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19/11/2015 | FRANCE | N°14-22349

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 19 novembre 2015, 14-22349


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 5 mai 2014), que Mme X..., venant aux droits de ses parents, est propriétaire d'un fonds de commerce de restaurant exploité depuis de très nombreuses années sur une parcelle dépendant des cinquante pas géométriques que l'Etat a cédée à la commune de Terre-de-Haut (la commune) ; que, Mme X... et la commune n'étant pas parvenues à un accord sur la vente de la parcelle ni sur la signature d'une convention d'occupation temporaire, la commune l'a assignée

aux fins d'expulsion ; que Mme X... a revendiqué le bénéfice d'un cont...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 5 mai 2014), que Mme X..., venant aux droits de ses parents, est propriétaire d'un fonds de commerce de restaurant exploité depuis de très nombreuses années sur une parcelle dépendant des cinquante pas géométriques que l'Etat a cédée à la commune de Terre-de-Haut (la commune) ; que, Mme X... et la commune n'étant pas parvenues à un accord sur la vente de la parcelle ni sur la signature d'une convention d'occupation temporaire, la commune l'a assignée aux fins d'expulsion ; que Mme X... a revendiqué le bénéfice d'un contrat de concession immobilière ;
Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu, d'une part, que Mme X... n'est pas recevable, faute d'intérêt, à se plaindre de ce que la cour d'appel n'ait pas assorti l'expulsion prononcée contre elle de l'exécution provisoire ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant exactement retenu que le contrat de concession immobilière était un contrat écrit par application de l'article 48 de la loi du 30 décembre 1967 et que la preuve de celui-ci ne pouvait pas être déduite des seuls indices invoqués par Mme X... ni du paiement de la taxe foncière qui ne saurait être requalifié en paiement d'une redevance, la cour d'appel en a déduit à bon droit que la demande de Mme X... visant à se voir reconnaître le bénéfice d'un contrat de concession immobilière devait être rejetée ;
D'où il suit que le moyen, pour partie irrecevable, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme X... à payer la somme de 3 000 euros à la commune de Terre-de-Haut ; rejette la demande de Mme X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Rémy-Corlay, avocat aux Conseils, pour Mme X..., épouse Y...

