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09/09/2016 | FRANCE | N°16-20575

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 septembre 2016, 16-20575


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Paris 15ème, 4 juillet 2016), que l'Union des syndicats anti-précarité (USAP), a déposé sa candidature en vue du scrutin national organisé par le ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, du 28 novembre au 12 décembre 2016, auprès des salariés des Très Petites Entreprises pour mesurer l'audience des organisations syndicales et apprécier leur représentativité en application de la loi n° 2010-1215 du

15 octobre 2010 ; que, par décision du 7 juin 2016, la direction génér...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Paris 15ème, 4 juillet 2016), que l'Union des syndicats anti-précarité (USAP), a déposé sa candidature en vue du scrutin national organisé par le ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, du 28 novembre au 12 décembre 2016, auprès des salariés des Très Petites Entreprises pour mesurer l'audience des organisations syndicales et apprécier leur représentativité en application de la loi n° 2010-1215 du 15 octobre 2010 ; que, par décision du 7 juin 2016, la direction générale du Travail a déclaré recevable la candidature de l'USAP ; que la Confédération générale du travail (CGT) a saisi le tribunal d'instance aux fins d'annulation de cette décision et, par conséquent, de la candidature de l'Union des syndicats anti-précarité ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la CGT fait grief au jugement de la débouter de ses demandes alors, selon le moyen, que conformément au dernier alinéa de l'article R. 2122-36 du code du travail, doivent être joints à la déclaration de candidature les éléments et documents permettant de justifier de l'indépendance de l'organisation syndicale ; que le tribunal a rejeté la contestation de la CGT en retenant qu'il appartient à celui qui conteste le respect, par une organisation syndicale, du critère d'indépendance d'apporter la preuve du bien-fondé de sa contestation ; qu'en statuant comme il l'a fait sans rechercher si l'USAP justifiait de la production, lors du dépôt de sa déclaration de candidature, d‘éléments et de documents permettant de justifier de son indépendance, le tribunal a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles R. 2122-36 et L. 2122-10 du code du travail ;

Mais attendu qu'ayant constaté que l'USAP avait fourni, lors du dépôt de sa déclaration de candidature, un bilan simplifié, un compte de résultats simplifié et une annexe, et que la CGT ne fournissait aucun élément au soutien de sa contestation de l'indépendance de cette organisation syndicale, le tribunal a légalement justifié sa décision au regard des articles L. 2122-10-6 et R. 2122-36 du code du travail ;

Sur le second moyen, pris en ses cinquième et sixième branches :

Attendu que la CGT fait grief au jugement de la débouter de ses demandes alors, selon le moyen :

1°/ que la charge de la preuve qu'elle satisfait au critère de transparence financière incombe à l'Union des syndicats anti-précarité ; que le tribunal a rejeté la contestation de la CGT tout en constatant que la ligne « autres produits » figurant dans le compte de résultat simplifié n'était pas détaillé s'agissant de la nature de ces gains alors même que ce poste représente plus du quart du total de ses produits ; qu'en statuant comme il l'a fait, quand il résultait de ses constatations que les mentions des documents produits étaient incomplètes et ne permettaient pas d'apporter la preuve d'une totale transparence financière, le tribunal a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 2122-10-6 du code du travail ;

2°/ que la charge de la preuve qu'elle satisfait au critère de transparence financière incombe à l'Union des syndicats anti-précarité ; que le tribunal a retenu « qu'il n'est pas davantage démontré par la CGT que l'instruction de ne pas apposer d'ordre sur les chèques de règlement émane bien de l'USAP, et non d'une pratique isolée d'une mandataire syndicale qui, de surcroît et d'après les pièces produites, avait été mandatée par l'Union locale « CGT » de Chatou dans l'espèce rapportée ; qu'en conséquence, la CGT échouant à rapporter la preuve contraire, l'USAP satisfait à l'exigence de transparence financière » ; qu'en considérant que la charge de la preuve incombait à la CGT, le tribunal a violé l'article L. 2122-10-6 du code du travail ;

Mais attendu que le moyen qui, sous le couvert de violation de la loi et de manque de base légale, ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine par le juge du fond de la valeur et de la portée des éléments de preuve qui lui sont soumis, ne saurait être accueilli ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les quatre premières branches du second moyen annexé, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf septembre deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour le syndicat Confédération générale du travail (CGT)

