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16/03/2016 | FRANCE | N°14-25068

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 16 mars 2016, 14-25068


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche, après avis de la chambre criminelle :
Vu l'article 78-2-2 du code de procédure pénale ;
Attendu que seul un officier de police judiciaire, assisté, le cas échéant, par un agent de police judiciaire, peut procéder à un contrôle d'identité, dans les conditions prévues par ce texte ;
Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par un premier président, et les pièces de la procédure, que M. X..., de nationalité tunisienne, interpell

é à la suite d'un contrôle d'identité, a fait l'objet d'une retenue aux fins de v...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche, après avis de la chambre criminelle :
Vu l'article 78-2-2 du code de procédure pénale ;
Attendu que seul un officier de police judiciaire, assisté, le cas échéant, par un agent de police judiciaire, peut procéder à un contrôle d'identité, dans les conditions prévues par ce texte ;
Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par un premier président, et les pièces de la procédure, que M. X..., de nationalité tunisienne, interpellé à la suite d'un contrôle d'identité, a fait l'objet d'une retenue aux fins de vérification de son droit de circulation ou de séjour, puis d'une mesure de rétention sur décision du préfet ;
Attendu que, pour confirmer le maintien en rétention, l'ordonnance, après avoir relevé que M. X... soutenait que seuls des agents de police judiciaire étaient présents sur les lieux lors du contrôle, retient que les services de police ont procédé au contrôle d'identité en application de l'article 78-2-2 du code de procédure pénale, lequel autorise, d'une part, des contrôles d'identité, par renvoi à l'article 78-2 du même code, d'autre part, des fouilles, notamment de véhicules, de sorte que la présence d'officiers de police judiciaire n'est nécessaire que pour les fouilles tandis que les contrôles peuvent être opérés par des agents de police judiciaire agissant sous les ordres de ceux-là ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'article 78-2-2 susvisé ne distingue pas selon que le contrôle se limite à celui de l'identité d'une personne ou est associé à une visite de véhicule, le premier président a violé ce texte ;
Et vu les articles L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire et 1015 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'elle déclare l'appel recevable, l'ordonnance rendue le 25 octobre 2013, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance partiellement cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize mars deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Rémy-Corlay, avocat aux Conseils, pour M. X....
Le moyen reproche à l'ordonnance attaquée d'AVOIR confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de MARSEILLE du 24 octobre 2013 ordonnant, pour une durée maximale de vingt jours commençant cinq jours après la décision de placement en rétention, le maintien dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire de Monsieur X... Bilel ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « l'article R 552-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : "Le premier président ou son délégué est saisi par une déclaration d'appel motivée transmise par tout moyen au greffe de la cour d'appel. La déclaration est enregistrée avec mention de la date et de l'heure. Le greffier de la cour d'appel avise immédiatement le greffe du tribunal de grande instance qui lui transmet sans délai le dossier." ; que l'article R 552-15 alinéa 1 du même code précise que le greffier de la cour d'appel fait connaître aux partie et au ministère public la date de l'audience au fond ; qu'il résulte de ces textes que dès lors qu'à l'audience au cours de laquelle est évoqué l'appel à l'encontre de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention le dossier complet de la procédure, incluant la requête et les pièces visées à l'article R 552.3 du CESEDA, est à la disposition des parties et du premier président et qu'un débat contradictoire portant sur l'ensemble des pièces utile peut être mené, aucun grief ne saurait être tiré de l'éventuel caractère incomplet du dossier transmis par le greffe du juge des libertés et de la détention après avis de l'appel ; qu'en l'espèce à l'ouverture des débats l'intégralité de la procédure, incluant les pièces de la procédure pénale ayant donné lieu à l'interpellation et à la retenue de Monsieur Bilel X... et les pièces de la procédure administrative d'éloignement et de placement au centre de rétention administrative, y compris la copie du registre prévu à l'article L 553-1 du CESEDA, soumise au premier juge et portant le cachet humide apposé par le greffier de ce magistrat, était à la disposition des parties ; que saisi d'une contestation portant sur la régularité de sa saisine, le juge des libertés et de la détention, comme le premier président, qui ne saurait