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que venant aux droits de Monsieur et Madame X..., Madame Y... occupait sans droit ni titre la parcelle de terrain sise à Terre de Haut lieudit « rue de la Saline » figurant au cadastre sous les références AC n°108, d'AVOIR ordonné l'expulsion de Madame Y... de ladite parcelle et de l'AVOIR déboutée de sa demande visant à faire reconnaître qu'elle bénéficiait d'un contrat de concession sur la parcelle cadastrée AC n°108 à Terre de Haut et à son maintien sur les lieux en application d'un tel contrat ;
AUX MOTIFS PROPRES QU' «(...) II résulte, d'une part, de l'acte du 24 septembre 2005 que Mme Corinne X... a reçu en donation le fonds de commerce « la Paillote » et, d'autre part, de l'extrait Kbis et contrat du 8 mars 2004 produits que le fonds est exploité en location-gérance par la SARL La Paillotte, dont Mme X... est la cogérante. Mme Corinne X... est propriétaire du fonds de commerce, exploité sur la parcelle, de sorte que l'action de la Commune en expulsion de celle-ci et de tout occupant de son chef, dont la SARL La Paillotte est utilement dirigée contre elle.
« (...) Pour s'opposer à son expulsion sans indemnité Mme X... fait valoir qu'elle bénéficie d'un contrat de concession immobilière. Elle expose, ainsi, que la jouissance de l'immeuble au vu et su de tous consistant en l'exploitation d'un restaurant ayant pignon sur rue a été paisible jusqu'en octobre 2006, date à laquelle le maire a manifesté le souhait de mettre fin au contrat. Elle ajoute qu'une redevance annuelle équivalente à la taxe foncière a été réclamée en contrepartie de la jouissance, laquelle a été régulièrement payée et en conclut que la jouissance paisible et continue sur une période excédent vingt ans et le paiement par l'occupant d'une redevance annuelle, constituent des indices graves, précis et concordants, révélateurs d'un contrat de concession et, qu'ainsi, la restitution des lieux ne peut se faire que moyennant l'indemnisation du concessionnaire. Le contrat de concession immobilière est défini par l'article 48 de la loi n° 67-1253 du 30 décembre 1967, dite loi d'orientation foncière.-Aux termes de ces dispositions, « la concession immobilière est le contrat par lequel le propriétaire d'un immeuble ou d'une partie d'immeuble, bâti ou non bâti, en confère la jouissance à une personne dénommée le concessionnaire, pour une durée de vingt années au minimum et moyennant le paiement d'une redevance annuelle ». En vertu de l'article 48, alinéa 2 de la loi du 30 décembre 1967, la concession immobilière « fait l'objet d'un acte authentique publié au fichier immobilier» et doit comporter la référence expresse à la loi précitée. Si celle-ci ne contient aucune disposition expresse concernant la preuve du contrat de concession immobilière, le contrat étant par application de l'article 48 un contrat écrit, il incombe de Mme X... de produire aux débats un contrat qui réponde au formalisme imposé par la loi. Mme X... ne produisant pas la preuve par écrit d'un contrat de concession, qui ne saurait être, comme elle le suggère, déduit du comportement des parties, étant observé que le paiement d'une taxe foncière ne saurait être requalifié en paiement d'une redevance résultant d'une concession, ses demandes découlant de l'existence d'un tel contrat doivent être rejetées. (...) il résulte des pièces produites aux débats que Mme X... occupe la parcelle, laquelle est la propriété de la Commune de Terre de Haut depuis l'acte du 25 juin 2007 et qu'elle n'a aucun titre pour ce faire, il convient donc, de confirmer le jugement entrepris, en ce qu'il a ordonné l'expulsion de Mme X... ainsi que de tout occupant de son chef. Cependant, la cour relève que les consorts X..., qui étaient occupants de la parcelle, située dans la zone des cinquante pas géométriques, depuis les années 70 auraient pu bénéficier des dispositions du décret n° 89-734 du 13 octobre 1989 ou de la loi du n° 96-1241 du 30 décembre 1996 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur de la zone dite des cinquante pas géométriques dans les départements d'outre-mer permettant l'acquisition par les occupants de la parcelle à l'Etat (le procès-verbal de gendarmerie du 13 avril 1974 fait, d'ailleurs, état d'un dossier déposé par M. Roland X..., le 26 février 1971), que la Commune s'est, en quelque sorte substituée à eux et a acquis à titre gratuit la parcelle, en juin 2007, aux motifs affichés de sa revente aux consorts X... en vue de la régularisation de la situation des occupants et du paiement par ceux-ci « d'une indemnisation des travaux réalisés dans le cadre de la zone d'aménagement concertée », ainsi que le démontre la lettre de la Commune à M. X..., le 5 octobre 2006, et celle de la Commune à la Direction départementale de l'équipement, le 18 octobre 2006. La parcelle de 640 m2, évaluée aux termes de l'acte administratif portant vente, du 25 juin 2007, au prix de 80.000 € a été estimée par la Commune, le 29 juin 2007, à la somme de 134.230 €, puis, proposée à la vente aux consorts X... au prix de 146.750 €, pour une parcelle réduite à 587 m2, le 11 août 2009, et enfin, proposée à la somme de 124.000 € selon délibération du conseil municipal, du 5 octobre 2010. II résulte des débats que le litige opposant les parties ne concerne que le prix de la parcelle, les consorts X... ayant, depuis le 18 octobre 2006, manifesté l'intention d'acheter la parcelle et fait, à la Commune, une proposition de prix et d'arbitrage du service des domaines. Eu égard