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche au jugement attaqué d'AVOIR rejeté les demandes de la CGT tendant à voir annuler la décision de la Direction générale du travail et par conséquent, la candidature de l'Union des Syndicats Anti-Précarité au scrutin visant à mesurer l'audience des organisations syndicales auprès des salariés des entreprises de moins de 11 salariés qui se dérouleront du 28 novembre au 12 décembre 2016 et, à titre subsidiaire, voir dire et juger l'Union des Syndicats Anti-Précarité ne peut présenter sa candidature au niveau national ;

AUX MOTIFS QUE, sur la recevabilité de la déclaration de candidature de l'USAP, l'article L. 2122-10-1 du code du travail dispose qu'en vue de mesurer l'audience des organisations syndicales auprès des salariés des entreprises de moins de onze salariés, à l'exception de ceux relevant des branches mentionnées à l'article L. 2122-6, un scrutin est organisé au niveau régional tous les quatre ans ; que ce scrutin a lieu au cours d'une période fixée par décret ; qu'aux termes de l'article L. 2122-10-6 du code du travail, les organisations syndicales de salariés qui satisfont aux critères de respect des valeurs républicaines, d'indépendance et de transparence financière, légalement constituées depuis au moins deux ans et auxquelles les statuts donnent vocation à être présentes dans le champ géographique concerné, ainsi que les syndicats affiliés à une organisation syndicale représentative au niveau national et interprofessionnel se déclarent candidats auprès des services du ministre chargé du travail dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat ; qu'aux termes de l'article R. 2122-33 du même code, les candidatures des organisations syndicales ayant statutairement vocation à être présentes dans le champ géographique d'une ou de plusieurs régions ou collectivités comprises dans le ressort territorial d'une seule direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi sont déposées auprès de cette direction ; que les candidatures des organisations syndicales ayant statutairement vocation à être présentes sur un champ géographique excédant le ressort territorial d'une seule direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi sont déposées auprès de la direction générale du travail ; que selon l'article R. 2122-39 du code du travail alinéa 1, la contestation des décisions relatives à l'enregistrement d'une ou plusieurs candidatures est formée, à peine d'irrecevabilité, dans un délai de quinze jours à compter de la publication mentionnée à l'article R. 2122-38 devant le tribunal d'instance dans le ressort duquel l'autorité administrative mentionnée à l'article R. 2122-37 a son siège ; qu'elle peut être formée par tout électeur ou tout mandataire d'une organisation candidate ; que le tribunal d'instance de Paris XV est compétent pour statuer sur les recours formés contre les décisions du directeur général du travail ; que selon l'article R. 2122-36 du code du travail, les pièces suivantes sont jointes à la déclaration de candidature d'une organisation syndicale : 1° Une déclaration sur l'honneur du mandataire de cette organisation attestant que sa candidature satisfait aux exigences prévues à l'article L. 2122-10-6 ; 2° Une copie de ses statuts ; 3° Une copie du récépissé de dépôt de ses statuts ; 4° Les éléments et documents permettant de justifier de l'indépendance et de la transparence financière de l'organisation syndicale ; que la CGT soutient que l'USAP n'a pas fourni, lors du dépôt de sa déclaration de candidature, de déclaration sur l'honneur de son mandataire ; mais attendu que la déclaration de candidature de l'USAP versée aux débats par la demanderesse elle-même contient bien une déclaration sur l'honneur de son mandataire attestant que cette candidature satisfait aux exigences prévues à l'article L. 2122-10-6 du code du travail, de sorte que ce moyen doit être écarté ; que la CGT soutient également que l'USAP n'a pas fourni, lors de ce dépôt, d'éléments suffisants permettant de justifier de son indépendance et de sa transparence financière ; mais attendu qu'il appartient à celui qui conteste le respect, par une organisation syndicale, du critère d'indépendance d'apporter la preuve du bien-fondé de sa contestation ; qu'en l'espèce, la CGT ne fournit aucun élément au soutien de la contestation de l'indépendance de l'USAP qu'elle élève ; qu'en outre, s'agissant du critère de transparence financière, il ressort des pièces versées aux débats que l'USAP a fourni lors du dépôt de sa déclaration de candidature un bilan simplifié, un compte de résultats simplifié et une annexe ; que ce faisant, l'USAP a satisfait aux exigences des dispositions des articles L. 2135-1 et D. 2135-3 du code du travail ; que contrairement à ce que soutient la CGT, la production du livre de compte tenu par le trésorier de l'union ne constitue nullement une exigence légale ou réglementaire ; qu'il s'ensuit que, là non plus, la contestation de la demanderesse n'est pas fondée ; que la CGT soutient encore que le formulaire de déclaration de candidature déposé par l'USAP comporte l'email de M X... qui n'avait, à cette date, aucun mandat ni pouvoir pour représenter le syndicat ; mais attendu qu'il ressort des éléments versés aux débats que c'est M. Paul Joachim Y... qui a signé le 22 mai la déclaration de candidature de l'USAP, et qu'il disposait à cette date de ce pouvoir en sa qualité de président de l'USAP ; qu'il est indifférent à cet égard que la mention de l'adresse email d'une personne tierce ait été portée sur cette même déclaration ; que là encore le moyen de la CGT doit donc être écarté ; qu'en conséquence, la déclaration de candidature déposée par l'USAP le 23 mai 2016 apparaît recevable ;

