La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/11/2016 | FRANCE | N°15-24445

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 23 novembre 2016, 15-24445


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un jugement a prononcé le divorce de M. X... et de Mme Y..., condamné le mari à verser une prestation compensatoire, rejeté la demande de l'épouse au titre de la contribution à l'entretien et l'éducation d'un enfant majeur, dit que les époux sont mariés sous le régime légal français et rejeté la demande de récompense de M. X... ;

Sur les premier et quatrième moyens, ci-après annexés :

Attendu que ces moyens ne sont manifestement pas de natu

re à entraîner la cassation ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que M. X... fait g...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un jugement a prononcé le divorce de M. X... et de Mme Y..., condamné le mari à verser une prestation compensatoire, rejeté la demande de l'épouse au titre de la contribution à l'entretien et l'éducation d'un enfant majeur, dit que les époux sont mariés sous le régime légal français et rejeté la demande de récompense de M. X... ;

Sur les premier et quatrième moyens, ci-après annexés :

Attendu que ces moyens ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de dire que les époux étaient mariés sous le régime matrimonial légal français de la communauté de biens, alors, selon le moyen :

1°/ que pour déterminer la loi applicable au régime matrimonial, les juges doivent rechercher l'endroit où les époux ont souhaité fixer leur premier domicile conjugal ; qu'en considérant, pour retenir l'application de la loi française, que les époux X... avaient résidé en Turquie pendant une courte période avant de s'installer de manière stable en France, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les époux n'avaient pas cherché à fixer leur domicile conjugal en Turquie, cette volonté ayant été uniquement contrariée par des raisons politiques les ayant poussés à l'exil, ce dont il résultait qu'ils n'avaient pas souhaité fixer leur domicile conjugal en France, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 3 du code civil et des principes du droit international privé français en matière de régimes matrimoniaux ;

2°/ que pour déterminer la loi applicable au régime matrimonial, les juges doivent rechercher l'endroit où les époux ont souhaité fixer le centre principal de leurs intérêts patrimoniaux et pécuniaires ; qu'en considérant, pour retenir l'application de la loi française, que les époux X... avaient localisé le centre de leurs intérêts pécuniaires en France, sans rechercher quelle était leur volonté à la date du mariage et durant la période qui l'avait immédiatement suivi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 3 du code civil et des principes du droit international privé français en matière de régimes matrimoniaux ;

Mais attendu que l'arrêt relève que les époux, mariés le 20 février 1979 en Turquie, y ont résidé, d'abord, chez leurs parents, puis, quelques mois, à Istanbul où est né leur premier enfant ; qu'il constate que M. X... n'y est resté que jusqu'à la fin du mois d'octobre 1980, date de sa fuite en France, où il a obtenu le statut de réfugié politique le 18 mars 1999, puis la nationalité française en 2002, tandis que Mme Y... est arrivée en France au mois d'octobre 1982, où elle a également obtenu, le 23 novembre 1982, le statut de réfugié politique ; que la cour d'appel, qui a procédé à la recherche prétendument omise, a, par une appréciation souveraine de ces éléments, estimé que les époux, qui ont vécu ensemble de manière précaire et non stable en Turquie où, pour des raisons politiques, il leur était impossible de s'installer et de fixer le centre de leurs intérêts patrimoniaux et pécuniaires, avaient entendu soumettre leur régime matrimonial au régime légal français ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le troisième moyen :

Vu l'article 4 du code de procédure civile ;

Attendu que l'arrêt dit que M. X... ne peut prétendre à aucune récompense contre la communauté au titre des éventuels travaux accomplis sur l'immeuble sis ... ;

Qu'en statuant ainsi, alors que M. X... ne soutenait pas que la communauté lui devrait une récompense au titre des travaux effectués dans cet immeuble, dans l'hypothèse où la loi française serait applicable, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige, violant ainsi le texte susvisé ;

Et vu les articles L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire et 1015 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, mais seulement en ce qu'il dit que M. X... ne peut prétendre à aucune récompense contre la communauté au titre des éventuels travaux accomplis sur l'immeuble sis ..., l'arrêt rendu le 9 juin 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Condamne Mme Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois novembre deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour M. X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné M. X... à payer à Mme Y... la somme mensuelle indexée de 600 euros à titre de contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant commun William X... ;

