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21/06/2016 | FRANCE | N°14-25344

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 21 juin 2016, 14-25344


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Ecolab USA Inc. (la société Ecolab) a fait opposition, sur le fondement de la marque verbale internationale « Ecolab » désignant l'Union européenne, déposée le 6 avril 2009, sous priorité d'un dépôt allemand du 26 novembre 2008, et enregistrée sous le n° 1005780, à la demande d'enregistrement en tant que marque du signe « Kairos Ecolab », déposée le 23 novembre 2012 auprès de l'Institut national de la propriété industrielle (l'INPI) par la sociÃ

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Sur le second moyen, p...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Ecolab USA Inc. (la société Ecolab) a fait opposition, sur le fondement de la marque verbale internationale « Ecolab » désignant l'Union européenne, déposée le 6 avril 2009, sous priorité d'un dépôt allemand du 26 novembre 2008, et enregistrée sous le n° 1005780, à la demande d'enregistrement en tant que marque du signe « Kairos Ecolab », déposée le 23 novembre 2012 auprès de l'Institut national de la propriété industrielle (l'INPI) par la société Kairos ; que ce dernier a rejeté cette opposition ;
Sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle ;
Attendu qu'il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) qu'un risque de confusion peut exister dans l'esprit du public, en cas d'identité des produits ou des services, lorsque le signe contesté est constitué au moyen de la juxtaposition, d'une part, de la dénomination de l'entreprise du tiers et, d'autre part, d'une marque enregistrée, dotée d'un pouvoir distinctif normal, et que celle-ci, sans créer à elle seule l'impression d'ensemble du signe composé, conserve dans ce dernier une position distinctive autonome (CJUE, 6 octobre 2005, Médion, C-120/04 ; Perfetti Van Melle/OHMI, C-353/09, point 36), de sorte que la conservation de cette position distinctive n'est pas nécessairement subordonnée à la renommée de cette marque ;
Attendu que pour rejeter le recours formé par la société Ecolab contre la décision du directeur général de l'INPI, l'arrêt retient que la seule reprise de la marque verbale antérieure dans le signe contesté, et quand bien même les produits couverts par les signes opposés seraient identiques ou similaires, ne suffit pas à établir un risque de confusion dans la mesure où il n'est pas établi que la marque antérieure jouit d'une renommée particulière qui permettrait au terme Ecolab de conserver, dans le signe contesté, une position distinctive autonome ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur ce moyen, pris en sa seconde branche :
Vu l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle ;
Attendu qu'il résulte de la jurisprudence de la CJUE qu'un élément d'un signe composé ne conserve pas une telle position distinctive autonome si cet élément forme avec le ou les autres éléments du signe, pris ensemble, une unité ayant un sens différent par rapport au sens desdits éléments pris séparément (CJUE, 8 mai 2014, Bimbo/OHMI, C-591/12, point 25 ; Becker/Harman International Industries, C-51/09, points 37 et 38), de sorte que la constatation de l'existence d'un risque de confusion n'est pas subordonnée à la condition que l'impression d'ensemble produite par le signe composé soit dominée par la partie de celui-ci constituée par la marque antérieure ;
Attendu que pour rejeter le recours de la société Ecolab, l'arrêt retient encore que l'attention du consommateur sera davantage portée sur le terme Kairos, lequel, composé de la lettre d'attaque K et de la sonorité Os, peu communes dans la langue française, fantaisiste pour désigner les produits et services en cause et placé en position d'attaque, présente un caractère distinctif et dominant ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le premier moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 mai 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Kairos aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Ecolab USA Inc. ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un juin deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils, pour la société Ecolab USA Inc..
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté le recours formé par la société Ecolab USA Inc. à l'encontre de la décision rendue le 8 août 2013 par le directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle ;
AUX ENONCIATIONS QUE « le dossier a préalablement été transmis au Ministère Public, représenté lors des débats par M.Hugues WOIRHAYE, Avocat Général, qui a fait connaître son avis » ;
ALORS QU'en procédant ainsi, sans préciser si le ministère public avait déposé des conclusions écrites préalablement à l'audience et, si tel avait été le cas, sans constater que la société Ecolab USA Inc. en avait reçu communication afin d'être en mesure d'y répondre utilement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'Homme et 16 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté le recours formé par la société Ecolab USA Inc. à l'encontre de la décision rendue le 8 août 2013 par le directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle ;