ALORS QUE, conformément au dernier alinéa de l'article R 2122-36 du code du travail, doivent être joints à la déclaration de candidature les éléments et documents permettant de justifier de l'indépendance de l'organisation syndicale ; que le tribunal a rejeté la contestation de la CGT en retenant qu'il appartient à celui qui conteste le respect, par une organisation syndicale, du critère d'indépendance d'apporter la preuve du bien-fondé de sa contestation ; qu'en statuant comme il l'a fait sans rechercher si l'USAP justifiait de la production, lors du dépôt de sa déclaration de candidature, d‘éléments et de documents permettant de justifier de son indépendance, le tribunal a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles R 2122-36 et L 2122-10 du code du travail ;

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Le moyen reproche au jugement attaqué d'AVOIR rejeté les demandes de la CGT tendant à voir annuler la décision de la Direction générale du travail et par conséquent, la candidature de l'Union des Syndicats Anti-Précarité au scrutin visant à mesurer l'audience des organisations syndicales auprès des salariés des entreprises de moins de 11 salariés qui se dérouleront du 28 novembre au 12 décembre 2016 et, à titre subsidiaire, voir dire et juger l'Union des Syndicats Anti-Précarité ne peut présenter sa candidature au niveau national ;

AUX MOTIFS QUE, sur la candidature de l'USAP, l'article L. 2131-1 du code du travail dispose que les syndicats professionnels ont exclusivement pour objet l'étude et la défense des droits ainsi que des intérêts matériels et moraux, tant collectifs qu'individuels, des personnes mentionnées dans leurs statuts ; aux articles L 2121-1 du code du travail, la représentativité des organisations syndicales est déterminée d'après les critères cumulatifs suivants : 1 ° Le respect des valeurs républicaines ; 2° L'indépendance ; 3° La transparence financière ; 4° Une ancienneté minimale de deux ans dans le champ professionnel et géographique couvrant le niveau de négociation ; que cette ancienneté s'apprécie à compter de la date de dépôt légal des statuts ; sur l'activité de l'union, la CGT fait valoir que l'USAP n'a pas la qualité de syndicat professionnel mais exerce dans les faits, à titre principal, une activité juridique et fonctionne comme une officine de droit ; mais attendu que les statuts de l'USAP tels que modifiés le 17 novembre 2012 donnent pour objet exclusif à l'union « l'étude et la défense des droits ainsi que des intérêts matériels et moraux tant collectifs qu'individuels, immédiats et à venir, des syndicats adhérents, des sections syndicales et des syndiqués qu'elle regroupe, et des salariés » (article 2 p.4) ; qu'ils spécifient encore que l'union « lutte par priorité contre la précarité dans l'emploi (CDD, CTT et temps partiel), les bas salaires et pour des emplois stables, évolutifs, variés et décemment payés (principe du salaire équitable), qu'elle « choisit d'utiliser les moyens classiques du mouvement syndical (grève, manifestation, pétition, etc.,.), ainsi que la défense juridique individuelle et collective [...] au même titre que la négociation dans les entreprises (lorsqu'elle y est implantée), la lutte pour l'amélioration des conditions de travail, la liberté syndicale et les salaires et le lobbying en direction des pouvoirs publics et du monde politique » (article 2 p.6) ; que si l'union précise, dans ses statuts, que son secrétariat comporte un secteur consacré aux « questions juridiques [ayant] pour fonction de développer l'information des élus, des salariés, des chômeurs et des retraités, et d'assurer si besoin leur assistance ou défense, et [ayant] également pour tâche d'étudier les questions touchant au droit social et au droit du travail », il doit néanmoins être rappelé que l'article 64 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, modifiée par la loi n° 90-1259 du 31 décembre 1990, a autorisé les syndicats et associations professionnelles à donner des consultations juridiques et rédiger des actes sous seing privés au profit des personnes dont la défense des intérêts est visée par leurs statuts, sur des questions se rapportant directement à leur objet à la condition qu'ils ne s'agisse pas de leur activité exclusive ; qu'il ressort des pièces versées aux débats par la CGT que l'USAP possède un site internet contenant de nombreux articles juridiques ; qu'elle assiste des salariés dans les litiges prud'homaux ; qu'elle en tire des ressources ; que l'USAP elle-même a reconnu oralement à l'audience l'existence de cette activité juridique en