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05/10/2016 | FRANCE | N°15-28672

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 octobre 2016, 15-28672


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 16 octobre 2015), que M. X... a été engagé pour une mission de 18 mois par la société Derichebourg intérim aéronautique (la société Derichebourg), en qualité d'électricien au profit de la société ATR ; qu'avant la fin de son contrat, fixée au 1er mai 2012, il a reçu de la société ATR une proposition de contrat à durée indéterminée, contrat qu'il a signé le 16 mai 2012, date de sa prise de fonction ; que la société ayant refusÃ

© de lui payer l'indemnité de fin de mission, il a saisi la juridiction prud'homale ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 16 octobre 2015), que M. X... a été engagé pour une mission de 18 mois par la société Derichebourg intérim aéronautique (la société Derichebourg), en qualité d'électricien au profit de la société ATR ; qu'avant la fin de son contrat, fixée au 1er mai 2012, il a reçu de la société ATR une proposition de contrat à durée indéterminée, contrat qu'il a signé le 16 mai 2012, date de sa prise de fonction ; que la société ayant refusé de lui payer l'indemnité de fin de mission, il a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que la société Derichebourg fait grief à l'arrêt de la condamner à verser au salarié une somme au titre de l'indemnité de fin de mission alors, selon le moyen :
1°/ qu'au terme de l'article L. 1251-32 du code du travail, le salarié sous contrat de travail temporaire ne peut prétendre à l'indemnité de fin de mission dès lors qu'à l'issue de sa mission, il bénéficie immédiatement d'un contrat de travail à durée indéterminée avec l'entreprise utilisatrice ; que tel est le cas si le salarié bénéficie, avant même l'expiration de sa mission, d'une promesse d'embauche à durée indéterminée précisant l'emploi proposé et la date d'embauche et qu'il accepte cette promesse, peu important que son acceptation intervienne quelques jours après le terme de son contrat de mission ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le salarié, dont la mission expirait le 1er mai 2012, avait reçu dès le 23 avril 2012 de l'entreprise utilisatrice une offre de contrat à durée indéterminée mentionnant l'emploi occupé, la rémunération, la date d'embauche, le temps et le lieu de travail et que cette offre constituait une véritable promesse d'embauche engageant l'employeur à compter de son émission ; qu'en jugeant que c'était seulement à la date d'acceptation de cette promesse d'embauche, soit le 10 mai 2012, que le salarié devait être considéré comme ayant bénéficié d'un contrat de travail à durée indéterminée de sorte que ce bénéfice n'était pas « immédiat » la cour d'appel a violé les articles L. 1121-1 et L. 1251-32 alinéa 1 du code du travail ;
2°/ qu'au terme de l'article L. 1251-32 du code du travail, le salarié sous contrat de travail temporaire ne peut prétendre à l'indemnité de fin de mission dès lors qu'à l'issue de sa mission, il bénéficie immédiatement d'un contrat de travail à durée indéterminée avec l'entreprise utilisatrice ; que lorsque la prise d'effet du contrat de travail n'est pas concomitante avec sa signature, cette prise d'effet doit intervenir dans un délai raisonnable ; qu'en l'espèce, il résultait du contrat de mission que celle-ci expirait le 1er mai 2012 inclus, et de la promesse d'embauche comme du contrat à durée indéterminée que celui-ci prenait effet le 16 mai 2012 ; qu'il en résultait qu'un délai de 14 jours séparait le terme de la mission et le début du contrat à durée indéterminée ; qu'en relevant, par motifs adoptés, que le salarié était resté 20 jours sans travail, sans préciser d'où résultait une telle constatation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil, ensemble les articles L. 1121-1 et L. 1251-32 du code du travail ;
3°/ que le salarié intérimaire qui bénéficie d'une promesse d'embauche à durée indéterminée avant même l'issue de sa mission mais qui ne l'accepte délibérément que plusieurs jours après le terme de sa mission ne peut se prévaloir de son propre retard pour réclamer une indemnité de précarité en invoquant n'avoir pas bénéficié immédiatement d'un contrat de travail ; qu'en jugeant que le salarié, qui avait reçu sept jours avant l'expiration de sa mission une promesse d'embauche qu'il n'avait acceptée que neuf jours après le terme de son contrat de mission, pouvait prétendre à une indemnité de précarité faute d'avoir bénéficié d'un contrat de travail « immédiat » lorsque cette situation résultait de sa propre attitude, la cour d'appel a violé les articles L. 1222-1 et L. 1251-32 alinéa 1 du code du travail ;
