LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 3 avril 2014), que M. X... et M. Y..., dit Z..., qui avaient constitué en 1996 la société AS Participations, ont cédé en 1998 au groupe Endemol 50 % du capital de cette société, devenue la société ASP Endemol, puis la société Endemol France, et dont M. X... était le président ; que par acte du 25 mai 2000, M. Hervé A... et plusieurs membres de sa famille (les consorts A...) ont cédé l'intégralité des actions de la société Hubert productions à la société Endemol développement, désormais dénommée Endemol productions, filiale à 100 % de la société ASP Endemol, et ayant pour dirigeant M. C..., lui-même salarié de cette dernière ; que soutenant que la cession à la société Endemol développement du capital de la société Hubert productions était intervenue à un prix dérisoire, et que M. X... avait commis plusieurs fautes et dissimulations à leur détriment, les consorts A... ont assigné ce dernier en paiement de dommages-intérêts ; que M. X... s'est opposé à cette demande et a appelé en garantie les sociétés Endemol France et Endemol productions ainsi que la société Endemol Investment BV, aux droits de laquelle est venue la société Endemol BV ;
Attendu que les consorts A... font grief à l'arrêt de dire que M. X... n'a pas agi comme dirigeant de fait de la société Endemol développement et de rejeter leur demande de dommages-intérêts alors, selon le moyen :
1°/ qu'aucune des parties ne soutenait dans ses écritures que le contrat de travail conclu par M. C..., dirigeant de la société Endemol développement, ainsi que les limitations statutaires de ses pouvoirs, étaient de nature à créer un lien de dépendance caractéristique de la gestion de fait à l'égard de la société ASP Endemol, société mère de la société Endemol développement et employeur de M. C..., et non à l'égard de M. X... personnellement, en tant que dirigeant de la société ASP Endemol ; que pour écarter l'existence d'une gestion de fait par M. X..., la cour d'appel a pourtant retenu que « le lien de subordination existant entre M. C... et son employeur n'implique pas M. X... personnellement mais seulement la société ASP-Endemol, employeur », et que les limitations statutaires des pouvoirs de M. C... « ne sont que de nature à créer une dépendance de la filiale vis-à-vis de la société mère actionnaire unique, à l'exclusion d'une dépendance vis-à-vis de la personne du président de cette dernière » ; qu'en soulevant ainsi d'office ce moyen, sans recueillir préalablement les observations des parties sur ce point, la cour d'appel a méconnu le principe de la contradiction et violé l'article 16 du code de procédure civile comme l'article 6 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2°/ que la fraude corrompt tout ; que l'existence d'un montage frauduleux doit être appréciée globalement ; que le montage frauduleux peut résulter d'un ensemble de faits qui, pris isolément, pourraient être licites mais dont la combinaison révèle l'illicéité ; qu'en l'espèce, pour écarter l'existence d'une gestion de fait de M. X..., la cour d'appel a retenu que, pris isolément, ni le fait que M. X... se soit soustrait en tant que dirigeant de la société ASP Endemol aux obligations de publicité qui eussent informé les cédants de la réelle valeur de leurs titres pour le groupe cessionnaire, ni la circonstance que M. X... avait mené les négociations préalables en vue de l'acquisition des titres de la société Hubert productions en qualité de dirigeant social de la société Endemol développement, ni le fait qu'il ait démissionné de ses fonctions de dirigeant de cette société très peu de temps avant la conclusion du contrat de cession d'actions, ni le fait qu'il avait fait nommer à sa place M. C..., dont le contrat de travail avec la société ASP Endemol et les limitations statutaires de ses pouvoirs le mettaient sous la dépendance de M. X..., dirigeant de la société ASP Endemol, ni encore le fait que M. X... ait donné des directives à la société Endemol développement postérieurement à la cession, n'établissaient sa qualité de dirigeant de fait de la société Endemol développement ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher s'il ne résultait pas de la combinaison de l'ensemble de ces comportements que M. X..., véritable maître de l'affaire, avait orchestré frauduleusement l'acquisition des titres de la société Hubert productions aux fins de tromper les consorts A... sur la valeur réelle des titres cédés dans un intérêt d'enrichissement personnel, tout en se gardant bien d'apparaître comme le dirigeant de droit de la société cessionnaire des titres, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe fraus omnia corrumpit ;
3°/ qu'en s'abstenant en outre de rapprocher l'ensemble de ces comportements de M. X... du défaut de respect de l'obligation légale à laquelle il était tenu en tant que dirigeant de la société ASP Endemol de publier le procès-verbal de l'assemblée générale de cette société du 24 novembre 1999 comportant une formule de valorisation des titres de la société Hubert productions retenue dans le plan de souscription des actions, pour rechercher si ce rapprochement ne caractérisait pas une dissimulation frauduleuse destinée à tromper les consorts A... sur la valeur de ces titres, la cour d'appel a privé de plus fort sa décision de base légale au regard du principe fraus omnia corrumpit ;
