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19/11/2015 | FRANCE | N°14-14424;14-14425

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 novembre 2015, 14-14424 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu la connexité, joint les pourvois n° T 14-14. 424 et U 14-14. 425 ;
Attendu, selon les arrêts attaqués (Aix-en-Provence, 24 janvier 2014), que Mme X..., M. E..., M. Y..., Mme Z..., Mme A..., Mme B... et M. C... ont été salariés de la société Chantiers navals de La Ciotat devenue la société Chantiers du Nord de la Méditerranée (Normed) ; que cette société a été mise en redressement judiciaire par jugement du 30 juin 1986, puis en liquidation judiciaire, le 27 février 1989, la société MJA, prise en la

personne de Mme D... ayant été désignée en qualité de mandataire-liquidat...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu la connexité, joint les pourvois n° T 14-14. 424 et U 14-14. 425 ;
Attendu, selon les arrêts attaqués (Aix-en-Provence, 24 janvier 2014), que Mme X..., M. E..., M. Y..., Mme Z..., Mme A..., Mme B... et M. C... ont été salariés de la société Chantiers navals de La Ciotat devenue la société Chantiers du Nord de la Méditerranée (Normed) ; que cette société a été mise en redressement judiciaire par jugement du 30 juin 1986, puis en liquidation judiciaire, le 27 février 1989, la société MJA, prise en la personne de Mme D... ayant été désignée en qualité de mandataire-liquidateur ; qu'ayant été inscrite sur la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit au dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (ACAATA), par arrêté du 7 juillet 2000, les salariés ont saisi la juridiction prud'homale pour que soit fixée au passif de la liquidation judiciaire de la société Normed une créance de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice spécifique d'anxiété ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal des salariés :
Attendu qu'il est fait grief aux arrêts de débouter les salariés de leur demande et de limiter le montant de la créance du syndicat en réparation de l'atteinte portée aux intérêts collectifs, alors, selon le moyen :
1°/ que tout salarié qui a travaillé dans un des établissements mentionnés à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante, se trouve, par le fait de l'employeur, dans une situation d'inquiétude permanente face au risque de déclaration à tout moment d'une maladie liée à l'amiante ouvrant droit à l'indemnisation d'un préjudice spécifique d'anxiété, sans qu'il ait à rapporter la preuve de son exposition personnelle ; qu'en retenant que l'absence de preuve de leur exposition habituelle aux poussières d'amiante des salariés faisait obstacle à ce qu'ils soient indemnisés de leur préjudice spécifique d'anxiété quand il était établi qu'ils avaient travaillé dans un établissement mentionné à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;
2°/ que, subsidiairement, présente un caractère habituel l'exposition aux poussières d'amiante d'un salarié qui a travaillé dans des bureaux situés dans un établissement mentionné à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante ; qu'en refusant de reconnaître un caractère habituel à l'exposition aux poussières d'amiante de Mme X..., commis, M. Y... commis principal, et M. E... employé, qui avaient pourtant travaillé dans des bureaux situés au sein d'un établissement mentionné à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu, d'abord, qu'il résulte de l'article 41 3° de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 que l'allocation de cessation anticipée d'activité est versée, s'agissant des salariés de la construction et de la réparation navales, à condition d'avoir exercé un métier figurant sur une liste fixée par arrêté conjoint des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et du budget ;
Attendu, ensuite, que la réparation du préjudice d'anxiété n'est admise, pour les salariés exposés à l'amiante, qu'au profit de ceux remplissant les conditions prévues à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 et l'arrêté ministériel ;
Et attendu, enfin, qu'ayant constaté que les salariés avaient occupé des postes qui ne relevaient pas des métiers visés par l'arrêté ministériel, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les pourvois éventuels formés pour le cas où la cassation serait prononcée ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois principaux ;
Dit que chacune des parties conservera la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour Mmes Z..., A... et B..., M. C... et l'union locale des syndicats CGT de La Ciotat, demandeurs au pourvoi principal n° T 14-14. 424
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Mesdames Z..., A..., B... et Monsieur C... de leur demande tendant à ce que soient fixées au passif de la liquidation judiciaire de la SA NORMED des créances de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice spécifique d'anxiété et d'AVOIR consécutivement limité le montant de la créance du syndicat CGT LA CIOTAT sur le passif de la liquidation judiciaire de la SA NORMED à la somme de 1. 000 € en réparation de l'atteinte portée aux intérêts collectifs de la profession ;
