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14/04/2016 | FRANCE | N°15-13867

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 14 avril 2016, 15-13867


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 26 novembre 2014), que la société Etablissements Salah viandes halales (société Salah) a pris à bail un local à usage commercial situé dans un centre commercial appartenant à la société In cité Bordeaux la Cub (la société In cité) ; qu'un incendie, survenu le 3 août 2007, a endommagé des locaux situés à proximité de ceux loués à la société Salah et entraîné la fermeture de plusieurs commerces ;

que le preneur a assigné le bailleur en réparation de son préjudice ; que la société civil...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 26 novembre 2014), que la société Etablissements Salah viandes halales (société Salah) a pris à bail un local à usage commercial situé dans un centre commercial appartenant à la société In cité Bordeaux la Cub (la société In cité) ; qu'un incendie, survenu le 3 août 2007, a endommagé des locaux situés à proximité de ceux loués à la société Salah et entraîné la fermeture de plusieurs commerces ; que le preneur a assigné le bailleur en réparation de son préjudice ; que la société civile professionnelle (SCP) X...-Y..., mandataire au redressement judiciaire de la société Salah prononcé par jugement du 18 septembre 2013, est intervenue volontairement à l'instance ;

Attendu que la société Salah et la SCP X...-Y..., ès qualités, font grief à l'arrêt de rejeter les demandes de la société Salah ;

Mais attendu qu'ayant relevé que la société Salah ne formulait aucun grief contre la société In cité quant à des troubles de jouissance liés à l'entretien des parties communes du centre commercial et retenu, appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, que la société In cité avait été diligente dans l'accomplissement des démarches nécessaires à la reprise des travaux de réfection à la suite de la survenance de l'incendie, les pièces produites établissant que les travaux de remise en état avait été entrepris à la demande de la société In cité et qu'un mandat de gestion avait été confié à la société Icade ADB le 15 septembre 2008, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a pu en déduire, sans modifier l'objet du litige, que les demandes de la société Salah devaient être rejetées ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Salah et la SCP X...-Y..., ès qualités, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Salah et la SCP X...-Y..., ès qualités, et les condamne à payer à la société In cité la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze avril deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Rémy-Corlay, avocat aux Conseils, pour la société Etablissements Salah viandes halales et de la SCP X...-Y..., ès qualités

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré la Société Etablissements Salah Viande Halales mal fondée en ses demandes à l'encontre de la Société d'économie mixte locale In Cité Bordeaux La Cub et l'en a déboutée ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE : « en vertu des dispositions générales du Code civil et notamment de l'article 1719, le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière :- de délivrer au preneur la chose louée,- d'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée,- d'en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail ; que le bailleur ne peut, par le biais d'une clause relative à l'exécution de travaux dans les lieux loués, s'affranchir de son obligation de délivrance ; que la clause selon laquelle le preneur « prend les lieux dans l'état où ils se trouvent » doit être interprétée de façon restrictive et étroitement limitée à l'objet de la clause, car elle ne décharge pas le bailleur de son obligation d'entretien ; que l'article 1720 du Code civil, qui met à la charge du bailleur toutes les réparations autres que locatives de la chose louée qui peuvent devenir nécessaires, n'est pas d'ordre public, il peut y être dérogé par des conventions particulières ; qu'en l'espèce, la Cour constatera que c'est à bon droit que les premiers juges ont jugé que le bailleur n'était pas tenu d'assurer l'activité du centre commercial, ni de garantir sa réussite commerciale et retenu que la responsabilité de la société In Cite n'était pas engagée en l'absence de démonstration d'une faute ; qu'à cette analyse, la Cour ajoutera qu'en l'absence de stipulation particulière du bail, le bailleur n'est tenu que des obligations de l'article 1719 du code civil et il n'existe à sa charge aucune obligation de garantie quant à la réussite commerciale d'une galerie marchande ; qu'en effet, il ne figure dans le bail aucune disposition particulière relative au fonctionnement du Centre commercial, si ce n'est l'obligation pour le bailleur d'adhérer à l'association des commerçants en place, et d'adhérer aux règles collectives actuelles et futures concernant le fonctionnement du Centre ; que la société Salah ne formule aucun grief de la société In Cite quant à des troubles de jouissance liés à l'entretien des parties communes du centre commercial et force est de constater en outre que le bail ne contient pas plus de clause d'exclusivité assurant à la société Salah le bénéfice d'une exclusivité dans le centre commercial ; que bien au contraire, il est stipulé que la destination du local loué, à savoir l'exploitation d'un commerce de boucherie halal, ne saurait conférer à la société appelante un droit d'exclusivité pour l'exercice d'un commerce de cette nature dans les immeubles ou groupes d'immeubles du bailleur ; que c'est donc à bon droit que les premiers juges ont écarté, en l'absence de stipulation particulière du bail, la responsabilité de la société In Cite du fait de la désertification des locaux du centre commercial consécutive à la survenance de l'incendie du mois d'août 2007, assimilable à un cas de force majeure ; qu'il est également acquis que la société bailleresse In Cite ne saurait être tenue responsable des difficultés économiques rencontrées par la société Salah après l'incendie ayant détruit plusieurs locaux du centre commercial en ce qu'elle n'a aucunement failli à ses obligations contractuelles et a toujours oeuvré pour le maintien d'un effet attractif du centre commercial ; qu'en effet, le rapport d'expertise judiciaire établit que la survenance de l'incendie ayant endommagé le centre commercial n'est pas imputable à la société In Cite ; que par ailleurs, la Cour constatera que la société bailleresse In Cite a oeuvré pour assurer le maintien d'un environnement favorable à l'ensemble de ses locataires, notamment pour assurer une maintenance suffisante au regard de l'entretien et de la sécurité élémentaire, mais a été également diligente dans l'accomplissement des démarches nécessaires à la reprise des travaux de réfection, suite à la survenance de l'incendie ; que ce constat ressort des pièces versées aux débats (Pièces n° 3, 6, 7, 8, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18 et 19 du dossier de l'intimée et pièce n° 2 de l'appelante) termes desquelles, il apparaît que c'est à la demande de la société In Cite que les travaux de remise en état ont pu être entrepris, qu'un mandat de gestion a été confié à la société Icade ADB, suivant contrat en date du 15 septembre 2008 et que la société In Cite avec la participation de la Mairie de Bordeaux s'est mis en quête de « rechercher de nouveaux commerçants et artisans susceptibles d'être intéressés par une implantation sur ce site » ; que s'agissant des autres chefs de préjudice, la Cour constatera que la SCP X...
Y...en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL Ets Salah est défaillant dans sa démonstration de l'imputabilité à la société In Cite des préjudices dont elle se prévaut comme de leur réalité ; qu'en conséquence, la Cour confirmera la décision déférée »

