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20/10/2016 | FRANCE | N°15-17675

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 octobre 2016, 15-17675


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 23 mai 2014), que Mme X... a été engagée au sein de la société Champion, devenue CSF France, le 1er avril 2004, en qualité d'employée commerciale ; qu'à l'issue de deux examens des 29 avril et 14 mai 2010, le médecin du travail l'a déclarée inapte à la reprise de son poste de responsable fruits et légumes avec une possibilité d'occuper un poste de type administratif sédentaire ; qu'après avoir saisi en référé la juridiction prud'homale pour obtenir le

règlement des salaires dus suivant le délai d'un mois à l'issue du deuxième...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 23 mai 2014), que Mme X... a été engagée au sein de la société Champion, devenue CSF France, le 1er avril 2004, en qualité d'employée commerciale ; qu'à l'issue de deux examens des 29 avril et 14 mai 2010, le médecin du travail l'a déclarée inapte à la reprise de son poste de responsable fruits et légumes avec une possibilité d'occuper un poste de type administratif sédentaire ; qu'après avoir saisi en référé la juridiction prud'homale pour obtenir le règlement des salaires dus suivant le délai d'un mois à l'issue du deuxième avis d'inaptitude, elle a saisi la même juridiction au fond le 3 mars 2011 pour obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail ; qu'elle a été licenciée le 14 mai 2011 pour inaptitude et impossibilité de reclassement ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes de résiliation judiciaire et de dommages-intérêts, alors, selon le moyen, que pour apprécier le bien-fondé d'une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, le juge doit se placer au jour où il statue ou, si le contrat a été rompu antérieurement à sa décision, à la date de la rupture dudit contrat, qu'en se plaçant à la date de la saisine de la juridiction prud'homale pour apprécier les manquements reprochés à l'employeur, après avoir constaté que la relation contractuelle s'était poursuivie postérieurement à cette saisine, la cour d'appel a violé l'article 1184 du code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel a constaté qu'à la date de la demande de résiliation judiciaire, les motifs fondant cette demande n'existaient plus ; qu'elle a ainsi fait ressortir que les manquements imputés à l'employeur n'empêchaient pas la poursuite du contrat de travail ; que le moyen ne peut dès lors être accueilli ;

Sur le second moyen :

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de dire que son licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse et de la débouter de sa demande de dommages-intérêts à ce titre, alors, selon le moyen :

1°/ que le reclassement du salarié déclaré inapte par le médecin du travail à son poste doit être recherché au sein de l'entreprise et, le cas échéant, du groupe auquel elle appartient, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de poste de travail ou aménagement du temps de travail ; qu'en se bornant à relever, après avoir constaté que la société CSF France avait proposé cinq postes ayant été refusés par la salariée, que l'employeur avait vainement poursuivi ses recherches afin de répondre au souhait exprimé par la salariée de mettre en avant son diplôme de gestion d'entreprises et de commerce récemment obtenu et de rester dans la région, sans vérifier si l'employeur avait tenté de reclasser la salariée par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de poste de travail ou aménagement du temps de travail, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle sur l'exécution par l'employeur de son obligation de reclassement, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1226-2 du code du travail ;

2°/ que le reclassement du salarié déclaré inapte par le médecin du travail à son poste doit être recherché au sein de l'entreprise et, le cas échéant, du groupe auquel elle appartient ; que l'employeur est tenu de justifier le périmètre de reclassement et l'impossibilité, à la date du licenciement, de reclasser le salarié tant dans l'entreprise que dans le groupe ; qu'en se bornant à relever, après avoir constaté que la société CSF France avait proposé cinq postes ayant été refusés par la salariée, que l'employeur a vainement poursuivi ses recherches afin de répondre au souhait exprimé par la salariée de mettre en avant son diplôme de gestion d'entreprises et de commerce récemment obtenu et de rester dans la région, sans vérifier si l'employeur justifiait que les postes proposés étaient les seuls conformes aux préconisations du médecin du travail qui étaient disponibles dans l'ensemble du groupe Carrefour à la date du licenciement, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1226-2 du code du travail ;