AUX MOTIFS QUE « sur la comparaison des signes, la marque antérieure porte sur le signe verbal "Ecolab", présenté en lettres majuscules d'imprimerie droites et noires ; que la demande d'enregistrement litigieuse porte sur le signe verbal "Kairos Ecolab", présenté en lettres majuscules d'imprimerie droites et noires ; que le signe critiqué ne constituant pas la reproduction à l'identique de la marque première qui lui est opposé, il convient de rechercher s'il n'existe pas entre les deux signes un risque de confusion (lequel comprend le risque d'association) qui doit être apprécié globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce ; que cette appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique et conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l'impression d'ensemble produite par celles-ci en tenant compte de leurs éléments distinctifs et dominants ; qu'en outre, un faible degré de similitude entre les produits et services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les signes et inversement ; que, visuellement, les deux signes opposés ne présentent ni la même structure ni la même longueur ; que si les deux signes ont en commun le terme "Ecolab", force est de constater qu'ils se distinguent visuellement dès lors que la marque antérieure n'est constituée que de cet élément court, tandis que le signe contesté est composé de deux éléments, le terme "Ecolab" étant précédé du terme "KAIROS" ; que, phonétiquement, les deux signes seront prononcés selon un rythme différent, le signe critiqué présentant une prononciation en cinq syllabes et la marque antérieure une prononciation en trois syllabes ; que, par ailleurs, si les deux signes en cause ont phonétiquement en commun le terme "Ecolab", ceux-ci présentent des sonorités d'attaque distinctes ; que conceptuellement, le signe critiqué "Kairos Ecolab" et la marque antérieure "Ecolab" seront appréhendés différemment par le consommateur, le premier renvoyant à un laboratoire écologique précisément identifié : le "laboratoire écologique Kairos", la seconde étant quant à elle seulement un néologisme construit à partir des termes "Eco" et "Lab", lesquels constituent des abréviations connues des mots "écologie" et "laboratoire" ; qu'en outre, la seule reprise de la marque verbale antérieure dans le signe contesté, et quand bien même les produits couverts par les signes opposés seraient identiques ou similaires, ne suffit pas à établir un risque de confusion dans la mesure où il n'est pas établi que la marque antérieure jouit d'une renommée particulière qui permettrait au terme "Ecolab" de conserver, dans le signe contesté, une position distinctive autonome ; que l'attention du consommateur sera davantage portée sur le terme "Kairos" lequel, composé des lettres d'attaque "K" et sonorité "OS" peut communes dans la langue française, fantaisiste pour désigner les produits et services en cause et placé en position d'attaque, présente un caractère distinctif dominant ; qu'il résulte de l'analyse globale ainsi menée qu'en dépit de l'identité ou de la similarité des produits et services couverts par les marques opposées, le consommateur ne pourra se méprendre sur l'origine respective des produits et services en cause, tans sont distincts la construction, la prononciation et la perception des signes opposés ; qu'il ne sera pas conduit à penser qu'ils proviennent d'une même entreprise ou d'entreprises liées économiquement ; que par conséquent, en l'absence de risque de confusion dans l'esprit du consommateur, doit être rejeté le recours formé à l'encontre de la décision rendue par le Directeur général de l'INPI » ;
ALORS, D'UNE PART, QU'un risque de confusion peut exister dans l'esprit du public, en cas d'identité ou de similarité des produits ou des services, lorsque le signe contesté est constitué au moyen de la juxtaposition, d'une part, de la dénomination de l'entreprise du tiers et, d'autre part, de la marque enregistrée, dotée d'un pouvoir distinctif normal, et que celle-ci, sans créer à elle seule l'impression d'ensemble du signe composé, conserve dans ce dernier une position distinctive autonome ; que le risque de confusion n'est pas alors subordonné à la renommée de la marque antérieure ; qu'en retenant, en l'espèce, pour exclure tout risque de confusion entre la marque antérieure Ecolab et le signe composé contesté Kairos Ecolab, qu' « il n'est pas établi que la marque antérieure jouit d'une renommée particulière qui permettrait au terme "Ecolab" de conserver, dans le signe contesté, une position distinctive autonome » (cf. arrêt, p. 6, § 2), la cour d'appel, qui a ainsi subordonné l'existence d'un risque de confusion à la renommée de la marque antérieure, a violé l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle tel qu'il doit s'interpréter à la lumière de la directive n° 2008/95/CE du Parlement et du Conseil du 22 octobre 2008 rapprochant les législations des Etats membres sur les marques ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'un risque de confusion peut exister dans l'esprit du public, en cas d'identité ou de similarité des produits ou des services, lorsque le signe contesté est constitué au moyen de la juxtaposition, d'une part, de la dénomination de l'entreprise du tiers et, d'autre part, de la marque enregistrée, dotée d'un pouvoir distinctif normal, et que celle-ci, sans créer à elle seule l'impression d'ensemble du signe composé, conserve dans ce dernier une position distinctive autonome ; que le risque de confusion n'est pas alors subordonné à la condition que l'impression d'ensemble produite par le signe composé soit dominée par la partie de celui-ci constituée par la marque antérieure et ne peut être exclu à raison du caractère dominant de la dénomination de l'entreprise du tiers ; qu'en retenant, en l'espèce, pour exclure tout risque de confusion entre la marque antérieure Ecolab et le signe composé contesté Kairos Ecolab, que le terme Kairos présente un caractère distinctif et dominant, la cour d'appel a violé l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle tel qu'il doit s'interpréter à la lumière de la directive n° 2008/95/CE du Parlement et du Conseil du 22 octobre 2008 rapprochant les législations des Etats membres sur les marques.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 14-25344
Date de la décision : 21/06/2016
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

