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03/05/2016 | FRANCE | N°14-27960

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 03 mai 2016, 14-27960


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Aix-en-Provence, 6 novembre 2014, RG n° 13/ 16012), que, par ordonnances des 18 et 23 juillet 2013, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence a, sur le fondement de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, autorisé des agents des impôts à procéder à une visite et des saisies dans des locaux sis à Cabriès, Fuveau, Aix-en-Provence

et que, par ordonnance du 19 juillet 2013, le juge des libertés et de la ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Aix-en-Provence, 6 novembre 2014, RG n° 13/ 16012), que, par ordonnances des 18 et 23 juillet 2013, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence a, sur le fondement de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, autorisé des agents des impôts à procéder à une visite et des saisies dans des locaux sis à Cabriès, Fuveau, Aix-en-Provence et que, par ordonnance du 19 juillet 2013, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Toulon a, sur le même fondement, autorisé des agents des impôts à procéder à une visite et des saisies dans des locaux sis à Bandol, tous ces lieux étant susceptibles d'être occupés par les sociétés de droit luxembourgeois Barysud, Baya et Barylux, afin de rechercher la preuve de la fraude fiscale qu'elles auraient commise au regard de l'impôt sur les sociétés et de la taxe sur la valeur ajoutée ; que ces sociétés ont formé un recours contre le déroulement des opérations, effectuées le 23 juillet 2013 ;

Attendu que les sociétés Barysud, Baya et Barylux font grief à l'ordonnance de rejeter leur demande d'annulation de l'intégralité des opérations de visite et de saisies alors, selon, le moyen :

1°/ que l'administration fiscale ne peut appréhender que des documents et supports d'information se rapportant, au moins en partie, aux agissements visés par l'ordonnance judiciaire autorisant les opérations de visite et saisie domiciliaires, et ceci quelles que soient la nature et la forme de ces documents et supports d'information ; que, d'autre part, il appartient à la juridiction du premier président de la cour d'appel, saisie d'un recours contre le déroulement d'opérations de visite et de saisie, de contrôler que les pièces appréhendées entrent dans le cadre de l'autorisation donnée, par la confrontation de l'ordonnance d'autorisation et des pièces saisies ; qu'en se fondant seulement, quant à la question de savoir si les pièces appréhendées entraient dans le cadre de l'autorisation donnée, pour exclure que les opérations de visite et de saisie litigieuses aient été massives et indifférenciées, sur la mention, sur les procès-verbaux de visite et de saisie, par les agents de l'administration fiscale eux-mêmes qu'ils avaient constaté la présence, parmi les données accessibles à partir des ordinateurs qui se trouvaient dans les lieux visités, de documents entrant dans le champ de l'autorisation, sans contrôler elle-même que les fichiers appréhendés par l'administration fiscale entraient dans le cadre de l'autorisation donnée, par la confrontation de l'ordonnance d'autorisation et des fichiers saisis, la juridiction du premier président de la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales et les stipulations de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

2°/ que l'administration fiscale ne peut appréhender que des documents et supports d'information se rapportant, au moins en partie, aux agissements visés par l'ordonnance judiciaire autorisant les opérations de visite et saisie domiciliaires, et ceci quelles que soient la nature et la forme de ces documents et supports d'information et quand bien même ces documents ou supports d'information seraient indivisibles ou insécables ; qu'il en résulte qu'il appartient à l'administration fiscale de trouver les moyens, si elle entend saisir des documents figurant sur un support d'information indivisible ou insécable, de ne saisir que les documents figurant sur un tel support d'information se rapportant, au moins en partie, aux agissements visés par l'ordonnance judiciaire autorisant les opérations de visite et saisie domiciliaires ; qu'en déboutant, dès lors, la société Barysud, la société Baya et la société Barylux de leur demande d'annulation totale des opérations de visite et de saisie litigieuses et en ne faisant que partiellement droit à leur demande d'annulation, d'inopposabilité et de destruction d'éléments saisis, après avoir relevé que les fichiers de messagerie électronique avaient été saisis dans leur totalité en raison de leur caractère indivisible et insécable, la juridiction du premier président de la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales et les stipulations de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