Mais attendu qu'aux termes de l'article L. 1251-32 du code du travail, lorsqu'à l'issue d'une mission, le salarié sous contrat de travail temporaire ne bénéficie pas immédiatement d'un contrat de travail à durée indéterminée avec l'utilisateur, il a droit, à titre de complément de salaire, à une indemnité destinée à compenser la précarité de sa situation ; que cette indemnité n'est pas due dès lors qu'un contrat de travail à durée indéterminée a été conclu immédiatement avec l'entreprise utilisatrice ;
Et attendu que la cour d'appel a constaté que le salarié n'avait accepté que le 10 mai 2012 la « promesse d'embauche » sous contrat à durée indéterminée que l'entreprise utilisatrice lui avait adressée le 23 avril précédent avant le terme de sa mission, et que, neuf jours ayant séparé le terme de sa mission, le 1er mai, de la conclusion du contrat de travail engageant les deux parties, elle en a exactement déduit que le salarié n'avait pas immédiatement bénéficié de ce contrat ;
D'où il suit que le moyen, inopérant en sa deuxième branche qui vise des motifs des premiers juges que la cour d'appel n'a pas adoptés, et irrecevable car nouveau, et mélangé de fait et de droit en sa troisième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Derichebourg intérim aéronautique aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq octobre deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Derichebourg intérim aéronautique
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société Derichebourg interim aéronautique à verser à M. X... la somme de 4.001, 61 euros au titre de l'indemnité de fin de mission, majorée des intérêts légaux à compter de la mise en demeure du 5 juin 2012, outre la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
AUX MOTIFS PROPRES QUE sur l'indemnité de précarité ; qu'aux termes de l'article L. 1251-32 du code du travail, lorsque, à l'issue d'une mission, le salarié ne bénéficie pas immédiatement d'un contrat de travail à durée indéterminée avec l'entreprise utilisatrice, il a droit, à titre de complément de salaire à une indemnité de fin de mission destinée à compenser la précarité de sa situation ; que l'indemnité de fin de contrat n'est pas due dès lors qu'un contrat de travail a été conclu immédiatement par l'entreprise utilisatrice ; lorsque la prise d'effet n'est pas concomitante avec sa signature, cette prise d'effet doit intervenir dans un délai raisonnable ; qu'en l'espèce, le contrat de mission de M. X..., dans le cadre de la mise à disposition au profit de la société ATR mentionne une fin de mission au 1er mai 2012 ; que ce dernier a reçu une offre de CDI de la part de cette dernière société par courrier du 23 avril 2012 ; que cette offre mentionne l'emploi occupé, la rémunération, la date d'embauche, le temps de travail et le lieu de travail ; qu'elle constitue ainsi une véritable promesse d'embauche ; que pour autant, il est constant que le CDI n'a été signé que le 16 mai 2012, date à laquelle M. X... a commencé à exercer au sein de la société ATR ; que la société Derichebourg produit le courrier électronique du 10 mai 2012 que lui a envoyé M. X... dans lequel il renvoie la promesse d'embauche signée ; que si la promesse d'embauche engage l'employeur qui la formule à compter de son émission, elle n'engage le salarié visé qu'à la date de son acceptation ; que le salarié intérimaire peut d'ailleurs valablement refuser la proposition de CDI sans pour autant perdre le bénéfice de l'indemnité de précarité dès lors qu'un tel refus n'entre pas dans les causes d'exclusion du bénéfice de l'indemnité de précarité prévue par l'article L. 1251-33 du code du travail, contrairement d'ailleurs aux dispositions relatives aux CDD, qui prévoient expressément une telle exclusion en cas de refus d'un CDI (L. 1243-10 du code du travail) ; que la SAS Derichebourg ne rapporte pas la preuve que M. X... a manifesté, avant le 10 mai 2012, son acceptation de la promesse d'embauche ; que dès lors, c'est à cette date qu'il y a lieu de considérer que ce dernier a bénéficié d'un contrat à durée indéterminée ; que l'acceptation du salarié étant intervenue neuf jours après le terme du contrat de mission, le bénéfice d'un contrat de travail à durée indéterminée ne saurait être considéré comme « immédiat » au sens de l'article L. 1251-32 du code du travail ; que dès lors, la décision des premiers juges sera confirmée sur ce point (…) que les dépens seront mis à la charge de la société Derichebourg interim aéronautique qui succombe, laquelle devra, également, verser à M. X... la somme de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles que ce dernier a pu être amené à exposer pour assurer la défense de ses intérêts, l'appelante étant, elle-même par voie de conséquence, déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
