La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/06/2016 | FRANCE | N°15-21294

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 30 juin 2016, 15-21294


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été victime d'un accident de la circulation en Allemagne ; qu'elle a saisi une commission d'indemnisation des victimes d'infractions afin d'obtenir l'indemnisation de ses préjudices ;

Attendu que, pour allouer Ã

  Mme X... une certaine somme au titre du solde de la réparation de son préjudice corpor...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été victime d'un accident de la circulation en Allemagne ; qu'elle a saisi une commission d'indemnisation des victimes d'infractions afin d'obtenir l'indemnisation de ses préjudices ;

Attendu que, pour allouer à Mme X... une certaine somme au titre du solde de la réparation de son préjudice corporel, la cour d'appel a retenu que, pour la période postérieure au 22 avril 2007, celle-ci ne justifiait d'aucune perte de revenu, en observant que les pièces 92 à 100 de son dossier qu'elle produisait à l'appui de sa demande étaient indiquées comme manquantes ;

Qu'en statuant ainsi, sans inviter les parties à s'expliquer sur l'absence au dossier des pièces qui figuraient au bordereau annexé aux dernières conclusions de Mme X..., et dont la communication n'avait pas été contestée, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a alloué à Mme X... la somme de 9 565,96 euros au titre du solde de la réparation de son préjudice corporel, cette somme avec intérêts au taux légal à compter du jugement, l'arrêt rendu le 12 mars 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Laisse les dépens à la charge du trésor public ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente juin deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour Mme X...

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir limité au montant de 9565,96 euros le solde de la somme allouée à Madame X... en réparation de son préjudice corporel ;