4°/ que le dirigeant social est tenu de procéder au dépôt au greffe de la copie du procès-verbal de l'assemblée générale des actionnaires ayant décidé ou autorisé une augmentation de capital ; que l'exécution de cette obligation légale a pour finalité d'informer tous les tiers ayant un intérêt à connaître les opérations sur capital ; qu'en l'espèce, M. X..., dirigeant des sociétés ASP Endemol et Endemol développement, avait l'obligation de déposer au greffe le procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire de la société ASP Endemol du 24 novembre 1999 qui, en approuvant un plan de souscription d'actions au bénéfice des salariés du groupe, avait décidé une augmentation de capital ; qu'en retenant pourtant que « le fait de ne pas l'avoir divulguée aux acquéreurs qu'elle ne concernait pas n'est ni dolosif, ni fautif », sans rechercher si M. X... n'avait pas commis une faute participant à la réalisation du dol en s'abstenant d'exécuter son obligation légale de dépôt au greffe de la copie du procès-verbal de l'assemblée générale aux fins de publication, ce qui aurait permis aux consorts A... d'en prendre connaissance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, ensemble l'article 51 du décret n° 84-406 du 30 mai 1984, applicable en la cause ;
5°/ que le prix de souscription des options de souscription d'actions est déterminé conformément aux méthodes objectives retenues en matière d'évaluation d'actions en tenant compte, selon une pondération appropriée à chaque cas, de la situation nette comptable, de la rentabilité et des perspectives d'activité de l'entreprise ; qu'il en résulte que le prix de souscription des options ayant pour assiette des actions que la société émettrice se propose d'acquérir d'un tiers, qui repose sur des fondements objectifs, est un élément d'appréciation pertinent pour le tiers quant à la valeur de ses titres ; qu'en l'espèce, pour décider que M. X... n'avait pas fautivement causé un préjudice aux consorts A... en s'abstenant de leur révéler la formule de valorisation des actions de la société Hubertproductions contenue dans le plan de souscription d'actions arrêté par décision d'assemblée générale du 24 novembre 1999, la cour d'appel a retenu que cette formule « ne constituait pas une information sur la valeur des biens cédés » ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si les consorts A... n'avaient pas intérêt à connaître cette formule, qui reposait sur une méthode d'évaluation objective, en sorte que la réticence de M. X... leur avait fait perdre la possibilité de mieux négocier le prix de cession en ayant connaissance d'une information pertinente sur la valeur des titres cédés aux yeux mêmes de leurs cessionnaires, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, ensemble l'article L. 225-177 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2006-1770 du 30 décembre 2006, applicable en la cause ;
6°/ qu'en énonçant péremptoirement que « le calcul proposé par les consorts A... reposant sur des bases erronées, la différence de prix considérable dont ils se prévalent ne peut de toute façon être retenue », sans s'expliquer autrement sur cette affirmation, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, et a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant, par une appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, retenu, d'un côté, qu'aucun acte positif de direction ou de gestion de la société Endemol développement, en relation avec la cession des actions de la société Hubert productions, ne pouvait être imputé à M. X..., de l'autre, que les dissimulations reprochées à ce dernier, pour certaines non démontrées, étaient, en toute hypothèse, sans lien avec la valorisation de cette société au moment de la vente de ses titres, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'inviter les parties à présenter leurs observations sur un moyen qui était dans le débat, et qui n'avait pas à effectuer des recherches que ses appréciations rendaient inopérantes, a légalement justifié sa décision ;
Et attendu, en second lieu, qu'ayant souverainement retenu que le prix fixé dans le cadre d'un plan de stock-options approuvé par l'assemblée générale de la société ASP Endemol du 24 novembre 1999 au bénéfice des salariés du groupe Endemol ne pouvait servir de référence pour la détermination de la valeur objective du prix négocié en vue de l'acquisition d'une société par le même groupe, ce dont elle a déduit que la formule de valorisation contenue dans ce plan ne constituait pas une information sur la valeur des biens cédés, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la dernière branche, légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen, pour partie inopérant, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne MM. Hervé A..., Richard A..., Philippe A..., Jérôme D... et Mme Anne-Marie D... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à M. X... la somme globale de 3 000 euros et aux sociétés Endemol France, Endemol productions et Endemol BV la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf janvier deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour les consorts A...- D...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que Monsieur X... n'a pas agi comme dirigeant de fait de la société ENDEMOL DEVELOPPEMENT pour la conclusion de la cession de la société HUBERT PRODUCTIONS et d'avoir débouté les consorts A... de toutes leurs demandes à l'encontre de Monsieur X... ;
AUX MOTIFS QUE « Sur la qualité de dirigeant de fait attribuée à M. X... :
Que pour soutenir que M. X... était le dirigeant de fait, par personne interposée, de la société Endemol développement lorsque la cession des parts a été conclue, les consorts A... font valoir que M. C..., s'il était président de la société Endemol développement, a été placé à cette fonction en qualité de salarié de la société ASP-Endemol dont M. X... était le dirigeant et que M. C... rendait compte régulièrement à M. X... véritable maître de l'affaire et dirigeant de fait de la société Endemol développement, comme le démontreraient les termes du contrat de travail de M. C... dont la subordination résulterait aussi des statuts de la société Endemol développement (révocable ad nutum, limitations de ses pouvoirs, reprise de la subordination du contrat de travail) ;