soulignant que l'ensemble des syndicats faisaient de même ; qu'il doit néanmoins être observé que la « convention de défense prud'homale » produite par la demanderesse comporte l'en-tête suivant : « secteur Prudis - Union des syndicats CGT de Chatou » ; que nulle part ce document ne fait mention de l'USAP; que, plus généralement, les éléments produits par la demanderesse ne lui permettent pas de rapporter la preuve de ce que l'union locale « CGT » de CHATOU et l'USAP constitueraient une seule et même entité, et que par conséquent les agissements imputables à la première le seraient également à la seconde ; qu'il n'appartient pas au tribunal de se faire le juge des griefs que la CGT formule à l'encontre de l'union locale « CGT » de CHATOU qui n'a pas été appelée à la cause ; qu'il ne lui revient pas non plus de statuer sur le point de savoir si les conditions dans lesquelles l'USAP exerce son activité d'assistance juridique constitue un exercice illégal de la profession d'avocat, ou une quelconque autre infraction pénale ; que seul importe de savoir si cette activité juridique exercée par l'USAP constitue son activité exclusive ; à cet égard, il ressort de ses statuts que l'USAP peut « syndiquer, nommer, présenter, défendre ... etc l'ensemble des salariés sur l'ensemble du territoire français, et signer tout accord collectif relevant de toutes les professions, catégories et statuts » ; que l'union « s'assigne la tâche de présenter des candidats aux élections professionnelles et prud'homales, de défendre les conventions collectives » ; que l'union « nomme également des délégué syndicaux (DS) ou des représentants de section syndicale (ESS ou RS CE), ou tout autre représentant syndical prévu par la loi (comme des salariés mandatés dans le cadre d'accord RTT), un accord collectif, un usage ou un engagement unilatéral d'un employeur ou d'un service public, sans limite géographique », qu'elle « peut être amenée à assister les élus et mandatés à toutes réunions propres à l'organisation ou avec les directions d'entreprises à la demande des élus, du syndicat, ou de la section » ; que l'union « a aussi notamment pour vocation de nommer des représentants dans tous organismes paritaires ou consultatifs », qu'elle « peut aussi présenter des listes de candidats dans toutes élections locales ou départementales pour lesquelles les organisations syndicales se présentent aux suffrages des électeurs et lorsque les préfets font appel de candidature pour les listes de conseillers du salarié » ; qu'ainsi il apparaît que l'USAP s'oblige à d'autres objectifs que l'assistance et la défense juridiques, à savoir la signature d'accord collectifs, la présentation de candidats aux élections professionnelles et prud'homales, la défense des conventions collectives, la désignation de délégués syndicaux ou de représentants dans tous les organismes paritaires ou consultatifs avec présentation de listes de candidats dans les élections locales et départementales ; qu'en outre, l'USAP justifie avoir présenté des listes syndicales dans 135 sites sur 65 sociétés différentes et y avoir obtenu 429 élus ; qu'elle a ainsi signé plus de 65 protocoles d'accords préélectoraux ; qu'elle produit de nombreuses décisions judiciaires démontrant son activité en vue de la défense des droits collectifs et individuels des salariés dans leur entreprise ; qu'elle communique des procès-verbaux d'élections professionnelles ; qu'elle produit un tract démontrant qu'elle s'implique également dans des actions revendicatives au sein des entreprises dans lesquelles elle s'implante ; qu'ainsi l'USAP démontre qu'elle déploie, dans les entreprises dans lesquelles sont implantés les syndicats anti-précarité, une activité revendicative visant la défense des droits collectifs et individuels des salariés qui apparaît conforme aux pratiques propres aux syndicats ; qu'il apparaît que le service d'assistance et de conseils juridiques qu'elle comprend ne constitue pas son objet mais davantage un moyen pour parvenir à la défense des intérêts des salariés ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que l'USAP justifie que son activité ne consiste pas, dans les faits, exclusivement à proposer des services rémunérés d'assistance et de conseil juridiques ; qu'il s'en déduit que non seulement les statuts de l'USAP apparaissent conformes aux dispositions légales, mais surtout que son activité elle-même est conforme aux statuts et partant aux dispositions légales ; qu'en conséquence, l'USAP revêt bien la qualité de syndicat professionnel ; que le moyen de la CGT sur ce point doit donc être écarté ;