3°/ qu'il appartient à l'officier de police judiciaire présent lors des opérations de visite et de saisie de veiller spontanément au respect du secret professionnel et des droits de la défense, même en l'absence de difficulté étant apparue pendant le cours des opérations et même en l'absence de remarque formulée par l'occupant des lieux ou par son représentant ; qu'en énonçant, par conséquent, pour écarter le moyen tiré de la passivité de l'officier de police judiciaire lors des opérations de visite et de saisie litigieuses, qu'il résultait du procès-verbal de saisie qu'aucune difficulté n'était apparue pendant le cours des opérations qui aurait nécessité l'intervention spécifique de l'officier de police judiciaire et que les représentants des occupants des lieux n'avaient formulé aucune remarque avant de signer les procès-verbaux, la juridiction du premier président de la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales et les stipulations de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

4°/ que l'inventaire des pièces et documents saisis doit être signé par les agents de l'administration des impôts, par l'officier de police judiciaire, par l'occupant des lieux ou son représentant, et, en cas d'impossibilité, par deux témoins ; qu'en écartant, dès lors, le moyen tiré de l'irrégularité des inventaires, après avoir relevé que les inventaires des fichiers informatiques saisis figuraient sur des CD qui ne portaient que les paraphes, et non les signatures, des parties présentes, la juridiction du premier président de la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales et les stipulations de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

5°/ que l'administration fiscale a l'obligation de dresser un inventaire des pièces et documents saisis ; qu'en écartant, par conséquent, le moyen tiré de l'irrégularité des inventaires, après avoir relevé que la liste des courriels contenus dans les fichiers de messagerie saisis n'apparaissait pas dans les inventaires des fichiers saisis figurant sur les CD annexés aux procès-verbaux des opérations, la juridiction du premier président de la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales et les stipulations de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

6°/ qu'il ne peut être exigé du demandeur au recours exercé contre le déroulement des opérations de visite et de saisie, qui entend faire statuer sur des pièces le concernant, d'identifier et de produire les pièces dont il conteste la saisie que s'il a été mis à même de le faire par l'établissement complet d'un inventaire des pièces saisies ; qu'en énonçant, dès lors, pour ne faire que partiellement droit à la demande d'annulation, d'inopposabilité et de destruction d'éléments saisis de la société Barysud, de la société Baya et de la société Barylux, qu'elles se contentaient d'une demande générale d'annulation des fichiers ayant trait à des correspondances privées, confidentielles et hors du champ de l'autorisation et qu'il ne pouvait être fait droit à une telle demande en l'absence de toute indication précise et production de chaque pièce concernée, quand elle avait relevé que la liste des courriels contenus dans les fichiers de messagerie saisis n'apparaissait pas dans les inventaires des fichiers saisis figurant sur les CD annexés aux procès-verbaux des opérations, la juridiction du premier président de la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales et les stipulations de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

7°/ qu'il ne peut donc être exigé du demandeur au recours exercé contre le déroulement des opérations de visite et de saisie, qui entend faire statuer sur des pièces le concernant, d'identifier et de produire les pièces dont il conteste la saisie que s'il a été mis à même de le faire ; qu'en énonçant, dès lors, pour ne faire que partiellement droit à la demande d'annulation, d'inopposabilité et de destruction d'éléments saisis de la société Barysud, de la société Baya et de la société Barylux, qu'elles se contentaient d'une demande générale d'annulation des fichiers ayant trait à des correspondances privées, confidentielles et hors du champ de l'autorisation et qu'il ne pouvait être fait droit à une telle demande en l'absence de toute indication précise et production de chaque pièce concernée, sans constater que, contrairement à ce que prétendaient la société Barysud, la société Baya et la société Barylux, ces dernières avaient été bénéficiaires, de la part de l'administration fiscale, de la restitution des CD sur lesquels figurait la liste des fichiers saisis, avec accès aux fichiers et messages, et donc avaient été matériellement mises en mesure de déterminer quels documents informatiques avaient été saisis et quels étaient la nature et le contenu de ces documents, la juridiction du premier président de la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales et les stipulations de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Mais attendu, en premier lieu, que contrairement à ce que postule la première branche, s'il appartient au premier président de la cour d'appel, saisi d'un recours contre les opérations de visite et de saisie arguant que les pièces appréhendées n'entraient pas dans le cadre de l'autorisation donnée, de procéder à cette vérification en confrontant les pièces et l'autorisation, encore faut-il que le demandeur précise et produise les pièces qui lui paraissent avoir été saisies illicitement ;