fonder sa décision sur une présomption de délégation de signature, peut néanmoins, en observant le principe du contradictoire, rechercher et prendre en considération un arrêté préfectoral donnant délégation de signature, publié au Recueil des actes administratifs de la préfecture qui ne fait pas partie des pièces devant, aux termes de l'article R 552-3 du CESDA, à peine d'irrecevabilité, accompagner la requête aux fins de prolongation ; que tel est le cas en l'espèce, puisque saisi, à hauteur d'appel, de la fin de non-recevoir tirée de l'absence d'une pièce annexée à sa requête initiale, le préfet a communiqué la délégation de signature du 08 juillet 2013 habilitant le fonctionnaire signataire des décisions notifiées à Monsieur Bilel X... ; que l'article 78-2-2 du code de procédure pénale autorise sur réquisitions écrites du procureur de la République aux fins recherche et de poursuite des actes de terrorisme et d'autres infractions graves les officiers de police judiciaire, assistés, le cas échéant, des agents de police judiciaire et des agents de police judiciaire adjoints à procéder non seulement aux contrôles d'identité prévus sixième alinéa décompte administratif résultant de la circulaire du 20 octobre 2000 de l'article 78-2 mais aussi à la visite des véhicules circulant, arrêtés ou stationnant sur la voie publique ou dans des lieux accessibles au public ; que, par ce renvoi, cette disposition légale autorise le contrôle d'identité de toute personne, quel que soit son comportement, se trouvant dans la zone et aux heures visées ; que par ailleurs, s'agissant de la présence sur les lieux du contrôle de seuls APJ, qu'il faut relever que l'article 78-2-2 du code de procédure pénale prévoit la présence d'OPJ ; que toutefois cet article, prévu pour la recherche d'infractions graves de terrorisme notamment, autorise, d'une part des contrôles d'identité - et renvoie donc à l'article 78-2 alinéa 6 décompte administratif résultant de la circulaire du 20 octobre 2000 et, d'autre part des fouilles, notamment de véhicules ; que la présence d'OPJ n'est donc nécessaire que pour les fouilles tandis que les contrôles peuvent être opérés par les APJ agissant sous leurs ordres ; qu'en l'espèce il résulte de l'examen de la procédure que Monsieur Billel X... a fait l'objet d'un contrôle d'identité le 19 octobre 2013 dans le cadre de réquisitions écrites du procureur de la république en date du 17.10.2013 alors qu'il se trouvait dans le périmètre temporel et géographique fixé par cette autorité, précisément à 11h30 rue des trois mages à Marseille ; que n'ayant pu justifier de son droit de circuler ou de séjourner en France Monsieur Bilel X... était placé en retenue administrative en application de l'article L611-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile suivant procès-verbal du même jour à 11h50mn avec effet à l'heure de son interpellation ; que conformément au texte susvisé l'OPJ lui notifiait en langue française qu'il comprenait, qu'il bénéficiait des droits suivants : 1° du droit d'être assisté par un interprète, 2° du droit d'être assisté par un avocat désigné par lui ou commis d'office par le bâtonnier, 3° du droit d'être examiné par un médecin, 4° du droit de prévenir à tout moment sa famille et toute personne de son choix et de prendre tout contact utile, 5° du droit d'avertir ou de faire avertir les autorités consulaires de son pays ; que le procureur de la république était avisé de cette mesure immédiatement ; qu'il était également avisé de l'opération de signalement décidée à l'égard de l'intéressé ; qu'il était mis fin à la procédure de retenue suivant procès-verbal du 19.10.2013 établi de 16h15 à 16h20 après 4 heures 50 mn de retenue au cours desquelles l'intéressé n'a pas été mis en présence de gardés à vue ; qu'il résulte de ces constations que la procédure suivie a été parfaitement conforme aux exigences légales, les policiers interpellateurs n'ayant pas à caractériser un quelconque comportement de la part des personnes soumises au contrôle d'identité décidé par le procureur de la république et Monsieur Bilel X..., ayant été informé de ses droits ; qu'il résulte de l'article L 552-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) que l'assignation à résidence n'est possible qu'après la remise à un service de police ou de gendarmerie du passeport et de tout document justificatif de l'identité de l'étranger retenu ; qu'à défaut de remise préalable du passeport en original ou, a fortiori, en l'absence de passeport, l'assignation à résidence n'est pas juridiquement envisageable ; qu'en l'espèce Monsieur Bilel X... est démuni de passeport et ne saurait donc bénéficier d'une assignation à résidence »