Mais attendu que, sous le couvert de griefs non fondés de manque de base légale, le moyen ne tend qu'à contester l'appréciation souveraine par la cour d'appel des éléments de fait et de preuve produits par les parties, dont elle a pu déduire que l'employeur justifiait être dans l'impossibilité de reclasser la salariée ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt octobre deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Haas, avocat aux Conseils, pour Mme X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, D'AVOIR débouté la salariée de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur et, en conséquence, de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE les critiques de l'appelante portent principalement sur le fait que le conseil de prud'hommes qui a fait droit à sa demande de résiliation judiciaire aux torts de l'employeur, a toutefois fixé la date d'effet à la date du prononcé du jugement et lui a alloué des salaires au lieu de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que lorsqu'un salarié demande la résiliation judiciaire du contrat de travail et que son employeur prononce par la suite son licenciement, le juge saisi du litige doit en premier lieu examiner si la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail est justifiée, et à défaut seulement, statuer sur le licenciement ; que la date d'effet de la résiliation judiciaire ne peut être fixée qu'à la date de la décision judiciaire la prononçant, que dès lors qu'à cette date, le salarié est toujours au service de son employeur, ce qui n'était pas le cas en l'espèce, la salariée ayant fait l'objet d'un licenciement en cours de route ; qu'en application de l'article L. 1226-4 du code du travail « à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n'est pas reclassé dans l'entreprise ou s'il n'est pas licencié, l'employeur lui verse, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail. Ces dispositions s'appliquent également en cas d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise constatée par le médecin du travail » ; qu'il est constant qu'au 15 juin 2010, l'employeur qui n'avait ni reclassé Mme X... et ne l'avait pas licenciée, n'avait pas repris le paiement des salaires ; que force est toutefois de constater qu'à la date (3 mars 2011) où Mme X... a saisi la juridiction prud'homale de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur, le paiement des salaires avait été régularisé suite à l'ordonnance de référé ; que la société fait en outre valoir qu'il ne s'agissait que d'une omission involontaire qui aurait été réglée bien avant si la salariée lui en avait fait la demande, cette dernière qui, demeurant en arrêt maladie à l'issue du second avis de reprise, était indemnisée d'une part par la sécurité sociale du fait de cet arrêt maladie, et d'autre part, du fait de son invalidité, avait elle-même omis de transmettre à l'employeur les relevés journaliers ;

ALORS QUE pour apprécier le bien-fondé d'une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, le juge doit se placer au jour où il statue ou, si le contrat a été rompu antérieurement à sa décision, à la date de la rupture dudit contrat ; qu'en se plaçant à la date de la saisine de la juridiction prud'homale pour apprécier les manquements reprochés à l'employeur, après avoir constaté que la relation contractuelle s'était poursuivie postérieurement à cette saisine, la cour d'appel a violé l'article 1184 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR dit que le licenciement de Mme X... reposait sur une cause réelle et sérieuse et, en conséquence, de L'AVOIR déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement est ainsi libellée : « Nous faisons suite par la présente aux avis médicaux rendus par le médecin du travail les 29 avril 2010 et 14 mai 2010 lesquels vous avez été déclarée inapte en ces termes » confirmation de l'inaptitude au poste de responsable fruits et légumes. Serait apte à un poste de type administratif ». Nous avons débuté, conformément à nos obligations légales, toutes les recherches de possibilités de reclassement utiles au sein du magasin Carrefour Market de Marseille Saint Barnabé, des différents magasins CSF France et au niveau des différents formats et enseignes du groupe Carrefour compte tenu des restrictions médicales émises par le médecin du travail. Après recherches, nous avons trouvé cinq postes susceptibles de vous être proposés et convenant avec votre état de santé. Employé service Po-Line Carrefour Supermarchés France, localisé à Cesson Sévigné (35), type de poste : Accueil administration temps complet : 1. 433, 28 € ; employée saisie base de données Carrefour Administratif France, localisé à Massy (91) type de poste : accueil administration temps complet, maintien du taux horaire ; assistante Flux PFII PFT/ 1 Supply Chain France, localisé à Massy (91) type de poste : accueil administration temps complet, salaire brut mensuel 1. 750 € ; pupitreur/ 1 Carrefour Proximité France, localisé Saint-Germain les Arpajon (91) type de poste : accueil administration base contrat 20h hebdomadaire ; assistant technique voyages/ 1 Carrefour Voyages, localisé Agence Siège Copernic Evry (91) type de poste : accueil/ administration temps complet maintien du taux horaire. Par courrier daté du 23 février 2011, nous vous avons adressé ces propositions de reclassement. Vous les avez refusées par courrier en date du 15 mars 2011. Vous nous avez indiqué, à cette occasion, être disposée à accepter d'éventuels postes à temps partiel dans la région et qu'à ce titre dans le cadre de votre congé individuel formation, vous aviez obtenu un diplôme Master Gestion d'entreprise et de commerce. Compte tenu de cet élément nouveau qui venait d'être porté à notre connaissance. Nous avons donc renouvelé nos recherches de reclassement en indiquant expressément le fait que vous êtes titulaire de ce diplôme. Cependant, nonobstant ces éléments aucune de ces recherches n'a abouti. En conséquence, malgré le fait que nous avons mené toutes les recherches de possibilités de reclassement utiles en adéquation avec l'avis du médecin du travail, il n'existe pas dans notre structure d'autre poste compatible avec l'avis d'inaptitude constaté par le médecin du travail. Compte tenu des propositions de reclassement refusées et du fait qu'aucun autre poste conciliant les restrictions du médecin du travail n'est disponible, les motifs s'opposant à votre reclassement vous ont donc été notifiés par courrier le 21 avril 2011. Il résulte donc de ce qui précède que les avis d'inaptitude émis par le médecin du travail, le refus des postes de reclassement proposés ainsi que l'absence de tout autre poste disponible compatible avec votre état de santé s'opposent à votre reclassement et justifient votre licenciement pour inaptitude physique consécutive à une maladie d'origine non professionnelle. Votre contrat de travail prendra fin à l'expiration d'un préavis de deux mois courant à compter de la première présentation de cette notification. C'est à l'expiration de ce préavis que seront arrêtés vos soldes de tout compte et certificat de travail, ainsi que votre attestation Pôle Emploi. Nous notons par ailleurs que votre état de santé ne vous permet pas actuellement d'accomplir votre délai-congé et qu'en conséquence celui-ci ne sera pas rémunéré » ; que lors que le salarié à la suite d'une maladie ou d'un accident non professionnel, est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur doit lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités et aussi comparable que possible à l'emploi précédent, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail ; que cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise ; que les possibilités de reclassement doivent être recherchées dans l'entreprise au sein de laquelle travaille le salarié devenu inapte mais également dans toutes les entreprises du groupe auquel appartient l'entreprise ; que dans le second avis du 14 mai 2010, la médecine du travail qui a confirmé l'inaptitude de Mme X... à son poste, a précisé « serait apte à un poste administratif sédentaire » ; qu'en l'espèce, la société CSF France justifie avoir interrogé les différentes enseignes du groupe sur différentes zones géographiques ainsi que les directions régionales, ses démarches ayant abouti à cinq propositions de postes administratifs sédentaires ; que Mme X... a refusé ces postes au motif qu'ils étaient géographiquement trop éloignés et à temps complet (pour quatre d'entre eux) ; qu'il convient toutefois de relever que les préconisations du médecin du travail ne font pas état de la nécessité d'un temps partiel ; que l'employeur a vainement poursuivi ses recherches afin de répondre au souhait exprimé par la salariée de mettre en avant son diplôme de gestion d'entreprises et de commerce récemment obtenu et de rester dans la région ; que rien ne permet de mettre en doute la bonne foi de l'employeur quant à la date des envois de ses courriers ; qu'il convient dès lors de considérer que la société CSF France seulement tenue d'une obligation de moyen renforcé, n'a pas failli à son obligation de reclassement et que le licenciement de Mme X... reposait sur une cause réelle et sérieuse ;