Attendu, en deuxième lieu, que contrairement à ce que soutient la deuxième branche, c'est à bon droit que le premier président a énoncé que lorsqu'un support de document est indivisible et insécable, l'administration est en droit d'appréhender tous les documents qui y sont contenus si certains d'entre eux se rapportent, au moins pour partie, à la fraude présumée et qu'il appartient ensuite aux demandeurs au recours de préciser et produire les éléments du fichier qui seraient insaisissables en indiquant la raison pour chacun des éléments concernés ;

Attendu, en troisième lieu, qu'ayant relevé qu'il résultait des procès-verbaux qu'aucune difficulté n'était apparue durant les opérations et que les parties intéressées n'avaient formulé aucune remarque avant la signature des procès-verbaux, c'est à bon droit que le premier président a retenu qu'il ne pouvait être reproché à l'officier de police judiciaire, tenu de veiller au respect du secret professionnel et des droits de la défense, d'être resté passif ;

Attendu, en quatrième lieu, qu'ayant relevé souverainement que les paraphes apposés sur les cédéroms non réinscriptibles comportant l'inventaire des fichiers saisis, annexés aux procès-verbaux, étaient ceux des personnes présentes ayant signé ces documents, le magistrat délégué a pu considérer que ces paraphes valaient signatures ;

Et, attendu, en dernier lieu, qu'après avoir énoncé que l'inventaire n'est soumis à aucune forme particulière et constaté que seule la saisie des fichiers informatiques était critiquée, l'ordonnance relève que, si la liste des courriels contenus dans les fichiers de messagerie saisis n'apparaissait pas dans l'inventaire, chacune de ces messageries avait été affectée, lors de sa saisie, d'une empreinte numérique permettant d'assurer son intégrité et d'identifier et éditer les courriels qu'elle contenait, cependant qu'une copie de l'inventaire de ces fichiers avait été effectuée sur des cédéroms non réinscriptibles, un exemplaire de chacun de ces supports étant remis au représentant des occupants des lieux ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, rendant inopérants les griefs des deux dernières branches, le premier président, qui a constaté que les demanderesses au recours se bornaient à former une demande générale de destruction et d'inopposabilité des fichiers ayant trait à des correspondances privées, confidentielles et hors du champ de l'autorisation des ordonnances, sans indiquer précisément ni produire les pièces concernées, a pu rejeter cette demande ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les sociétés Barysud, Baya et Barylux aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer au directeur général des finances publiques la somme globale de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trois mai deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Yves et Blaise Capron, avocat aux Conseils, pour les sociétés Barysud, Baya, Barylux

Le pourvoi fait grief à l'ordonnance attaquée D'AVOIR débouté la société Barysud, la société Barylux et la société Baya de leur demande d'annulation de l'intégralité des opérations de visite et de saisie diligentées le 23 juillet 2013 à Bandol, à Cabriès, à Fuveau et à Aix-en-Provence et de leur demande d'annulation, d'inopposabilité et de destruction des éléments saisis lors des opérations de visite et de saisie diligentées le 23 juillet 2013 à Bandol, à Cabriès, à Fuveau et à Aix-en-Provence autres que les 15 courriels adressés par le cabinet Binisti, Bouquet, Lassalle et associés, identifiés en pièce 10 pages 3/ 4, produite par les requérantes, les courriels échangés avec M. Fabien X... Mme Françoise Y..., ifleca. avocat @ nerim. fr, jl. rainaud @ cabinet-jeca et jm @ urbani, identifiés en pièce 11, pages 4/ 5 et 5/ 5 produite par les requérantes, les courriels échangés avec BBLMA, identifiés en pièce 7 produite par les requérantes et les courriels échangés avec BBLMA et Roustouil, identifiés en pièce 9 produite par les requérantes ;