ET AUX MOTIFS REPUTES ADOPTES QUE : « la présente demande vise à établir la responsabilité du bailleur, dans la perte financière subie par le preneur, dans l'exploitation de son fonds de commerce, en raison d'une diminution de la commercialité des lieux ; que cette demande se fonde sur une faute dans l'obligation de délivrance du bailleur ; Sur le bien-fondé de la demande : que le bail a été souscrit entre les parties le 16 février 2005 et porte sur un local commercial et un appartement situés au Centre commercial Europe, d'une surface totale de 215 m2 ; l'objet du bail est l'exploitation d'un commerce de boucherie Halal et Cacher, petite épicerie, traiteur, plats cuisinés et sandwicherie, sans exclusivité ; qu'il ne figure dans le bail aucune disposition particulière relative au fonctionnement du Centre commercial, si ce n'est l'obligation pour le preneur d'adhérer à l'association des commerçants en place, et d'adhérer aux règles collectives actuelles et futures concernant le fonctionnement du Centre ; que l'obligation de délivrance du bailleur consiste à mettre à disposition du preneur des locaux en état de remplir l'usage auxquels ils sont destinés et de lui assurer une jouissance paisible ; que dans la présente espèce, il n'est pas fait à proprement parler état de troubles de jouissance, dans la mesure où il n'est pas évoqué de difficultés liées à la sécurité des lieux et à leur entretien, à la propreté des accès ou des parties communes ; qu'en revanche il est reproché une modification des facteurs de commercialité qui résulterait d'une abstention fautive du bailleur, de son inaction pour trouver de nouveaux occupants destinés à dynamiser le Centre et à maintenir un effet attractif réciproque ; qu'en l'état les pièces versées aux débats ne démontrent pas l'inertie du bailleur face au sinistre survenu en 2007 et à la perturbation d'activités qui en a résulté ; qu'elles ne démontrent pas davantage une modification apportée par le bailleur à l'organisation ou la distribution des lieux loués ; que son propre intérêt est en effet la location de l'ensemble des emplacements commerciaux du Centre, et on ne peut présumer de sa volonté de ne pas rechercher des preneurs intéressés par la complémentarité des commerces ; qu'on ne peut que rappeler que le bailleur n'est pas tenu d'assurer l'activité du centre, de garantir sa réussite commerciale, et les difficultés du preneur ne sauraient lui être imputées en l'absence de toute faute démontrée et de toute clause ou disposition particulière figurant en ce sens au contrat de bail ; Sur le préjudice : qu'il n'est pas davantage établi les document communiqués concernant les autres activités commerciales de la société dans des entités économiques distinctes ; qu'il ne s'agit en toute hypothèse que de documents ponctuels qui ne permettent pas d'apprécier concrètement l'évolution commerciale de cet établissement et encore moins le lien éventuel avec le phénomène invoqué ; qu'au vu de l'ensemble de ces éléments la société Salah sera déboutée de sa demande »