ET AUX MOTIFS (A LES SUPPOSER) ADOPTES QUE sur l'indemnité de fin de mission ; que l'article L. 1251-32 du code du travail dispose « Lorsqu'à l'issue d'une mission, le salarié ne bénéficie pas immédiatement d'un contrat de travail à durée indéterminée avec l'entreprise utilisatrice, il a droit, à titre de complément de salaire, à une indemnité de fin de mission destinée à compenser la précarité de sa situation » ; qu'en l'espèce, en l'absence de promesse d'embauche définitive signée et datée avant la conclusion du contrat de travail, M. X... s'est trouvé pendant vingt jours entre la fin de sa mission et son embauche en contrat à durée indéterminé sans salaire et sans possibilité de bénéficier de l'indemnité Pôle emploi qui constitue indéniablement une situation de précarité ; que le salaire de base est fixé à 1.255, 55 euros sur une mission ayant duré 36 mois ; qu'en conséquence, le bureau de jugement condamne la société Derichebourg interim à payer à M. X... son indemnité de fin de mission soit 4.001, 61 euros majorée d'un intérêt légal à compter de la date de la mise en demeure le 5 juin 2012.
1° - ALORS QU'au terme de l'article L. 1251-32 du code du travail, le salarié sous contrat de travail temporaire ne peut prétendre à l'indemnité de fin de mission dès lors qu'à l'issue de sa mission, il bénéficie immédiatement d'un contrat de travail à durée indéterminée avec l'entreprise utilisatrice ; que tel est le cas si le salarié bénéficie, avant même l'expiration de sa mission, d'une promesse d'embauche à durée indéterminée précisant l'emploi proposé et la date d'embauche et qu'il accepte cette promesse, peu important que son acceptation intervienne quelques jours après le terme de son contrat de mission ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le salarié, dont la mission expirait le 1er mai 2012, avait reçu dès le 23 avril 2012 de l'entreprise utilisatrice une offre de contrat à durée indéterminée mentionnant l'emploi occupé, la rémunération, la date d'embauche, le temps et le lieu de travail et que cette offre constituait une véritable promesse d'embauche engageant l'employeur à compter de son émission; qu'en jugeant que c'était seulement à la date d'acceptation de cette promesse d'embauche, soit le 10 mai 2012, que le salarié devait être considéré comme ayant bénéficié d'un contrat de travail à durée indéterminée de sorte que ce bénéfice n'était pas « immédiat » la cour d'appel a violé les articles L. 1121-1 et L. 1251-32 alinéa 1 du code du travail.
2° - ALORS QU'au terme de l'article L. 1251-32 du code du travail, le salarié sous contrat de travail temporaire ne peut prétendre à l'indemnité de fin de mission dès lors qu'à l'issue de sa mission, il bénéficie immédiatement d'un contrat de travail à durée indéterminée avec l'entreprise utilisatrice ; que lorsque la prise d'effet du contrat de travail n'est pas concomitante avec sa signature, cette prise d'effet doit intervenir dans un délai raisonnable ; qu'en l'espèce, il résultait du contrat de mission que celle-ci expirait le 1er mai 2012 inclus, et de la promesse d'embauche comme du contrat à durée indéterminée que celui-ci prenait effet le 16 mai 2012 ; qu'il en résultait qu'un délai de 14 jours séparait le terme de la mission et le début du contrat à durée indéterminée ; qu'en relevant, par motifs adoptés, que le salarié était resté 20 jours sans travail, sans préciser d'où résultait une telle constatation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil, ensemble les articles L. 1121-1 et L. 1251-32 du code du travail.
3° - ALORS QUE le salarié intérimaire qui bénéficie d'une promesse d'embauche à durée indéterminée avant même l'issue de sa mission mais qui ne l'accepte délibérément que plusieurs jours après le terme de sa mission ne peut se prévaloir de son propre retard pour réclamer une indemnité de précarité en invoquant n'avoir pas bénéficié immédiatement d'un contrat de travail; qu'en jugeant que le salarié , qui avait reçu sept jours avant l'expiration de sa mission une promesse d'embauche qu'il n'avait acceptée que neuf jours après le terme de son contrat de mission, pouvait prétendre à une indemnité de précarité faute d'avoir bénéficié d'un contrat de travail « immédiat » lorsque cette situation résultait de sa propre attitude, la cour d'appel a violé les articles L. 1222-1 et L. 1251-32 alinéa 1 du code du travail,


