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31/03/2016 | FRANCE | N°15-14617

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 31 mars 2016, 15-14617


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un jugement a prononcé le divorce de Mme X... et de M. Y...aux torts partagés, rejeté la demande de prestation compensatoire présentée par Mme X... et condamné M. Y...à contribuer à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, Kevin, né le 30 août 1999, à compter de la date du jugement de rétablissement de la présomption de paternité ;
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de prononcer le divorce à ses torts ex

clusifs ;
Attendu que, sous le couvert de griefs non fondés de manque de base lé...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un jugement a prononcé le divorce de Mme X... et de M. Y...aux torts partagés, rejeté la demande de prestation compensatoire présentée par Mme X... et condamné M. Y...à contribuer à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, Kevin, né le 30 août 1999, à compter de la date du jugement de rétablissement de la présomption de paternité ;
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de prononcer le divorce à ses torts exclusifs ;
Attendu que, sous le couvert de griefs non fondés de manque de base légale, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion, devant la Cour de cassation, les appréciations par lesquelles la cour d'appel a souverainement estimé que les griefs allégués par l'épouse n'étaient pas établis ; qu'il ne peut être accueilli ;
Sur le second moyen, ci-après annexé :
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de prestation compensatoire ;
Attendu que, sous le couvert d'un grief non fondé de manque de base légale, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion, devant la Cour de cassation, les appréciations par lesquelles les juges d'appel, prenant en considération les éléments de preuve dont ils disposaient, ont souverainement apprécié les revenus des époux et estimé qu'il n'était pas établi que la rupture du mariage créait, au détriment de l'épouse, une disparité dans leurs conditions de vie respectives ; qu'il ne peut être accueilli ;
Mais sur le troisième moyen :
Vu les articles 371-2 et 373-2-2 du code civil ;
Attendu que, pour fixer à la date du jugement établissant la paternité de M. Y...le point de départ de l'obligation de celui-ci de contribuer à l'entretien et l'éducation de l'enfant, l'arrêt énonce que cet état de droit est imputable à la mère qui a bénéficié des droits sociaux ouverts par cette situation ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les effets d'une déclaration judiciaire de paternité remontent à la naissance de l'enfant et que la mère sollicitait une contribution à compter de cette date, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et vu les articles L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire et 1015 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il met la contribution à la charge du père pour l'entretien et l'éducation de l'enfant à compter du jugement du 22 mars 2012, l'arrêt rendu le 8 juillet 2014, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Dit que M. Y...devra verser à Mme X... la somme mensuelle de 200 euros au titre de sa contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant à compter du 30 août 2009, selon les modalités prévues par le jugement confirmé ;
Condamne M. Y...aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mars deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a prononcé le divorce aux torts exclusifs de Madame X... et rejeté ses demandes visant tant à une prestation compensatoire qu'à l'octroi de dommages-intérêts ;
AUX MOTIFS QUE « l'article 242 du Code civil dispose que le divorce peut être demandé par l'un des époux lorsque des faits constitutifs d'une violation grave ou des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune ; que Corinne X...fonde sa demande principale sur de famille, de contribution aux charges du mariage de la part de Damien Y...dont elle prétend encore qu'il s'était inscrit sur des sites de rencontre dès les premiers temps du mariage ; qu'à l'appui de sa demande reconventionnelle, Damien Y...prétend avoir été mis dehors du domicile conjugal le 5 mars 2009 par son épouse et s'être heurté à l'obstruction de celle-ci relativement à ses droits sur l'enfant commun ; qu'il est constant que Damien Y...a quitté le domicile conjugal 5 mars 2009 alors que son épouse était enceinte de trois mois ; que les époux sont contraires sur les circonstances de cette séparation ; que toutefois il ressort des propres photocopies de messages téléphoniques produites par Corinne X... qu'à la date du 4 mars 2009, elle estimait ne plus pouvoir vivre dans les conditions que son mari lui faisait subir et qu'elle préférait arrêter leurs relations sans délai, intimant à Damien Y...le soir même de dormir chez sa mère ou chez sa copine, avec récupération de toutes ses affaires à prévoir dès le lendemain ; qu'en outre, s'il est également constant que Damien Y...a le 16 mars 2009, demandé la clôture du compte joint du ménage, c'est en raison du retrait préalablement par Corinne X... d'une somme de 3000 ¿ dont la moitié revenait à l'époux que tout en ayant placé cette somme sur son livret A personnel, elle a justifié son comportement par le souci de préserver les intérêts du ménage au regard de l'intention qu'aurait manifesté son mari de mettre un terme au compte joint ; que par ailleurs, après avoir reconnu par anticipation le 3 avril 2009 et s'être inscrite dans l'établissement où elle a accouché, sous son nom de jeune fille, elle a également été déclaré Kevin sous seul nom à sa naissance sans aucune mention du mariage permettant de présumer la paternité de Damien Y...; que Corinne X... a certes déposé postérieurement, soit le 17 février 2010, une requête en rectification d'état civil mais cette requête a été radiée par le Procureur de la république qui dans un courrier du 18 mai 2010, a estimé qu'il ne s'agissait pas d'une erreur mais bien d'une volonté délibérée de la requérante la présomption de paternité ; que peu avant la naissance, le conseil de Corinne X... avait d'ailleurs fait connaître à Damien Y...le refus de sa cliente d'indiquer la date et le lieu prévus pour l'accouchement ; les différents échanges de courriers entre les parties, y compris par de leur conseil, démontrent à la fois la volonté de Damien Y...d'exercer pleinement « son droit de paternité et de père responsable » (et ce dès le 8 juin 2009) et les réticences de la mère après même l'intervention de l'ordonnance de non-conciliation assortie de l'exécution provisoire au motif non vérifié de vérifié de l'absence d'assurance relativement à la prise en charge de l'enfant par Damien Y...; celui-ci a déposé en conséquence plusieurs plaintes pour non présentation d'enfant. Le refus de Damien Y...d'assumer une paternité n'est pas établi et se trouve au contraire démenti par la soumission à un spermogramme le 13 novembre 2008, soit très peu de temps après la conclusion du mariage ; qu'enfin, il n'est pas démontré que Damien Y...se soit inscrit à des sites de rencontre dès le début de cette union, par des photocopies de site Internet non significatives et surtout non datées ; qu'il convient au vu de ces éléments d'appréciation et en l'absence de grief établi à rencontre de Damien Y..., de réformer le jugement déféré et de prononcer le divorce aux torts exclusifs de Corinne X... qui s'avère avoir tenté de faire échec aux droits du père sur l'enfant commun, ce qui est constitutif d'une violation grave des devoirs et obligations du mariage au sens de l'article précité » ;
ALORS QUE, premièrement, dans ses conclusions d'appel, Madame X... faisait valoir que Monsieur Y..., à compter de septembre 2008, la rejetait, allait très souvent dormir chez sa mère chez laquelle il était toujours domicilié, qu'il était parti tout un dimanche et qu'à deux reprises au moins, il était allé vivre chez sa mère ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ces faits, se rapportant, non pas à 2009, mais à 2008, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 242 du code civil ;
ALORS QUE, deuxièmement, Madame X... faisait encore valoir que son mari évitait les rapports intimes avec son épouse ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ces faits, les juges du fond ont de nouveau privé leur décision de base légale au regard de l'article 242 du code civil ;
ALORS QUE, troisièmement, l'arrêt rappelle que Madame X... invoquait l'absence de contributions aux charges du mariage de la part du mari, lequel était effectivement invoqué dans les conclusions de l'épouse ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ce grief, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a rejeté la demande de prestation compensatoire formée par l'épouse contre le mari ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « Corinne X... soutient à l'appui de sa demande, qu'il existe une différence notable entre les salaires respectifs, que le mariage a duré cinq ans, que si la vie commune a très peu duré, c'est en raison du départ de l'époux, et qu'elle a élevé l'enfant sans aucune participation financière du jour de sa naissance, le 30 août 2009 jusqu'au jugement de divorce déféré ayant fait rétroagir la fixation de la pension alimentaire au 22 mars 2012 ; elle ajoute être moins disponible par suite de la présence de l'enfant, pour faire évoluer sa carrière ou effectuer des heures supplémentaires, et n'avoir aucun patrimoine personnel ; que l'article 270 du Code civil prévoit que l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respective ; l'article 271 suivant énonce certains des critères susceptibles d'être pris en considération dans l'appréciation de ce droit ; qu'en l'occurrence, Corinne X..., née le 21 décembre 1971 et Damien Y...né le 1er mars 1974, ont contracté mariage le 21 juin 2008 à l'âge respectivement de 37 et 35 ans. Leur vie commune a été particulièrement brève puisque la séparation est intervenue dès le 5 mars 2009 ; que les deux époux sont employés de grande surface avec un revenu respectif en 2012, de 20 916 euros pour l'époux et de 17 540 ¿ pour l'épouse ; qu'il n'est pas fait état de difficultés de santé ni d'un patrimoine personnel pour l'un ou pour l'autre des époux ; que les difficultés alléguées par Corinne X... relativement à sa carrière par suite de la présence de l'enfant sont des plus aléatoires, étant observé que Kevin est aujourd'hui en âge de fréquenter l'école ; qu'il y a lieu en conséquence à confirmation de la décision déférée en ce qu'elle a débouté Corinne X... de sa demande de prestation compensatoire » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « les époux se sont unis le 21 juin 2008 ; que la durée du mariage est donc de 5 ans ; qu'un enfant est issu de cette union, étant indiqué que le couple était déjà séparé à sa naissance ; que Mme Corinne X... est née le 21 décembre 1971, elle est donc âgée de 41 ans ; qu'elle est employée au magasin CARREFOUR et perçoit un salaire mensuel de 1. 