La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/09/2016 | FRANCE | N°16-80642

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 27 septembre 2016, 16-80642


Statuant sur le pourvoi formé par :

- La société Vias y Renovacion,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AGEN, chambre correctionnelle, en date du 10 décembre 2015, qui, dans la procédure suivie contre elle du chef, notamment, d'homicide involontaire, a prononcé sur une requête en rétractation d'arrêt ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 28 juin 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Harel-Dutirou, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de

la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Randouin ;
Sur le rapport de Mme le conseill...

Statuant sur le pourvoi formé par :

- La société Vias y Renovacion,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AGEN, chambre correctionnelle, en date du 10 décembre 2015, qui, dans la procédure suivie contre elle du chef, notamment, d'homicide involontaire, a prononcé sur une requête en rétractation d'arrêt ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 28 juin 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Harel-Dutirou, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Randouin ;
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire HAREL-DUTIROU, les observations de la société civile professionnelle BOULLEZ, de la société civile professionnelle DELAPORTE et BRIARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CUNY ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 14 avril 2016, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 459 et 487 du code de procédure pénale ;
" il est fait grief à l'arrêt attaqué a prononcé le rabat de l'arrêt, en date du 16 avril 2015, et dit que l'audience sera examinée à l'audience du 31 mars à 13 heures 30 ;
" aux motifs que les motifs de l'arrêt du 16 avril 2015 ayant conduit la cour à rejeter la demande de Mme Patrocinio X...en réparation du préjudice économique sont les suivants : ‘ ‘ Il doit être rappelé que, par l'arrêt du 24 mars 2014, la cour avait observé qu'elle aurait apprécié de trouver dans le dossier remis par l'avocat de Mme X..., laquelle prétend à une indemnité de 336 924, 34 euros en réparation du préjudice économique, des pièces justificatives de la situation financière complète du couple dans les années précédant le décès du mari et de celle de la veuve dans les années suivant ce dernier, plutôt que le rapport « Dintilhac », le référentiel indicatif régional de l'indemnisation du préjudice corporel et le barème de capitalisation 2011 publié à la Gazette du Palais parfaitement connus d'elle ; que force est de constater qu'à la suite de cet arrêt ordonnant la réouverture des débats et invitant Mme X...à produire diverses pièces justificatives indispensables à l'appréciation du bien-fondé de sa réclamation au titre du préjudice économique, et alors que l'affaire est venue une première fois à l'audience du 30 juin 2014 à laquelle elle a été renvoyée contradictoirement à l'audience du 12 mars 2015, aucune des pièces sollicitées par la cour n'a été produite, l'avocat de Mme X..., qui n'a même pas adressé un dossier à la cour, et celle-ci (contrairement aux audiences précédentes) ne comparaissant pas. En cet état, la cour ne peut que rejeter la demande de Mme X...au titre du préjudice économique, faute pour elle de justifier de la réalité de celui-ci par des pièces probantes''; que, pourtant, le 10 décembre 2014, l'avocat de Mme X...avait adressé à 10 heures 48 le courriel suivant à l'adresse électronique aud. cadage @ justice. fr, courriel également adressé à l'avocat de la société Vias y Renovacion à l'adresse électronique pjolibert @ cotegazam. fr ‘ ‘ Madame le greffier, Je reviens vers vous dans ce dossier afin de vous communiquer, en vue de l'audience de demain 11 décembre 2014 à 13 heures 30, les pièces demandées par la cour, de A à G, à savoir :/ …/. Compte tenu de mon éloignement géographique, je vous prie d'excuser mon absence à votre audience. Je vous prie de croire, Madame le greffier, en l'assurance de ma considération respectueuse''; que ce courriel avait été suivi d'autres courriels adressés à 10 heures 50, 10 heures 52, 10 heures 53 et 10 heures 55 aux deux adresses électroniques précitées de sorte que sept pièces avaient été communiquées ; que ces sept pièces n'avaient pas été connues des magistrats de la chambre correctionnelle, le directeur de greffe de la cour d'appel d'Agen ayant établi à cet égard le17 juin 2015 l'attestation suivante : ‘ ‘ atteste :- que le courriel joint a été adressé par Me Diaz, avocat au barreau de Paris le 10 décembre 2014 et reçu par le greffe de la chaîne pénale de la cour d'appel,- que les pièces évoquées dans ce courriel n'ont pas été éditées par le greffe et n'ont pas été remises aux magistrats de la chambre correctionnelle,- que ces pièces ont été éditées seulement le 16 juin 2015 par la titulaire du poste, constate :- que les services, tant de l'audiencement, que du greffe correctionnel, n'ont pas reçu, ni par fax ni par courrier postal, les pièces telles que sollicitées, par arrêt, en date du 24 mars 2014,- qu'aucune convention n'a été établie entre la cour d'Agen et les différents barreaux du ressort quant aux modalités, d'une part, de consultations et d'échanges électroniques de documents et données relatifs aux affaires pénales, et, d'autre part, de l'utilisation de moyens de télécommunications au cours de la procédure''; que, par ailleurs, à l'audience de 12 mars 2015, l'avocat de la société Vias y Renovacion, qui avait été destinataire des sept pièces précitées (lesquels figurent au dossier remis à la cour à l'audience du 30 novembre 2015), avait déposé des conclusions dans lesquels il était :- notamment, indiqué dans le ‘ ‘ rappel des faits et de la procédure " : ‘ ‘ Ce n'est qu'en date du 10 décembre, après deux reports, que Mme Patrocinio X...a produit quelques documents. Toutefois, et évidence, ces deux pièces sont totalement insuffisantes sauf à démontrer que la requérante ferait preuve d'une loyauté contestable. C'est en l'état que la société Vias Y Renovacion entend formuler les observations suivantes …''.- notamment, demandé à la cour dans le dispositif de ‘ ‘ constater Mme X...n'a pas communiqué l'ensemble des documents utiles et réclamés''; qu'il apparaît donc qu'à la suite d'un dysfonctionnement du greffe de la cour (et d'un défaut d'information de l'avocat de la société Vias y Renovacion), les magistrats de la chambre correctionnelle n'ont pas eu connaissance des pièces communiquées par l'avocat de Mme X..., lesquelles ne nécessitaient pas pour leur prise en compte une comparution de cette dernière ou sa représentation à l'audience du 12 mars 2015, alors que ce défaut de connaissance, non imputable à l'intéressée, a eu une influence déterminante sur l'arrêt rendu le 16 avril 2015 ; qu'étant enfin observé en réponse à ce que la cour hésite à qualifier de moyens de la société Vias y Renovacion, d'une part, que la requête n'est en rien tardive dans la mesure où elle a été présentée le 23 juin 2015 pour un dysfonctionnement officiellement constaté six jours auparavant, d'autre part, que la procédure introduite par Mme X..., veuve A..., à qui soit dit au passage l'arrêt du 16 avril 2015 n'a pas encore été signifié, est adéquate à la situation, le rabat de cet arrêt doit être en conséquence prononcé ;