AUX MOTIFS QU'en vertu des dispositions combinées des articles 371-2, 373-2 et 373-2-2 du Code civil, chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation de l'enfant à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent ainsi que des besoins de l'enfant, cette contribution, en cas de séparation, prenant la forme soit d'une pension alimentaire versée par l'un des parents à l'autre soit, en tout ou en partie, d'une prise en charge directe des frais exposés au profit de l'enfant ; que cette contribution peut éventuellement être ajustée pour tenir compte de la prise en charge des frais de déplacement de l'enfant à l'occasion de l'exercice du droit de visite et d'hébergement ; que cette obligation ne cesse pas de plein droit lorsque l'enfant est majeur ; que l'enfant commun William, âgé de 22 ans, travaille pour la société gérée par son père à temps partiel et a perçu un salaire mensuel moyen de 336 euros en 2013 ; qu'il vit avec sa mère à l'ancien domicile familial ; que Mme Y..., reconnue handicapée et en perte d'autonomie, ne dispose plus d'aucune ressource depuis le 1er janvier 2013 faute de séparation effective d'avec son mari, M. X... étant toujours domicilié, au moins fiscalement, dans l'immeuble ayant constitué l'ancien domicile conjugal, même s'il résiderait apparemment à une autre adresse ; qu'au titre de l'année 2013, M. X... a déclaré 43.198 euros de revenus au titre des bénéfices industriels et commerciaux soit en moyenne environ 3.600 euros ; qu'il déclare fiscalement le salaire versé à son fils et bénéficie par conséquent en contrepartie de l'avantage fiscal en résultant ; qu'eu égard aux besoins de l'enfant et de la situation respective des parties, il y a lieu de fixer la contribution à l'entretien et l'éducation de William à la somme mensuelle indexée de 600 euros ;

1°) ALORS QUE des motifs dubitatifs équivalent à une absence de motifs ; qu'en relevant, pour justifier la condamnation de M. X... à verser à Mme Y... une somme de 600 euros par mois au titre de la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant majeur, que William vivait avec sa mère au sein de l'ancien domicile conjugal, et que son père, bien que domicilié à la même adresse « résiderait apparemment à une autre adresse », la Cour d'appel a statué par un motif hypothétique, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;

2°) ALORS QU'il appartient au parent sollicitant le versement d'une contribution à l'entretien de l'enfant majeur de rapporter la preuve de ce qu'il en assume à titre principal la charge ; qu'en se bornant à retenir, pour condamner M. X... à verser à Mme Y... la somme de 600 euros par mois au titre de la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant majeur, que William vivait avec sa mère au sein de l'ancien domicile conjugal, et que son père, bien que domicilié à la même adresse « résiderait apparemment à une autre adresse », sans rechercher, comme elle y était invitée, si M. X... n'assumait pas toutes les charges du domicile conjugal dans lequel il résidait conformément à l'ordonnance de non-conciliation, qui avait par ailleurs ordonné à Mme Y... de déménager, ce dont il résultait que cette dernière ne prouvait pas prendre en charge l'enfant majeur, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 373-2-5 du Code civil.

DEUXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que les époux étaient mariés sous le régime matrimonial légal français de la communauté de biens (articles 1400 et suivants du Code civil) ;

AUX MOTIFS QU'aux termes des pièces produites, les époux Y...
X..., mariés le 20 février 1979 en Turquie, y ont résidé d'abord chez leurs parents puis quelques mois à Istanbul où est née leur premier enfant, mais l'époux seulement jusqu'à fin octobre 1980, date de sa fuite en France, où il a obtenu le statut de réfugié politique le 18 mars 1999 puis la nationalité française en 2002, et l'épouse jusqu'en octobre 1982, date de son arrivée en France où elle a également obtenu, le 23 novembre 1982, le statut de réfugiée politique en conservant la nationalité turque ; qu'ainsi, d'une part, les époux X...
Y... ont vécu moins de 2 années ensemble, de manière précaire et non stable sur le sol turc où, pour des raisons politiques, il leur était impossible de s'installer et par conséquent d'y localiser leurs intérêts patrimoniaux et pécuniaires ; que d'autre part, depuis, et jusqu'à ce jour, les époux X...
Y..., peu important leur nationalité, ont toujours vécu en France, quatre de leurs cinq enfants y sont nés, ils y ont acquis divers biens, ce qui caractérise la localisation de leurs intérêts patrimoniaux et pécuniaires dans leur pays d'adoption, étant constaté par ailleurs que plusieurs membres de la famille de M. X..., notamment ses parents et sa soeur, mais aussi de la famille Y... habitent également à proximité de l'ancien domicile des époux ; que c'est ainsi que, lors de l'acquisition par les 2 époux de l'immeuble commun constitutif du domicile familial assortie de la souscription d'un prêt immobilier, aucune précision relative au régime matrimonial n'a été portée sur l'acte authentique d'acquisition reçue le 22 juillet 1997 ; qu'à cet égard, la mention unilatérale et tardive, peu de temps avant leur séparation intervenue en juillet 2007 puis le dépôt de la requête en divorce le 29 octobre 2008, Mme Y... n'étant pas partie aux actes, figurant aux statuts de la société en nom collectif S.A.M. reçus le 12 janvier 2006 par acte authentique ou à la cession de fonds de commerce par cette société reçue par acte authentique le 15 février 2006, aux termes de laquelle M. X... s'est marié en Turquie le 20 février 1979 sous le régime de la séparation de biens est exacte sans être en contradiction avec la constatation précédente tirée d'un choix commun et bien antérieur ; que par conséquent, confirmant la décision déférée, s'agissant d'époux mariés avant l'entrée en vigueur de la Convention de La Haye du 14 mars 1978 sur la loi applicable aux régimes matrimoniaux, il y a lieu de dire la loi française applicable au règlement de leurs intérêts patrimoniaux soumis au régime de la communauté légale réduite aux acquêts ;

ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE la loi initiale applicable aux régimes matrimoniaux d'époux mariés avant le 1er septembre 1992, date d'entrée en vigueur de la convention de La Haye du 14 mars 1978, est déterminée, à défaut de désignation expresse dans un contrat, principalement en considération de la fixation du premier domicile matrimonial ; que le mariage a été célébré le 20 février 1979 et les époux n'ayant conclu aucune convention désignant expressément la loi applicable à leur régime matrimonial, il convient de rechercher quel a été le statut que ceux-ci ont eu la volonté d'adopter pour le règlement de leurs intérêts pécuniaires ; que pour l'appréciation de cette volonté, le lieu du premier domicile matrimonial est un indice prépondérant qui peut cependant être corrigé par d'autres éléments relatifs à la fixation du centre de leurs intérêts pécuniaires ; que selon Mme Y... la loi française est applicable dès lors que le premier domicile stable et effectif des époux X... se situe en France, territoire sur lequel ils ont fixé et fixent toujours le centre de leurs intérêts pécuniaires ; que M. Semdin X... soutient au contraire que les époux ont sans nul doute voulu soumettre leur régime matrimonial en Turquie, le mariage ayant été célébré en Turquie et selon la coutume traditionnelle, leur premier domicile stable ayant été fixé en Turquie et les époux n'ayant eu strictement aucun lien avec la France ni avant ni après le mariage ; qu'il ressort en l'espèce des éléments du dossier que les époux, tous deux mineurs au moment du mariage, étaient également tous deux de nationalité turque et qu'ils se sont bien mariés selon la coutume turque suivant la volonté de leur famille dans leur village en Turquie sans toutefois choisir la loi applicable à leur régime matrimonial ; que s'ils sont restés dans ce pays où leur fille aînée a vu le jour le 10 octobre 1980, il apparaît en revanche, que l'époux, selon ses propres déclarations dans ses conclusions et le relevé de carrière qu'il produit en pièce 51 révélant qu'il a accumulé 4 trimestres en 1981, alors qu'il était majeur et donc libre de ses actes, a précipitamment quitté la Turquie pour des raisons politiques à la fin de l'année 1980 soit moins de deux années après la célébration du mariage, pour s'installer en France, où il a rapidement obtenu le statut de réfugié puis un titre de séjour et un travail et où il a fait venir l'épouse et l'enfant au mois de mai 1982 ; que l'épouse se souvient qu'il était déjà parti lors de la naissance de leur fille aînée ; que l'époux n'apporte pas la contradiction et ne fournit aucune indication sur la date de son entrée sur le territoire français ; que le couple, qui a eu par la suite quatre autres enfants tous nés sur le territoire français et prénommés avec un prénom à consonance française, a définitivement fixé le centre de ses intérêts personnels et pécuniaires en France en se portant notamment acquéreurs le 22 juillet 1997 d'un bien immobilier pour leur résidence principale sans cependant, il est vrai, préciser le régime applicable à leur régime matrimonial ; que M. Semdin X... a ensuite acquis la nationalité française en 2002 ; qu'il se déduit de ces éléments que le premier ... n'était ni stable ni durable et ne consacrait pas leur volonté commune, au moment de leur mariage, d'être régis par le droit local en vigueur en ce qui concerne leur patrimoine ; que le premier domicile commun des époux a donc bien été fixé en France, il convient de faire application de la loi de cet Etat au régime matrimonial des époux ; que les époux sont donc mariés sous le régime français de la communauté légale à défaut de contrat préalable à leur mariage régi par les articles 1400 et suivants du Code civil ; que M. Semdin X... n'est pas fondé à se prévaloir de l'acte notarié du 15 février 2006 qu'il a passé seul, étant donné que la loi applicable au régime matrimonial a une vocation permanente ;

