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05/11/2015 | FRANCE | N°14-26055

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 05 novembre 2015, 14-26055


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu les articles 13, § 2, c), et 14 ter du règlement n° 1408/71/CEE du 14 juin 1971 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, applicables à la date de l'accident litigieux ;
Attendu, selon le premier de ces textes, que la personne qui exerce son activité professionnelle à bord d'un navi

re battant pavillon d'un Etat membre est soumise à la législation de sécurité ...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu les articles 13, § 2, c), et 14 ter du règlement n° 1408/71/CEE du 14 juin 1971 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, applicables à la date de l'accident litigieux ;
Attendu, selon le premier de ces textes, que la personne qui exerce son activité professionnelle à bord d'un navire battant pavillon d'un Etat membre est soumise à la législation de sécurité sociale de cet Etat, sous réserve des exceptions et particularités prévues par le second ;
Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, qu'exerçant son activité professionnelle en qualité de salariée sur un navire appartenant à la société britannique Alba Shipping limited (la société), Mme X... a été victime, le 22 mars 2010, d'un accident pris en charge par la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine (la caisse) au titre de la législation professionnelle ; que considérant que Mme X... ne relevait pas de la législation française, la caisse lui a demandé, le 1er février 2013, le remboursement des prestations servies et lui a fait signifier à cette fin une contrainte ; que Mme X... a fait opposition devant une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que, pour débouter partiellement la caisse de ses demandes, le jugement retient que Mme X... a payé des cotisations maladie à la caisse de sécurité sociale française en continu pendant toutes les années précédant l'accident ; que même si une partie de ces prestations et notamment, celles précédant immédiatement l'accident, a été versée en fraude puisque Mme X... touchait l'aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d'une entreprise sans être au chômage, travaillant et touchant un salaire d'un employeur anglais, il n'en demeure pas moins que tant que ces versements de prestations chômage et allocations n'ont pas été remis en cause, elle était valablement assurée et avait droit, à ce titre, à des remboursements « maladie », peu important que la cause des soins de santé ait pour origine un accident chez un employeur étranger, aucune exclusion à ce titre n'étant prévue par le code de la sécurité sociale ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à déterminer le rattachement de l'intéressée à la législation d'un Etat membre de l'Union européenne, le tribunal a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 22 juillet 2014, entre les parties, par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Nanterre ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Versailles ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme X... à payer à la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq novembre deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine
Le pourvoi fait grief au jugement attaqué d'AVOIR limité la condamnation de mademoiselle X... à payer à la CPAM des Hauts de Seine la somme de 1.181,80 € à titre de prestations indûment versées et d'AVOIR validé la contrainte délivrée le 21 janvier 2014 pour ce seul montant mais de l'AVOIR invalidé pour le surplus ;
AUX MOTIFS QUE mademoiselle X... a été engagée le 16 février 2010 par une société anglaise ALBA SHIPPING LIMITED pour y exercer des fonctions d'hôtesse du 1er janvier 2010 au 15 avril 2010 sur un bateau naviguant dans les Antilles ; le 22 mars 2010, elle a fait une chute sur le bateau pendant son service, elle a été hospitalisée à l'hôpital de Saint-Martin (Antilles françaises) puis en France et la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts de Seine a pris en charge les différentes factures des différents praticiens à 100 % comme pour un accident de travail pour un montant total de 3.269,28 € (...);
ET AUX MOTIFS QU' il convient de donner acte à mademoiselle X... de ce qu'elle admet que son accident est un accident de droit commun et qu'elle ne peut donc prétendre à la prise en charge intégrale de ses dépenses de santé comme s'il s'agissait d'un accident du travail ; que la somme de 3269,28 € réclamée par la caisse concerne l'intégralité des dépenses de santé qu'elle a payés pour mademoiselle X... suite à son accident en ce compris la partie relevant de la législation sur les accidents du travail, premières créances notifiées à mademoiselle X... et abandonnées lorsqu'elle a demandé remboursement de l'intégralité des dépenses ; qu'en conséquence, la part des remboursements relevant des accidents du travail (ticket modérateur, franchise...) est incontestablement due par mademoiselle X... et la créance réclamée est donc fondée sur les sommes initialement demandées dans les trois premières notifications de créance, soit la somme totale de 1181,80 €, la contrainte devant être validée sur ce point ; que pour le surplus, il ne peut être contesté que mademoiselle X... a payé des cotisations maladie à la caisse de sécurité sociale française en continu pendant toutes les années précédant l'accident ; que même si une partie de ces prestations, et notamment celle précédant immédiatement l'accident a été versée par Pôle Emploi en fraude puisque mademoiselle X... touchait l'ACCRE sans être au chômage (travaillant et touchant un salaire d'un employeur anglais), il n'en demeure pas moins que tant que ces versements de prestations chômage et allocations n'ont pas été remis en cause, elle était valablement assurée sociale et a droit à ce titre à des remboursements « maladie » peu important que la cause des soins de santé ait pour origine un accident pour un employeur étranger, aucune exclusion à ce titre n'étant prévue par le code de la sécurité sociale ; qu'aucune disposition dans le code de la sécurité sociale ne prévoit expressément que la caisse ne peut prendre en charge au titre de l'assurance maladie des dépenses de santé intervenues lors d'un accident de travail chez un employeur étranger ; qu'en conséquence c'est à bon droit que les cotisations maladie ayant été versées pour elle, mademoiselle X... pouvait se voir rembourser ses soins dans le cadre de l'assurance maladie et la CPAM devra être déboutée de sa demande de remboursement de ces sommes ;
1. ¿ ALORS QUE la législation de la sécurité sociale étant d'ordre public, les conditions d'assujettissement à un régime de sécurité sociale ne sauraient être affectées par la volonté des parties mais résultent exclusivement des conditions posées par la loi ; qu'ainsi, un accident du travail est un accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail ; qu'en l'espèce, le tribunal a relevé que mademoiselle X... avait fait « une chute sur le bateau pendant son service » caractérisant ainsi un accident du travail ; qu'en retenant que l'accident en cause était un accident de droit commun dès lors que la victime admettait qu'il s'agissait d'un tel accident, quand il lui appartenait de se prononcer lui-même sur ce point, le tribunal a violé l'article L.411-1 du code de la sécurité sociale ;
2. ¿ ALORS subsidiairement QU'un accident du travail est un accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail ; qu'en l'espèce, le tribunal a donné acte à mademoiselle X... que son accident était un accident de droit commun ; qu'il a toutefois jugé que la caisse devait prendre en charge au titre de l'assurance maladie les dépenses de santé qui étaient intervenues « lors d'un accident de travail chez un employeur étranger » ; qu'en statuant ainsi le tribunal a violé l'article L.411-1 du code de la sécurité sociale ;
3. ¿ ALORS QUE selon le principe de territorialité et le règlement CE n°1408/71, les travailleurs exerçant une activité professionnelle à bord d'un bateau battant pavillon d'un Etat membre sont soumis à la législation de cet Etat ; qu'en particulier, une personne n'exerçant pas de façon habituelle son activité professionnelle sur mer, qui effectue un travail sur un navire battant pavillon d'un autre Etat membre est soumis à la législation de cet Etat et ne peut bénéficier des prestations de sécurité sociale pour les accidents qu'elle subit que ce soient des accidents de travail ou des accidents de droit commun ; que mademoiselle X... avait conclu avec la société de droit anglais ALBA SHIPPING LIMITED un contrat à durée déterminée pour travailler sur le bateau ATAO, battant pavillon anglais ; que pendant la durée de son engagement par la société anglaise, la salariée ne relevait donc pas de la législation de sécurité sociale française ; qu'en jugeant pourtant qu'elle avait droit aux prestations de l'assurance maladie française bien que travaillant pour un employeur étranger, parce qu'aucune disposition ne prévoirait que la caisse ne peut prendre en charge les dépenses de santé intervenues lors d'un accident du travail chez un employeur étranger, le tribunal a violé les dispositions de l'article L.111-2-2 du code de la sécurité sociale et l'article 14 ter du règlement CE n° 1408/71 du 14 juin 1971 ;
4. ¿ ALORS en tout état de cause QUE la fraude corrompt tout ; qu'ainsi, les cotisations versées par Pôle Emploi pour des allocations de retour à l'emploi obtenues frauduleusement ne peuvent ouvrir droit au maintien des droits à l'assurance maladie ; qu'en l'espèce, le tribunal a énoncé qu'une partie des cotisations avait été versée par Pole Emploi « en fraude puisque Mlle X... touchait l'ACCRE sans être au chômage » ; qu'en jugeant qu'en dépit de cette fraude, l'assurée avait été valablement assurée sociale et avait droit à ce titre au remboursement « maladie », le tribunal a violé le principe fraus omnia corrumpit ;