ALORS QUE le syndicat CGT a fait valoir que l'activité de l'USAP consistait exclusivement à proposer des services rémunérés d'assistance et de conseil juridique ; que pour rejeter ses contestations, le tribunal s'est référé aux statuts de l'USAP ; qu'en se déterminant de la sorte quand les seuls statuts ne permettaient pas de déterminer quelle était l'activité de l'USAP qui devait être appréciée dans les faits, le tribunal a statué par des motifs inopérants en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

Et ALORS d'une part QUE la production d'un seul tract ne permet pas de caractériser une réelle activité syndicale de l'USAP, a fortiori lorsque cette dernière présente sa candidature au niveau national et qu'il n'est pas justifié de la diffusion dudit tract ; que pour rejeter les contestations de la CGT, le tribunal a retenu que l'USAP produisait un tract ; qu'en se déterminant par des motifs insusceptibles de caractériser une activité syndicale réelle de l'USAP, le tribunal a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles L 2131-1 et L 2122-10-6 du code du travail ;

ALORS d'autre part QUE la CGT a fait valoir que l'USAP s'implantait dans des entreprises en faisant une utilisation frauduleuse du sigle de la CGT et en trompant les salariés ; que le tribunal a retenu que l'USAP avait présenté des listes électorales, signé des protocoles d'accord préélectoraux et obtenu des élus ; qu'en statuant comme il l'a fait, sans répondre aux conclusions de l'exposant qui faisait valoir que l'USAP s'implantait dans des entreprises en faisant une utilisation frauduleuse du sigle de la CGT et en trompant les salariés, le tribunal a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS en outre QU'en ne précisant pas si les tracts et les signatures ainsi invoqués portaient ou non le sigle CGT et le sigle USAP, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard des articles L 2131-1 et L 2122-10-6 du code du travail ;

