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12/07/2016 | FRANCE | N°15-14362

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 juillet 2016, 15-14362


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 27 novembre 2000, en qualité de chef de réception par la société Hôtel Elysées Star, aux droits de laquelle vient la société Amarante, exerçant en dernier lieu les fonctions de directeur adjoint, a, après mise à pied conservatoire, été licencié pour faute grave par lettre du 29 novembre 2007 ; que par jugement du tribunal de commerce de Paris du 17 avril 2012, la société a été placée sous sauvegarde de justice et le 16 juillet 2013 a bénéficiÃ

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Sur le moyen unique du pourvoi principal de l'AGS...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 27 novembre 2000, en qualité de chef de réception par la société Hôtel Elysées Star, aux droits de laquelle vient la société Amarante, exerçant en dernier lieu les fonctions de directeur adjoint, a, après mise à pied conservatoire, été licencié pour faute grave par lettre du 29 novembre 2007 ; que par jugement du tribunal de commerce de Paris du 17 avril 2012, la société a été placée sous sauvegarde de justice et le 16 juillet 2013 a bénéficié d'un plan de sauvegarde ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal de l'AGS :

Vu les articles L. 625-3 du code de commerce et L. 3253-8 du code du travail ;

Attendu que pour dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, condamner la société à payer au salarié un rappel de salaire sur mise à pied conservatoire et congés payés afférents, les indemnités de rupture, la prime de treizième mois, des dommages-intérêts pour droit individuel à la formation et condamner l'AGS à garantir, l'arrêt retient qu'il résulte de l'article L. 3253-6 du code du travail que l'AGS a vocation à intervenir à compter de l'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire et qu'il n'y a pas lieu de la mettre hors de cause, qu'elle devra sa garantie dans les conditions prévues aux articles L. 3253-8 et suivants du code du travail en cas seulement de défaillance de la société actuellement in bonis ;

Attendu cependant, d'une part, que l'article L. 625-3 du code de commerce ne prévoit pas la mise en cause des institutions mentionnées à l'article L. 3253-14 du code du travail en cas d'ouverture d'une procédure de sauvegarde au cours de l'instance prud'homale et, d'autre part, qu'il résulte de l'article L. 3253-8 du code du travail que, dans ce cas, seules sont garanties les créances résultant des ruptures intervenues pendant la période d'observation et dans le mois suivant le jugement qui a arrêté le plan de sauvegarde ;

Qu'en statuant comme elle a fait, alors que la créance du salarié était antérieure au jugement d'ouverture, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le moyen unique du pourvoi incident du mandataire judiciaire de la société :

Vu les articles L. 622-7, L. 622-21 et L. 622-22 du code de commerce ;

Attendu qu'aux termes du premier article, le jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde emporte, de plein droit, interdiction de payer toute créance née antérieurement au jugement d'ouverture, à l'exception du paiement par compensation de dettes connexes et emporte également de plein droit interdiction de payer toute créance née après le jugement d'ouverture non mentionnée au I de l'article L. 622-17 ; qu'aux termes du second, le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 et tendant : 1° à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent... ;

Attendu que l'arrêt condamne la société à paiement de rappels de salaires sur mise à pied conservatoire et congés payés afférents, d'indemnités de rupture, de prime de treizième mois et de dommages-intérêts pour droit individuel à la formation ;

Qu'en statuant ainsi alors qu'elle constatait que la société débitrice était sous la protection d'une procédure de sauvegarde et que la créance du salariée était antérieure à l'ouverture de cette procédure, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Vu l'article 627 du code de procédure civile, et à la demande des parties ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que l'AGS devra sa garantie dans les conditions prévues par les articles L. 3253-8 et suivants du code du travail seulement en cas de défaillance de la société Amarante et en ce qu'il condamne à paiement cette société, l'arrêt rendu le 18 décembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Dit n'y avoir lieu à renvoi ;

Statuant de ces chefs ;

Fixe la créance de M. X... à la procédure de sauvegarde de la société Amarante les sommes suivantes :

-1 346, 16 euros au titre du rappel de salaire sur mise à pied outre 134, 61 euros de congés payés afférents ;
-6 192, 5 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 619, 25 euros de congés payés afférents ;
-2 167, 38 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement ;
-2 500 euros au titre de la prime de 13e mois ;
-1 098 euros au titre des dommages-intérêts sur droit individuel à la formation ;

Dit que l'AGS ne doit pas sa garantie des sommes fixées au bénéfice de M. X... ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elles exposés ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'AGS ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit, au pourvoi principal, par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour l'AGS et l'UNEDIC

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le licenciement de M. X... ne reposait pas sur une faute grave mais sur une cause réelle et sérieuse, d'avoir condamné la société Amarante à payer à M. X..., outre les intérêts au taux légal, les sommes de 1 346, 16 euros au titre du rappel de salaire pour la mise à pied conservatoire, outre 134, 61 euros pour les congés payés afférents, de 6 192, 50 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 619, 25 euros pour les congés payés afférents, de 2 167, 38 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, de 2 500 euros au titre de la prime de 13ème mois, de 1 098 euros à titre de dommages et intérêts pour le droit individuel à la formation et d'avoir dit que l'Ags devra sa garantie, dans les conditions prévues par les articles L. 3253-8 et suivants du code du travail, seulement en cas de défaillance de la société Amarante ;