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 14-26055
Date de la décision : 05/11/2015
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

COMMUNAUTE EUROPEENNE - Sécurité sociale - Règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil du 14 juin 1971 - Article 13 - Salarié occupé à bord d'un navire - Navire battant pavillon d'un Etat membre - Législation applicable - Détermination

SECURITE SOCIALE - Assujettissement - Généralités - Salarié exerçant son activité professionnelle sur un navire battant pavillon d'un Etat membre - Législation applicable - Détermination

Selon l'article 13, § 2, c), du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil du 14 juin 1971 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, la personne qui exerce son activité professionnelle à bord d'un navire battant pavillon d'un Etat membre est soumise à la législation de sécurité sociale de cet Etat, sous réserve des exceptions et particularités prévues à l'article 14 ter de ce même règlement. Viole les textes susvisés la cour d'appel qui rejette la demande en répétition de l'indu formée par une caisse primaire d'assurance maladie au titre des prestations servies à un salarié, victime d'un accident du travail, exerçant son activité professionnelle sur un navire appartenant à une société britannique, par des motifs impropres à déterminer le rattachement de l'intéressé à la législation d'un Etat membre de l'Union européenne


Références :

articles 13, § 2, c), et 14 ter du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil du 14 juin 1971 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés et aux travailleurs non salariés

Décision attaquée : Tribunal des affaires de sécurité sociale de Nanterre, 22 juillet 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 05 nov. 2015, pourvoi n°14-26055, Bull. civ. 2016, n° 839, 2e Civ., n° 421
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2016, n° 839, 2e Civ., n° 421

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat général : Mme Lapasset
Rapporteur ?: Mme Le Fischer
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.26055
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