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14/04/2016 | FRANCE | N°15-13712

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 14 avril 2016, 15-13712


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., psychiatre, a exercé ses fonctions au sein de la Clinique de Perreuse (la clinique), en vertu d'un contrat d'exercice libéral conclu le 7 septembre 1989, auquel il a mis fin le 13 septembre 2002 ; que ce contrat prévoyait le paiement de redevances à la clinique au titre des services et prestations rendus au praticien ; que, par acte du 6 janvier 2012, M. X... a assigné la clinique aux fins d'obtenir le remboursement de redevances indûment prélevées ; que ce

lle-ci a opposé une fin de non-recevoir tirée de la prescription ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., psychiatre, a exercé ses fonctions au sein de la Clinique de Perreuse (la clinique), en vertu d'un contrat d'exercice libéral conclu le 7 septembre 1989, auquel il a mis fin le 13 septembre 2002 ; que ce contrat prévoyait le paiement de redevances à la clinique au titre des services et prestations rendus au praticien ; que, par acte du 6 janvier 2012, M. X... a assigné la clinique aux fins d'obtenir le remboursement de redevances indûment prélevées ; que celle-ci a opposé une fin de non-recevoir tirée de la prescription quinquennale de l'action ;
Sur le moyen unique, pris en ses première et troisième branches, ci-après annexé :
Attendu que ces griefs ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le moyen, pris en sa deuxième branche :
Vu les articles 2262 et 2277 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, et l'article 2222 du même code ;
Attendu que, pour déclarer M. X... irrecevable en sa demande, l'arrêt relève qu'en application de l'article 2277 du code civil, complété par la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005, les actions en répétition des loyers, des fermages et des charges locatives qui se prescrivaient auparavant par trente ans, se prescrivent désormais par cinq ans, que la réclamation de M. X... porte sur la répétition des sommes versées à la clinique, au travers des redevances, en contrepartie des frais induits par son activité libérale et non couverts par le prix de journée, parmi lesquels se trouvent, pour la quasi-totalité, des frais de locaux et des charges afférentes à ces locaux, payables mensuellement, et en déduit que, le délai ayant commencé à courir à compter du 19 janvier 2005, date d'entrée en vigueur de la loi du 18 janvier 2005, la prescription était acquise au 19 janvier 2010, soit près de deux ans avant l'introduction de l'instance par M. X... ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'action en répétition de redevances indûment prélevées au regard du contrat d'exercice libéral conclu entre une clinique et un médecin, ne constitue pas une action en répétition de loyers, de fermages ou de charges locatives de sorte qu'une telle action était prescrite par trente ans, antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 ayant réduit à cinq ans la prescription de droit commun, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il accueille la fin de non-recevoir soulevée par la Clinique de Perreuse et déclare M. X... irrecevable en ses demandes relatives aux redevances, l'arrêt rendu le 24 octobre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne la Clinique de Perreuse aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze avril deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, avocat aux Conseils, pour M. X....
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir déclaré irrecevable comme prescrite l'action en répétition engagée par le Dr X... au titre des redevances indument perçues par la clinique ;
AUX MOTIFS QUE l'article 6 du contrat d'exercice libéral disposait au titre des redevances dues à la clinique : « Pour la participation de la clinique au recouvrement des honoraires dus au praticien par le tiers-payant et en contrepartie des services et prestations rendus au praticien par la clinique et qui ne sont pas inclus dans le prix de journée fixé par la Sécurité sociale, des prestations seront facturées mensuellement pour une somme correspondant aux frais engagés, celle-ci ne devant pas dépasser 10% des honoraires bruts du praticien » ; que le Dr X... prétend que seule la facturation des honoraires en tiers payant serait justifiée et réclame le reversement des autres sommes prélevées, selon lui, de manière injustifiée et illicite pour un montant de 238 141 € entre septembre 1989 et septembre 2002, en ce inclus la part de redevances correspondant à la permanence médicale ; que le tribunal a jugé que l'action en répétition des sommes versées dans le cadre de ces redevances était prescrite en retenant que, sous l'ancien régime de prescription, les dispositions de l'article 2277 ancien du code civil trouvaient à s'appliquer et que le délai n'avait pas été modifié par la loi nouvelle, puisque l'article 2224 du code civil tel que résultant de la loi du 17 juin 2008 prévoit que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que l'intimé conteste l'applicabilité des dispositions de l'article 2277 ancien du code civil ; mais qu'aux termes de cet article complété par la loi du 18 janvier 2005, les actions en répétition des loyers, des fermages et des charges locatives – qui se prescrivaient auparavant par trente ans, s'agissant d'une action relevant du régime spécifique des quasi-contrats – se prescrivent par cinq ans ; que la réclamation du Dr X... porte sur la répétition des sommes versées à la clinique, au travers des redevances, en contrepartie des frais induits par son activité libérale et non couverts par le prix de journée parmi lesquels se trouvent, pour la quasi-totalité, des frais de locaux et des charges afférentes à ces locaux (téléphone, chauffage, électricité, eau, entretien, assurances) payables mensuellement ; qu'ainsi sur l'année 1995 donnée en exemple par le Dr X..., ces frais représentaient plus de 90% des redevances, une fois déduites les dépenses du personnel pour la facturation et le tiers payant dont le reversement n'est pas sollicité ; que dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu que la prescription quinquennale devait s'appliquer à l'action en répétition de ces sommes et ont constaté que, le délai ayant commencé à courir à compter du 19 janvier 2005, date d'entrée en vigueur de la loi du 19 janvier 2005, elle était acquise au 19 janvier 2010, soit près de deux ans avant l'introduction de l'instance par le Dr X... ; qu'ils ont justement ajouté que la conciliation tentée par le demandeur avant l'introduction de la procédure contentieuse n'avait pas pu suspendre le délai de prescription dès lors que celui-ci était déjà expiré à la date du recours à la conciliation formalisé par lettre du 20 mai 2011 ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE l'article 2277 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005, disposait que se prescrivaient par cinq ans les actions en paiement des salaires, des arrérages des rentes perpétuelles et viagères et de ceux des pensions alimentaires, des loyers et des fermages, des intérêts des sommes prêtées, et généralement de tout ce qui est payable par année ou à des termes périodiques plus courts ; que la loi n°2005-32 du 18 janvier 2005 a ajouté qu'étaient également soumises à cette prescription spéciale quinquennale les actions relatives aux charges locatives et en répétition des loyers, des fermages et des charges locatives ; qu'en l'espèce, l'action relative à la redevance mensuelle s'analyse en une action en répétition de charges mensuelles ; qu'avant l'entrée en application de la loi du 18 janvier 2005, l'action en répétition de sommes indûment versées à titre de charges était considérée comme relevant du régime spécifique des quasi-contrats et que n'était pas soumise à la prescription abrégée de l'article 2277 du code civil ; l'article 2262 ancien du code civil était alors applicable ; qu'en réduisant la durée de la prescription, la prescription quinquennale a commencé à courir à compter du 19 janvier 2005, date de l'entrée en vigueur de la loi du 18 janvier 2005, sans que le délai total de la prescription ne puisse excéder le délai trentenaire prévu par la loi antérieure ; qu'en l'espèce, la période d'exercice du Docteur X... à la Clinique, du 7 septembre 1989 au 13 septembre 2002, est intégralement antérieure au 19 janvier 2005, le délai trentenaire n'était pas acquis au 19 janvier 2005 et plus de cinq ans restaient à courir à cette date ; que la prescription pour cette période est donc acquise depuis le 19 janvier 2010 ; que l'article 2224 du code civil issu de la loi du 17 janvier 2008 fixe désormais le délai de prescription de droit commun à cinq années à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait du connaître les faits lui permettant de l'exercer, et n'a donc pas changé le délai de cinq ans instauré en janvier 2005 ; que l'acte introductif de la présente instance du 6 janvier 2012 est donc postérieur de près de deux ans à l'acquisition de la prescription ;
1°) ALORS QUE la prescription quinquennale de l'article 2277 du code civil dans ses dispositions résultant de la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005, applicables à l'espèce, n'atteint les créances qui y sont soumises que lorsqu'elles sont déterminées ; que n'est pas déterminée la créance dont le montant fait l'objet d'un litige entre les parties ; qu'en ne répondant pas aux conclusions du Dr X... qui faisaient valoir que l'ancien article 2277 du code civil était inapplicable dès lors que la créance était contestée dans son montant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE l'article 2277 du code civil dans ses dispositions résultant de la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005, applicables à la cause, soumettait les actions en répétition des seuls loyers, fermages et charges locatives à une prescription de cinq ans ; qu'en déclarant prescrite l'action en répétition de redevances versées en application du contrat d'exercice libéral, qui ne constituent ni un loyer, ni un fermage, ni une charge locative, au prétexte qu'elles auraient elles-mêmes pour objet de compenser des charges assumées mensuellement par le créancier, la cour d'appel a violé l'article 2277 précité ;
3°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QU'en statuant ainsi, quand il résultait de ses constatations que seule une partie du montant des redevances compensait des sommes payables mensuellement, la cour d'appel a violé l'article 2277 du code civil dans ses dispositions issues de la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 15-13712
Date de la décision : 14/04/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

