LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à Paris, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur la question prioritaire de constitutionnalité formulée par mémoire spécial reçu le 4 janvier 2016 et présenté par :
- M. Luc X...,
à l'occasion du pourvoi formé par lui contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 7e chambre, en date du 26 mai 2015, qui, pour provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence envers un groupe de personnes en raison de leur origine ou de leur appartenance à une ethnie, une race, une religion ou une nation déterminée, l'a condamné à 10 000 euros d'amende et à la privation de son droit d'éligibilité et a prononcé sur intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 1er mars 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Parlos, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de M. le conseiller PARLOS, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIÉ, de la société civile professionnelle BOUZIDI et BOUHANNA, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général LE DIMNA ;
Vu les observations produites ;
Attendu que la question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :
" Les dispositions de l'article 24, alinéas 8, 10 et 11 de la loi du 29 juillet 1881 sur la presse et 131-26 2° du code pénal portent-elles atteinte aux droits et libertés que garantit la Constitution, et plus précisément au principe de nécessité et de proportionnalité des peines garanti par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme de 1789 et au principe de la liberté d'expression garanti par l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme de 1789 ? " ;
Attendu que les dispositions législatives contestées sont applicables à la procédure et n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;
Mais attendu que la question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle ;
Et attendu que la question posée ne présente pas un caractère sérieux, dès lors que, d'une part, les peines édictées par les alinéas 8, 10 et 11, devenus, respectivement, les alinéas 7, 9 et 10 de l'article 24 de la loi du 29 juillet 1881 pour la sanction du délit défini à l'alinéa 8, devenu l'alinéa 7, du même article, d'un an d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende ou de l'une de ces deux peines seulement, comme la peine complémentaire de la privation des droits énumérés au 2° de l'article 131-26 du code pénal pour une durée de cinq ans au plus, sont conformes au principe de nécessité et répriment, sans disproportion manifeste, la provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, et, d'autre part, l'atteinte portée à la liberté d'expression par de telles sanctions, prévues par la loi et prononcées par le juge en tenant compte des circonstances propres à l'espèce, apparaît aussi nécessaire, adaptée et proportionnée, dans une société démocratique, à l'objectif de lutte contre le racisme et de protection de l'ordre public poursuivi par le législateur ;
D'où il suit qu'il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ;
Par ces motifs :
DIT N'Y AVOIR LIEU A RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le trente mars deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;