Qu'ils ajoutent qu'après la cession, M. X... s'est ingéré dans la gestion de la société Endemol développement et de la société Hubert productions ;
Que pour contester avoir été gérant de fait, M. X... indique que les prérogatives respectives de M. C... et de lui-même au sein du groupe Endemol correspondent au fonctionnement habituel et régulier de tout groupe structuré ; qu'il rappelle encore que, conformément aux statuts d'ASP-Endemol dont l'article 18 lui imposait de recueillir l'accord de sa direction hollandaise pour tout engagement supérieur à 1 million de francs, l'acquisition de la société Hubertproductions n'a été décidée qu'avec l'accord exprès d'Endemol qui en assurait le financement, ce qui exclut de sa part un acte positif de gestion exercé en toute indépendance ;
Sur ce :
Que le contrat de travail conclu le 13 décembre 1999 entre la société ASP-Endemol et M. C..., engagé en qualité de directeur du développement et chargé à ce titre de plusieurs mandats sociaux au sein des filiales, spécialement du mandat de président de la filiale à créer ASP-Endemol développement, stipule en son article 2-3 que le salarié exercera ses fonctions de directeur du développement ainsi que les mandats de direction générale qui lui auront été confiés par l'employeur sous l'autorité, le contrôle et la supervision de celui-ci auquel il rapportera régulièrement, ainsi qu'à toute demande du président, l'état d'avancement de ses travaux et l'exécution des instructions et directives de l'employeur ;
Que les statuts de la société Endemol développement reprennent ces dispositions quant à l'exercice de son mandat par le président ;
Que si le lien étroit entre le statut de salarié de la société ASP-Endemol de M. C... et celui de président de la société filiale, dénommée Endemol développement au moment de la cession de parts litigieuse, ne peut être contesté et induit nécessairement une emprise de la société mère employeur sur son salarié, par ailleurs président d'une société fille, il reste que le lien de subordination existant entre M. C... et son employeur n'implique pas M. X... personnellement mais seulement la société ASP-Endemol, employeur ;
Que dans ces conditions, les allégations des consorts A... quant à une direction de fait par personne interposée tirées des stipulations du contrat de travail de M. C... sont dénuées de toute portée pour caractériser une gestion de fait personnelle de M. X... relative à la société Endemol développement ;
Que quant aux limitations invoquées des pouvoirs statutaires du président de la société Endemol développement résultant de l'exigence de l'accord de l'associé unique pour les engagements excédant un certain montant et quant à la possible révocation ad nutum du président, elles relèvent de clauses usuelles et, en tout état de cause, ne sont que de nature à créer une dépendance de la filiale vis-à-vis de la société mère actionnaire unique, à l'exclusion d'une dépendance vis-à-vis de la personne du président de cette dernière ;
Qu'au travers des moyens de fait développés par les consorts A..., il s'agit d'examiner si la preuve est rapportée de l'accomplissement par M. X..., agissant à titre personnel et en toute indépendance, d'un acte positif de direction de la société Endemol développement, en relation avec la cession conclue le 25 mai 2000 ;
Qu'en effet, les seuls actes accomplis par M. X... en relation avec cette cession sont ceux qu'il a pu mener dans la négociation ayant précédé l'acte de cession luimême qui a commencé selon les consorts A... en octobre 1999 ;
Que M. X... était alors le président de la société ASP-Endemol, détenue à 50 % par la société Niouco (holding de MM. X... et Y...), d'une part, et à 50 % par la société Endemol entertainment BV (filiale du groupe néerlandais Endemol), d'autre part ; que les pourparlers se sont concrétisés par la signature le 19 janvier 2000 d'une lettre d'intention entre la société ASP-Endemol représentée par M. X... et les consorts A..., représentés par M. Hervé Hubert A... ;
Qu'ensuite, le 14 février 2000, la société ASP international, dirigée par M. X..., a été transformée en SAS dénommée Endemol développement, a vu son capital augmenter et M. C... devenir son président, à la suite de la démission de M. X... dont aucun élément du dossier n'établit le caractère « malicieux » que lui prêtent les consorts A... ;
Et que l'acte de cession a été finalement signé le 25 mai 2000 par M. C..., en sa qualité de président de la société Endemol développement ;
Qu'ainsi, les actes de gestion ou direction imputables à M. X... en relation avec la cession de la société Hubert production ont été accomplis par lui en sa qualité de dirigeant de droit des sociétés Niouco puis ASP-Endemol et il faut rappeler que les consorts A... ne recherchent plus sa responsabilité en qualité de dirigeant de droit, selon les termes de leurs dernières écritures, et qu'ils ne le pourraient au demeurant pas, en raison de la prescription triennale encourue en ce cas et de l'absence de toute faute de M. X... détachable de ses fonctions sociales, comme l'ont pertinemment retenu les premiers juges ;
Que les consorts A... se prévalent encore d'une gestion de fait directe de M. X... lui imputant une immixtion dans la gestion de la société Endemol développement ;
Qu'outre que les faits visés sont postérieurs à la cession du 25 mai 2000, ils ne caractérisent pas la gestion de fait alléguée puisqu'aucun acte positif de direction n'est prouvé, notamment par les pièces 176 à 179 visées par les appelants, qui ne font référence qu'à des demandes ou des directives émanant de M. X... et adressées aux dirigeants des filiales de la société ASP-Endemol qu'il dirigeait, ce qui correspond au fonctionnement usuel d'un groupe et ne caractérise, en tous cas pas, l'immixtion personnelle de M. X... qui agit, au travers de ces correspondances, pour le compte de la société ASP-Endemol ;
Que finalement, aucun acte positif de direction ou de gestion de la société Endemoldéveloppement, accompli personnellement et en toute indépendance par M. X..., en relation avec la cession de la société Hubertproductions, n'est prouvé par les consorts A... ;
Que M. X... ne peut donc être considéré comme le dirigeant de fait de la société ASP-Endemol ;
Sur le dol invoqué :
Qu'aux termes de leurs dernières conclusions (cf notamment p 23), les consorts A... précisent expressément que les faits dolosifs reprochés à M. X... sont établis dans la mesure où il a eu la qualité de dirigeant de fait par interposition de la personne de M. C... pour exercer la fonction de président de la société Endemol développement ; qu'ils en déduisent qu'ils n'invoquent donc pas le dol d'un tiers comme l'ont retenu les premiers juges ;
Mais que la qualité de dirigeant de fait de M. X... n'étant pas caractérisée, il doit être considéré comme un tiers à la convention litigieuse ;
Que la victime d'un dol pouvant engager la responsabilité civile délictuelle du tiers auteur de ce dol en exerçant à son encontre une action indemnitaire, et les consorts A... fondant leur action sur les dispositions de l'article 1382 du Code civil, il convient d'examiner dans ce seul cadre le grief tiré de la réticence dolosive de M. X... à l'égard des consorts A... ;
Qu'il faut rappeler que l'acquéreur, même professionnel, n'est pas tenu d'une obligation d'information au profit du vendeur sur la valeur du bien acquis ; qu'a fortiori, M. X..., tiers à l'acte, ne pouvait être tenu d'une telle obligation à l'égard des consorts A..., représentés par M. Hervé Hubert A..., homme d'affaires avisé et dirigeant social expérimenté dans le secteur de la production d'émissions pour la télévision ;
Que la jurisprudence contraire citée par les appelants est sans application en la cause car elle vise l'obligation de loyauté à laquelle est tenu le dirigeant social qui s'entremet dans une opération de cession de droits sociaux de la société qu'il dirige à l'égard de l'associé cédant lorsqu'il omet de l'informer de l'existence de circonstances de nature à influer sur son consentement et spécialement de négociations conduites parallèlement en vue de la revente ou de l'apport des titres pour une valeur supérieure au prix de cession ;
Que surabondamment, les dissimulations invoquées par les appelants sont sans portée, dans la mesure où les faits prétendument cachés ne sont, pour certains, pas établis et sont de toute façon sans lien avec la valorisation de la société Hubertproductions au moment de la vente de ses titres comme le montre l'examen qui suit des dissimulations ou manoeuvres reprochées à M. X... :
1) Que les consorts A... imputent à M. X... des manoeuvres consistant en la dissimulation du plan de stock-options prévu au bénéfice de M. C... comme salarié, notamment dans la société Hubertproductions, dont les modalités ont été définies au plus tard en novembre 1999 et ils voient la preuve du dol dans la non-publication des informations comptables et financières et le non-dépôt au greffe du procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire d'ASP-Endemol du 24 novembre 1999 en violation des dispositions légales ; qu'ils observent que le procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire du 26 janvier 2000 de la société précitée établit la connaissance par M. X... dès novembre 1999 de la nouvelle valorisation de ses filiales par Endemol NV, et font valoir que, faute de publication des procès-verbaux d'assemblée et des comptes, la formule de valorisation de leurs parts contenue dans le plan de stock-options ne leur était pas accessible en 2000 lorsqu'ils ont négocié et conclu la vente, alors que ces éléments d'information contenaient les clés permettant aux cédants d'apprécier la valeur réelle des actions qu'ils vendaient ; qu'ils affirment ainsi que la formule de valorisation du plan de stock-options appliquée à leurs actions aboutit à une valeur pour leurs titres de 181 998 057 euros au lieu des 30 718 477 euros effectivement perçus ;
Que M. X... rétorque que M. A... est demeuré, après la cession, dirigeant de sa société jusqu'en mars 2008, qu'il avait connaissance du plan de stock-options devenu une information publique au moins à compter de la publication des comptes de l'exercice 2003 intervenue en octobre 2004 et qu'il n'ignorait donc rien de la formule de valorisation des actions prévue par ce plan quand il a saisi le tribunal de commerce de Paris de demandes tendant à obtenir l'exécution du contrat de vente dont il ne remettait pas en cause la validité (demandes au titre des compléments de prix) ; qu'il fait surtout valoir que la méthode de valorisation en cause ne reflète aucunement la valeur objective de la société Hubertproductions, mais seulement une valeur contractuelle dans l'intérêt collectif de certains salariés destinée à les fidéliser et qu'il ne s'agit pas d'une information devant être communiquée aux tiers ; qu'enfin, il note que le calcul par les consorts A... de la valeur de leurs actions prétendument fondé sur la formule du plan de stockoptions Hubert est erroné puisqu'établi, non sur les chiffres de l'exercice précédant la cession mais sur ceux de l'exercice 2006, alors que si l'on procède au calcul avec les données de l'exercice 1999/ 2000, on obtient une valeur de 35 000 000 euros peu éloignée du prix de vente ;
