LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 22 mai 2015), que Mme X..., divorcée de M. Y..., a fait assigner ce dernier devant un juge de l'exécution, afin d'obtenir, sous astreinte, la communication des baux qu'il a signés ainsi qu'un état liquidatif des loyers perçus par lui pour la période du 25 novembre 2002 au 23 juillet 2010 ;
Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt de confirmer en toutes ses dispositions le jugement du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Vannes du 18 juin 2013 lui ayant ordonné, sous astreinte, de communiquer un état précis des loyers de l'atelier perçus par lui pour la période du 25 novembre 2002 au 23 juillet 2010, ainsi que la totalité des baux de l'atelier concernant la même période et de dire que l'astreinte prononcée serait liquidée sur la base déterminée par ledit juge de 200 euros par jour de retard pendant trois mois à compter du 24 septembre 2013, alors selon le moyen :
1°/ que le juge de l'exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit ; que si ledit juge ne peut ni modifier le dispositif de la décision ni en suspendre l'exécution, il a la faculté de l'interpréter et d'en tirer toutes conséquences de nature à trancher un litige relatif, non pas à ce jugement lui-même, mais à son exécution ; qu'en l'espèce, il avait soutenu que c'était à tort qu'il avait été condamné sous astreinte à communiquer un état précis des revenus locatifs perçus et des charges acquittées relativement à l'atelier de son entreprise, dès lors que la valorisation globale de cette dernière, incluant nécessairement les loyers de cet atelier, avait été définitivement fixée à la somme de 215 000 euros par les parties, en vertu de l'état liquidatif établi le 6 mai 2005 par le notaire et homologué par l'arrêt du 27 janvier 2009 ; qu'en décidant dès lors de confirmer le jugement déféré en ce qu'il l'avait condamné à communiquer cet état des revenus locatifs, sous astreinte, sans rechercher par voie d'interprétation, comme elle y était invitée, si cette homologation n'avait pas rendu sans cause cette communication, la cour a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire et R. 121-1 du code des procédures civiles d'exécution ;
2°/ que nul ne peut se voir imposer, sans être acculé à devoir produire une preuve impossible, dans des conditions étrangères à celles d'un procès équitable, de communiquer un document écrit qui n'existe pas ou dont l'existence, contestée, n'est pas prouvée par celui qui en demande communication ; qu'en l'espèce, M. Y... avait protesté que les contrats de bail de l'atelier, dont la communication lui était demandée, n'existaient pas et n'avaient jamais existé ; qu'en décidant dès lors de confirmer le jugement déféré en ce qu'il l'avait condamné sous astreinte à communiquer ces documents, sans que leur existence ait jamais été établie, la cour a violé l'article 1315 du code civil, ensemble l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel a retenu que la cour d'appel de Rennes, saisie par Mme X... sur la portée de l'état liquidatif conclu entre les époux divorcés, ne s'était pas bornée à homologuer cet accord transactionnel mais avait, dans son arrêt du 27 janvier 2009, imposé à M. Y... de remettre au notaire les baux des appartements et de l'atelier ainsi qu'un état précis des revenus locatifs perçus et des charges acquittées à ce titre, alors que celui-ci contestait déjà l'existence de ces documents ;
Et attendu, ensuite, qu'ayant retenu que cet arrêt du 27 janvier 2009 avait acquis force de chose jugée tant sur l'homologation de l'état liquidatif que sur l'injonction de remise au notaire des documents, c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a décidé de prononcer une astreinte ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. André Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme Marie-Louise X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier septembre deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Le Griel, avocat aux Conseils, pour M. Y....
Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé en toutes ses dispositions le jugement du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Vannes du 18 juin 2013 ayant ordonné à M. Y..., sous astreinte, de communiquer un état précis des loyers de l'atelier perçus par lui pour la période du 25 novembre 2002 au 23 juillet 2010, ainsi que la totalité des baux de l'atelier concernant la même période, et d'avoir dit que l'astreinte prononcée serait liquidée sur la base déterminée par ledit juge de 200 € par jour de retard pendant trois mois à compter du 24 septembre 2013 ;
Aux motifs propres que M. Y... soutient essentiellement que l'arrêt du 27 janvier 2009 a homologué l'état liquidatif établi par Me Z... le 6 mai 2005, sauf à rectifier la valeur de l'immeuble de Ploeren, et que le bâtiment à usage d'atelier a été intégré dans la valeur globale de l'entreprise, fixée à 66 772 € par l'arrêt de la cour du 27 janvier 2009 ; que les loyers sont encaissés par l'entreprise individuelle et que cette contrepartie financière de la jouissance de l'atelier est incluse dans la valorisation de l'entreprise, acceptée par les parties et que dès lors qu'il n'y a pas eu de baux écrits, il ne peut les produire ; que la question de la valorisation de l'atelier du fait de l'encaissement des loyers relève de la discussion de fond, et non de celle portée devant le juge de l'exécution, qui ne porte que sur la communication des éléments visés par l'arrêt de la cour d'appel du 27 janvier 2009 ; que cet arrêt, qui a reçu force de chose jugée impose à M. Y... « de remettre au notaire les baux des appartements et de l'atelier ainsi qu'un état précis des revenus locatifs perçus et des charges acquittées à ce titre » ; que le juge de l'exécution, en application de l'article R. 121-1 du code des procédures civiles d'exécution, ne peut ni modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites, ni en suspendre l'exécution ; qu'il incombe donc à M. Y... de satisfaire à la disposition de cette décision, par la communication des baux de l'atelier et d'un état précis des loyers encaissés ; qu'il ne peut à ce titre contester que des loyers ont bien été encaissés, quelle que soit leur affectation, puisque l'expert comptable atteste que « les loyers sont encaissés par l'entreprise individuelle » ; que faute pour lui d'avoir déféré à cette injonction de la cour par la communication de ces pièces, le recours au juge de l'exécution aux fons d'obtenir leur production par lui, sous astreinte de 200 € par jour de retard pendant trois mois à compter de la signification de la décision, était justifiée et fondée ;
Et aux motifs adoptés du premier juges que le litige ne porte pas sur ce qui doit être intégré ou non à l'actif de la liquidation [qui dépend du juge aux affaires familiales] mais sur le fait de savoir si les documents permettant cette liquidation ont été ou non fournis et si une astreinte est indispensable pour y parvenir ; que le juge aux affaires familiales n'a pas compétence pour prononcer une astreinte pour obtenir l'exécution d'une décision d'une autre juridiction ; que dans l'état liquidatif du 23 juillet 2013, Me A... a rappelé (p. 3) l'obligation pour M. Y... de remettre les baux des appartements et de l'atelier, ainsi qu'un état revenus locatifs perçus et des charges acquittées à ce titre et ce depuis le 25 novembre 2002 ; que si l'état liquidatif indique que M. Y..., conformément à l'arrêt du 27 janvier 2009, a remis au notaire les contrats de location pour les appartements sus-désignés, ainsi qu'un état précis des recettes encaissées et dépenses acquittées depuis le 25 novembre 2002 jusqu'au 30 juin 2010, il indique que les loyers de l'atelier sont encaissés, mais sans inscrire aucune somme ; que force est de constater que les prescriptions de la cour n'ont pas été respectées, qu'aucun bail concernant l'atelier n'a été transmis et qu'il en est de même de l'état précis des revenus locatifs perçus et des charges acquittées à ce titre ; que le problème de l'évaluation de l'atelier, qui intégrerait ou non la valeur des bâtiments prenant en compte les loyers, ne relève pas de la compétence du juge de l'exécution ; que l'arrêt est clair sur la communication des pièces litigieuses, l'affirmation de M. Y... sur l'inexistence des baux étant tardive et peu crédible devant son peu de réaction à la lecture de l'arrêt du 27 janvier 2009 ;
1° Alors que le juge de l'exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit ; que si ledit juge ne peut ni modifier le dispositif de la décision ni en suspendre l'exécution, il a la faculté de l'interpréter et d'en tirer toutes conséquences de nature à trancher un litige relatif, non pas à ce jugement lui-même, mais à son exécution ; qu'en l'espèce, M. Y... avait soutenu que c'était à tort qu'il avait été condamné sous astreinte à communiquer un état précis des revenus locatifs perçus et des charges acquittées relativement à l'atelier de son entreprise, dès lors que la valorisation globale de cette dernière, incluant nécessairement les loyers de cet atelier, avait été définitivement fixée à la somme de 215 000 euros par les parties, en vertu de l'état liquidatif établi le 6 mai 2005 par le notaire et homologué par l'arrêt du 27 janvier 2009 ; qu'en décidant dès lors de confirmer le jugement déféré en ce qu'il avait condamné M. Y... à communiquer cet état des revenus locatifs, sous astreinte, sans rechercher par voie d'interprétation, comme elle y était invitée, si cette homologation n'avait pas rendu sans cause cette communication, la cour a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire et R. 121-1 du code des procédures civiles d'exécution ;
2° Alors que nul ne peut se voir imposer, sans être acculé à devoir produire une preuve impossible, dans des conditions étrangères à celles d'un procès équitable, de communiquer un document écrit qui n'existe pas ou dont l'existence, contestée, n'est pas prouvée par celui qui en demande communication ; qu'en l'espèce, M. Y... avait protesté que les contrats de bail de l'atelier, dont la communication lui était demandée, n'existaient pas et n'avaient jamais existé ; qu'en décidant dès lors de confirmer le jugement déféré en ce qu'il avait condamné sous astreinte M. Y... à communiquer ces documents, sans que leur existence ait jamais été établie, la cour a violé l'article 1315 du code civil, ensemble l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales.