La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/02/2016 | FRANCE | N°14-25732

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 24 février 2016, 14-25732


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X...et Mme Y... se sont mariés le 16 septembre 1961 ; qu'une ordonnance de non-conciliation du 18 avril 2006 a condamné M. X... à verser à Mme Y... une pension alimentaire mensuelle ; qu'un arrêt du 4 juin 2008 a annulé cette décision au motif que l'épouse n'avait pas été assistée de son curateur lors de cette procédure ; que, par acte du 6 mai 2009, Mme Y..., assistée de son curateur, a assigné son mari en divorce ;
Sur les trois premiers moyens, ci-après

annexés :
Attendu que ces moyens ne sont manifestement pas de nature à ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X...et Mme Y... se sont mariés le 16 septembre 1961 ; qu'une ordonnance de non-conciliation du 18 avril 2006 a condamné M. X... à verser à Mme Y... une pension alimentaire mensuelle ; qu'un arrêt du 4 juin 2008 a annulé cette décision au motif que l'épouse n'avait pas été assistée de son curateur lors de cette procédure ; que, par acte du 6 mai 2009, Mme Y..., assistée de son curateur, a assigné son mari en divorce ;
Sur les trois premiers moyens, ci-après annexés :
Attendu que ces moyens ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais, sur le quatrième moyen :
Vu les articles 1235 et 1376 du code civil ;
Attendu que, pour rejeter la demande de M. X... en remboursement des pensions alimentaires acquittées en application de l'ordonnance du 18 avril 2006 jusqu'à son annulation, l'arrêt retient que celle-ci n'a aucune incidence sur le devoir de secours auquel était tenu le mari envers son épouse ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'obligation de rembourser résultait de plein droit de l'annulation de l'ordonnance de non-conciliation, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et vu les articles L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire et 1015 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de remboursement formée par M. X... au titre des pensions alimentaires acquittées en application de l'ordonnance du 18 avril 2006 jusqu'à l'annulation de celle-ci, l'arrêt rendu le 6 décembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre février deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la fin de non recevoir soulevée par Monsieur X... tendant à voir dire et juger la demande en divorce pour faute de Madame Y... épouse X... irrecevable ;
AUX MOTIFS QUE la déclaration d'acceptation du principe de la rupture ne produit ses effets que pendant la durée de l'instance en divorce et n'est pas susceptible de rétractation, même en appel. Toutefois elle ne fait pas obstacle en cas de désistement d'instance à l'engagement d'une nouvelle procédure sur le fondement de la faute. En outre le procès verbal d'acceptation du principe de la rupture du 11 avril 2006 a été joint à l'ordonnance de non-conciliation du même jour qui a été annulée par arrêt de la cour d'appel de Nîmes du 4 juin 2008, en raison de l'absence d'assistance de Madame Josette Y... par son curateur. En conséquence ledit procès verbal, annulé de ce fait, ne saurait faire obstacle à l'engagement par l'épouse d'une nouvelle procédure en divorce pour faute. De surcroît le désistement de Madame Josette Y... à l'audience de conciliation du 16 septembre 2008, avant même l'introduction par assignation d'une demande en divorce, ne saurait présumer d'une quelconque réconciliation des époux privant l'épouse de la possibilité d'introduire une demande en divorce fondée sur des faits antérieurs au désistement. La fin de non recevoir soulevée par Monsieur André X... sera donc écartée.