ALORS, 1°), QUE le reclassement du salarié déclaré inapte par le médecin du travail à son poste doit être recherché au sein de l'entreprise et, le cas échéant, du groupe auquel elle appartient, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de poste de travail ou aménagement du temps de travail ; qu'en se bornant à relever, après avoir constaté que la société CSF France avait proposé cinq postes ayant été refusés par la salariée, que l'employeur avait vainement poursuivi ses recherches afin de répondre au souhait exprimé par la salariée de mettre en avant son diplôme de gestion d'entreprises et de commerce récemment obtenu et de rester dans la région, sans vérifier si l'employeur avait tenté de reclasser la salariée par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de poste de travail ou aménagement du temps de travail, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle sur l'exécution par l'employeur de son obligation de reclassement, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1226-2 du code du travail ;

ALORS, 2°), QUE le reclassement du salarié déclaré inapte par le médecin du travail à son poste doit être recherché au sein de l'entreprise et, le cas échéant, du groupe auquel elle appartient ; que l'employeur est tenu de justifier le périmètre de reclassement et l'impossibilité, à la date du licenciement, de reclasser le salarié tant dans l'entreprise que dans le groupe ; qu'en se bornant à relever, après avoir constaté que la société CSF France avait proposé cinq postes ayant été refusés par la salariée, que l'employeur a vainement poursuivi ses recherches afin de répondre au souhait exprimé par la salariée de mettre en avant son diplôme de gestion d'entreprises et de commerce récemment obtenu et de rester dans la région, sans vérifier si l'employeur justifiait que les postes proposés étaient les seuls conformes aux préconisations du médecin du travail qui étaient disponibles dans l'ensemble du groupe Carrefour à la date du licenciement, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1226-2 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-17675
Date de la décision : 20/10/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 23 mai 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 oct. 2016, pourvoi n°15-17675


Composition du Tribunal
Président : Mme Guyot (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.17675
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