QUASI-CONTRAT - Paiement de l'indu - Action en répétition - Prescription - Contrat d'exercice libéral conclu entre une clinique et un médecin - Redevances indûment prélevées - Prescription de droit commun

PRESCRIPTION CIVILE - Prescription de droit commun - Contrat d'exercice libéral - Action en répétition de redevances indûment prélevées PRESCRIPTION CIVILE - Prescription trentenaire - Domaine d'application - Contrat d'exercice libéral - Action en répétition de redevances indûment prélevées PRESCRIPTION CIVILE - Prescription quinquennale - Action en répétition de loyers, de fermage ou de charges locatives - Action antérieure à la loi du 17 juin 2008 - Exclusion - Cas - Redevances indûment prélevées au regard du contrat d'exercice libéral conclu entre une clinique et un médecin

L'action en répétition de redevances indûment prélevées au regard du contrat d'exercice libéral, conclu entre une clinique et un médecin, ne constitue pas une action en répétition de loyers, de fermages ou de charges locatives de sorte qu'une telle action était prescrite par trente ans, antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 ayant réduit à cinq ans la prescription de droit commun


Références :

article 2262 du code civil dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008

article 2277 du code civil dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008

article 2222 du code civil

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 24 octobre 2014

A rapprocher :Ch. mixte, 12 avril 2002, pourvoi n° 00-18529, Bull. 2002, Ch. mixte n° 2 (rejet)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 14 avr. 2016, pourvoi n°15-13712, Bull. civ. d'information 2016 n° 849, I, n° 1230
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles d'information 2016 n° 849, I, n° 1230

Composition du Tribunal
Président : Mme Batut
Avocat général : M. Sudre
Rapporteur ?: Mme Duval-Arnould
Avocat(s) : SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.13712
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