ALORS, QUE le désistement d'une action a pour effet d'éteindre le droit et d'effacer les griefs anciens et s'oppose à ce que, en l'absence de griefs nouveaux, il soit formé une nouvelle demande motivée par les mêmes faits ; que dès lors, le désistement d'action, entraînant l'abandon du droit qui fait l'objet de la contestation, est, en matière de divorce pour faute, assimilé à la réconciliation prévue par l'article 244 du Code civil ; qu'en conséquence, en retenant que le désistement de Madame Josette Y... à l'audience de conciliation du septembre 2008, avant même l'introduction par assignation d'une demande en divorce, ne saurait présumer d'une quelconque réconciliation des époux privant l'épouse de la possibilité d'introduire une demande en divorce fondée sur des faits antérieurs au désistement, la cour d'appel a privé d'effet le désistement d'action de Madame Y... épouse X... et ainsi violé l'article 384 du Code de procédure civile, ensemble l'article 244 du Code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé le divorce des époux aux torts exclusifs de Monsieur X... ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'il est constant au vu des écritures des parties et des éléments produits de part et d'autre, que la séparation des époux est intervenue fin 1992. Aux termes d'une déclaration de main courante effectuée le 4 janvier 1993, Madame Josette Y... a déclaré avoir quitté le domicile conjugal le 20 décembre 1992 en raison de menaces de son mari qui avait réintégré le domicile conjugal après avoir vécu pendant sept ans avec une autre femme. Ainsi que le relève de façon pertinente le premier juge, l'entretien par le mari d'une relation adultère est corroborée par divers témoignages précis et concordants émanant notamment de Monsieur Jean-Pierre Z...et Madame Christine A...qui confirment que Monsieur André X... ne vivait plus au domicile conjugal depuis 1985 et résidait chez une maîtresse à Port de Bouc. L'infidélité établie de Monsieur André X... pendant plusieurs années constitue une violation grave et renouvelée des obligations du mariage et justifie, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres griefs, le prononcé du divorce aux torts exclusifs du mari, celui-ci n'ayant formé aucune demande reconventionnelle pouvant justifier l'examen des griefs allégués contre son épouse ;
AUX MOTIFS ADOPTES QU'il y a lieu d'observer que les époux sont séparés de fait depuis 1992 et qu'il convient en conséquence de rechercher les causes qui, à cette époque, ont été à l'origine de la séparation du couple. Madame Y... épouse X... produit la copie d'une main courante datée du 4. 01. 1993 aux termes de laquelle elle déclare, avoir quitté le domicile conjugal depuis le 20. 12. 1992 car elle a été menacée par son mari qui après avoir quitté 7 ans le domicile conjugal pour vivre avec une autre femme, est revenu s'installer au domicile conjugal. Ces déclarations sont corroborées par l'attestation de Monsieur Z...Jean-Pierre qui précise que Monsieur X... avait dans ces périodes une de ses amies comme maîtresse qui s'appelait Liliane et qu'il avait vécu de 1985 à 1992 à Port de Bouc chez une de ses amies certainement aussi sa maîtresse. L'attestation de Madame A...Christine confirme le fait qu'à cette époque Monsieur ne vivait plus au foyer familial mais à Port de Bouc chez Madame Thérèse B.... En outre il est établi par la pièce numéro 87 (mot manuscrit de Liliane et Papi et photos de réunions familiales) que Monsieur X... entretenait une relation conjugale. Le comportement infidèle de Monsieur X... est donc à l'origine de la séparation. Ces faits constituent une violation grave et renouvelée des devoirs et obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune sans qu'il soit nécessaire d'analyser les autres griefs soulevés. Monsieur X... ne sollicitant pas le divorce, il n'y a pas lieu d'analyser les griefs invoqués contre son épouse. Il convient en conséquence de prononcer le divorce aux torts exclusifs de l'époux.
ALORS QUE les jugements doivent être motivés ; qu'en retenant par motifs adoptés que le comportement infidèle de Monsieur X... est à l'origine de la séparation, sans répondre aux conclusions de ce dernier qui faisaient valoir l'inertie sociale et familiale de Madame Y... épouse X..., ce dont il résultait que cette incapacité de l'épouse à prendre soin de son mari, de leurs enfants et d'elle-même était à l'origine des difficultés du couple, la cour d'appel a privé sa décision de motifs en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Monsieur X... à payer à Madame Y... la somme de 20 000 euros à titre de prestation compensatoire ;