" alors que le rabat d'arrêt, procédure purement prétorienne, doit rester exceptionnelle ; qu'il ne peut y être recouru, dès lors que d'autres voies légales sont ouvertes ; qu'en l'espèce, la partie civile n'a ni comparu, ni été représentée à l'audience du 12 mars 2015 ; que l'arrêt, en date du 16 avril 2015, a donc été qualifié à tort de contradictoire à signifier, puisque, en application de l'article 487 du code de procédure pénale, la partie civile a été jugée par défaut ; que la voie de l'opposition était ainsi ouverte ; qu'en prononçant le rabat d'arrêt, motifs pris d'un dysfonctionnement du service du greffe de la cour, alors que, en vertu de l'article 459 du code de procédure pénale, les parties sont tenues de déposer leurs conclusions à l'audience, et qu'aucune obligation ne pèse sur le greffe d'éditer, la veille de l'audience, des pièces reçues par courriel, la cour d'appel a violé les articles visés au moyen " ;
Vu les articles 489 et suivants, 567 et suivants du code de procédure pénale ;
Attendu que les arrêts rendus par les cours d'appel ne peuvent être annulés que par la voie de l'opposition ou du pourvoi en cassation ; qu'une cour d'appel ne peut en conséquence rétracter l'arrêt qu'elle a rendu ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'à la suite d'un accident du travail ayant causé le décès de Juan A...
..., la société de droit espagnol Vias y Renovacion a été déclarée coupable d'homicide involontaire et responsable des préjudices subis par les parties civiles ; que, prononçant sur les intérêts civils, la cour d'appel, après avoir ordonné la réouverture des débats sur le préjudice économique en invitant la veuve de la victime à justifier des revenus du couple et de ses revenus personnels avant l'accident, par arrêt du 16 avril 2015, a constaté l'absence de production des pièces et l'a déboutée de sa demande ; que Mme X...a présenté une requête en rétractation d'arrêt ;
Attendu que, pour prononcer le rabat de l'arrêt et ordonner le renvoi de l'affaire, l'arrêt relève qu'à la suite d'un dysfonctionnement du service du greffe de la cour, les magistrats de la chambre correctionnelle n'ont pas eu connaissance des pièces communiquées par l'avocat de la partie civile ; que les juges ajoutent que ce défaut de connaissance, non imputable à l'intéressée, a eu une influence déterminante sur l'arrêt rendu le 16 avril 2015 ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Agen, en date du 10 décembre 2015 ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Agen et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-sept septembre deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 16-80642
Date de la décision : 27/09/2016
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

JUGEMENTS ET ARRETS - Arrêts - Rétractation - Requête - Recevabilité (non) - Portée

JURIDICTIONS CORRECTIONNELLES - Cour d'appel - Arrêts - Rétractation - Requête - Recevabilité (non) - Portée

Les arrêts rendus par les cours d'appel ne peuvent être annulés que par la voie de l'opposition ou du pourvoi en cassation. Une cour d'appel ne peut en conséquence rétracter l'arrêt qu'elle a rendu


Références :

articles 489 et suivants du code de procédure pénale

articles 567 et suivants du code de procédure pénale

Décision attaquée : Cour d'appel d'Agen, 10 décembre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 27 sep. 2016, pourvoi n°16-80642, Bull. crim.
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle

Composition du Tribunal
Président : M. Guérin
Avocat général : M. Cuny
Rapporteur ?: Mme Harel-Dutirou
Avocat(s) : SCP Boullez, SCP Delaporte et Briard

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:16.80642
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award