Sur ce :
Que comme le fait observer M. X..., rejoint sur ce point par les sociétés Endemol, le prix fixé dans le cadre d'un plan de stock-options pour le rachat des actions souscrites par des collaborateurs salariés importants d'un groupe ne peut constituer une référence pour déterminer la valeur objective du prix que le même groupe est prêt à payer pour acquérir une société ; que la formule de valorisation contenue dans le plan en cause ne constituait donc pas une information sur la valeur des biens cédés et le fait de ne pas l'avoir divulguée aux acquéreurs qu'elle ne concernait pas n'est ni dolosif, ni fautif ;
Qu'en outre, le calcul proposé par les consorts A... reposant sur des bases erronées, la différence de prix considérable dont ils se prévalent ne peut de toute façon être retenue ;
2) Que les consorts A... font ensuite valoir un « montage frauduleux » tenant à une quadruple interposition de personnes morales, à l'interposition de M. C... et à une politique de manquement aux obligations de publicité légale des sociétés entrant dans le périmètre de contrôle de M. X... durant la période allant de 1999 à 2007 ;
Que les points allégués à ce titre ont, pour certains, déjà été écartés par la cour, s'agissant de « l'interposition » de M. C... et de la non-publication des comptes et assemblées générales en relation avec le plan de stock-options ; que s'agissant des défauts de publication postérieurs à la cession, ils ne peuvent aucunement apporter la preuve d'un dol commis par M. X... dans la période précédant la conclusion de la cession ; qu'enfin, il faut encore rappeler que les consorts A... n'étaient créanciers à l'égard du groupe Endemol comme de M. X... d'aucune obligation d'information quant à la valorisation de la société Hubertproductions qu'ils étaient les mieux placés pour apprécier ;
3) Que les consorts A... invoquent encore un manquement à son obligation de loyauté par M. X... au sujet de la situation de conflit d'intérêts de Me E..., avocat qui les a assistés lors de la cession, alors qu'il avait précédemment été le conseil de la société Case productions présidée par M. X... dans deux procédures ;
Que M. X... est étranger au choix par les consorts A... du conseil qui allait les assister pour la cession de leurs actions ; que force est de constater qu'aucun grief précis n'est formulé à l'encontre de Me E... qui n'est pas dans la cause et contre lequel les consorts A... n'indiquent pas avoir exercé la moindre action ; que l'existence d'un conflit d'intérêts ne repose que sur la seule affirmation des appelants et n'est corroborée par aucun élément objectif du dossier, d'autant que M. X... précise que les affaires pour lesquelles cet avocat était intervenu pour le compte de ses sociétés n'avaient aucune relation avec la cession de la société Hubertproductions ;
Qu'en conséquence, outre qu'il ne peut être fait grief à M. X... de ne pas avoir informé les consorts A... du fait que Me E... avait été le conseil de ses sociétés à deux reprises, aucun lien n'est prouvé entre l'intervention de cet avocat et le niveau du prix de cession négocié ;
4) Qu'enfin, les consorts A... reprochent à M. X... de ne pas leur avoir révélé qu'il allait vendre au groupe Endemol, par l'intermédiaire de la société Niouco, les 50 % des actions qu'il détenait encore dans la société ASP-Endemol ; qu'ils prétendent que M. X... s'était engagé en ce sens par un acte du 1er décembre 1999 (dit « Share Purchase Agreement » ci-après SPA) moyennant un prix fixe et un complément de prix tiré d'une formule complexe dont le coeur consiste à appliquer un multiple aux résultats de ASP Endemol et de ses filiales acquises et non acquises, parmi lesquels en conséquence ceux de la société Hubertproductions ; qu'en dépit des dénégations des intimés, ils maintiennent que cet acte existait bien antérieurement à la cession du 25 mai 2000 puisqu'il est cité dans le rapport annuel d'Endemol Holding NV en page 21-22 et que cette mention ne procède pas d'une erreur de plume, mais de la volonté délibérée de Telefonica, après son OPE sur Endemol, de ne pas endosser vis-à-vis de ses actionnaires ce SPA comportant des compléments de prix et ils font état de divers autres faits et « aveux » corroborant selon eux l'existence de cet acte ainsi que des énonciations du SPA de 2000 faisant référence aux « accords précédents, négociations, entente et accord préalable » que le nouvel accord indique remplacer, et à sa clause de substitution comme acquéreur de Endemol France à Endemol Investment BV qui prouverait l'existence d'un précédent accord ; qu'ils ajoutent que la société Endemol BV a financé l'intégralité de l'acquisition de la société Hubertproductions, à l'exclusion de tout apport de la société Niouco, preuve qu'elle avait l'assurance par la voie d'un accord antérieur d'une contrepartie à ces avantages consentis à la société Niouco ;
Qu'ils en déduisent que M. X..., informé de son profit à venir, avait l'intention de leur nuire en dissimulant activement ces informations et font valoir que s'ils avaient connu ces informations, ils auraient contracté à un prix supérieur à celui qui a été convenu ; qu'en relevant que le prix payé par le groupe Endemol pour acquérir Endemol France auprès de MM. X... et Y... s'est élevé à 690 190 000 euros, ils indiquent que sur la période de référence du SPA allant du 1er septembre 1999 au 31 décembre 2005, la société Hubertproductions a représenté 25, 73 % du chiffre d'affaires et 31, 89 % des résultats nets d'ASP Endemol et de ses filiales ; qu'ils en déduisent que sur le prix perçu par MM. X... et Y..., 238 642 049 euros sont la conséquence directe des résultats de la société Hubertproductions ;