ET AUX MOTIFS REPUTES ADOPTES QUE « sur la nullité : il ressort du procès-verbal de mise à disposition n° 13/151/01, que Mohamed X... a répondu aux fonctionnaires interpellateurs en langue française ; que par la suite, le procès-verbal de notification des droits afférent à la retenue administrative indique notamment que l'intéressé a renoncé à son droit d'être assisté par un avocat ; que l'intéressé a signé ce procès-verbal à 12h ; qu'au-delà de ses seules affirmations à l'audience de ce jour, il ne démontre pas que le procès-verbal en question qui fait foi jusqu'à preuve du contraire serait entaché d'irrégularité ; qu'il ne saurait non plus être soutenu que dans toutes les procédures de retenues administratives les personnes concernées renoncent à l'assistance d'un avocat ; que ce moyen est en conséquence rejeté ; sur le fond : que l'intéressé n'a pas de garantie de représentation et ne dispose pas de documents d'identité notamment d'un passeport en original et en cours de validité dont il indique à l'audience qu'il a été perdu chez un ami ; que le maintien en rétention de l'intéressé est nécessaire pour mettre à exécution la mesure d'éloignement dont il fait l'objet »
ALORS QUE 1°) il ne peut être procédé à un contrôle d'identité sur réquisitions écrites du procureur de la République qu'en présence d'éléments de nature à le justifier tenant à la recherche et à la poursuite des infractions intervenant dans les conditions de l'article 78-2-2 du Code de procédure pénale ; qu'en disant, après avoir constaté que le contrôle d'identité de Monsieur X... avait été effectué dans le cadre de réquisitions écrites du procureur de la République du 17 octobre 2013, que ledit contrôle pouvait être effectué à l'égard « de toute personne, quel que soit son comportement » de sorte qu'il n'y aurait pas lieu d'en préciser les motifs dans le procès-verbal de police, le premier président de la Cour d'appel a violé l'article 78-2-2 du Code de procédure pénale et l'article 2 du protocole n° 4 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
ALORS QUE 2°) les contrôles d'identité effectués sur réquisitions écrites du procureur de la République dans le cadre de l'article 78-2-2 du Code de procédure pénale doivent être accomplis par « les officiers de police judiciaire, assistés, le cas échéant, des agents de police judiciaire » ; qu'en se contentant de dire que l'exigence d'un OPJ ne valait que pour les fouilles de véhicules autorisées par l'article 78-2 du Code de procédure pénale, les APJ pouvant valablement procéder seuls aux contrôles d'identité simples, soit sans constater que le contrôle d'identité de Monsieur X..., effectué dans le cadre de réquisitions écrites du procureur de la République du 17 octobre 2013, avait été opéré par un OPJ, le premier président de la Cour d'appel a violé l'article 78-2-2 du Code de procédure pénale et l'article 2 du protocole n° 4 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
ALORS QUE 3°) les procès-verbaux d'interpellation et la justification de la délégation de signature du signataire de la requête portant demande de prorogation de la rétention administrative constituent des pièces justificatives utiles au sens de l'article R. 552-3 du CESEDA ; que ces pièces sont indispensables au juge judiciaire pour apprécier la régularité de la procédure servant de fondement à la rétention ; qu'il ne peut être suppléé à l'absence du dépôt de ces pièces par leur seule communication à l'audience ; qu'en retenant qu'il était suffisant que les pièces justificatives utiles, en ce compris la justification de la délégation de signature au signataire de la requête, aient été produites devant le juge des libertés et de la détention et que le principe du contradictoire avait été respecté dès lors que les pièces de procédure avaient été ainsi soumises au débat contradictoire, le premier président de la Cour d'appel a violé ensemble l'article R. 552-3 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'article 16 du Code de procédure civile, le principe du droit de la défense et l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 14-25068
Date de la décision : 16/03/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Analyses

ETRANGER - Mesures d'éloignement - Rétention dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire - Prolongation de la rétention - Saisine du juge des libertés et de la détention - Régularité - Contrôle d'identité sur réquisitions écrites du procureur de la République - Contrôle d'identité sur le fondement de l'article 78-2-2 du code de procédure pénale - Compétence d'un officier de police judiciaire, assisté, le cas échéant, par un agent de police judiciaire

Seul un officier de police judiciaire, assisté, le cas échéant, par un agent de police judiciaire, peut procéder à un contrôle d'identité, dans les conditions prévues par l'article 78-2-2 du code de procédure pénale


Références :

article 78-2-2 du code de priocédure pénale

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 25 octobre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 16 mar. 2016, pourvoi n°14-25068, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Batut
Avocat général : Mme Valdès-Boulouque
Rapporteur ?: Mme Gargoullaud
Avocat(s) : Me Rémy-Corlay

Origine de la décision
Date de l'import : 22/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.25068
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