AUX MOTIFS QUE – perte de gains professionnels actuelle – sous cet intitulé, sont examinées les demandes relatives aux pertes de revenus jusqu'à la consolidation, soit jusqu'au 31 août 2008 ; que Madame X... indique qu'elle a été en congé longue maladie à plein traitement du 20 novembre 2006 au 31 août 2007 mais que ce plein traitement ne lui a pas permis d'être rémunérée des HSA ni d'autres composantes de son traitement ; qu'elle évalue sa perte à la somme totale de 4.327,72 € jusqu'au 6 novembre 2007 puis à 1.302,42 € du 7 novembre 2007 au 31 août 2008 ; qu'il ressort de deux attestations du rectorat de l'académie de Versailles qu'entre le 6 novembre 2006 et le 22 avril 2007, Madame X... a subi une perte nette totale de 3.777,65 € ; que pour la période postérieure, elle ne justifie d'aucune perte, étant observé que les pièces 92 à 100 de son dossier sont indiquées comme étant manquantes ; que le préjudice est dès lors de 3.777,65 € - 10 % = 3.399,88 € dont il convient de déduire la somme de 789,60 € qui a été prise en charge par la MAIF au titre de la perte de revenus jusqu'au 13 mars 2007, soit un solde de 2.610,28 € ; permanents après consolidation ; - dépenses de santé futures ; qu'il n'est pas démontré que les séances de kinésithérapie dite "complémentaires" n'auraient pas été remboursées par la sécurité sociale dès lors qu'elles ont été prescrites ; qu'en revanche, pendant sa grossesse, Madame X... a dû se passer des médicaments antalgiques et anti inflammatoires ; qu'il lui a été prescrit pour améliorer ses douleurs un neurostimulateur qui étant une conséquence de l'accident doit être pris en charge, soit une somme de 310 € - 10 % = 279 € ; - incidence professionnelle ; que Madame X... fait valoir avoir subi un préjudice qu'elle évalue à la somme de 2.000 € en raison du fait qu'elle a été placée en mi-temps de formation payé à 85 % à compter du 1er septembre 2008 ; qu'elle ajoute qu'elle aurait dû faire l'objet peu après l'accident d'un rapport d'inspection destine à corriger un rapport de sanction du mois de mai 2006 dû à une erreur de prénom ; qu'elle a ainsi pris du retard dans sa progression de carrière qu'elle évalue à la somme de 81,831,06 € ; qu'elle indique en outre qu'elle a été contrainte de cesser de participer à un collectif de cinéma, à un ouvrage sur le féminisme et que le rythme de progression de sa thèse a été ralentie ; qu'elle chiffre ce préjudice à la somme de 6.000 € ; que, cependant, des pièces communiquées, il ressort que Madame X... demandait le bénéfice d'un congé de formation professionnelle depuis l'année 2000 ; que son obtention en septembre 2008 qui lui a permis de travailler sur sa thèse "Le féminin dans le cinéma de Georges Cukor de 1950 à 1981", est en conséquence sans rapport avec l'accident ; que, le 9 mai 2006, Madame X... a fait l'objet, à sa demande, d'une inspection qui a été effectuée par Madame Y... et dont le résultat a été considéré par l'inspectrice comme insuffisant ; que le courriel que Madame X... lui a adressé postérieurement afin de réclamer un rendez-vous, ne permet pas d'admettre que Madame X... aurait été confondue avec une homonyme ; qu'en effet, le 28 juin 2006, Madame X... avait écrit : Suite à votre visite du 9 mai 2006 et à notre entretien, vous aviez demandé à me revoir avant la fin de l'année scolaire en vue finaliser mon rapport d'inspection. J'ai bien reçu votre rapport de visite et j'en ai pris note, mais je souhaiterais pouvoir revenir avec vous sur certains points à propos desquels j'aurais besoin de précisions. [...] ; qu'elle avait essuyé une fin de non recevoir, l'inspectrice lui ayant répondu : Le rapport de visite a été fait pour vous aider pédagogiquement et pour remédier aux problèmes que vous avez rencontrés lors de la séance à laquelle j'ai assisté avec Madame le Proviseur. J'ai considéré au vu de cette séance et de l'entretien que vous n 'étiez pas au mieux de vous-même, voire perturbée, connue vous me l'avez dit, par les perspectives de votre mutation éventuelle. De ce fait, je vous ai fait bénéficier d'un rapport de visite afin d'éviter le maintien de note qu'aurait légitimé le travail très insuffisant auquel j'ai assisté. […] ; que s'il est exact que l'inspectrice a précisé qu'elle reviendrait procéder à une inspection soit fin 2006, soit début 2007, ni les éléments rappelés ci-dessus, ni les notes pédagogiques obtenues les années antérieures et identiques à celle de l'année 2005/2006, ne permettent d'affirmer que cette inspection aurait été favorable et aurait permis à Madame X... d'obtenir son avancement plus rapidement qu'elle ne l'a effectivement obtenu ; que le fait que le collectif auquel elle participait, a souhaité l'exclure du groupe n'est pas en lien de causalité avec l'accident, tout comme le conflit qui l'a opposée aux coauteurs d'un ouvrage sur le féminisme ; qu'enfin, il n'est démontré ni que le rythme de progression de sa thèse, deux fois plus longue que ne le sont d'ordinaire les thèses, a été ralenti de façon significative, ni qu'elle aurait été en mesure d'obtenir une meilleure appréciation si l'accident ne s'était pas produit ; que les demandes présentées au titre de l'incidence professionnelle sont en conséquence rejetées ; Préjudices extra-patrimoniaux ; temporaires avant consolidation ; - déficit fonctionnel temporaire ; que l'incapacité fonctionnelle totale ou partielle subie par la victime durant la maladie traumatique pour la période antérieure la date de consolidation ainsi que sa perte de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante et la privation de ses activités privées souffertes durant cette même période sont indemnisées par la somme offerte de 4.853 € - 10 % = 4.367,70 € ; - souffrances ; qu'elles sont caractérisées par le traumatisme initial et les traitements subis, cotées à 2,5/7, qu'elles sont indemnisées par l'allocation de la somme de 4.000 € - 10 % = 3.600 € ; permanents après consolidation ; - déficit fonctionnel permanent ; que les séquelles constatées par l'expert ci-dessus décrites, justifiant un taux de déficit fonctionnel permanent de 5 % sont indemnisées par la somme de 7.500,00 € - 10 % = 6.750 € ; - préjudice d'agrément ; qu'il est alloué la somme de 2.000 € - 10 % = 1.800 € ; qu'il revient en conséquence à Madame X... en réparation de son préjudice corporel la somme totale de 19.491,76 € dont il y a lieu de déduire les provisions versées de 2.000 € et 4.401,80 € sur lesquelles les parties sont d'accord ; que l'article 706-9 du code de procédure pénale dispose que la commission tient compte des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d'autres débiteurs au titre du même préjudice ; que, dès lors, doit être déduite la somme de 3.524 € qui revient à la victime au titre de son contrat Praxis, peu important que la MAIF exerce un recours auprès de l'assureur du véhicule impliqué, ce recours n'ayant pas pour conséquence le remboursement par l'assurée de la somme perçue ; que le solde revenant à Madame X... est en conséquence de 9.565,96 € ;

1°) ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en fixant à la somme de 3.777,65 € la perte de gains professionnels actuelle, motif pris que pour la période postérieure au 22 avril 2007, Madame X... « ne justifie d'aucune perte, étant observé que les pièces 92 à 100 de son dossier sont indiquées comme manquantes », sans inviter les parties à s'expliquer sur l'absence au dossier de ces pièces, qui figuraient au bordereau de pièces annexé aux dernières conclusions de Madame X..., et dont la communication n'avait pas été contestée, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE l'indemnité allouée aux victimes d'infractions doit être calculée suivant les règles du droit commun de la responsabilité ; que la subrogation ne peut nuire à la victime subrogeante, créancière de l'indemnisation, lorsqu'elle n'a été indemnisée qu'en partie ; qu'en ce cas, elle peut exercer ses droits contre le responsable pour ce qui lui reste dû, par préférence au tiers payeur dont elle n'a reçu qu'une indemnisation partielle ; qu'il en résulte que dans le cas d'une limitation du droit à indemnisation de la victime, son droit de préférence sur la dette du tiers responsable implique que son préjudice doit être intégralement réparé, dans la mesure de l'indemnité laissée à la charge du tiers responsable, et que seul le solde peut, le cas échéant, être accordé au tiers payeur ; que la créance de l'assureur de la victime doit donc être imputée sur le montant de l'indemnité réparant chaque chef de préjudice avant l'application de la limitation du droit à indemnisation résultant du partage de responsabilité ; qu'en décidant qu'il convient de déduire la somme de 789,60 euros, prise en charge par la MAIF, sur le montant du préjudice de perte de gains professionnels actuelle fixé après réduction au titre du partage de responsabilité, la cour d'appel a violé, les articles 31 alinéa 2 de la loi du 5 juillet 1985 et L. 376-1 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction issue de la loi du 21 décembre 2006, ensemble l'article 706-9 du code de procédure pénale et l'article 1252 du code civil ;

3°) ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motif ; qu'en l'espèce Madame X... faisait valoir, dans ses conclusions récapitulatives d'appel (p. 6), qu'elle n'avait pas accepté les conclusions du rapport d'expertise du Docteur Z..., pas plus que la proposition d'indemnisation amiable qui lui était faite par la MAIF le 27 novembre 2007; qu'en se bornant à relever que doit être déduite la somme de 3524 euros qui revient à la victime au titre du contrat Praxis, peu important que la MAIF exerce un recours auprès de l'assureur du véhicule impliqué, ce recours n'ayant pas pour conséquence le remboursement par l'assurée de la somme perçue, sans répondre aux conclusions de Madame X... qui faisait valoir qu'elle avait refusé cette offre, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

4°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE selon l'article 706-9 du code de procédure pénale il faut tenir compte des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d'autres débiteurs au titre du même préjudice ; que les dispositions de l'article 31 de la loi du 5 juillet 1985, modifiées par l'article 25 IV de la loi du 21 décembre 2006, prévoient que le recours des tiers payeurs s'exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent les préjudices qu'ils ont pris en charge ; qu'en imputant la somme de 3524 euros revenant, selon elle, à la victime au titre de son contrat Praxis sur la somme totale de son préjudice corporel et non sur le poste de préjudice indemnisé par cette somme, la cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article 31 de la loi n° 85677 du 5 juillet 1985, dans sa rédaction issue de l'article 25 de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006, ensemble l'article 706-9 du code de procédure pénale ;

5°) ALORS QU'en rejetant la demande d'indemnisation de Madame X... au titre de l'incidence professionnelle, motif pris qu'il n'est démontré « ni que le rythme de progression de sa thèse, deux fois plus longue que ne le sont d'ordinaire les thèses, a été ralenti de façon significative, ni qu'elle aurait été en mesure d'obtenir une meilleure appréciation si l'accident ne s'était pas produit » (arrêt attaqué p. 6 in fine), après avoir pourtant constaté que les séquelles de l'accident sont constituées de « céphalées résiduelles, d'une discrète fatigabilité et d'un léger manque à la concentration » (arrêt attaqué p. 4 in fine) ainsi que d'un préjudice d'agrément concernant la rédaction de livres (arrêt attaqué p. 5), la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 706-3 du code de procédure pénale, ensemble le principe de la réparation intégrale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 15-21294
Date de la décision : 30/06/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 12 mars 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 30 jui. 2016, pourvoi n°15-21294


Composition du Tribunal
Président : M. Savatier (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Ortscheidt

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.21294
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award