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14/06/2016 | FRANCE | N°14-28995

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 14 juin 2016, 14-28995


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 16 octobre 2014), que, par un jugement du 14 mai 2013, le tribunal de grande instance de Lyon a mis M. X..., avocat au barreau de cette ville, en redressement judiciaire, cette procédure collective étant convertie en liquidation judiciaire le 14 janvier 2014 ; que, par un jugement du 11 février suivant, le tribunal a désigné le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Lyon pour accomplir les actes professionnels au lieu et place de M. X... ; que celui-ci a formé ap

pel contre les jugements des 14 janvier et 11 février 2014 d...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 16 octobre 2014), que, par un jugement du 14 mai 2013, le tribunal de grande instance de Lyon a mis M. X..., avocat au barreau de cette ville, en redressement judiciaire, cette procédure collective étant convertie en liquidation judiciaire le 14 janvier 2014 ; que, par un jugement du 11 février suivant, le tribunal a désigné le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Lyon pour accomplir les actes professionnels au lieu et place de M. X... ; que celui-ci a formé appel contre les jugements des 14 janvier et 11 février 2014 devant la cour d'appel de Lyon qui, à sa demande, a, par deux arrêts du 24 avril 2014, renvoyé les deux affaires devant la cour d'appel de Grenoble ; que l'arrêt attaqué a joint les affaires, rejeté la demande de renvoi devant la cour d'appel de Lyon et confirmé les décisions déférées ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de statuer ainsi alors, selon le moyen :
1°/ qu'il avait soutenu que le jugement de liquidation judiciaire prononcé brutalement le 14 janvier 2014 par le tribunal de grande instance de Lyon, pendant la période pourtant prorogée d'observation, et qui emportait de plein droit son dessaisissement, la perte immédiate de son activité et sa « mort professionnelle », produisait ainsi les mêmes effets qu'une radiation, de sorte qu'il constituait une sanction disciplinaire déguisée ; qu'il avait souligné que le caractère sanctionnateur de cette décision était d'autant plus avéré que, le jugement ne lui ayant été signifié que le 28 février 2014, il était impossible que la cour d'appel statue au fond dans les quatre mois suivant le prononcé de ce jugement ; que pour rejeter ce moyen, la cour d'appel s'est bornée à retenir qu'il ne pouvait s'agir d'une sanction disciplinaire déguisée dès lors que la décision visée était un jugement de liquidation intervenu consécutivement à une cessation des paiements et une impossibilité de présenter un plan de redressement ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, nonobstant la nature de cette décision, son caractère brutal, alors que la période d'observation avait été prolongée par le tribunal lui-même jusqu'au 14 mai 2014, et ses effets radicaux sur la vie professionnelle de M. X..., ne permettaient pas de l'assimiler à une sanction disciplinaire déguisée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 12, alinéa 2, du code de procédure civile et 184 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 ;
2°/ que les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense, le juge devant, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction dont le respect constitue, pour toute personne, un droit fondamental à caractère constitutionnel ; que le tribunal ne peut convertir le redressement judiciaire en liquidation judiciaire qu'après avoir recueilli l'avis du ministère public, lequel doit être communiqué en temps utile aux parties ; qu'en l'espèce, la cour d'appel s'est bornée à constater que ce dernier avait requis le rejet des demandes de renvoi et de sursis à statuer et la confirmation des jugements déférés ; qu'en se déterminant ainsi, sans avoir constaté que cet avis avait été communiqué en particulier au débiteur en temps utile, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble des articles 15 et 16 du code de procédure civile ;
3°/ que l'appel des jugements rendus, en particulier en matière de liquidation judiciaire, doit être « formé, instruit et jugé » suivant les modalités de la procédure avec représentation obligatoire, « sous réserve » notamment que « la cour d'appel statue au fond dans les quatre mois suivant le prononcé des jugements mentionnés à l'article L. 661-6 » ; qu'en l'espèce, le jugement de liquidation et le jugement rectificatif sont intervenus, respectivement, le 14 janvier 2014 et le 11 février 2014 ; que, cependant, l'arrêt au fond n'a été rendu par la cour d'appel que le 16 octobre 2014 ; qu'en s'étant ainsi déterminée, en violation des exigences susvisées, la cour d'appel a violé l'article R. 661-6, 6°, du code de commerce ;
Mais attendu, d'une part, que c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu, sans avoir à effectuer la recherche invoquée par la première branche, que la conversion d'une procédure de redressement en liquidation judiciaire, lorsque cette procédure concerne un avocat, ne peut être assimilée à une sanction disciplinaire déguisée prononcée contre lui ;
Attendu, d'autre part, que le ministère public ayant, selon les constatations de l'arrêt, fait connaître son avis à l'audience sur la conversion en liquidation judiciaire, le débiteur, qui pouvait lui répondre dans les conditions de l'article 445 du code de procédure civile, ne peut se faire un grief de l'absence de communication préalable d'un avis écrit ; Et attendu, enfin, que le délai de quatre mois prévu par l'article R. 661-6, 6°, du code de commerce ne concerne pas l'appel des jugements de conversion d'une procédure de redressement en liquidation judiciaire et qu'au demeurant le non-respect de ce délai n'est pas sanctionné ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt, après jonction des procédures n° 14/ 2273 et 14/ 2277, de dire n'y avoir lieu à renvoi devant la cour d'appel de Lyon et à sursis à statuer, ni à annulation du jugement rectificatif du 11 février 2014, et de confirmer les jugements des 14 janvier et 11 février 2014 alors, selon le moyen, qu'en application de l'article 625, alinéa 2, du code de procédure civile, la cassation de l'arrêt attaqué sera prononcée par voie de conséquence de la cassation à intervenir de l'arrêt rendu le 26 juin 2014 par la cour d'appel de Lyon ayant confirmé la sanction disciplinaire de radiation, arrêt objet d'un pourvoi déposé le 1er juillet 2014 sous le n° Z 14-20. 134 ;