Que M. X... rappelle que la cession par M. Y... et lui-même de leurs titres d'ASP-Endemol est une information publique depuis janvier 2001 et que M. Hervé Hubert A..., qui n'en ignorait rien lorsqu'il a saisi le tribunal de commerce de Paris, ne s'en est pas prévalu ; qu'il ajoute que l'opération critiquée est sans lien avec la cession de la société Hubertproductions en observant que les valeurs respectives des sociétés Hubertproductions et ASP-Endemol ne sont pas comparables, compte tenu notamment de la valeur stratégique de cette dernière pour le groupe Endemol ;
qu'il soutient que de toute façon, la cession de la société ASP-Endemol n'a pas été conclue par un SPA du 1er décembre 1999 dont on ne trouve la mention que dans le rapport annuel 2004 publié par le groupe Endemol (SPA de décembre 1999) qui procède d'une erreur de frappe, mais seulement par le SPA du 21 décembre 2000 avec transfert effectif des titres en janvier 2001 et estime que les appelants ne rapportent aucunement la preuve de l'existence d'un accord en décembre 1999 dont il souligne l'impossibilité compte tenu de l'absence de mention de cet engagement dans les comptes consolidés 1999/ 2000 du groupe Endemol qui ont été certifiés sans réserve, au contraire des mêmes comptes pour l'exercice 2000/ 2001 également certifiés qui le mentionnent ;
Que les sociétés Endemol, sur l'existence et les conséquences du prétendu SPA de décembre 1999, concluent dans le même sens que M. X... et relèvent que, tant le rapport annuel 2003 du groupe que le rapport annuel 2005 font référence au SPA du 21 décembre 2000, de sorte que l'indication d'un SPA de décembre 1999 n'est que le résultat d'une erreur de plume dommages-intérêts rapport 2004 (sic) ;
Sur ce :
Qu'au vu des moyens de fait invoqués et des pièces produites, les consorts A..., qui exploitent une mention unique figurant dans le rapport annuel 2004 du groupe Endemol démentie par les rapports antérieur et postérieur ainsi que par les comptes consolidés du groupe et se livrent à des extrapolations peu crédibles démenties par les éléments objectifs du dossier, manquent à rapporter la preuve qui leur incombe de l'existence d'un accord formel entre M. X... et le groupe Endemol pour la cession de la participation de MM. X... et Y... dans ASP-Endemol et diverses filiales dès décembre 1999 ;
Que dans ces conditions, le reproche fait à M. X... d'avoir dissimulé ce fait aux consorts A..., qui ont cédé leur société en mai 2000, manque en fait ;
Qu'en tout état de cause, même en admettant l'hypothèse d'un accord pour la cession d'ASP-Endemol antérieur à la cession de la société Hubertproductions, aucune faute ne peut être imputée à ce titre à M. X... ; qu'en effet, comme le soutiennent les intimés et comme l'ont retenu les premiers juges, les sociétés ASPEndemol et Hubertproductions n'étaient pas comparables quant à leurs tailles et à leurs résultats respectifs, aux filiales détenues supports d'émissions à succès, aux contrats d'exclusivité conclus avec des animateurs vedettes et donc à l'enjeu stratégique représenté par l'acquisition de chacune de ces sociétés pour le groupe Endemol soucieux d'introduire et de renforcer la télé-réalité en France ;
Qu'ainsi, les premiers juges ont pertinemment retenu, par des motifs que la cour adopte, que le lien entre le prix d'achat des actions d'Hubertproductions par Endemol développement et le prix de cession du solde de leur participation dans ASP-Endemol par MM. X... et Y... était loin d'être direct en soulignant que ce dernier prix de cession était fonction du nouveau patrimoine d'ASP-Endemol après l'acquisition de différentes sociétés de production télévisuelles indépendantes, dont la société Hubertproductions n'était qu'une parmi plusieurs autres, connues et appréciées et représentant une ensemble mieux valorisé que chacune prise isolément ;
Qu'en conséquence, outre qu'il faut répéter que M. X..., recherché ici au titre d'une faute délictuelle comme tiers à la cession conclue le 25 mai 2000, n'était tenu envers les vendeurs d'aucune obligation d'information sur la valeur des actions cédées, il ne peut de toute façon lui être fait grief de ne pas avoir révélé, à la supposer antérieure, la cession de sa participation dans ASP-Endemol au groupe Endemol dans la mesure où cette cession n'autorise pas à considérer que le prix reçu par les consorts A... pour la vente de leurs actions a été dérisoire ou qu'ils auraient conclu la vente à des conditions significativement différentes s'ils avaient connu ce fait avant la signature de l'acte ;
Qu'aucune faute en lien avec un préjudice subi par les consorts A... ne pouvant être retenue à l'encontre de M. X..., ils doivent être déboutés de toutes leurs demandes à son encontre » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « Sur la faute détachable :
Que les demandeurs ont assigné M. X... au titre d'une faute détachable qu'il aurait commise dans ses fonctions de dirigeant de sociétés au sein du groupe Endemol ;
Que la faute séparable est la faute commise par le dirigeant d'une société, même s'il agit dans les limites de ses attributions, ce qui suppose qu'il ait agi volontairement en sachant qu'un dommage allait en résulter pour un tiers ;
Que dans ce cas, il engage sa responsabilité envers ce tiers, ce qui l'oblige à réparer le préjudice qui en est résulté ;
Qu'il appartient à la victime de prouver le caractère détachable de la faute commise, à défaut, elle doit se retourner contre la société elle-même ;