AUX MOTIFS QUE la durée du mariage a été de 51 ans, dont 31 ans de vie commune. Les deux époux ont élevé quatre enfants dont l'un est décédé, ils possèdent en commun une maison d'habitation sise à Fos sur Mer, occupée par Monsieur André X... à titre onéreux. Ils souffrent chacun de problèmes de santé importants. Madame Josette Y..., âgée de 73 ans, a travaillé sur de brèves périodes jusqu'en 1962 et courant 1986. Elle a fait l'objet d'une déclaration médicale d'inaptitude au travail en 2003 et d'un placement sous curatelle renforcée en 2005. Ses droits à retraite sont particulièrement réduits. Elle a perçu en 2011 une pension de retraite de 724, 27 euros outre une allocation logement de 264, 93 euros, soit un revenu mensuel moyen de 1 007 euros. Elle acquitte un loyer mensuel de 430 euros et bénéficie d'un service d'aide à domicile dont elle supporte partiellement la charge à hauteur de 100 euros par mois. Elle supporte seule les charges de la vie courante. Monsieur André X..., âgée de 75 ans, perçoit une retraite mensuelle de 1 457 euros et occupe le domicile conjugal pour lequel il sera redevable d'une indemnité d'occupation. Il a été victime d'une hémiplégie en 1992 et en conserve quelques séquelles. L'examen des conditions de vie respectives des parties révèle une disparité au préjudice de l'épouse qui justifie le versement à son profit d'une prestation compensatoire qu'il convient de fixer à la somme de 20 000 euros en capital, l'arbitrage du premier juge présentant un caractère excessif au regard des revenus modestes de Monsieur X... ;
ALORS, QUE la prestation compensatoire, destinée à compenser la disparité dans les conditions de vie respectives des époux après la disparition du lien conjugal, est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ; qu'à cet effet, le juge prend notamment en considération la situation respective des époux en matière de charges prévisible de la vie courante ; que pour fixer le montant de la prestation compensatoire due à Mme Y..., l'arrêt se borne à relever que l'épouse supporte seule les charges de la vie courante et acquitte un loyer mensuel de 430 euros ; qu'en se déterminant ainsi, sans envisager aussi, comme elle y était pourtant invitée, la situation de Monsieur X... quant aux charges afférents à la vie courante, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 270 et 271 du Code civil ;
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de remboursement formée par Monsieur X... au titre des pensions alimentaires acquittées en application de l'ordonnance du 18 avril 2006 jusqu'à l'annulation de celle-ci ;
AUX MOTIFS QU'en vertu des dispositions conjuguées des articles 1235 et 1376 du Code civil, tout payement suppose une dette : ce qui a été payé sans être dû est sujet à répétition. Celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû s'oblige à le restituer à celui de qui il l'a indûment reçu. Toutefois la répétition n'est pas admise à l'égard des obligations naturelles qui ont été volontairement acquittées. Monsieur André X... soutient que Madame Josette Y... est redevable d'une somme de 11 800 euros correspondant aux sommes qu'il lui a versées au titre du devoir de secours en application d'une ordonnance de non-conciliation du 18 avril 2006 qui a été annulée par la cour d'appel le 4 juin 2008. L'annulation de l'ordonnance, qui était motivée par l'irrégularité de procédure tenant à l'absence d'assistance de la créancière par son curateur, n'avait aucune incidence sur le devoir de secours auquel Monsieur X..., qui n'avait pas repris la vie commune avec son épouse, restait tenu envers elle. La demande de remboursement formée par Monsieur X... au titre des pensions alimentaires qu'il a acquittées en application de la décision du 18 avril 2006 jusqu'à l'annulation de celle-ci sera donc rejetée.
ALORS QUE celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû s'oblige à le restituer à celui de qui il l'a indûment reçu ; la répétition n'est pas admise à l'égard des obligations naturelles qui ont été volontairement acquittées ; que l'obligation de versement par Monsieur X... d'une pension alimentaire à sa femme à hauteur de 400 euros par mois avait pour origine l'ordonnance du 18 avril 2006 ce dont il résultait que ce paiement n'était pas une obligation naturelle volontairement acquittée ; qu'en retenant, pour rejeter la demande de remboursement formée par Monsieur X... au titre des pensions alimentaires acquittées en application de l'ordonnance du 18 avril 2006 jusqu'à l'annulation de celle ci, que « l'annulation de l'ordonnance, qui était motivée par l'irrégularité de procédure tenant à l'absence d'assistance de la créancière par son curateur, n'avait aucune incidence sur le devoir de secours auquel Monsieur X..., qui n'avait pas repris la vie commune avec son épouse, restait tenu envers elle » quant l'annulation de l'ordonnance devait produire tous ses effets et privait de tout fondement les versements effectuées par Monsieur X... à ce titre, la cour d'appel a violé les articles 1235 et 1376 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 14-25732
Date de la décision : 24/02/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 06 décembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 24 fév. 2016, pourvoi n°14-25732


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.25732
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award