AUX MOTIFS QUE Monsieur C... a été employé par la NORMED en qualité d'analyste d'organisation, métier ne figurant pas sur la liste des métiers concernés ; qu'il ne produit aucune pièce autre qu'un certificat de travail, des bulletins de salaire et une notification ACAATA à compter au 1er avril 2010, lesquels ne permettent pas d'établir une exposition habituelle aux poussières d'amiante ; que s'agissant de Mesdames Viviane Z..., Jenny A... et Marie-Thérèse B..., elles soutiennent avoir été exposées au risque de manière passive, dans le cadre de leur parcours au sein de l'entreprise, dans laquelle elles ont été employées, au vu des pièces produites du 2 octobre 1972 au 8 décembre 1978, pour Madame Z..., au poste de sténo dactylographe, du 11 décembre 1969 au 13 décembre 1978, en qualité de femme de ménage, pour Madame A..., du 18 avril 1972 au 26 octobre 1978, également comme femme de ménage, pour Madame B... ; que pour faire la preuve de leur exposition au risque de l'amiante, elles communiquent le rapport d'enquête en date du 30 mars 2012, adressé par le directeur de l'Unité Territoriale des Bouches-du-Rhône au directeur régional des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l'Emploi, relatif à la demande d'inscription, sur la liste Construction/ Réparation navale ouvrant droit à l'allocation de cessation d'activité des travailleurs de l'amiante, des nouveaux métiers suivants pointeuse, secrétaire d'atelier, commise et commise principale, opératrice de saisie, chef de groupe, sténo-dactylographe et secrétaire sténo, indiquant notamment qu'il n'est plus possible actuellement de réaliser une analyse de données qui permettrait au regard de critères précis d'estimer les temps et degrés d'exposition des salariés des sociétés CNC/ NORMED, que son auteur est d'avis que les salariées ayant déposé la demande ont été exposées de manière passive (exposition environnementale) à l'inhalation de poussières d'amiante dans le cadre de leur parcours au sein de l'entreprise, et qu'il appartiendra à la commission de se prononcer, ; que les salariées produisent aussi une attestation de Monsieur F..., chef du département Bureau de Fabrication, déclarant qu'une autre salariée, qui travaillait dans son service et se rendait dans les ateliers et sur les terre-pleins dans des endroits où l'amiante était travaillée sans que des précautions de protection soient prises a été exposée à ces poussières d'amiante comme toutes les personnes qui se sont trouvées dans cette atmosphère avec tous risques inhérents ; que ni ce rapport ni cette attestation ne sont probants d'une exposition habituelle de ces salariées au risque de l'amiante ; que s'il est soutenu que nul dans l'entreprise n'était indemne d'une telle exposition, compte tenu de la dispersion et de la volatilité des fibres et poussières d'amiante, les plans et photos des lieux versés aux débats ne permettent pas un tel constat ; que ces éléments ne suffisent pas à faire la preuve qu'ils ont été exposés habituellement à l'inhalation de poussières d'amiante, ni qu'ils se trouvent de par le fait de l'employeur dans un état d'inquiétude permanente face au risque de déclaration à tout moment d'une maladie liée à l'amiante ;
1/ ALORS QUE tout salarié qui a travaillé dans un des établissements mentionnés à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante, se trouve, par le fait de l'employeur, dans une situation d'inquiétude permanente face au risque de déclaration à tout moment d'une maladie liée à l'amiante ouvrant droit à l'indemnisation d'un préjudice spécifique d'anxiété, sans qu'il ait à rapporter la preuve de son exposition personnelle ; qu'en retenant que l'absence de preuve de leur exposition habituelle aux poussières d'amiante des salariés faisait obstacle à ce qu'ils soient indemnisés de leur préjudice spécifique d'anxiété quand il était établi qu'ils avaient travaillé dans un établissement mentionné à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;
2/ ALORS QUE, à tout le moins, en retenant que l'absence de preuve de l'exposition habituelle aux poussières d'amiante de Monsieur C... faisait obstacle à ce qu'il soit indemnisé de son préjudice spécifique d'anxiété quand il était établi, d'une part, qu'il avait travaillé dans un établissement mentionné à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante et, d'autre part, qu'il avait été déclaré éligible à l'ACAATA, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;
3/ ALORS QUE, subsidiairement, présente un caractère habituel l'exposition aux poussières d'amiante d'un salarié qui a travaillé dans des bureaux situés dans un établissement mentionné à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante ; qu'en refusant de reconnaître un caractère habituel à l'exposition aux poussières d'amiante de Monsieur C..., analyste d'organisation, Madame Z..., sténo-dactylographe et Mesdames A... et B..., femmes de ménage, qui avaient pourtant travaillé dans des bureaux situés au sein d'un établissement mentionné à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil.