AUX MOTIFS QUE « sur la validité des opérations de saisie./ À l'appui de leur demande d'invalidation de l'ensemble des opérations de saisie, les sociétés Barysud, Baya et Barylux invoquent une saisie massive, indifférenciée et disproportionnée des fichiers de l'ordinateur présent dans les locaux visités et une violation manifeste de la procédure visée à l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales. Il convient d'examiner successivement ces deux moyens./ Sur la saisie des fichiers./ Les requérantes soutiennent que l'administration a procédé à la saisie de l'intégralité des fichiers de l'ordinateur présent dans les locaux sans discernement ni considération tenant à leur éventuel lien avec la fraude présumée ou à leur caractère privé ou confidentiel. Elles ajoutent que le logiciel utilisé par l'administration interdit tout tri postérieur à la saisie dans la mesure où le support des fichiers est indivisible et insécable ce qui ne permet pas au juge d'exercer un contrôle juridictionnel efficace dès lors que l'intitulé des fichiers inventoriés ne renseigne pas sur leur contenu réel et ne permet pas de les identifier. Ces dires des demanderesses ne sont toutefois pas étayés par des éléments précis./ Il résulte de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales que les agents de l'administration des impôts peuvent, sur autorisation du juge des libertés et de la détention, procéder à la saisie de documents papiers ou informatiques dans les lieux déterminés par l'ordonnance d'autorisation. Pour respecter le principe de proportionnalité découlant de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme, la saisie ne peut porter que sur des documents se rapportant aux agissements retenus par l'ordonnance d'autorisation./ Il ressort des procès-verbaux de saisie et des inventaires que les agents de l'administration fiscale ont notamment procédé aux opérations suivantes :- dans les locaux de Bandol, l'examen des données accessibles à partir d'un ordinateur HP présent dans le bureau ; les agents ont constaté la présence de documents entrant dans le champ de l'autorisation et ont procédé à une extraction de fichiers en utilisant les fonctionnalités du logiciel Encase ; la saisie a porté sur 230 fichiers copiés sur disque dur externe de l'administration et inventorié sur un CD unique, étant précisé qu'aucun fichier de messagerie n'a été saisi ;- dans les locaux de Cabriès, la saisie de documents papiers inventoriés et l'examen des données accessibles à partir des ordinateurs fixes de marque HP présents dans le bureau de Gilles Z..., d'un ordinateur fixe de marque HP et du disque dur externe de marque Iomega présents dans le bureau de Martine A...; les agents ont constaté la présence de documents entrant dans le champ de l'autorisation de visite et ont procédé à une extraction des fichiers en utilisant les fonctionnalités du logiciel Encase ; les fichiers ont été copiés sur un disque dur externe de l'administration et leur inventaire a été gravé sur un CD copié en 30 exemplaires ;- dans les locaux du 12 chemin des Ménagers à Fuveau, l'examen des données accessibles à partir d'un ordinateur Toshiba présent dans un coffre-fort d'une chambre ; les agents ont mentionné qu'ils avaient constaté la présence de documents entrant dans le champ de l'autorisation de visite et ont procédé à une extraction des fichiers en utilisant les fonctionnalités du logiciel Encase ; la saisie a porté sur 635 fichiers ainsi que 3 fichiers de messagerie qui ont été inventoriés ; un autre ordinateur de marque Apple présent dans le bureau a été examiné mais aucune saisie n'a été pratiquée sur les fichiers de cet ordinateur en l'absence de documents entrant dans le champ de l'autorisation de visite et de saisie donnée par le juge des libertés et de la détention ;- dans les locaux du 18, chemin des Ménagers à Fuveau, l'examen des données accessibles à partir des deux ordinateurs présents dans le bureau de la dépendance ; seule la saisie des dossiers et fichiers de l'ordinateur Sony VAIO sera examinée, l'administration ayant renoncé à exploiter les dossiers contenus dans l'ordinateur Apple en raison de difficultés techniques pour ouvrir ces dossiers ; les agents ont mentionné qu'ils avaient constaté la présence de documents entrant dans le champ de l'autorisation et ont procédé à une extraction des fichiers en utilisant les fonctionnalités du logiciel Encase ; la saisie a porté sur 176 fichiers ainsi que sur deux fichiers de messagerie de l'ordinateur Sony VAIO, éléments qui ont été inventoriés ;- dans les locaux d'Aix-en-Provence, aucune saisie n'a été pratiquée./ Il résulte de ces éléments, qu'en utilisant le logiciel Encase, l'administration fiscale a procédé à une recherche de documents pouvant être en rapport avec les agissements de fraude des trois sociétés luxembourgeoises présumées exercer une activité non déclarée en France. Il n'y a pas eu copie intégrale des disques durs des ordinateurs examinés, étant observé qu'il n'y a pas eu de saisies sur tous les ordinateurs examinés, ce qui démontre la sélectivité des saisies pratiquées. En tout état de cause, les demanderesses ne rapportent nullement la preuve qui leur incombe d'une saisie massive et indifférenciée des fichiers informatiques et ne détaillent même pas les fichiers ou éléments qui selon elles seraient insaisissables. En réalité, ce qu'elles contestent, c'est la saisie des messageries avec