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-28672
Date de la décision : 05/10/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

TRAVAIL TEMPORAIRE - Contrat de mission - Expiration - Indemnisation - Indemnité de fin de mission - Exclusion - Cas - Bénéfice immédiat d'un contrat de travail à durée indéterminée - Notion

TRAVAIL TEMPORAIRE - Contrat de mission - Expiration - Promesse d'embauche de l'entreprise utilisatrice - Acceptation du salarié - Moment - Portée TRAVAIL TEMPORAIRE - Entreprise de travail temporaire - Rémunération du salarié - Eléments de rémunération - Indemnité de fin de mission - Paiement - Obligation - Etendue - Détermination - Portée

Aux termes de l'article L. 1251-32 du code du travail, lorsqu'à l'issue d'une mission, le salarié sous contrat de travail temporaire ne bénéficie pas immédiatement d'un contrat de travail à durée indéterminée avec l'utilisateur, il a droit, à titre de complément de salaire, à une indemnité destinée à compenser la précarité de sa situation, une telle indemnité n'étant toutefois pas due dès lors qu'un contrat de travail à durée indéterminée a été conclu immédiatement avec l'entreprise utilisatrice. La cour d'appel, qui a constaté que le salarié n'avait accepté que le 10 mai 2012 la "promesse d'embauche" sous contrat à durée indéterminée que l'entreprise utilisatrice lui avait adressée le 23 avril précédent avant le terme de sa mission fixé au 1er mai, et que neuf jours avaient séparé ce terme de la conclusion du contrat de travail engageant les deux parties, en a exactement déduit que le salarié n'avait pas immédiatement bénéficié de ce contrat


Références :

articles L. 1222-1 et L. 1251-32 du code du travail

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 16 octobre 2015

Sur la conclusion d'un contrat à durée indéterminée entre le travailleur temporaire et l'entreprise utilisatrice avant le terme de la mission, mais avec une prise d'effet postérieure à ce terme, à rapprocher :Soc., 8 décembre 2004, pourvoi n° 01-46877, Bull. 2004, V, n° 330 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 oct. 2016, pourvoi n°15-28672, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Frouin
Avocat général : Mme Robert
Rapporteur ?: M. Ludet
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Monod, Colin et Stoclet

Origine de la décision
Date de l'import : 27/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.28672
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