1°) ALORS QUE pour déterminer la loi applicable au régime matrimonial, les juges doivent rechercher l'endroit où les époux ont souhaité fixer leur premier domicile conjugal ; qu'en considérant, pour retenir l'application de la loi française, que les époux X... avaient résidé en Turquie pendant une courte période avant de s'installer de manière stable en France, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les époux n'avaient pas cherché à fixer leur domicile conjugal en Turquie, cette volonté ayant été uniquement contrariée par des raisons politiques les ayant poussés à l'exil, ce dont il résultait qu'ils n'avaient pas souhaité fixer leur domicile conjugal en France, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 3 du Code civil et des principes du droit international privé français en matière de régimes matrimoniaux ;

2°) ALORS QUE pour déterminer la loi applicable au régime matrimonial, les juges doivent rechercher l'endroit où les époux ont souhaité fixer le centre principal de leurs intérêts patrimoniaux et pécuniaires ; qu'en considérant, pour retenir l'application de la loi française, que les époux X... avaient localisé le centre de leurs intérêts pécuniaires en France, sans rechercher quelle était leur volonté à la date du mariage et durant la période qui l'avait immédiatement suivi, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 3 du Code civil et des principes du droit international privé français en matière de régimes matrimoniaux.

TROISIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que M. X... ne pouvait prétendre à aucune récompense contre la communauté au titre des éventuels travaux accomplis sur l'immeuble sis ... ;

AUX MOTIFS QUE s'agissant des travaux exécutés sur l'immeuble commun pendant la vie commune, M. X... ne peut prétendre à aucune récompense de ce chef faute de rapporter la preuve du paiement des travaux allégués par des fonds propres ;

ALORS QUE dans ses conclusions d'appel, M. X... ne soutenait pas que la communauté lui devrait une récompense au titre des travaux effectués dans l'immeuble de Pierrefitte sur Seine, dans l'hypothèse où la loi française serait applicable ; qu'en statuant néanmoins sur cette demande, la Cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du Code de procédure civile.

QUATRIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné M. X... à payer la somme de 100.000 euros en capital à Mme Y... à titre de prestation compensatoire ;

AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article 270 du Code civil, le divorce met fin au devoir de secours époux, mais l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respective ; que cette prestation a un caractère forfaitaire et prend la forme d'un capital dont le montant est fixé par le juge ; que toutefois, le juge peut refuser d'accorder une telle prestation si l'équité le commande, soit en considération des critères prévus à l'article 271, soit lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de l'époux qui demande le bénéfice de cette prestation, au regard des circonstances particulières de la rupture ; qu'à cet égard, l'article 271 du Code précité édicte que la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ; qu'à cet effet, le juge prend en considération notamment la durée du mariage, l'âge et l'état de santé des époux, leur qualification et leur situation professionnelles, les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne, le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tarit en capital qu'en revenu après la liquidation du régime matrimonial, leurs droits existants et prévisibles, leurs situations respectives en matière de pensions de retraite ; que le premier juge a justement et minutieusement examiné et exposé la situation respective des parties, âgées de 52 ans, le mari, gérant d'un bar restaurant rapide tabac loto, en état de santé satisfaisant, lui autorisant un revenu mensuel moyen d'environ 3.600 euros, et l'épouse, qui n'a jamais travaillé et ne peut travailler, maintenant reconnue handicapée ce qui l'autoriserait à percevoir environ 830 euros par mois, mais actuellement sans revenus, et en charge de leur fils commun William, et à laquelle le père a été condamné à verser une contribution mensuelle indexée à l'entretien et l'éducation de 600 euros ; que la retraite prévisible de M. X... est directement liée à ses choix de cotisations, volontairement réduits pour l'instant mais qu'il peut largement améliorer jusqu'à sa prise de retraite ; que celle de Mme Y... demeurera plus que modique, cette dernière n'ayant pas travaillé tout au long de la vie commune, en charge de l'éducation des 4 enfants nés de son union avec M. X..., et ne pouvant plus travailler ; que leur situation patrimoniale a été déterminée ci-dessus dans le cadre du régime de la communauté légale réduite aux acquêts ; que compte tenu de l'état de santé de chacun des époux, de leur aptitude et de la capacité au travail, de leurs revenus actuels et prévisibles ainsi que de la pension de retraite prévisible pour chacun d'eux, c'est à juste titre que le premier juge a retenu l'existence d'une disparité créée par la rupture du mariage dans les conditions de vie respectives de chacun des époux ; que cependant, réformant la décision déférée, il y a lieu de porter le montant de la prestation compensatoire à verser en capital par M. X... à Mme Y... à la somme de 100 000 euros ;

ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE le mariage a été célébré le 20 février 1979, il a donc duré 34 années ; que l'époux, né le 1er janvier 1962 est âgé de 51 ans ; que l'épouse, également née le 1er janvier 1962, est âgée de 51 ans ; que cinq enfants actuellement tous majeurs respectivement âgés de 32, 29, 26, 25 et 20 ans sont issus de cette union ; que seul William âgé de 20 ans est toujours à charge ; que l'article 272 alinéa 1er du Code Civil dispose que dans le cadre de la fixation d'une prestation compensatoire, par le juge ou par les parties, celles-ci fournissent au juge une déclaration certifiant sur l'honneur l'exactitude de leurs ressources, revenus, patrimoine et conditions de vie ; que les époux ont procédé à la communication de leurs déclarations sur l'honneur ; que Mme Y... souffre d'une pathologie psychiatrique invalidante ; que son handicap a été reconnu par la Commission des Droits et de l'Autonomie ; qu'elle déclare percevoir pour toute ressource la somme de 831,91 euros par mois au titre de l'allocation pour adulte handicapé et du complément de ressources ainsi que celle de 261,12 euros au titre de l'allocation de logement ; qu'il n'est pas contesté que l'épouse n'a jamais travaillé et qu'elle s'est consacrée à l'éducation des enfants communs ; que ses droits à la retraite seront donc insignifiants ; que M. Semdin X... est gérant et associé de la SNC SAM dont il détient la majorité du capital en propre, soit actuellement 55 parts ; que cette société est propriétaire d'un fonds de commerce à destination de café, plat du jour, débit de tabac, loto ; que M. Semdin X... fait état d'un problème de santé au genou (lettre de recommandation du Docteur Eric Z...), sans démontrer que cela puisse le gêner dans son activité professionnelle ; qu'aux termes de sa déclaration sur l'honneur, à titre de ressources de l'année 2011, il mentionne un bénéfice industriel et commercial de 39.653 euros mais il explique que les sommes déclarées ne sont pas perçues en intégralité par lui, qu'il se verse seulement 1.500 euros par mois et que le solde va alimenter le compte courant d'associé, ce qui est globalement confirmé dans la note de l'expert-comptable du 30 novembre 2012 ; qu'ils sont mariés sous le régime de la communauté légale ; que le couple est propriétaire d'une maison individuelle évaluée à 205.000 euros et d'avoirs en compte bancaires pour 2.594,04 euros, qui ont vocation à être partagés ; que Mme Y... ne dispose d'aucun patrimoine propre ; que M. Semdin X... est propriétaire en propre des parts sociales de la SNC SAM et de l'apport personnel investi dans l'acquisition du fonds de commerce ; que la valeur de la société n'a pu être examinée au cours des opérations d'expertises ni même l'historique du compte d'associé sur lequel sont déposées des sommes importantes provenant des différentiels de ses rémunérations annuelles qu'il décide de s'attribuer ; qu'en tout cas, d'après l'évaluation de l'expert-comptable qu'il produit, la valeur de la SNC SAM s'élèverait à 35.000 euros et celle du fonds de commerce à 300.000 euros, ce qui n'est pas négligeable ; qu'il résulte de ces éléments que la rupture du lien du mariage entraînera une disparité dans les conditions de vie respectives des époux au détriment de l'épouse ;

ALORS QUE le montant de la prestation compensatoire destinée à combler la disparité créée entre les conditions de vie des époux par la rupture du mariage doit être fixé en fonction des charges pesant sur chacun ; qu'en se bornant, pour juger que M. X... devait verser à Mme Y... une prestation compensatoire d'un montant de 100.000 euros, à examiner la situation des époux au regard de leur âge, de leur état de santé, de leurs revenus et de leurs droits prévisibles en manière de retraite, sans répondre aux conclusions par lesquelles M. X... faisait valoir qu'il supportait d'importantes charges mensuelles incompressibles d'un total de 1.727,77 euros, et qu'il continuait par ailleurs à exposer de nombreux frais pour les enfants du couple (conclusions, p. 26), la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 15-24445
Date de la décision : 23/11/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 09 juin 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 23 nov. 2016, pourvoi n°15-24445


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP de Chaisemartin et Courjon

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.24445
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award