PROPRIETE INDUSTRIELLE - Marques - Protection - Contrefaçon - Contrefaçon par reproduction - Risque de confusion - Conditions - Impression produite par le signe composé dominée par la marque antérieure (non)

Dans la mesure où il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE, 8 mai 2014, Bimbo/OHMI, C-591/12, point 25 ; Becker/Harman International Industries, C-51/09, points 37 et 38) qu'un élément d'un signe composé ne conserve pas une telle position distinctive autonome si cet élément forme avec le ou les autres éléments du signe, pris ensemble, une unité ayant un sens différent par rapport au sens des dits éléments pris séparément, de sorte que la constatation de l'existence d'un risque de confusion n'est pas subordonnée à la condition que l'impression d'ensemble produite par le signe composé soit dominée par la partie de celui-ci constituée par la marque antérieure, méconnaît les dispositions de l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle l'arrêt qui, pour rejeter le recours formé contre la décision du directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle, retient que l'attention du consommateur sera davantage portée sur l'un des termes de la marque litigieuse qui, composé d'une lettre d'attaque et d'une sonorité peu communes dans la langue française, fantaisiste pour désigner les produits et services en cause et placé en position d'attaque, présente un caractère distinctif et dominant


Références :

Sur le numéro 1 : article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 30 mai 2014

n° 1 :Sur la caractérisation d'un risque de confusion en présence d'un signe composé, cf. :CJUE, 6 octobre 2005, Médion, C-120/04 ;

CJUE, 15 février 2011, Perfetti Van Melle/OHMI, C-353/09n° 2 :Sur l'appréciation de la position distincte autonome d'un élément d'un signe composé, cf. :CJUE, 8 mai 2014, Bimbo/OHMI, C-591/12 ; CJUE, 24 juin 2010, Becker/Harman International Industries, C-51/09


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 21 jui. 2016, pourvoi n°14-25344, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Riffault-Silk (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : M. Mollard
Rapporteur ?: M. Sémériva
Avocat(s) : SCP Hémery et Thomas-Raquin

Origine de la décision
Date de l'import : 14/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.25344
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