à ce contexte et à la nécessité de laisser une place à une dernière tentative de transaction portant sur le prix, qui pourrait utilement s'appuyer sur une estimation par les services de France domaine et par référence aux cessions de terrains intervenues au profit des occupants de la zone des cinquante pas géométriques, et aux cessions de terrain intervenues dans la zone d'aménagement concertée crée sur Marigaux, dans laquelle est incluse la parcelle, il convient de juger qu'une astreinte de même que le recours demandé à la force publique en vue d'une expulsion apparaissent, en l'état, prématurés. D'où il suit que le jugement entrepris sera confirmé en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a fixé une astreinte et permis à la Commune de recourir à la force publique en vue de l'expulsion de Mme X... et des occupants de son chef »
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE «(...) l'article 2278 du Code Civil est inapplicable à l'espèce, puisqu'il concerne les actions possessoires, protégeant la possession contre le trouble qui l'affecte ou la menace sans avoir égard au fond du droit, alors que la Commune de Terre de Haut n'a commis aucun trouble et fonde son action sur son droit de propriété. De jurisprudence constante l'article 555 alinéa 4 du Code Civil s'applique au constructeur de bonne foi, et le terme de bonne foi s'entend par référence à l'article 550 du même code et ne vise que celui qui possède comme propriétaire en vertu d'un titre translatif de propriété dont il ignore le vice, de sorte que Mme Corinne X... épouse Y..., qui ne dispose d'aucun titre, ne peut se prévaloir de ce texte. Aux termes des dispositions de l'article 544 du Code Civil la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements. Aux termes des dispositions de l'article 545 du Code Civil nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité. La Commune de Terre de Haut justifie être propriétaire de la parcelle litigieuse pour l'avoir acquise de l'Etat selon acte administratif en date du 25 juin 2007. Mme Corinne X... épouse Y... ne dispose d'aucun titre lui permettant d'occuper cette parcelle. Alors que ses propositions de vente de la parcelle ou de signature d'une convention d'occupation temporaire du domaine communal, qui auraient pour effet de conférer un titre à l'occupant, n'ont pas été suivies d'effet, la Commune de Terre de haut sollicite l'expulsion de Mme Corinne X... épouse Y..., occupant sans droit ni titre. Mme Corinne X... épouse Y... ne peut, pour s'opposer à la légitime demande du propriétaire de là parcelle, exciper de l'absence d'actions antérieures par les autorités compétentes, alors que les actes de pure faculté et ceux de simple tolérance, qui ne peuvent, aux termes de l'article 2232 du Code Civil, fonder ni possession, ni prescription, ne sont pas d'avantage susceptibles de lui conférer un droit d'occupation à titre gratuit» ;
ALORS QUE 1°) l'exigence de forme authentique du contrat de concession immobilière et de référence expresse aux dispositions de la loi le gouvernant ne sont pas prescrites ad solemnitatem; qu'un contrat de concession immobilière entendu comme un contrat synallagmatique par lequel le propriétaire d'un immeuble en concède la jouissance au concessionnaire pendant une durée de vingt ans au minimum moyennant le versement d'une redevance, conclu sous seing privé est valable inter partes ; que Madame Y... faisait valoir dans ses conclusions d'appel (p. 9, 3 derniers §), que les parties avaient conclu un contrat de concession immobilière dès lors que la Commune avait consenti la jouissance du fonds litigieux à ses parents puis à elle-même pendant bien plus de vingt ans, en contrepartie du paiement d'une redevance annuelle; qu'en refusant cependant de reconnaître l'existence d'un contrat de concession immobilière motifs pris de ce que Madame X... ne produisait pas un contrat «répond(ant) au formalisme imposé par la loi », soit un contrat faisant l'objet d'un acte authentique publié au fichier immobilier et comportant une référence expresse à la loi du 30 décembre 1967 (arrêt attaqué p. 4, § 7 et 8), la Cour d'appel a violé les dispositions de ladite loi, et celles des articles 1134 et 1315 et suivants du Code civil ;
ALORS, QUE 2°) un arrêt de cour d'appel constitue un titre susceptible d'exécution forcée dès sa notification à partie; que prononçant une expulsion, il doit être assorti de la possibilité conférée à l'huissier de recourir à la force publique si besoin est ; qu'après avoir elle-même considéré que le litige opposant les parties ne portait que sur le prix de la parcelle et que le recours demandé à la force publique en vue d'une expulsion apparaissait en l'état, prématuré « (...) eu égard à (...) la nécessité de laisser une place à une dernière tentative de transaction portant sur le prix» (arrêt attaqué p. 5, § 3 et 4), la Cour d'appel a cependant ordonné l'expulsion de Madame Y... ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 411-1 et suivants du Code des procédures civiles d'exécution, et celles des articles 500 et suivants du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 14-22349
Date de la décision : 19/11/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Basse-Terre, 05 mai 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 19 nov. 2015, pourvoi n°14-22349


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : Me Rémy-Corlay, SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.22349
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