Et AUX MOTIFS QUE, sur la transparence financière de l'USAP, l'article L. 2135-1 du code du travail dispose que les syndicats professionnels et leurs unions mentionnés aux articles L. 2131-2, L. 2133-1 et L. 2133-2 relatifs à la création de syndicats professionnels et les associations de salariés ou d'employeurs régies par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association ou, dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, par le droit local sont soumis aux obligations comptables définies à l'article L. 123-12 du code de commerce ; que lorsque leurs ressources annuelles n'excèdent pas un seuil fixé par décret, ils peuvent adopter une présentation simplifiée de leurs comptes avec la possibilité de n'enregistrer leurs créances et leurs dettes qu'à la clôture de l'exercice ; si leurs ressources annuelles n'excèdent pas un second seuil fixé par décret, ils peuvent tenir un livre enregistrant chronologiquement l'ensemble des mouvements de leur patrimoine ; que les conditions d'application du présent article sont fixées par décret ; que l'article D. 2135-3 du même code précise que les comptes annuels des syndicats professionnels de salariés ou d'employeurs et de leurs unions, et des associations de salariés ou d'employeurs mentionnés à l'article L. 2135-1 dont les ressources au sens de l'article D. 2135-9 sont inférieures ou égales à 230 000 euros à la clôture de l'exercice peuvent être établis sous la forme d'un bilan, d'un compte de résultat et d'une annexe simplifiés, selon des modalités fixées par règlement de l'Autorité des normes comptables; qu'ils peuvent n'enregistrer leurs créances et leurs dettes qu'à la clôture de l'exercice ; qu'il a déjà été établi que l'USAP avait satisfait aux exigences auxquelles elle se trouve soumise du fait du montant de ses ressources, à savoir la production d'un bilan simplifié, d'un compte de résultats simplifié et d'une annexe lors du dépôt de sa déclaration de candidature ; que s'il est regrettable que la ligne « autres produits » figurant dans son compte de résultat simplifié ne soit pas davantage détaillée s'agissant de la nature de ces gains alors même que ce poste représente plus du quart du total de ses produits, pour autant ce seul élément ne suffit pas à remettre en cause la représentativité de l'union dès lors qu'elle satisfait aux exigences légales et réglementaires ; qu'il n'est pas davantage démontré par la CGT que l'instruction de ne pas apposer d'ordre sur les chèques de règlement émane bien de l'USAP, et non d'une pratique isolée d'une mandataire syndicale qui, de surcroît et d'après les pièces produites, avait été mandatée par l'union locale « CGT » de CHATOU dans l'espèce rapportée ; qu'en conséquence, la CGT échouant à rapporter la preuve contraire, l'USAP satisfait à l'exigence de transparence financière ; sur le respect des valeurs républicaines par l'USAP, il appartient à celui qui conteste le respect par une organisation syndicale des valeurs républicaines d'apporter la preuve de sa contestation ; que la CGT soutient que l'USAP ne satisfait pas l'exigence de respect des valeurs républicaines nécessaire à la représentativité des organisations syndicales ; mais attendu que le seul fait, pour un syndicat, de présenter des candidats aux élections des conseillers prudhommaux n'apparaît pas en soi contraire aux valeurs républicaines ; qu'il s'agit au contraire d'une faculté légale offerte aux syndicats ; de surcroît, la contestation par l'USAP dans le préambule de ses statuts de l'efficacité des autres organisations syndicales relève de l'exercice de sa liberté d'expression ; que les éléments rapportés ne permettent pas de se convaincre de ce que les limites en auraient été franchies ; que la confusion entre l'USAP et l'union locale « CGT » de CHATOU n'est pas davantage établie par les éléments versés aux débats ; qu'en conséquence, il n'est pas démontré par la CGT que l'USAP contreviendrait à l'exigence de respect des valeurs républicaines ; qu'il s'en déduit que l'USAP satisfait aux exigences légales de représentativité ; et que la CGT doit être déboutée de sa demande sur ce chef ; sur la représentativité de l'USAP au niveau national, qu'aux termes de l'article L 2122-10-6 du code du travail, les organisations syndicales de salariés qui satisfont aux critères de respect des valeurs républicaines, d'indépendance et de transparence financière, légalement constituées depuis au moins deux ans et auxquelles les statuts donnent vocation à être présentes dans le champ géographique concerné, ainsi que les syndicats affiliés à une organisation syndicale représentative au niveau national et interprofessionnel se déclarent candidats auprès des services du ministre chargé du travail dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat ; qu'il ressort de la rédaction des statuts de l'USAP, et notamment de son article 2, qu'elle consiste en une organisation syndicale interprofessionnelle et intercatégorielle dont « [le] champ d'action est national » (page 5) ; qu'il s'en déduit que les statuts de l'USAP lui donnent vocation à être présente sur le territoire national ; que, dès lors, le champ professionnel et géographique des syndicats qui lui sont affiliés importe peu ; qu'en conséquence, l'USAP apparaît fondée à présenter sa candidature au niveau national ; que la CGT doit donc être déboutée de sa demande sur ce chef ;

