LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Multi techniques France (la société MTF), assurée auprès de la société Generali IARD (la société Generali), est locataire d'un immeuble dans lequel elle exerce une activité de traitement des eaux de piscine durant l'été et une activité de location d'appartements à l'année dans la partie des locaux qui ne sont pas réservés à son activité commerciale ; qu'un incendie a pris naissance dans un appartement occupé par M. X..., locataire assuré auprès de la société AGF, devenue Allianz, le 2 décembre 2008 ; que la société MTF a fait assigner la société Generali, M. X... et l'assureur de celui-ci afin d'être indemnisée des conséquences de ce sinistre ;
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 114-2 du code des assurances ;
Attendu que pour déclarer la société MTF irrecevable en ses demandes à l'encontre de la société Generali, l'arrêt retient que l'action qu'elle a engagée par "exploit des 11 juillet et 12 août 2014" à la suite d'un sinistre dont elle avait eu connaissance au plus tard le 6 décembre 2008, est prescrite par application de l'article L. 114-1 du code des assurances dès lors que la société MTF, qui invoque un "processus de tentative amiable", ne justifie d'aucune cause d'interruption au sens de l'article L. 114-2 de ce code ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la prescription biennale n'avait pas été interrompue par la désignation de plusieurs experts, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu que pour statuer comme il le fait l'arrêt retient que l'action a été engagée par acte des 11 juillet et 12 août 2014 ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'acte de signification de l'assignation délivrée à la société Generali portait la date du 11 août 2011, la cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis ;
Et sur le second moyen :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour débouter la société MTF de ses demandes à l'encontre de la société Allianz et de M. X..., l'arrêt retient qu'elle ne peut se prévaloir d'un préjudice de perte de loyers qui n'est que la conséquence d'un litige locatif, sans lien avec le sinistre, M. X... , logé dans un autre appartement, s'étant abstenu d'en payer le loyer, que la perte d'exploitation qui correspondrait à l'affectation à la remise en état des appartements et studios des sommes que la société avait prévu d'affecter à une campagne de publicité n'est justifiée par aucune pièce, que le premier juge a relevé à bon droit que l'indemnisation des dommages causés à l'installation électrique avait été versée au propriétaire des appartements qui avait procédé à la réfection totale de l'installation, que la société MTF ne peut se prévaloir d'un préjudice au titre des taxes et impositions qu'elle aurait dû de toute façon payer et qu'elle ne justifie pas d'un préjudice tenant à "l'immobilisation du gérant" ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la société MTF qui invoquait également un préjudice consécutif à l'impossibilité de relouer avant remise en état les appartements détériorés par l'incendie, au titre duquel elle sollicitait paiement de la somme de 2 197 euros, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
Dit n'y avoir lieu de mettre la société Generali IARD hors de cause ;
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 février 2015, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne M. X... et les sociétés Générali IARD et Allianz aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leurs demandes et les condamne à payer à la société Multi techniques France la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juin deux mille seize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils, pour la société Multi techniques France
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
La société Multi Techniques France fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable son action à l'encontre de la compagnie GENERALI IARD ;
AUX MOTIFS QUE l'action engagée par exploits des 11 juillet et 12 août 2014 à la suite d'un sinistre dont la SARL Multi Techniques France a eu connaissance au plus tard le 6 décembre 2008 est prescrite par application de l'article L. 114-1 du code des assurances qui dispose que toutes actions dérivant du contrat d'assurance sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance ; que la SARL Multi Techniques, qui invoque un « processus de tentative amiable » ne justifie d'aucune cause d'interruption de la prescription au sens de l'article L. 114-2 du code des assurances ;
1./ ALORS QUE la prescription biennale prévue par l'article L. 114-1 du code des assurances est interrompue par la désignation d'un expert ; que dès lors, en se bornant à énoncer, pour considérer que la prescription biennale était acquise et dire irrecevable son action à l'encontre de la compagnie Generali, que la société Multi Techniques France, qui invoquait un « processus de tentative amiable », ne justifiait d'aucune cause d'interruption de la prescription au sens de l'article L. 114-2 du code des assurances, sans rechercher, comme elle y était invitée, si plusieurs experts n'avaient pas été successivement désignés, circonstances de nature à interrompre la prescription, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de ce texte ;
2./ ALORS, en outre, QUE la société Multi Techniques France établissait avoir assigné la société Generali Assurances par acte signifié le 11 juillet 2011 ; que dès lors en énonçant, pour dire con action irrecevable car prescrite, qu'elle l'avait engagée par exploits des 11 juillet et 12 août 2014, la cour d'appel, qui a dénaturé l'acte de signification de l'assignation précitée, a violé l'article 4 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
La société Multi Techniques France fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de ses demandes à l'encontre de la société d'assurance Allianz et de M. X... ;
AUX MOTIFS QUE la SARL Multi Techniques France ne peut par ailleurs se prévaloir d'un préjudice de perte de loyers qui n'est en réalité que la conséquence d'un litige locatif, sans lien avec le sinistre, M. X..., logé dans un autre appartement s'étant simplement abstenu de régler le loyer ; que dans la mesure où la SARL Multi Techniques France n'a pas engagé une action en paiement de loyers devant un juge incompétent mais invoque un préjudice correspondant à une perte de loyers dans le cadre d'une action relevant de la compétence du tribunal de grande instance, le jugement déféré doit être infirmé en ce que le tribunal de grande instance s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance et la SARL Multi Techniques France doit être déboutée de cette demande ; que la perte d'exploitation, qui correspondrait à l'affectation à la remise en état des appartements et studios de sommes que la société avait prévu d'affecter à une campagne de publicité, n'est justifiée par aucune pièce, tant sur la réalité du projet que sur les conséquences financières alléguées ; que la SARL Multi Techniques soutient notamment que le défaut de publicité aurait entraîné un arrêt des ventes pour les années suivantes, sans toutefois l'établir par une quelconque pièce, la société ne produisant d'ailleurs en tout et pour tout sur le plan comptable que le bilan clôt le 31 décembre 2010 ; que la société d'assurance Allianz et M. Rolando X... arguent par ailleurs à bon droit de ce que la SARL Multi Techniques France ne peut se prévaloir d'un préjudice au titre des taxes, impositions et ordures ménagères qu'elle aurait dû de toute façon payer ; que la SARL Multi Techniques France invoque enfin un préjudice qui correspondrait à « l'immobilisation du gérant » qui n'est pas davantage justifié ;
ALORS QUE la société Multi Techniques France sollicitait l'octroi d'une somme de 2 197,00 € au titre du préjudice consécutif à l'impossibilité de relouer avant remise en état les appartements non détruits, mais détériorés par l'incendie ; que dès lors, en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.