LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 19 novembre 2014), qu'à la suite d'un contrôle portant sur les années 2008 et 2009, l'URSSAF de Seine-Maritime, aux droits de laquelle vient l'URSSAF de Haute-Normandie, a contesté la possibilité pour la société Cars Grisel, devenue société Grisel (la société), de déduire de la rémunération de ses salariés devant être prise en compte dans le calcul de la réduction de cotisations sur les bas salaires la fraction des sommes versées, en application d'un accord d'entreprise, au titre des temps de coupure et d'amplitude, qui excédait les montants prévus par la convention collective étendue applicable dans l'entreprise ; que la société a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de rejeter son recours, alors, selon le moyen :
1°/ que la réduction de la part patronale de cotisation qui est prévue par l'article L. 241-13 III du code de la sécurité sociale est égale au produit de la rémunération mensuelle, telle que définie à l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale par un coefficient, lequel est fonction du rapport entre le salaire minimum de croissance calculé pour un mois sur la base de la durée légale du travail et la rémunération mensuelle du salarié telle que définie à l'article L. 242-1, « hors rémunération des temps de pause, d'habillage et de déshabillage versée en application d'une convention ou d'un accord collectif étendu en vigueur au 11 octobre 2007 » ; qu'il s'ensuit que la rémunération des temps de pause, d'habillage et de déshabillage est exclue de l'assiette de rémunération retenue pour le calcul de la réduction de cotisations prévue à l'article L. 241-13 III du code de la sécurité sociale dès lors qu'elle est versée en application en application d'une convention collective étendue, y compris dans l'hypothèse où le montant a été fixé par un accord d'entreprise plus favorable que la convention collective ; qu'en décidant que seule l'indemnisation des temps de coupure et d'amplitude dont le principe et le montant ont été déterminés dans une convention collective peut être déduite de l'assiette de la part des cotisations de sécurité sociale incombant à l'employeur, aux termes de l'article L. 241-13 III du code de la sécurité sociale, la cour d'appel a violé la disposition précitée ;
2°/ qu'aux termes de l'article L. 241-13 III du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de l'article 26 de la loi du 3 décembre 2008, « le montant de la réduction est calculé chaque mois civil, pour chaque salarié », qu'il « est égal au produit de la rémunération mensuelle, telle que définie à l'article L. 242-1 par un coefficient » ; que « ce coefficient est déterminé par application d'une formule fixée par décret ; qu'il « est fonction du rapport entre le salaire minimum de croissance calculé pour un mois sur la base de la durée légale du travail et la rémunération mensuelle du salarié telle que définie à l'article L. 242-1 » du code de la sécurité sociale ; qu'il s'ensuit que seule la rémunération d'un temps de travail effectif entre dans l'assiette de la rémunération prise en considération pour le calcul de la réduction prévue à l'article L. 241-13 III du code de la sécurité sociale ; qu'en se bornant à énoncer que les indemnisations prévues par un accord d'entreprise, en contrepartie d'un temps de coupure ou d'amplitude, ne sont pas exclues des modalités de calcul de la réduction de cotisations patronales prévues par l'article L. 241-13 III du code de la sécurité sociale, sans rechercher si le temps de coupure ou d'amplitude constituait un temps de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 3121-2 et L. 3121-1 du code du travail et de la disposition précitée ;
Mais attendu, selon l'article L. 241-13, III, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, que le coefficient pris en compte pour le calcul du montant de la réduction de cotisations sur les bas salaires est fonction du rapport entre le salaire minimum de croissance calculé pour un mois sur la base de la durée légale du travail et la rémunération mensuelle du salarié telle que définie à l'article L. 242-1, hors rémunération des heures complémentaires et supplémentaires dans la limite, en ce qui concerne la majoration salariale correspondante, des taux de 25 % ou 50 %, selon le cas, prévus au I de l'article L. 212-5 du code du travail et à l'article L. 713-6 du code rural et hors rémunération des temps de pause, d'habillage et de déshabillage versée en application d'une convention ou d'un accord collectif étendu en vigueur au 11 octobre 2007 ;
Et attendu que l'arrêt, après avoir énoncé à bon droit que les réductions et exonérations de cotisations constituent une exception au principe de l'assujettissement, de sorte que les dispositions qui les prévoient doivent être interprétées strictement, constate que l'accord d'entreprise de 2005 ne constitue pas un accord étendu en vigueur au 11 octobre 2007 ;
Que de ces énonciations et constatations, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche inopérante, a exactement déduit que seules les indemnités fixées par la convention collective applicable pouvaient être déduites de la rémunération retenue pour le calcul de la réduction de cotisations sur les bas salaires ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Grisel aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Grisel et la condamne à payer à l'URSSAF de Haute-Normandie la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un janvier deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boullez, avocat aux Conseils, pour la société Grisel
Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR écarté la demande que la société GRISEL avait formée, afin d'obtenir le remboursement de la somme de 14 289,40 € et de voir juger que les rémunérations des temps de coupure et d'amplitude issues d'un accord d'entreprises conclu avant le 11 octobre 2007, plus favorable qu'une convention collective, peuvent être neutralisées en totalité dans la formule de calcul prévue par l'article L. 241-13, III du Code de la sécurité sociale.