tous les courriels qu'elles contenaient./ Mais les fichiers de messagerie sont indivisibles et insécables, si bien qu'ils ont été saisis dans leur totalité. Ils ont été authentifiés par une unique empreinte numérique calculée sur leur contenu, ce qui n'empêche pas l'identification et l'édition des courriers qu'ils contiennent en vue d'un contrôle de la validité de la saisie. D'ailleurs, l'édition de l'inventaire des fichiers saisis sur l'ordinateur montre que chaque fichier y est identifiable par son chemin et authentifié par une empreinte numérique spécifique./ Lorsqu'un support de documents est indivisible et insécable, l'administration est en droit d'appréhender tous les documents qui y sont contenus si certains de ces documents se rapportent au moins en partie aux agissements visés par l'ordonnance autorisant les opérations de visite et de saisie domiciliaires. Il appartient ensuite aux demandeurs au recours de préciser les éléments du fichier qui seraient insaisissables en indiquant la raison pour chacun des éléments concernés, ce qui ne font pas les demanderesses. Enfin, la présence de courriels insaisissables dans une messagerie électronique n'a pas pour effet d'invalider la saisie des autres éléments de cette messagerie./ Compte tenu de ces éléments, le moyen de contestation tiré d'une saisie indifférenciée sera rejeté./ Sur la violation de la procédure de saisie./ Sur la passivité de l'officier de police judiciaire./ Les demanderesses soutiennent que l'officier de police judiciaire présent aux opérations de visite et de saisie a eu un rôle purement passif dans la mesure où il a laissé les agents de l'administration copier l'intégralité du disque dur de l'ordinateur ce qui a entraîné une saisie indifférenciée des fichiers./ L'article L. 16 B du livre des procédures fiscales dispose que l'officier de police judiciaire veille au respect du secret professionnel et des droits de la défense conformément aux dispositions du troisième alinéa de l'article 56 du code de procédure pénale./ En l'espèce, l'administration fiscale souligne à juste titre qu'il résulte du procès-verbal de saisie qu'aucune difficulté n'est apparue pendant le cours des opérations qui aurait nécessité l'intervention spécifique de l'officier de police judiciaire, étant observé que les représentants des occupants des lieux n'ont formulé aucune remarque avant de signer les procès-verbaux. Par ailleurs, la copie de l'intégralité du disque dur et la saisie indifférenciée ne sont nullement établies. Il s'ensuit que le moyen tiré de la passivité de l'officier de police judiciaire ne peut être retenu./ Sur la régularité de l'inventaire./ Les demanderesses soulèvent l'irrégularité de l'inventaire aux motifs qu'il n'a pas été signé, qu'il ne mentionne pas les voies de recours ni les possibilités offertes à l'occupant des lieux de contester son établissement et de solliciter, en cas de difficultés, la mise sous scellés de la saisie. Ils ajoutent que certains inventaires sont incomplets puisque les fichiers de messagerie saisis contiennent des courriels non identifiés ni inventoriés./ L'article L. 16 B du livre des procédures fiscales ne soumet l'inventaire à aucune forme particulière et exige seulement qu'il soit signé par les parties présentes aux opérations./ En l'espèce, les inventaires des documents papiers figurent dans les procès-verbaux des opérations et n'est d'ailleurs pas contesté./ La discussion porte sur les inventaires des fichiers informatiques saisis dont la procédure est relatée dans les procès-verbaux des opérations. Ces inventaires figurent sur des CD non réinscriptibles annexés aux procès-verbaux et portant les paraphes des parties présentes qui ont signé les procès-verbaux, étant précisé qu'un exemplaire de ces supports a été remis à chaque fois au représentant des occupants des lieux. Sur les CD figure la liste des fichiers saisis dont les fichiers de messagerie qui sont insécables. La liste des courriels contenus dans ces fichiers n'apparaît pas, mais chacune de ces messageries a été affectée d'une empreinte numérique lors de la saisie ce qui permet d'en assurer l'intégrité tout en rendant possible l'identification et l'édition des courriels pour en contrôler la teneur./ Par ailleurs, dans la mesure où aucune difficulté n'a été soulevée pour la réalisation des inventaires, les éléments saisis n'ont pas été placés sous scellés ce qui rendait inutile une information sur l'ouverture de scellés inexistants./ Les dispositions de la loi ont dès lors été respectées et les demanderesses ont été en mesure de connaître la nature des données appréhendées. Le moyen tiré de l'irrégularité de l'inventaire sera en conséquence rejeté./ Sur l'annulation de la saisie de certains fichiers et leur inopposabilité./ Il appartient aux demanderesses de lister et de produire les pièces pour lesquelles elles sollicitent l'annulation de la saisie en indiquant les motifs de la demande, afin de permettre à la juridiction saisie d'exercer un contrôle effectif sur le bien-fondé de la demande./ Or, les requérantes se contentent d'une demande générale d'annulation des fichiers ayant trait à des correspondances privées, confidentielles et hors du champ de l'autorisation des ordonnances des 18 et 23 juillet 2013. Il ne peut être fait droit à une telle demande en l'absence de toute indication précise et production de chaque pièce concernée » (cf., ordonnance attaquée, p. 4 à 7) ;