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour Mme X..., MM. E... et Y... et l'union locale des syndicats CGT de La Ciotat, demandeurs au pourvoi principal n° U 14-14. 425
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame X... et Messieurs E... et Y... de leur demande tendant à ce que soient fixées au passif de la liquidation judiciaire de la SA NORMED des créances de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice spécifique d'anxiété et d'AVOIR consécutivement limité le montant de la créance du syndicat CGT LA CIOTAT sur le passif de la liquidation judiciaire de la SA NORMED à la somme de 1. 000 € en réparation de l'atteinte portée aux intérêts collectifs de la profession ;
AUX MOTIFS QUE les salariés ont été employés dans les conditions suivantes : Monsieur Francis E... en qualité d'employé du 13 octobre 1965 au 13 mars 1967, Monsieur Hugues Y... en qualité de commis principal du 4 novembre 1968 et 1er septembre 1988, Madame Muriel X... en qualité de commis du 5 février 1974 au 7 décembre 1978 ; qu'il est versé aux débats-le rapport d'enquête en date du 30 mars 2012, adressé par le directeur de l'Unité Territoriale des Bouches-du-Rhône au directeur régional des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l'Emploi, relatif à la demande d'inscription, sur la liste Construction/ Réparation navale ouvrant droit à l'allocation de cessation d'activité des travailleurs de l'amiante, des nouveaux métiers suivants pointeuse, secrétaire d'atelier, commise et commise principale, opératrice de saisie, chef de groupe, sténo-dactylographe et secrétaire sténo, indiquant notamment qu'il n'est plus possible actuellement de réaliser une analyse de données qui permettrait au regard de critères précis d'estimer les temps et degrés d'exposition des salariés des sociétés CNC/ NORMED, que son auteur est d'avis que les salariées ayant déposé la demande ont été exposées de manière passive (exposition environnementale) à l'inhalation de poussières d'amiante dans le cadre de leur parcours au sein de l'entreprise, et qu'il appartiendra à la commission de se prononcer-l'attestation de Monsieur F..., chef du département Bureau de Fabrication, déclarant qu'une autre salariée, qui travaillait dans son service et se rendait dans les ateliers et sur les terre-pleins dans des endroits où l'amiante était travaillée sans que des précautions de protection soient prises a été exposée à ces poussières d'amiante comme toutes les personnes qui se sont trouvées dans cette atmosphère avec tous risques inhérents ; que ces éléments ne suffisant pas à faire la preuve qu'ils ont été exposés de manière habituelle aux poussières d'amiante, ni qu'ils se trouvent de par le fait de l'employeur dans un état d'inquiétude permanente face au risque de déclaration à tout moment d'une maladie liée à l'amiante, ces trois salariés seront déboutés et le jugement infirmé en ce qui les concerne ;
1/ ALORS QUE tout salarié qui a travaillé dans un des établissements mentionnés à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante, se trouve, par le fait de l'employeur, dans une situation d'inquiétude permanente face au risque de déclaration à tout moment d'une maladie liée à l'amiante ouvrant droit à l'indemnisation d'un préjudice spécifique d'anxiété, sans qu'il ait à rapporter la preuve de son exposition personnelle ; qu'en retenant que l'absence de preuve de leur exposition habituelle aux poussières d'amiante des salariés faisait obstacle à ce qu'ils soient indemnisés de leur préjudice spécifique d'anxiété quand il était établi qu'ils avaient travaillé dans un établissement mentionné à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;
2/ ALORS QUE, subsidiairement, présente un caractère habituel l'exposition aux poussières d'amiante d'un salarié qui a travaillé dans des bureaux situés dans un établissement mentionné à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante ; qu'en refusant de reconnaître un caractère habituel à l'exposition aux poussières d'amiante de Madame X..., commis, Monsieur Y... commis principal, et Monsieur E... employé, qui avaient pourtant travaillé dans des bureaux situés au sein d'un établissement mentionné à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-14424;14-14425
Date de la décision : 19/11/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 24 janvier 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 nov. 2015, pourvoi n°14-14424;14-14425


Composition du Tribunal
Président : M. Chollet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.14424
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