Qu'à l'époque des faits litigieux, M. X... a été le gérant d'Endemol Développement jusqu'au 14/ 02/ 2000, et a été signataire en cette qualité du term sheet signé avec les consorts A... le 19/ 01/ 2000 ;
Que lors de la signature de l'acte de cession des actions d'Hubert Productions le 25/ 05/ 2000, l'acquéreur, Endemol Développement était dirigé par M. C..., et que M. X... n'a signé cet acte qu'en qualité de président de la société ASP Endemol au titre de la caution donnée par cette société aux vendeurs, garantissant l'exécution de ladite convention par sa filiale Endemol Développement ;
Que pour considérer que M. X... aurait commis une faute détachable dans l'exercice de ses fonctions, il conviendrait de démontrer que M. X..., conscient du dommage causé aux consorts A... par la fixation d'un faible prix d'acquisition de leurs actions au regard de la valeur future de l'achat ultérieur qui serait fait par le groupe Endemol de ses actions dans ASP Endemol, aurait fait pression sur le gérant d'Endemol Développement, M. C..., pour que le prix d'acquisition soit le plus faible possible, et même dérisoire comme l'affirment les demandeurs ;
Que ces agissements ne sont pas démontrés, qu'il n'est pas non plus démontré que les négociations qui ont été menées parallèlement avec d'autres sociétés de production indépendantes en vue de leur acquisition (2 AS Productions, PAF Productions, Société du Spectacle, NAO et Boîte 2 Prod) ont abouti à des prix nettement supérieurs à celui offert pour l'achat d'Hubert Productions ;
Qu'en conséquence le tribunal jugera que M. X... n'a pas commis de faute détachable de ses fonctions de dirigeant social ;
Sur le dol :
Que les consorts A... ajoutent que M. X... a commis un dol en s'abstenant de leur donner les informations en sa possession, lesquelles, si elles avaient été portées à leur connaissance, les auraient conduits à refuser le prix proposé par l'acquéreur ;
Que le dol doit émaner du cocontractant ou de son représentant ;
Que M. X... n'est pas le cocontractant des consorts A..., ni le représentant de l'acquéreur, ce dernier étant la société Endemol Développement représentée par M. C... ;
Qu'en conséquence le tribunal jugera que M. X... ne peut être recherché pour dol par les consorts A... ;
Plus généralement sur les reproches formulés par les consorts A... à l'encontre de M. X... :
Qu'en outre, le lien entre le prix d'achat des actions d'HubertProductions par Endemol Développement et le prix de cession du solde des actions détenues par MM. X... et Y... dans la société ASP Endemol au profit du groupe Endemol est loin d'être direct, ce dernier prix de cession étant fonction du nouveau patrimoine d'ASP Endemol après l'acquisition des différentes sociétés de production télévisuelle indépendantes, dont HubertProductions n'était qu'une société parmi plusieurs autres, connues et appréciées, et donc représentant un ensemble mieux valorisé que chacune d'entre elles prises isolément ;
Que l'acquisition d'Hubert Productions a été faite de façon indivisible avec celle de la société Orevi, que ces deux sociétés ont perçu un prix d'achat global (fixe et proportionnel) qu'elles se sont partagé par moitié, mais que le vendeur d'Orevi, V. F... ne s'est pas joint à cette instance ;
Qu'enfin M. B... est un professionnel du monde de la production dans l'audiovisuel, et que même si M. X... a la réputation d'un homme d'affaires très avisé, M. B... n'a pu se méprendre à ce point sur la valeur des actions de la société HubertProductions, ni ignorer que Me E... avait déjà eu comme client ASP Endemol, sauf à faire preuve d'une légèreté coupable dans un milieu professionnel qu'il pratiquait depuis longtemps ;
Qu'en conséquence le tribunal rejettera l'ensemble des demandes des consorts B... » ;
1/ ALORS QU'aucune des parties ne soutenait dans ses écritures que le contrat de travail conclu par Monsieur C..., dirigeant de la société ENDEMOL DEVELOPPEMENT, ainsi que les limitations statutaires de ses pouvoirs, étaient de nature à créer un lien de dépendance caractéristique de la gestion de fait à l'égard de la société ASP ENDEMOL, société-mère de la société ENDEMOL DEVELOPPEMENT et employeur de Monsieur C..., et non à l'égard de Monsieur X... personnellement, en tant que dirigeant de la société ASP ENDEMOL ; que pour écarter l'existence d'une gestion de fait par Monsieur X..., la Cour d'appel a pourtant retenu que « le lien de subordination existant entre M. C... et son employeur n'implique pas M. X... personnellement mais seulement la société ASP-Endemol, employeur » (arrêt, p. 10, alinéa 3, in fine), et que les limitations statutaires des pouvoirs de Monsieur C... « ne sont que de nature à créer une dépendance de la filiale vis-à-vis de la société mère actionnaire unique, à l'exclusion d'une dépendance vis-à-vis de la personne du président de cette dernière » (arrêt, p. 10, alinéa 3, in fine) ; qu'en soulevant ainsi d'office ce moyen, sans recueillir préalablement les observations des parties sur ce point, la Cour d'appel a méconnu le principe de la contradiction et violé l'article 16 du Code de procédure civile comme l'article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme et de Sauvegarde des Libertés Fondamentales ;