ALORS QUE, de première part, l'administration fiscale ne peut appréhender que des documents et supports d'information se rapportant, au moins en partie, aux agissements visés par l'ordonnance judiciaire autorisant les opérations de visite et saisie domiciliaires, et ceci quelles que soient la nature et la forme de ces documents et supports d'information ; que, d'autre part, il appartient à la juridiction du premier président de la cour d'appel, saisie d'un recours contre le déroulement d'opérations de visite et de saisie, de contrôler que les pièces appréhendées entrent dans le cadre de l'autorisation donnée, par la confrontation de l'ordonnance d'autorisation et des pièces saisies ; qu'en se fondant seulement, quant à la question de savoir si les pièces appréhendées entraient dans le cadre de l'autorisation donnée, pour exclure que les opérations de visite et de saisie litigieuses aient été massives et indifférenciées, sur la mention, sur les procès-verbaux de visite et de saisie, par les agents de l'administration fiscale eux-mêmes qu'ils avaient constaté la présence, parmi les données accessibles à partir des ordinateurs qui se trouvaient dans les lieux visités, de documents entrant dans le champ de l'autorisation, sans contrôler elle-même que les fichiers appréhendés par l'administration fiscale entraient dans le cadre de l'autorisation donnée, par la confrontation de l'ordonnance d'autorisation et des fichiers saisis, la juridiction du premier président de la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