AUX MOTIFS QUE […] le licenciement pour faute grave a été prononcé par la société Amarante par lettre du 29 novembre 2007 ; […] ; que le 15 janvier 2008, M. X... a saisi le conseil de prud'hommes ; que par jugement du 12 avril 2012, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de sauvegarde à l'égard de la société Amarante ; que par jugement du 16 juillet 2013, le tribunal de commerce de Paris a arrêté un plan de sauvegarde […] ; que sur la garantie de l'Ags, il résulte de l'article L. 3253-6 du code du travail que l'Ags a vocation à intervenir à compter de l'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire ; qu'il n'y a donc lieu de la mettre hors de cause comme elle le demande ; qu'elle devra sa garantie, dans les conditions prévues par les articles L. 3253-8 et suivants du code du travail, en cas seulement de défaillance de la société actuellement in bonis ;

ALORS QUE dans le cadre d'une procédure de sauvegarde ayant donné lieu à l'adoption d'un plan de sauvegarde, sont seules garanties par l'Ags les créances résultant de la rupture du contrat de travail intervenue pour un motif économique, dans le mois suivant le jugement qui a arrêté ledit plan ; qu'il était constant que M. X... avait été licencié le 13 novembre 2007 pour faute grave, qu'une procédure de sauvegarde avait été ouverte le 17 avril 2012 à l'égard de la société Amarante et qu'un plan de sauvegarde avait été arrêté le 16 juillet 2013 ; qu'il en résultait que la garantie de l'Ags Cgea n'était pas due du chef des créances litigieuses ; qu'en refusant de mettre hors de cause l'Ags et en décidant qu'elle devra sa garantie en cas de défaillance de la société employeur, la cour d'appel a violé l'article L. 625-3 du code de commerce, ensemble l'article L. 3253-8 du code du travail.
Moyen produit, au pourvoi incident, par Me Bertrand, avocat aux Conseils pour la société Actis, ès qualités

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société Amarante à payer à M. X... les sommes de 1. 346, 16 euros au titre de rappel de salaire pour la mise à pied conservatoire, outre 134, 61 euros pour les congés payés afférents, 6. 192, 50 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 619, 25 euros pour les congés payés afférents, 2. 167, 38 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, 2. 500 euros au titre de la prime de 13ème mois et 1. 098 euros à titre de dommages et intérêts pour le droit individuel à la formation ;

AUX MOTIFS QUE sur le rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire et les congés payés afférents : M. X... peut prétendre au paiement des salaires dont il a été privé au cours de la période de mise à pied conservatoire du 14 au 29 novembre 2007, soit au vu du bulletin de salaire du mois de novembre 2007, la somme de 1. 346, 16 euros, outre les congés payés afférents ; sur l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents : l'employeur plaide que le salarié ne peut prétendre qu'à deux mois de salaire brut de base ; cependant, en application de l'article L. 1234-5 du code du travail, l'indemnité de préavis doit correspondre à la rémunération que le salarié aurait perçue s'il avait continué à travailler pendant cette période, laquelle inclut notamment, au vu des bulletins de salaire, une " majoration 36 à 39 heures " et des primes d'ancienneté et de fidélité ; M. X... peut prétendre en l'occurrence à une indemnité de 6. 192, 50 euros, outre les congés payés afférents ; sur l'indemnité conventionnelle de licenciement : compte tenu de son ancienneté, M. X... peut prétendre à une indemnité de licenciement de 2. 167, 68 euros, somme justifiée et non contestée dans son quantum ; sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : l'existence d'un motif réel et sérieux justifiant le licenciement prive de fondement la demande qui sera rejetée ; sur la prime de 13ème mois : l'accord d'entreprise prévoit que l'assiette de calcul du 13ème mois est " constitué uniquement du salaire brut de base à l'exclusion de tous les autres éléments variables de rémunération " ; M. X... peut donc prétendre au versement de la somme de 2. 500 euros ; sur le DIF : selon l'article L. 6323-5 du code du travail, alors applicable, les droits acquis annuellement au titre du droit individuel à la formation peuvent être cumulés sur une durée de six ans et au terme de cette durée, et à défaut de son utilisation en tout ou partie, le droit reste plafonné à 120 heures ; M. X... peut donc prétendre, pour 120 heures acquises, à la somme de 1. 098 euros (120 h x 9, 15 euros-article D. 6332-87) à titre de dommages et intérêts (arrêt attaqué pp. 6-7) ;

ALORS QUE le jugement ouvrant la procédure de sauvegarde emporte interdiction de plein droit de payer toute créance née antérieurement au jugement d'ouverture et interrompt les actions en justice ; que la cour d'appel a constaté que, par jugement du 17 avril 2012, le tribunal de commerce de Paris avait ouvert une procédure de sauvegarde à l'égard de la société Amarante, cette société ayant ensuite bénéficié d'un plan de sauvegarde aux termes d'un jugement de ce même tribunal du 16 juillet 2013 ; qu'en condamnant la société Amarante à payer diverses sommes d'argent à M. X... au titre de son licenciement prononcé le 29 novembre 2007, soit avant le jugement d'ouverture, la cour d'appel, qui ne pouvait condamner la société Amarante, objet d'une procédure de sauvegarde, à payer un somme d'argent au titre de créances nées avant le jugement ayant ouvert la procédure de sauvegarde, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et violé les articles L. 622-7 et L. 622-21 du code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-14362
Date de la décision : 12/07/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 18 décembre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 jui. 2016, pourvoi n°15-14362


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Bertrand, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.14362
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