2176 ; que M. Damien Y...est né le 1er mars 1974, il est donc âgé de 39 ans. Il est vendeur au magasin CARREFOUR et perçoit à ce titre un salaire mensuel de 1. 605 ¿. Il est hébergé chez ses parents ; qu'ainsi que le soulignait très justement le juge conciliateur, s'il est légitime que l'époux dédommage ses parents du surcoût de dépenses courantes induit par sa présence au foyer parental, la somme qu'il verse apparaît disproportionnée par rapport aux frais d'entretien qu'il peut générer ainsi que par rapport à ses propres revenus ; que les débats ne font pas apparaître que la rupture du lien conjugal créée, au jour du présent jugement, une disparité dans les conditions de vie respectives des époux au détriment de l'épouse devant être compensée par l'attribution d'une prestation compensatoire » ;
ALORS QUE, pour se prononcer sur la disparité de la situation respective des époux, les juges du fond doivent se placer à la date à laquelle ils prononcent le divorce ; qu'en l'espèce, Madame X... faisait valoir, dans le cadre de ses conclusions du 22 mai 2014, que son salaire n'était que de 1. 217, 67 euros, cependant que le salaire du mari était de 2. 008, 06 euros (p. 24) ; qu'en se bornant à faire état des revenus de 2012, quand ils devaient se placer au 8 juillet 2014, sans s'expliquer sur les revenus respectifs, tels que mentionnés par l'épouse, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 270 à 272 du Code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a fixé le point de départ de la contribution mise à la charge du père pour l'entretien et l'éducation de l'enfant à compter du jugement du 22 mars 2012 et rejeté en conséquence les demandes de la mère pour la période antérieure ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « S'agissant de la contribution financière à l'entretien et à l'éducation de l'enfant commun, il y a lieu d'écarter les prétentions relatives à la période antérieure à l'établissement de la paternité par le jugement du tribunal de grande instance du 22 mars 2012, étant rappelé que par arrêt du 10 mars 2010, cette cour a infirmé l'ordonnance de non-conciliation initiale sur la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant faute de filiation paternelle légalement établie, l'imputabilité de cet état de droit à la mère, mais aussi les droits sociaux ouverts par cette situation puisque Corinne X... a bénéficié en sus d'une prime de naissance de 890 ¿ en juin 2009, de l'allocation PAJE et de l'allocation de soutien familial d'un montant global mensuel de 265, 35 euros. La décision déférée ayant fait courir la contribution alimentaire du père à compter du 22 mars 2012 est ainsi pleinement justifiée et doit être confirmée » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Eu égard aux situations financières des parties, examinées ci-après, et compte tenu des relations entre le père et l'enfant, il y a lieu de fixer provisoirement le montant de la contribution paternelle à l'entretien et à l'éducation de l'enfant à la somme mensuelle de 200euros avec indexation, ce rétroactivement à compter du 22 mars 2012, date à laquelle la paternité de M. Damien Y...a été officiellement reconnue » ;
ALORS QUE, premièrement, les effets de la présomption de paternité, quand bien même elle aurait été constatée par une décision de justice postérieure, remontent à la naissance de l'enfant ; qu'en fixant le point de départ de la contribution du père au jour du prononcé de la décision constatant la filiation de l'enfant à son égard et non au jour de la naissance, au motif que l'absence de lien de filiation établi à l'égard du père était imputable à la mère, les juges du fond ont violé les articles 312, 371-2 et 373-2-2 du Code civil ;
ALORS QUE, deuxièmement, s'agissant d'apprécier si une pension alimentaire est due au titre de la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, les juges du fond sont tenus d'examiner tant les besoins de l'enfant que les ressources respectives de chaque parent ; qu'en se bornant, pour écarter la demande de la mère, à relever que celle-ci avait « bénéficié en sus d'une prime de naissance de 890 euros en juin 2009, de l'allocation PAJE et de l'allocation de soutien familial d'un montant global mensuel de 265, 35 euros », les juges du fond ont à tout le moins privé leur décision de base légale au regard des articles 371-2 et 373-2-2 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 15-14617
Date de la décision : 31/03/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 08 juillet 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 31 mar. 2016, pourvoi n°15-14617


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.14617
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