LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 24 novembre 2014), que la SCI du Canal (la SCI) a fait assurer en 2008 par la société Axa France IARD (l'assureur) un immeuble ancien, déclaré vide, dans lequel elle a entrepris des travaux de rénovation à l'effet de le louer en habitation ; qu'à l'issue de ce contrat, renouvelé en 2009 et venu à échéance le 16 mars 2010, les parties ont établi le 26 mars 2010, sur la foi des informations communiquées par la SCI faisant état de l'achèvement des travaux entrepris dans l'immeuble assuré et de sa location à 100 % en habitation, un nouveau contrat d'assurance à effet du 15 mars 2010, comportant de nouvelles garanties moyennant une prime d'assurance moins élevée ; qu'à la suite de la destruction de l'immeuble dans un incendie survenu dans la nuit du 6 au 7 février 2011, l'assureur a refusé sa garantie, en se prévalant d'une fausse déclaration intentionnelle de l'assurée lors de la souscription du nouveau contrat ; que la SCI l'a assigné en paiement d'une certaine somme au titre des pertes et frais engendrés par le sinistre ;
Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de prononcer la nullité du contrat multirisque habitation pour fausse déclaration intentionnelle, et de la débouter en conséquence de ses demandes tendant à voir l'assureur condamné à lui verser une certaine somme, alors, selon le moyen, que la fausse déclaration intentionnelle de l'assuré procède des seules réponses qu'il a apportées aux questions précises posées par l'assureur lors de la conclusion du contrat, sans pouvoir résulter des mentions, relatives à d'éventuelles déclarations de l'assuré, insérées dans les conditions particulières de la police ; qu'en l'espèce, pour prononcer la nullité du contrat litigieux, l'arrêt attaqué a énoncé que la volonté de l'assuré de faire une fausse déclaration résultait des indications portées sur les conditions particulières de la police ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé les articles L. 112-3, alinéa 4, L. 113-2-2° et L. 113-8 du code des assurances ;
Mais attendu que, d'une part, comme l'a exactement énoncé l'arrêt, selon l'article L. 113-8 du code des assurances, le contrat d'assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré et l'article L. 113-2 n'impose pas l'établissement d'un questionnaire préalable écrit ; que, d'autre part, le juge peut prendre en compte, pour apprécier l'existence d'une fausse déclaration, les déclarations faites par l'assuré à sa seule initiative lors de la conclusion du contrat ; qu'ayant relevé que, d'abord, c'était l'assuré lui-même qui avait pris attache avec l'assureur en se rendant à son agence pour l'informer de la fin des travaux de transformation et de ce que les locaux étaient loués, qu'ensuite, l'agent avait écrit à la SCI pour lui transmettre une proposition de contrat en faisant état de cette circonstance et en lui laissant le soin de prendre connaissance de ce contrat pour, s'il lui donnait satisfaction, le retourner signé, la cour d'appel s'est fondée, à bon droit, pour annuler le contrat, sur de telles déclarations dont elle avait ainsi fait ressortir le caractère spontané et mensonger en relevant qu'au jour du sinistre, peu de travaux avaient été entrepris, les derniers ayant été réalisés en septembre 2010, et que le bâtiment était inhabitable et totalement inoccupé ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la SCI du Canal aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SCI du Canal, la condamne à payer à la société Axa France IARD la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre février deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour la SCI du Canal.
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la nullité d'un contrat multirisque habitation pour fausse déclaration intentionnelle de l'assuré (la SCI du Canal, l'exposante) et d'avoir en conséquence débouté celui-ci de ses demandes tendant à voir l'assureur (la société Axa France IARD) condamné à lui verser la somme de 634 502 ¿ outre les intérêts légaux ;
AUX MOTIFS QUE l'article L. 113-2-2° du code des assurances précisait que l'assuré était obligé de répondre exactement aux questions posées, notamment dans le formulaire de déclaration du risque par lequel l'assureur l'interrogeait, lors de la conclusion du contrat, sur les circonstances qui étaient de nature à faire apprécier par celui-ci les risques qu'il prenait en charge ; que la société Axa rapportait la preuve de la matérialité de la fausse déclaration intentionnelle et de la volonté de la SCI du Canal de faire une fausse déclaration, de même qu'elle démontrait que la déclaration inexacte de la part de cette dernière avait changé l'objet du risque ou modifié l'opinion qu'elle s'en faisait ; que la société AXA produisait le contrat signé le 26 mars 2010 par le représentant de la SCI du Canal stipulant expressément, au paragraphe « déclaration du souscripteur » : « Les biens immobiliers assurés (...) (étaient) loués à 100 % en habitation. A la souscription, la surface vide d'occupant n'ex(cédait) pas 25 % de la surface totale (hors greniers non habitables, sous-sols, caves et parkings). En cours de contrat, l'assuré s'engage(ait) à nous déclarer avant la prochaine échéance si l'un des biens immobiliers restait entièrement vacant » ; qu'ainsi que l'avait justement apprécié le tribunal, la formulation de l'article L. 113-2 du code des assurances, par l'emploi de l'adverbe « notamment », ne posait pas le principe selon lequel l'établissement d'un questionnaire préalable écrit serait le corollaire de l'obligation de déclaration, l'assureur ayant la possibilité de poser des questions par un autre moyen, en particulier verbalement ; qu'en tout état de cause, les indications portées sur les conditions particulières du contrat, de par leur précision, démontraient bien que la SCI avait répondu à un questionnement ciblé de la part de l'assureur (arrêt attaqué, p. 4, p. 5, 1er al. et in fine, et p. 6, 1er à 3ème al.) ;
ALORS QUE la fausse déclaration intentionnelle de l'assuré procède des seules réponses qu'il a apportées aux questions précises posées par l'assureur lors de la conclusion du contrat, sans pouvoir résulter des mentions, relatives à d'éventuelles déclarations de l'assuré, insérées dans les conditions particulières de la police ; qu'en l'espèce, pour prononcer la nullité du contrat litigieux, l'arrêt attaqué a énoncé que la volonté de l'assuré de faire une fausse déclaration résultait des indications portées sur les conditions particulières de la police ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé les articles L. 112-3, alinéa 4, L. 113-2-2° et L. 113-8 du code des assurances.