qui interdit au salarié d'en contester le bien-fondé, contrairement à ce qui a pu être jugé en cas d'adhésion du salarié à une convention de conversion ou à une convention de reclassement personnalisée ; qu'elle expose que par conséquent Mme X... ne peut plus contester la rupture de son contrat de travail ni critiquer la question de l'obligation de recherche de reclassement dès lors que cette rupture est intervenue dans le cadre de la signature d'une rupture d'un commun accord, la salariée n'invoquant aucun vice du consentement ; qu'il est de principe, lorsque la résiliation du contrat de travail résulte de la conclusion d'un accord de rupture amiable conforme aux prévisions d'un accord collectif ou d'un plan de sauvegarde de l'emploi soumis aux représentants du personnel, que la cause de la rupture ne peut être contestée, sauf fraude ou vice du consentement ; qu'il ressort des éléments du dossier, pour partie repris dans l'exposé des faits du présent arrêt, que la société Groupe Seb Moulinex a mis en oeuvre une réorganisation d'une partie de ses activités et que dans ce cadre elle a régulièrement informé et consulté les instances représentatives du personnel notamment sur le plan de sauvegarde de l'emploi qu'elle a finalement adopté dans sa version définitive le 19 octobre 2009 ; qu'au titre des mesures mises en oeuvre en exécution de ce plan, il était notamment prévu : des mesures favorisant la mobilité des salariés dont le poste de travail était supprimé et d'accompagnement de cette mobilité, pour permettre soit le transfert de leur poste vers d'autres sites soit leur reclassement, la société prévoyant notamment soit un transfert ou un reclassement immédiat, soit une mutation après confirmation de leur choix par les salariés concernés après une période d'observations des nouvelles conditions de travail, des mesures de soutien pour permettre le reclassement externe des salariés ayant refusé les offres de mobilité internes du groupe, avec notamment proposition d'un congé de reclassement, des mesures tendant à soutenir les salariés dans l'élaboration et la réalisation de leur projet professionnel hors de l'entreprise, dans le cadre de départs volontaires, ces dernières mesures ayant été intégrées au plan de sauvegarde de l'emploi suite aux discussions intervenues avec le comité central d'entreprise ; que c'est dans le cadre de ces mesures mises en place en exécution du plan de sauvegarde de l'emploi que des discussions ont été entreprises entre Mme X... et la société Groupe Seb Moulinex ; qu'il a d'abord été étudié la possibilité d'un transfert du contrat de travail de la salariée, dispositif auquel la salariée a adhéré en se réservant la possibilité de confirmer son choix au terme du délai fixé au plan et c'est en exécution de cette faculté qui lui avait été laissée qu'elle a finalement décidé de ne pas accepter le transfert de son contrat de travail ; que s'il est vrai qu'à la suite de l'échec de ce transfert du contrat de travail de la salariée, son employeur - après lui avoir fait des offres de reclassement - a décidé de la convoquer à un entretien préalable à un éventuel licenciement, il doit être souligné que la procédure de licenciement n'a pas été poursuivie et que la rupture du travail n'est pas intervenue à la seule initiative de l'employeur ; qu'en effet, la rupture du contrat de travail est intervenue en exécution d'une convention signée entre les parties le 12 juillet 2010 et dénommée "convention de rupture d'un commun accord du contrat de travail pour motif économique", convention signée des deux parties et dans laquelle il est exposé en préalable que la signature de cette convention s'inscrit dans le cadre des mesures d'accompagnement prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi, la convention précisant que la salariée a exprimé le souhait de se porter candidate au départ volontaire et de pouvoir bénéficier des aides au reclassement externe en vue de réaliser une formation dans le cadre d'une reconversion ; que cette convention a prévu que la salariée bénéficiait des mesures détaillées au chapitre "départs volontaires" par le plan de sauvegarde de l'emploi adopté par la société ; qu'il ressort des courriers et des courriels échangés entre les parties préalablement à la signature de cette convention que par courriels du 24 juin 2010, Mme X... a fait part à la société de son accord pour signer une "rupture d'un commun accord" et pour se rendre à un rendez-vous pour un entretien à cet effet ; que par courrier du lendemain, la société a confirmé à Mme X... qu'elle pouvait bénéficier de la procédure de rupture d'un commun accord et lui a fixé un rendez-vous le 5 juillet pour répondre notamment à l'ensemble de ses questions et lui proposer le bénéfice d'un congé de reclassement ; qu'à la suite de cet entretien, par courrier daté du 9 juillet 2010, la salariée a confirmé à son employeur son " souhait de quitter le groupe dans le cadre d'une rupture d'un commun accord pour motif économique, en lien avec son projet de reconversion dans l'immobilier" ; que dans ce même courrier, elle a précisé également qu'elle avait été retenue pour la formation qu'elle envisageait et qu'à la suite de ses congés payés puis d'un congé spécifique pour formation longue, elle acceptait d'être en congé de reclassement ; que dans le mail d'accompagnement de la copie de ce courrier transféré par mail à la responsable des ressources humaines au sein de la société, la salariée ajoutait qu'elle avait appris qu'elle était prise à l'université Dauphine et qu'ainsi son "projet pouvait se réaliser dans des conditions optimales" ; qu'il doit être relevé, pour conforter l'accord de Mme X... sur ce nouvel projet professionnel, que lorsque son conseil a annoncé à la société Groupe Seb Moulinex que la salariée renonçait à poursuivre le transfert de son contrat de travail, celui-ci a aussi précisé, dans un courrier daté du 22 avril 2010, que dans l'hypothèse où aucune alternative de reclassement n'était envisageable, Mme X... entendait bénéficier " de mesures concrètes d'aide à un projet professionnel" ; que l'ensemble de ces éléments confirment que la rupture du contrat de travail de Mme X... est bien intervenue d'un commun accord entre les parties, la salariée n'invoquant ni fraude ni vice de son consentement, cette rupture étant intervenue dans le cadre d'un départ volontaire dont les modalités ont été mises en oeuvre et exécutées conformément aux dispositions du plan de sauvegarde de l'emploi soumis à la discussion des instances représentatives du personnel ; que par conséquent, la salariée n'est recevable ni à contester la cause de la rupture ni à invoquer le non-respect par son employeur de son obligation de reclassement et tous les moyens qu'elle allègue à l'appui de cette contestation et du défaut de cause réelle et sérieuse de la rupture du contrat de travail, sont irrecevables, de sorte que la rupture d'un commun accord est valide ;
ALORS QUE l'adhésion d'un salarié, dont le licenciement pour motif économique est envisagé, à un plan de départ volontaire s'inscrivant dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi ne prive pas l'intéressé de la faculté d'invoquer le non-respect par son employeur de l'obligation de reclassement à laquelle ce dernier était tenu ; qu'en retenant que Mme X... était irrecevable à contester le non-respect par son employeur de son obligation de reclassement après avoir relevé que la convention de rupture d'un commun accord conclue entre les parties s'inscrivait dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi prévoyant des suppressions de postes et que l'employeur avait convoqué la salariée à un entretien préalable à un licenciement pour motif économique avant la conclusion de cette convention, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 1134 du code civil, L. 1221-1 et L. 1233-4 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-17679
Date de la décision : 07/12/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 10 juillet 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 07 déc. 2016, pourvoi n°15-17679


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.17679
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award