AUX MOTIFS QU'en vertu de l'article L. 241-13 III du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable en 2008 et 2009 le montant de la réduction est calculé chaque mois civil pour chaque salarié ; que le montant est égal au produit de la rémunération brute par un coefficient ; que la rémunération brute à prendre en compte pour le calcul du coefficient n'intègre pas celle des temps de pause (auxquels sont assimilés les temps de coupure et d'amplitude) d'habillage et de déshabillage versée en application d'une convention ou d'un accord collectif étendu en vigueur au 11 octobre 2007 ; que l'article 17 de l'annexe I de la convention collective des transports routiers, modifié par accord du 18 avril 2002 étendu par arrêté du 22 décembre 2003, fixe l'indemnisation des coupures à 25 ou 50 % selon qu'elle est effectuée dans un local aménagé dédié aux conducteurs ou dans tout autre lieu extérieur ; que par ailleurs il prévoit l'indemnisation de l'amplitude au-delà de 12 heures et dans la limite de 14 heures à hauteur de 65 % de la durée du dépassement d'amplitude ; que l'accord d'entreprise du 14 janvier 2005 conclu entre la société et le syndicat d'entreprise prévoit en son article 4 que l'indemnisation de la coupure à 25 % prévue par l'accord du 18 avril 2002 sera de 50 % dans l'entreprise et que l'indemnisation de l'amplitude sera de 75 % au lieu de 65 % ; que les réductions et exonérations de cotisations constituent une exception au principe de l'assujettissement, de sorte que les dispositions qui les prévoient doivent être interprétées strictement ; que l'accord d'entreprise de 2005 ne constituant pas un accord étendu en vigueur au 11 octobre 2007, seuls les temps de coupure et d'amplitude prévus dans la convention collective applicable, qui détermine le montant de leur indemnisation, peuvent être déduites de la rémunération retenue dans la formule de calcul de la réduction Fillon ; qu'il convient en conséquence d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions sans qu'il soit nécessaire de s'interroger sur la portée, discutée, de la lettre ACOSS du 26 janvier 2011 dont il n'est pas fait ici application ;
1. ALORS QUE la réduction de la part patronale de cotisation qui est prévue par l'article L. 241-13-III du Code de la sécurité sociale, est égal au produit de la rémunération mensuelle, telle que définie à l'article L. 242-1 du Code de la sécurité sociale par un coefficient, lequel est fonction du rapport entre le salaire minimum de croissance calculé pour un mois sur la base de la durée légale du travail et la rémunération mensuelle du salarié telle que définie à l'article L. 242-1, « hors rémunération des temps de pause, d'habillage et de déshabillage versée en application d'une convention ou d'un accord collectif étendu en vigueur au 11 octobre 2007 » ; qu'il s'ensuit que la rémunération des temps de pause, d'habillage et de déshabillage est exclue de l'assiette de rémunération retenue pour le calcul de la réduction de cotisations prévue à l'article L. 241-13-III du Code de la sécurité sociale dès lors qu'elle est versée en application en application d'une convention collective étendue, y compris dans l'hypothèse où le montant a été fixé par un accord d'entreprise plus favorable que la convention collective ; qu'en décidant que seule l'indemnisation des temps de coupure et d'amplitude dont le principe et le montant ont été déterminés dans une convention collective peut être déduite de l'assiette de la part des cotisations de sécurité sociale incombant à l'employeur, aux termes de l'article L. 241-13-III du Code de la sécurité sociale, la Cour d'appel a violé la disposition précitée ;
2. ALORS QU'aux termes de l'article L. 241-13-III du Code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de l'article 26 de la loi du 3 décembre 2008, « le montant de la réduction est calculé chaque mois civil, pour chaque salarié », qu'il « est égal au produit de la rémunération mensuelle, telle que définie à l'article L. 242-1 par un coefficient » ; que « ce coefficient est déterminé par application d'une formule fixée par décret » ; qu'il « est fonction du rapport entre le salaire minimum de croissance calculé pour un mois sur la base de la durée légale du travail et la rémunération mensuelle du salarié telle que définie à l'article L. 242-1 » du Code de la sécurité sociale ; qu'il s'ensuit que seule la rémunération d'un temps de travail effectif entre dans l'assiette de la rémunération prise en considération pour le calcul de la réduction prévue à l'article L. 241-13-III du Code de la sécurité sociale ; qu'en se bornant à énoncer que les indemnisations prévues par un accord d'entreprise, en contrepartie d'un temps de coupure ou d'amplitude, ne sont pas exclues des modalités de calcul de la réduction de cotisations patronales prévues par l'article L. 241-13-III du Code de la sécurité sociale, sans rechercher si le temps de coupure ou d'amplitude constituait un temps de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 3121-2 et L. 3121-1 du Code du travail et de la disposition précitée.