ALORS QUE 1°) aux termes de leurs conclusions d'appel, régulièrement signifiées le 29 avril 2014, la Société Etablissements Salah Viandes Halales et la Scp X...
Y...ès-qualités de mandataire judiciaire ont fait valoir (p. 10) « que la Société In Cite, qui est l'unique propriétaire de l'ensemble des locaux du Centre commercial, avait l'obligation de mettre en oeuvre les moyens nécessaires pour que les locaux sinistrés soient réparés rapidement, afin que les locataires puissent continuer à jouir paisiblement des locaux loués ; qu'elle était d'ailleurs la seule à pouvoir le faire, les locataires étant pour leur part totalement assujettis au bon vouloir de la bailleresse » ; qu'il a été argué du manque de diligence de la bailleresse à effectuer les travaux de réparation à la suite de l'incendie survenu dans le centre commercial pendant la nuit du 1er au 2 août 2007 en observant que (p. 11) : l'expert judiciaire désigné avait précisé que les travaux de réparation pouvaient être effectués dès le 30 novembre 2007 ; la Société In Cité, loin d'effectuer au plus vite les travaux autorisés, avait adressé le 20 décembre 2007 un courrier aux différentes entreprises intervenues sur le chantier indiquant qu'il leur incombait de procéder à leurs frais aux travaux ; qu'il a été conclu au résultat de ces constatations (p. 12) : « qu'en conséquence aucun travaux n'était réalisé ni par ces entreprises ni par In Cite en dépit de l'autorisation de l'Expert, et ceci durant plus de quatre années ; qu'il apparaît ainsi que loin de pré financer les travaux et de les faire réaliser à ses frais avancés par souci de célérité, la Société In Cite a préféré invoquer l'éventuelle responsabilité des entreprises qu'elle avait mises en cause, pour leur demander d'exécuter les travaux de réparation ; que la Société In Cite n'entreprendra aucune action et laissera le dossier en l'état plus de quatre ans, laissant les lieux se dégrader au détriment des commerces restants, en violation de son obligation d'entretien des lieux loués et de garantie d'une jouissance paisible » ; qu'en considérant (p. 6, alinéa 2) « La Société Salah ne formule aucun grief de la société In Cite quant à des troubles de jouissance liés à l'entretien des parties communes du centre commercial (…) », soit en méconnaissant le contenu clair et précis des conclusions des exposantes reprochant directement à la bailleresse un manquement à son obligation d'entretien des lieux loués dans la partie du centre commercial, objet du sinistre, la Cour d'appel a violé ensemble les articles 4 et 5 du Code de procédure civile ;

ALORS QUE 2°) aux termes de leurs conclusions d'appel, régulièrement signifiées le 29 avril 2014, la Société Etablissements Salah Viandes Halales et la Scp X...
Y...ès-qualités de mandataire judiciaire ont fait valoir (p. 10) « que la Société In Cite, qui est l'unique propriétaire de l'ensemble des locaux du Centre commercial, avait l'obligation de mettre en oeuvre les moyens nécessaires pour que les locaux sinistrés soient réparés rapidement, afin que les locataires puissent continuer à jouir paisiblement des locaux loués ; qu'elle était d'ailleurs la seule à pouvoir le faire, les locataires étant pour leur part totalement assujettis au bon vouloir de la bailleresse » ; qu'il a été argué du manque de diligence de la bailleresse à effectuer les travaux de réparation à la suite de l'incendie survenu dans le centre commercial pendant la nuit du 1er au 2 août 2007 en observant que (p. 11) : l'expert judiciaire désigné avait précisé que les travaux de réparation pouvaient être effectués dès le 30 novembre 2007 ; la Société In Cité, loin d'effectuer au plus vite les travaux autorisés, avait adressé le 20 décembre 2007 un courrier aux différentes entreprises intervenues sur le chantier indiquant qu'il leur incombait de procéder à leurs frais aux travaux ; qu'il a été conclu au résultat de ces constatations (p. 12) : « qu'en conséquence aucun travaux n'était réalisé ni par ces entreprises ni par In Cite en dépit de l'autorisation de l'Expert, et ceci durant plus de quatre années ; qu'il apparaît ainsi que loin de pré financer les travaux et de les faire réaliser à ses frais avancés par souci de célérité, la Société In Cite a préféré invoquer l'éventuelle responsabilité des entreprises qu'elle avait mises en cause, pour leur demander d'exécuter les travaux de réparation ; que la Société In Cite n'entreprendra aucune action et laissera le dossier en l'état plus de quatre ans, laissant les lieux se dégrader au détriment des commerces restants, en violation de son obligation d'entretien des lieux loués et de garantie d'une jouissance paisible » ; qu'en se contentant de dire que la bailleresse (p. 6, alinéas 7 et 8) « (…) a été également diligente dans l'accomplissement des démarches nécessaires à la reprise des travaux de réfection, suite à la survenance de l'incendie ; (…) il apparaît que c'est à la demande de la société In Cite que les travaux de remise en état ont pu être entrepris (…) », soit sans répondre au moyen des exposantes faisant valoir qu'il incombait à la bailleresse d'effectuer directement les travaux de réparation dans le cadre de son obligation d'entretien des lieux et que le délai de quatre années établissait sa carence à ce titre, la Cour d'appel a violé les articles 455 et 458 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 15-13867
Date de la décision : 14/04/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 26 novembre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 14 avr. 2016, pourvoi n°15-13867


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : Me Rémy-Corlay, SCP Boutet-Hourdeaux

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.13867
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