2/ ALORS QUE la fraude corrompt tout ; que l'existence d'un montage frauduleux doit être appréciée globalement ; que le montage frauduleux peut résulter d'un ensemble de faits qui, pris isolément, pourraient être licites mais dont la combinaison révèle l'illicéité ; qu'en l'espèce, pour écarter l'existence d'une gestion de fait de Monsieur X..., la Cour d'appel a retenu que, pris isolément, ni le fait que Monsieur X... se soit soustrait en tant que dirigeant de la société ASP ENDEMOL aux obligations de publicité qui eussent informé les cédants de la réelle valeur de leurs titres pour le groupe cessionnaire, ni la circonstance que Monsieur X... avait mené les négociations préalables en vue de l'acquisition des titres de la société HUBERT PRODUCTIONS en qualité de dirigeant social de la société ENDEMOL DEVELOPPEMENT, ni le fait qu'il ait démissionné de ses fonctions de dirigeant de cette société très peu de temps avant la conclusion du contrat de cession d'actions, ni le fait qu'il avait fait nommer à sa place Monsieur C..., dont le contrat de travail avec la société ASP ENDEMOL et les limitations statutaires de ses pouvoirs le mettaient sous la dépendance de Monsieur X..., dirigeant de la société ASP ENDEMOL, ni encore le fait que Monsieur X... ait donné des directives à la société ENDEMOL DEVELOPPEMENT postérieurement à la cession, n'établissaient sa qualité de dirigeant de fait de la société ENDEMOL DEVELOPPEMENT ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher s'il ne résultait pas de la combinaison de l'ensemble de ces comportements que Monsieur X..., véritable maître de l'affaire, avait orchestré frauduleusement l'acquisition des titres de la société HUBERT PRODUCTIONS aux fins de tromper les consorts A... sur la valeur réelle des titres cédés dans un intérêt d'enrichissement personnel, tout en se gardant bien d'apparaître comme le dirigeant de droit de la société cessionnaire des titres, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe fraus omnia corrumpit ;
3/ ALORS QU'en s'abstenant en outre de rapprocher l'ensemble de ces comportements de Monsieur X... du défaut de respect de l'obligation légale à laquelle il était tenu en tant que dirigeant de la société ASP ENDEMOL de publier le procès-verbal de l'assemblée générale de cette société du 24 novembre 1999 comportant une formule de valorisation des titres de la société HUBERT PRODUCTIONS retenue dans le plan de souscription des actions, pour rechercher si ce rapprochement ne caractérisait pas une dissimulation frauduleuse destinée à tromper les consorts A... sur la valeur de ces titres, la Cour d'appel a privé de plus fort sa décision de base légale au regard du principe fraus omnia corrumpit ;
4/ ALORS QUE le dirigeant social est tenu de procéder au dépôt au greffe de la copie du procès-verbal de l'assemblée générale des actionnaires ayant décidé ou autorisé une augmentation de capital ; que l'exécution de cette obligation légale a pour finalité d'informer tous les tiers ayant un intérêt à connaître les opérations sur capital ; qu'en l'espèce, Monsieur X..., dirigeant des sociétés ASP ENDEMOL et ENDEMOL DEVELOPPEMENT avait l'obligation de déposer au greffe le procèsverbal de l'assemblée générale extraordinaire de la société ASP ENDEMOL du 24 novembre 1999 qui, en approuvant un plan de souscription d'actions au bénéfice des salariés du groupe, avait décidé une augmentation de capital ; qu'en retenant pourtant que « le fait de ne pas l'avoir divulguée aux acquéreurs qu'elle ne concernait pas n'est ni dolosif, ni fautif » (arrêt, p. 13, alinéa 2), sans rechercher si Monsieur X... n'avait pas commis une faute participant à la réalisation du dol en s'abstenant d'exécuter son obligation légale de dépôt au greffe de la copie du procès-verbal de l'assemblée générale aux fins de publication, ce qui aurait permis aux consorts A... d'en prendre connaissance, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil, ensemble l'article 51 du décret n° 84-406 du 30 mai 1984, applicable en la cause ;
5/ ALORS QUE le prix de souscription des options de souscription d'actions est déterminé conformément aux méthodes objectives retenues en matière d'évaluation d'actions en tenant compte, selon une pondération appropriée à chaque cas, de la situation nette comptable, de la rentabilité et des perspectives d'activité de l'entreprise ; qu'il en résulte que le prix de souscription des options ayant pour assiette des actions que la société émettrice se propose d'acquérir d'un tiers, qui repose sur des fondements objectifs, est un élément d'appréciation pertinent pour le tiers quant à la valeur de ses titres ; qu'en l'espèce, pour décider que Monsieur X... n'avait pas fautivement causé un préjudice aux consorts A... en s'abstenant de leur révéler la formule de valorisation des actions de la société HUBERT PRODUCTIONS contenue dans le plan de souscription d'actions arrêté par décision d'assemblée générale du 24 novembre 1999, la Cour d'appel a retenu que cette formule « ne constituait pas une information sur la valeur des biens cédés » (arrêt, p. 13, alinéa 2, in fine) ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si les consorts A... n'avaient pas intérêt à connaître cette formule, qui reposait sur une méthode d'évaluation objective, en sorte que la réticence de Monsieur X... leur avait fait perdre la possibilité de mieux négocier le prix de cession en ayant connaissance d'une information pertinente sur la valeur des titres cédés aux yeux mêmes de leurs cessionnaires, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil, ensemble l'article L. 225-177 du Code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2006-1770 du 30 décembre 2006, applicable en la cause ;
6/ ALORS QU'en énonçant péremptoirement que « le calcul proposé par les consorts A... reposant sur des bases erronées, la différence de prix considérable dont ils se prévalent ne peut de toute façon être retenue » (arrêt, p. 13, alinéa 3), sans s'expliquer autrement sur cette affirmation, la Cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, et a violé l'article 455 du Code de procédure civile.