ALORS QUE, de deuxième part, l'administration fiscale ne peut appréhender que des documents et supports d'information se rapportant, au moins en partie, aux agissements visés par l'ordonnance judiciaire autorisant les opérations de visite et saisie domiciliaires, et ceci quelles que soient la nature et la forme de ces documents et supports d'information et quand bien même ces documents ou supports d'information seraient indivisibles ou insécables ; qu'il en résulte qu'il appartient à l'administration fiscale de trouver les moyens, si elle entend saisir des documents figurant sur un support d'information indivisible ou insécable, de ne saisir que les documents figurant sur un tel support d'information se rapportant, au moins en partie, aux agissements visés par l'ordonnance judiciaire autorisant les opérations de visite et saisie domiciliaires ; qu'en déboutant, dès lors, la société Barysud, la société Baya et la société Barylux de leur demande d'annulation totale des opérations de visite et de saisie litigieuses et en ne faisant que partiellement droit à leur demande d'annulation, d'inopposabilité et de destruction d'éléments saisis, après avoir relevé que les fichiers de messagerie électronique avaient été saisis dans leur totalité en raison de leur caractère indivisible et insécable, la juridiction du premier président de la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

ALORS QUE, de troisième part, il appartient à l'officier de police judiciaire présent lors des opérations de visite et de saisie de veiller spontanément au respect du secret professionnel et des droits de la défense, même en l'absence de difficulté étant apparue pendant le cours des opérations et même en l'absence de remarque formulée par l'occupant des lieux ou par son représentant ; qu'en énonçant, par conséquent, pour écarter le moyen tiré de la passivité de l'officier de police judiciaire lors des opérations de visite et de saisie litigieuses, qu'il résultait du procès-verbal de saisie qu'aucune difficulté n'était apparue pendant le cours des opérations qui aurait nécessité l'intervention spécifique de l'officier de police judiciaire et que les représentants des occupants des lieux n'avaient formulé aucune remarque avant de signer les procès-verbaux, la juridiction du premier président de la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

ALORS QUE, de quatrième part, l'inventaire des pièces et documents saisis doit être signé par les agents de l'administration des impôts, par l'officier de police judiciaire, par l'occupant des lieux ou son représentant, et, en cas d'impossibilité, par deux témoins ; qu'en écartant, dès lors, le moyen tiré de l'irrégularité des inventaires, après avoir relevé que les inventaires des fichiers informatiques saisis figuraient sur des CD qui ne portaient que les paraphes, et non les signatures, des parties présentes, la juridiction du premier président de la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

ALORS QUE, de cinquième part, l'administration fiscale a l'obligation de dresser un inventaire des pièces et documents saisis ; qu'en écartant, par conséquent, le moyen tiré de l'irrégularité des inventaires, après avoir relevé que la liste des courriels contenus dans les fichiers de messagerie saisis n'apparaissait pas dans les inventaires des fichiers saisis figurant sur les CD annexés aux procès-verbaux des opérations, la juridiction du premier président de la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

ALORS QUE, de sixième part, il ne peut être exigé du demandeur au recours exercé contre le déroulement des opérations de visite et de saisie, qui entend faire statuer sur des pièces le concernant, d'identifier et de produire les pièces dont il conteste la saisie que s'il a été mis à même de le faire par l'établissement complet d'un inventaire des pièces saisies ; qu'en énonçant, dès lors, pour ne faire que partiellement droit à la demande d'annulation, d'inopposabilité et de destruction d'éléments saisis de la société Barysud, de la société Baya et de la société Barylux, qu'elles se contentaient d'une demande générale d'annulation des fichiers ayant trait à des correspondances privées, confidentielles et hors du champ de l'autorisation et qu'il ne pouvait être fait droit à une telle demande en l'absence de toute indication précise et production de chaque pièce concernée, quand elle avait relevé que la liste des courriels contenus dans les fichiers de messagerie saisis n'apparaissait pas dans les inventaires des fichiers saisis figurant sur les CD annexés aux procès-verbaux des opérations, la juridiction du premier président de la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

ALORS QUE, de septième part, il ne peut donc être exigé du demandeur au recours exercé contre le déroulement des opérations de visite et de saisie, qui entend faire statuer sur des pièces le concernant, d'identifier et de produire les pièces dont il conteste la saisie que s'il a été mis à même de le faire ; qu'en énonçant, dès lors, pour ne faire que partiellement droit à la demande d'annulation, d'inopposabilité et de destruction d'éléments saisis de la société Barysud, de la société Baya et de la société Barylux, qu'elles se contentaient d'une demande générale d'annulation des fichiers ayant trait à des correspondances privées, confidentielles et hors du champ de l'autorisation et qu'il ne pouvait être fait droit à une telle demande en l'absence de toute indication précise et production de chaque pièce concernée, sans constater que, contrairement à ce que prétendaient la société Barysud, la société Baya et la société Barylux, ces dernières avaient été bénéficiaires, de la part de l'administration fiscale, de la restitution des CD sur lesquels figurait la liste des fichiers saisis, avec accès aux fichiers et messages, et donc avaient été matériellement mises en mesure de déterminer quels documents informatiques avaient été saisis et quels étaient la nature et le contenu de ces documents, la juridiction du premier président de la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 14-27960
Date de la décision : 03/05/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 06 novembre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 03 mai. 2016, pourvoi n°14-27960


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.27960
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