Mais attendu que la cassation, par un arrêt de la Cour de cassation (première chambre civile, 1er juillet 2015, pourvoi n° 14-20. 134), de l'arrêt de la cour d'appel de Lyon du 26 juin 2014 prononçant la radiation de M. X... n'a pas pour effet d'entraîner la cassation, par voie de conséquence, de l'arrêt confirmant la conversion de son redressement en liquidation judiciaire, qui est une décision indépendante de la radiation ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze juin deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Le Griel, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR, après jonction des procédures n° 14/ 2273 et 14/ 2277, dit n'y avoir lieu à renvoi devant la cour d'appel de Lyon et à sursis à statuer, ni à annulation du jugement rectificatif du 14 mai 2014, et D'AVOIR confirmé les jugements déférés en toutes leurs dispositions,
AUX MOTIFS QUE la procédure collective, qui est sans lien avec les faits déjà sanctionnés disciplinairement, ne peut être qualifiée de sanction déguisée alors qu'elle a été ouverte sur déclaration de cessation des paiements de M. X... et que la liquidation judiciaire a été prononcée sur constat de son impossibilité de présenter un plan de redressement par continuation après que le tribunal l'ait entendu en ses observations et pris connaissance des pièces communiquées ; que la demande de M. X... de renvoi devant la cour de Lyon sera rejetée, étant observé que la cour de Grenoble a été saisie sur sa demande et en application de l'article 47 du Code de procédure civile ;
1° ALORS QUE M. X... avait soutenu que le jugement de liquidation judiciaire prononcé brutalement le 14 janvier 2014 par le tribunal de grande instance de Lyon, pendant la période pourtant prorogée d'observation, et qui emportait de plein droit son dessaisissement, la perte immédiate de son activité et sa « mort professionnelle », produisait ainsi les mêmes effets qu'une radiation, de sorte qu'il constituait une sanction disciplinaire déguisée ; qu'il avait souligné que le caractère sanctionnateur de cette décision était d'autant plus avéré que, le jugement ne lui ayant été signifié que le 28 février 2014, il était impossible que la cour statue au fond dans les quatre mois suivant le prononcé de ce jugement ; que pour rejeter ce moyen, la cour s'est bornée à retenir qu'il ne pouvait s'agir d'une sanction disciplinaire déguisée dès lors que la décision visée était un jugement de liquidation intervenu consécutivement à une cessation des paiements et une impossibilité de présenter un plan de redressement ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, nonobstant la nature de cette décision, son caractère brutal, alors que la période d'observation avait été prolongée par le tribunal lui-même jusqu'au 14 mai 2014, et ses effets radicaux sur la vie professionnelle de M. X..., ne permettaient pas de l'assimiler à une sanction disciplinaire déguisée, la cour a privé sa décision de base légale au regard des articles 12 alinéa 2 du Code de procédure civile et 184 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 ;
2° ALORS QUE les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense, le juge devant, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction dont le respect constitue, pour toute personne, un droit fondamental à caractère constitutionnel ; que le tribunal ne peut convertir le redressement judiciaire en liquidation judiciaire qu'après avoir recueilli l'avis du ministère public, lequel doit être communiqué en temps utile aux parties ; qu'en l'espèce, la cour s'est bornée à constater que ce dernier avait requis le rejet des demandes de renvoi et de sursis à statuer et la confirmation des jugements déférés ; qu'en se se déterminant ainsi, sans avoir constaté que cet avis avait été communiqué en particulier au débiteur en temps utile, la cour a privé sa décision de base légale au regard des articles 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble des articles 15 et 16 du code de procédure civile ;
3° ALORS QUE l'appel des jugements rendus, en particulier en matière de liquidation judiciaire, doit être « formé, instruit et jugé » suivant les modalités de la procédure avec représentation obligatoire, « sous réserve » notamment que « la cour d'appel statue au fond dans les quatre mois suivant le prononcé des jugements mentionnés à l'article L. 661-6 » ; qu'en l'espèce, le jugement de liquidation et le jugement rectificatif sont intervenus, respectivement, le 14 janvier 2014 et le 11 février 2014 ; que, cependant, l'arrêt au fond n'a été rendu par la cour d'appel que le 16 octobre 2014 ; qu'en s'étant ainsi déterminée, en violation des exigences susvisées, la cour a violé l'article R. 661-6 6° du Code de commerce.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR, après jonction des procédures n° 14/ 2273 et 14/ 2277, dit n'y avoir pas lieu à renvoi devant la cour d'appel de Lyon et à sursis à statuer, ni à annulation du jugement rectificatif du 14 mai 2014, et D'AVOIR confirmé les jugements déférés en toutes leurs dispositions,
ALORS QU'en application de l'article 625 alinéa 2 du code de procédure civile, la cassation de l'arrêt attaqué sera prononcée par voie de conséquence de la cassation à intervenir de l'arrêt rendu le 26 juin 2014 par la cour d'appel de Lyon ayant confirmé la sanction disciplinaire de radiation, arrêt objet d'un pourvoi déposé le 1er juillet 2014 sous le n° Z 14-20. 134.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 14-28995
Date de la décision : 14/06/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 16 octobre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 14 jui. 2016, pourvoi n°14-28995


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Le Griel

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.28995
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