ALORS QUE la charge de la preuve qu'elle satisfait au critère de transparence financière incombe à l'Union des Syndicats Anti-précarité ; que le tribunal a rejeté la contestation de la CGT tout en constatant que la ligne « autres produits » figurant dans le compte de résultat simplifié n'était pas détaillé s'agissant de la nature de ces gains alors même que ce poste représente plus du quart du total de ses produits ; qu'en statuant comme il l'a fait, quand il résultait de ses constatations que les mentions des documents produits étaient incomplètes et ne permettaient pas d'apporter la preuve d'une totale transparence financière, le tribunal a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L 2122-10-6 du code du travail ;

Et ALORS QUE la charge de la preuve qu'elle satisfait au critère de transparence financière incombe à l'Union des Syndicats Anti-précarité ; que le tribunal a retenu « qu'il n'est pas davantage démontré par la CGT que l'instruction de ne pas apposer d'ordre sur les chèques de règlement émane bien de l'USAP, et non d'une pratique isolée d'une mandataire syndicale qui, de surcroît et d'après les pièces produites, avait été mandatée par l'union locale « CGT » de CHATOU dans l'espèce rapportée ; qu'en conséquence, la CGT échouant à rapporter la preuve contraire, l'USAP satisfait à l'exigence de transparence financière » ; qu'en considérant que la charge de la preuve incombait à la CGT, le tribunal a violé l'article L 2122-10-6 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-20575
Date de la décision : 09/09/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

SYNDICAT PROFESSIONNEL - Représentativité - Détermination - Modalités - Audience électorale - Audience des organisations syndicales concernant les très petites entreprises - Scrutin - Candidature - Recevabilité - Critères - Indépendance du syndicat - Appréciation - Portée

SYNDICAT PROFESSIONNEL - Représentativité - Détermination - Critères - Indépendance du syndicat - Constatation - Preuve - Eléments de preuve - Production - Nécessité - Applications diverses SYNDICAT PROFESSIONNEL - Représentativité - Détermination - Modalités - Audience électorale - Audience des organisations syndicales concernant les très petites entreprises - Scrutin - Candidature - Déclaration de candidature - Eléments annexés - Détermination - Portée

Il résulte de l'article R. 2122-36 du code du travail que les organisations syndicales qui déposent leur candidature en vue du scrutin national organisé par le ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social auprès des très petites entreprises (TPE) pour mesurer l'audience des organisations syndicales et apprécier leur représentativité en application de la loi n° 2010-1215 du 15 octobre 2010 joignent à leur déclaration de candidature, notamment, les éléments et documents permettant de justifier de leur indépendance et de leur transparence financière. Justifie sa décision au regard de ce texte le tribunal d'instance, saisi d'une demande d'annulation de la décision de la direction générale du travail ayant déclaré recevable la candidature d'une organisation syndicale, qui, constatant que lors du dépôt de sa déclaration de candidature, celle-ci a fourni un bilan simplifié, un compte de résultats simplifié et une annexe et que l'organisation syndicale qui conteste son indépendance ne fournit aucun élément au soutien de sa contestation, déboute cette dernière de sa demande d'annulation


Références :

articles L. 2122-10-6 et R. 2122-36 du code du travail

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Paris 15ème, 04 juillet 2016

Sur le principe selon lequel le défaut d'indépendance d'un syndicat doit être établi par la partie qui l'allègue, à rapprocher : Soc., 22 juillet 1981, pourvoi n° 81-60695, Bull. 1981, V, n° 748 (cassation).Sur les éléments de nature à justifier du défaut d'indépendance d'un syndicat, à rapprocher :Soc., 31 janvier 1973, pourvoi n° 72-60096, Bull. 1973, V, n° 51 (1) (rejet)

arrêt cité ;Soc., 23 février 1973, pourvoi n° 72-60110, Bull. 1973, V, n° 107 (rejet) ;Soc., 11 janvier 1979, pourvoi n° 78-60672, Bull. 1979, V, n° 31 (rejet), et les arrêts cités ;Soc., 10 octobre 1990, pourvoi n° 89-61346, Bull. 1990, V, n° 455 (cassation)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 sep. 2016, pourvoi n°16-20575, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Frouin
Avocat général : M. Boyer
Rapporteur ?: Mme Lambremon
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 01/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:16.20575
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